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Une photographe tuée en République centrafricaine a laissé un héritage durable

Dix ans après, le meurtre de Camille Lepage n’est toujours pas élucidé

La photographe française Camille Lepage au Stade Bonga-Bonga à Bangui, en République centrafricaine, le 6 octobre 2013.  © 2013 Sylvain Cherkaoui/AP Photo

Cette semaine a marqué le dixième anniversaire de la mort de Camille Lepage, une photojournaliste française qui a été tuée alors qu’elle travaillait dans l’ouest de la République centrafricaine. C’était une véritable amie d’un pays qui a toujours grandement besoin de témoins aux abus qui y sont commis. Camille avait 26 ans.

Quelques mois avant son arrivée en République centrafricaine en 2013, une alliance de groupes rebelles, la Séléka, avait pris le contrôle de Bangui, la capitale. Cette alliance s’était alors déjà emparée de la plupart des provinces du pays et ses combattants se livraient à des actes de violence généralisés à l’encontre des populations civiles dans tout le pays. Camille est arrivée un peu plus tard cette année-là, alors que des milices chrétiennes et animistes, appelées anti-balaka, commençaient à organiser des contre-attaques contre la Séléka. Ce groupe prenait fréquemment pour cible des civils musulmans, les associant à la Séléka. Alors que la situation en matière humanitaire se détériorait rapidement, des centaines de milliers de personnes ont fui le pays en tant que réfugiés, tandis que d’autres sont devenus déplacées à l’intérieur des frontières.

Alors que les gens fuyaient, Camille a pris le chemin inverse. Elle s’est servie de son appareil photo pour raconter les histoires des personnes restées sur place. Elle a compris que c’était une crise oubliée et qu’elle avait un moyen d’apporter son aide.

Les photos prises par Camille sont toujours parmi les images les plus frappantes illustrant le coût humain du conflit lors de ces premières années. Elle a permis de mettre des visages sur les noms des victimes et des survivants, captant en une image la peur avant la bataille, la douleur de la perte d’un être aimé et l’injustice des crimes de guerre. Je me souviens de l’avoir accompagnée à une manifestation lors de laquelle des participants réclamaient justice pour un juge qui avait été assassiné. Dix ans après, les photos qu’elle avait prises ce jour-là constituent toujours un témoignage fort de la détermination des Centrafricains à réclamer que justice soit faite et que des comptes soient rendus.

Depuis le meurtre de Camille, la République centrafricaine continue d’être l’un des endroits les plus dangereux au monde pour les travailleurs humanitaires. L’impunité alimente la commission d’abus ; il y a eu beaucoup trop peu d’efforts pour faire rendre des comptes aux auteurs des crimes de guerre commis dans le pays. Le cas de Camille est emblématique à cet égard, car il y a eu très peu de progrès dans les tentatives de traduire ses assassins en justice.

Un livre rassemblant des photos prises par Camille a été publié après sa mort. Son titre, « République Centrafricaine : On est ensemble », représente à la fois les liens de Camille avec le pays et une phrase qu’elle utilisait fréquemment en sango, la langue locale. Dix ans après sa mort, Camille reste liée à ce pays et son héritage est bien vivant. 

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