<< précédente | index | suivant>> Attaques transfrontalières contre des civils au TchadAttaques contre le Tchad de Janjawids basés au SoudanLes attaques récentes des Janjawids se sont produites le plus souvent entre la ville stratégique de Adré, au Tchad, qui se trouve à trente kilomètres à louest de Al Geneina, la capitale de lOuest du Darfour, et le petit village de Modoyna, au Tchad, vingt kilomètres à louest de la petite ville de Damra de louest du Darfour. Dans ce secteur frontalier, la population civile est surtout dorigine Masalit au nord et Dajo au sud, deux tribus frontalières non-arabes qui ont également été les cibles des attaques des Janjawids au Darfour.
Les milices Janjawid basées au Darfour traversaient déjà la frontière au nord de Adré dès 2003, surtout dans les régions Zaghawa. Elles ont commencé à lancer des raids occasionnels dans la région au sud de Adré en 2004. La situation à la frontière sest améliorée en général en 2005 grâce à un cessez-le-feu provisoire au Darfour ; aussi grâce à la plus grande présence de la Mission de lUnion Africaine au Soudan (AMIS, mandatée par les rebelles du Darfour et le gouvernement soudanais pour contrôler un cessez-le-feu en avril 2004 et pour protéger les civils) au Darfour et dans la ville frontière de Tine (dans une zone Zaghawa) et dans la capitale régionale tchadienne de Abéché ; et grâce aux patrouilles régulières de larmée tchadienne le long de la frontière. Cependant, à la suite du retrait de larmée tchadienne de la région en octobre et décembre 2005, et en particulier depuis lattaque du 18 décembre contre Adré, la sécurité sest gravement détériorée et lactivité des milices sest accrue. Selon le secrétaire général de la préfecture dAdré, les milices Janjawid ont attaqué plus de cinquante villages frontaliers dans la préfecture depuis le 18 décembre.16 Les témoignages de douzaines de témoins oculaires suggèrent que à partir de mi décembre les raids menés par les Janjawids à partir du Soudan ont attaqué des villages à lintérieur du Tchad de façon régulière si ce nest quotidiennement.
Comme les marchés au Darfour ont été bouleversés par les violences et les déplacements de populations, le commerce normal est remplacé par une économie de guerre dominée par le vol de bétail et le pillage. De ce fait, les raids transfrontaliers des Janjawids semblent être surtout motivés par des considérations de profit, puisque des bovins, des chevaux, de la nourriture et même des articles domestiques comme des nattes et des tasses ont été volés. Les villageois tchadiens qui résistent au vol sont sommairement exécutés et dans certains cas les Janjawids ont fait feu sans motif sur les huttes, blessant et tuant les personnes qui se trouvaient à lintérieur. Une femme Dajo de trente-cinq ans a décrit une attaque matinale des Janjawids contre son village en septembre 2005 qui a fait sept victimes, dont son mari et son fils de seize ans. Elle a été blessée, puis évacuée vers lhôpital à Adré, où sa jambe droite a été amputée au niveau du genou.
Je dormais et puis jai entendu les fusils et les cris. Je me suis levée et mon fils saignait. Jai couru vers lui et jai vu quil était mort. Je suis revenue en courant et cest là que jai été blessée. . . . Jai juste vu du sang. Mon mari est allé dans sa chambre pour prendre son grigri17 et la balle la frappé à lestomac et elle est ressortie dans son dos. Ils ne nous avaient jamais attaqués avant.18
Des déclarations attribuées aux Janjawids par des témoins oculaires suggèrent que lappropriation de la terre puisse être une autre motivation des violences. Un paysan Dajo de cinquante et un ans dun village frontalier tchadien qui a été attaqué le 18 décembre 2005, fait partie des nombreuses personnes qui pensent que les Janjawids cherchent à pousser les non-arabes hors de leurs terres.
Ils sont arrivés le matin et ils ont pris les vaches et les chèvres et ils ont dit Quest-ce que vous faites sur cette terre ? Ce nest pas votre terre. Ces vaches ne sont plus vos vaches. Si vous restez vous serez tués, mais si vous partez en courant nous ne vous tuerons pas. Les Janjawids veulent vider cet endroit. Ils veulent récupérer la terre des Noubas.19
A environ cent kilomètres au sud de Adré, dans les environs de Borota (habité principalement par les Masalit), les Janjawids ont attaqué quelques hameaux pendant la nuit du 20 janvier 2006, alors que des chercheurs de Human Rights Watch se trouvaient à quelques kilomètres au centre de Borota, recueillant des informations sur de précédentes attaques.20 Les Janjawids ont tiré sur un homme du hameau de Oussouri et lont gravement blessé à lestomac ; ils ont aussi volé plusieurs chevaux.
A environ 200 kilomètres au sud de Adré, le village de Koloy est devenu un centre important pour les Tchadiens déplacés à lintérieur du pays. Beaucoup de villageois ont décidé de se déplacer à Koloy, qui se trouve à vingt kilomètres de la frontière soudanaise, à la suite dune attaque importante des Janjawids dans et aux environs du village de Modoyna le 27 septembre 2005, qui a fait des douzaines de victimes.21 Larmée tchadienne a répliqué agressivement à cette attaque, entraînant les combattants Janjawids dans une fusillade qui sest terminée près de la frontière, et faisant huit prisonniers. Un prisonnier serait mort des suites de ses blessures et les sept autres seraient en attente de jugement devant un tribunal à huis clos à NDjamena.22
Human Rights Watch a interviewé de nombreuses victimes dune attaque contre des villages dans la même région le 18 décembre 2005.23 Cet épisode a déclenché un exode loin de la frontière et à Koloy qui a pesé lourdement sur le déplacement de septembre (voir aussi ci-dessous Conséquences humanitaires au Tchad des violences transfrontalières).
Les personnes déplacées à Koloy, Dajo pour la plupart, ont décrit des modalités dattaques des Janjawids remarquablement semblables à celles des témoignages recueillis plus au nord, où prédominent les Masalit : des Arabes à la peau claire et quelques Arabes à la peau foncée portant des treillis soudanais et des turbans ont mené les attaques contre les villages, habituellement à cheval et parfois à dos de chameau. Certains témoins se rappellent avoir vu des uniformes de camouflage pour le désert blancs (de couleur claire) en plus des treillis soudanais. Certaines personnes à Koloy ont déclaré avoir vu des grades et des insignes sur les uniformes des attaquants. Des témoins oculaires ont donné à Human Rights Watch les noms de Tchadiens arabes quils ont reconnus comme étant de leurs villages et qui avaient apparemment rejoint les Janjawids.24 Un homme de quarante-huit ans portant les cicatrices dune balle lui ayant traversé lépaule a dit avoir été blessé près de la frontière le 18 décembre 2005, par un assaillant quil a lui-même identifié comme Janjawid.
Jai vu des soldats en uniforme dans les champs aussi je suis allé les saluer. Lun dentre eux a dit : Erreur. Tu penses que nous sommes larmée tchadienne. Comment tu sais que nous sommes du Tchad ? Il a dit : « Tu as entendu parler des Janjawids? Jai dit : Je ne sais pas. Puis il a dit O.K., cours. Je ne suis pas un voleur, pourquoi il faudrait que je courre ? Mais jai couru. Puis il a dit Hé ! Je me suis retourné. Il ma tiré dessus.25
Comme résultat du vide sécuritaire existant à la frontière Tchad-Soudan, les Janjawids se livrent à des incursions de plus en plus audacieuses. Larmée tchadienne a confirmé une attaque des Janjawids le 10 janvier 2006 contre Dorote, un village Dajo entre Adé et Goz Beida, plus de quarante kilomètres à lintérieur du territoire tchadien.26
En labsence de larmée tchadienne au sud de Adré, de nombreux villages ont organisé des groupes dautodéfense pour décourager les attaques des Janjawids et se défendre comme leurs homologues au Darfour avaient été obligés de le faire des années plus tôt. Ces groupes, constitués dhommes et de garçons, sont armés essentiellement de lances, de couteaux et dépées de cérémonie, darcs et de flèches, de gourdins sculptés et de boomerangs, bien que dans certains endroits les villageois ont réuni des fonds pour équiper leurs groupes dautodéfense avec des armes à feu, en général des fusils dassaut Kalachnikov.
Human Rights Watch a remarqué un groupe dautodéfense bien armé et bien organisé à Modoyna (composé surtout de Dajo et de quelques Zaghawa). Le groupe dautodéfense de Borota, essentiellement Masalit, aurait possédé une cinquantaine darmes à feu.27 Officiellement, le gouvernement tchadien a refusé darmer des civils pour ses propres raisons, et conscient maintenant de la vitesse avec laquelle cette stratégie avait échappé à tout contrôle par accident ou délibérément au Darfour. Cependant, ces groupes de milices civiles se sont multipliés le long de la frontière au sud de Adré avec ou sans aide extérieure depuis 2004 au moins, lorsque Human Rights Watch a noté la présence de groupes de milices de lintérieur du Tchad aussi bien que de groupes de milices composés de réfugiés des deux côtés de la frontière.28
Discrimination ethnique de la part des Janjawids et dautresLa partie du Tchad qui borde le Darfour a une population qui, comme au Darfour, est variée sur le plan ethnique, avec la présence de groupes arabes aussi bien que non-arabes (Africains). Beaucoup de groupes ethniques vivent des deux côtés de la frontière. De récentes violences transfrontalières au Tchad montrent des signes persistants de discrimination ethnique car elles ont largement touché deux tribus non-arabes : les Masalit et les Dajo, qui résident des deux côtés de la frontière Tchad-Soudan et ont été la cible des attaques des Janjawids au Darfour.29
La grande majorité des témoins oculaires des raids des Janjawids dans la partie est du Tchad décrivent leurs assaillants comme des Arabes du Soudan ayant une peau claire ou rouge, et parlant larabe soudanais. De nombreuses victimes ont déclaré que leurs assaillants utilisaient lépithète raciste péjorative de Nouba, laissant penser quune animosité ethnique dirige les violences. Dans les zones frontalières où des villages non-arabes ont été abandonnés à cause des raids incessants, les villages arabes bénéficient de facto dune immunité contre les attaques. Les Janjawids sont issus essentiellement de tribus arabes nomades sans terre et souvent appauvries du Darfour, dont beaucoup ont émigré depuis le Tchad dans les décennies précédentes et ont des liens familiaux des deux côtés de la frontière.
Les attaques récentes des Janjawids dans la partie est du Tchad se produisent dans le contexte de tensions ethniques sous-jacentes que les raids des Janjawids ne font quexacerber. Les violences intertribales dans la province de Ouaddaï dans la partie est du Tchad, en particulier dans la zone entre les villes principales de Adé et de Goz Beida, ont fait au moins vingt-deux victimes depuis le début de 2006.30 Les conflits pour les ressources et les pâturages ont entraîné des effusions de sang entre les Dajo, qui constituent la majorité dans la région, et à la fois les tribus arabes et dautres tribus non-arabes (comme les Mimi et les Waddai, toutes deux alliées informelles des Arabes). Les champs et les vergers ont été brûlés et un village que Human Rights Watch a visité, Routrout, a été abandonné à cause des violences continuelles. Le sultan de Goz Beida a convié tous les chefs de village de la région à une réunion le 30 janvier dans un appel à la paix.
De plus, les Tchadiens arabes de la région au sud de Adré ont récemment franchi la frontière pour pénétrer au Soudan en nombre suffisamment important pour susciter la préoccupation des travailleurs humanitaires qui craignent que ces migrations soient dictées par la peur de représailles de la part de non-Arabes.31 Les meurtres de deux Arabes en 2004 au sud de Adré par des assaillants Massalit auraient pu être commis pour se venger des raids des Janjawids dans la région.32
Des chefs des Janjawids impliqués dans des attaques au TchadDeux dirigeants des milices Janjawid bien connus pour être étroitement liés au gouvernement soudanais sont sans doute parmi les responsables des violences dans la région au sud de Adré. Hamid Dawai et Abdullah abu Shineibat se trouvaient parmi les sept dirigeants des milices Janjawid désignés, par le Département dEtat des Etats Unis en 200433 et dans des rapports de Human Rights Watch et dautres,34 comme étant les chefs des forces Janjawid ayant commis le plus dabus dans la partie ouest du Darfour. Des victimes de violence à Koloy identifient Hamid Dawai, un émir de la tribu Beni Halba et chef des Janjawids dans le triangle Terbeba-Arara-Beida de la partie ouest du Darfour, comme étant derrière les attaques contre leurs villages. On dit que Dawai est un Tchadien arabe qui est naturalisé citoyen soudanais. Son influence considérable sur les Janjawids au Tchad est apparue lorsquil a évité une attaque imminente des Janjawids contre un village au nord de Koloy, Tchad, comme le rappelle un responsable Dajo de ce village:
Les Janjawids sont arrivés à huit heures du matin et ils ont encerclé le village. A dix heures Hamid Dawai est arrivé avec deux véhicules. Jai su que cétait lui parce quil a dit : Je suis Hamid Dawai. Il a dit : Où est le chef ? Jai dit : Cest moi. Je suis le chef. Jai apporté de leau et je lui ai donné du thé. Il a parlé avec les Janjawids et il a dit quils nattaqueraient pas mon village.35
Un autre homme, dont le père a été tué dans un raid des Janjawids entre Goz Beida et Adé, a raconté à Human Rights Watch que Dawai avait saisi cinquante-et-une vaches au Janjawid responsable et quil les avait fait rendre par lintermédiaire de Ali Muhammad Saleh, le député sous-préfet de Adé.36 A Goz Beida, des responsables civils tchadiens ont négocié directement avec Dawai en 2006 pour tenter de mettre un terme aux attaques transfrontalières des Janjawids.37
Abdullah Abu Shineibat, également émir de la tribu Beni Halba, est le commandant responsable des attaques des Janjawids dans la région de Modoyna, vingt kilomètres à lest de Koloy, selon des témoins oculaires. Abdullah Abu Shineibat aurait une zone dopérations au Soudan qui sétend de Arara (près de la frontière tchadienne) jusquà une trentaine de kilomètres à lest en direction de Habila, avec son quartier général à Amsamgamti. Des villageois à Modoyna pensent que leur bétail volé peut se trouver à Amsamgamti. Tant Arara que Habila sont fréquemment mentionnés comme points de départ au Soudan des incursions Janjawid, tout comme Gobe, au Soudan, à lest du village tchadien de Hadjer Beida.38
Des sources au sein de larmée tchadienne identifient Yacub Angar comme le commandant Janjawid dont linfluence sétend aussi loin au sud du Soudan que Hagar Banga, près de la ville tchadienne de Tissi.39 Participation et complicité du gouvernement soudanais dans les attaques transfrontalièresLes liens entre le gouvernement soudanais et les milices Janjawid dans les opérations au Darfour ont été largement documentés au cours de ces dernières années.40 Human Rights Watch a trouvé des preuves de limplication apparente du gouvernement soudanais dans des attaques contre des populations civiles dans la partie est du Tchad depuis décembre 2005. Des rapports de témoins et des preuves matérielles ont indiqué que les soldats du gouvernement du Soudan et des hélicoptères de combat avaient participé directement aux attaques, tandis que de nombreuses personnes ont rapporté avoir vu des appareils Antonov approcher en provenance du Soudan, voler en cercles puis repartir vers le Soudan avant les raids Janjawid ; ils pensent que des observateurs dans ces appareils ont signalé les concentrations de bétail aux forces sur le terrain.41
Human Rights Watch a documenté quatre attaques des forces armées basées au Darfour entre les 5 et 11 décembre 2005, dans la préfecture de Goungour, avec plus de 8300 habitants surtout Masalit dans cinquante et un hameaux, situés à quatre-vingt kilomètres au sud de Adré. Les deux premières attaques auraient impliqué des milices Janjawid soutenues par des soldats et des véhicules du gouvernement soudanais et deux hélicoptères de combat, qui ont lancé des roquettes sur plusieurs zones pendant trois jours.
Des villageois ont expliqué quils avaient dabord cru que les soldats soudanais poursuivaient des rebelles soudanais du SLA qui senfuyaient à Goungour en franchissant la frontière après des escarmouches au Darfour. Mais il est devenu évident que les civils étaient les cibles, lorsque les soldats du gouvernement soudanais et les Janjawids ont attaqué directement vingt-deux villages dans la région de Goungour. Des responsables locaux à Goungour ont déclaré à Human Rights Watch que quarante-cinq personnes au total avaient été tuées dans un bain de sang qui avait duré sept jours, bien que seulement deux victimes aient pu être vérifiées.42 Le vol de bétail et de nourriture en quantités importantes a été signalé.
A Bakou, qui fait partie de la préfecture de Goungour, Human Rights Watch a recueilli des fragments de roquettes air-sol43 et a examiné dautres preuves matérielles dattaques aériennes présentées par des villageois, comme des éclats dobus, des ailettes stabilisatrices, une roquette partiellement explosée et des poignées de fléchettes petites flèches métalliques qui sont dispersées par des dispositifs anti-personnels.
Les milices Janjawid, entre le 16 décembre 2005 et le 5 janvier 2006, ont attaqué, pillé et vidé quarante villages sur quatre-vingt-cinq dans la préfecture de Borota, à dominante Masalit, à cent kilomètres au sud de Adré. Ces attaques ont été menées en compagnie de policiers et de soldats soudanais, selon des témoins qui ont reconnu les officiers soudanais non daprès leur uniforme (ils étaient habillés comme des Janjawids, avec les mêmes uniformes et turbans) mais daprès leur visage ils ont dit quils les connaissaient parce quils faisaient du commerce au Soudan, la frontière se trouvant à quelques kilomètres de plusieurs villages de Borota. Les officiers Janjawid et/ou Soudanais auraient tué douze civils tchadiens et ils en auraient blessé six autres, volé des chevaux, des bovins, des sacs de grain et autres biens. Les habitants des quarante villages attaqués dans cette période ont ensuite abandonné leurs maisons et se sont réfugiés au centre de Borota.44
Hamid Dawai, lun des dirigeants Janjawid mentionné plus haut, est basé à Beida, au Soudan, où le gouvernement du Soudan maintiendrait une base militaire de taille qui a été dotée récemment dhélicoptères et darmes lourdes, y compris des tanks.45 Malgré la présence de ces installations militaires, le Soudan sest révélé incapable ou peu désireux dempêcher ses milices Janjawid dans la région de lancer des attaques au Tchad.46
Coordination entre les rebelles tchadiens et les JanjawidsHuman Rights Watch a trouvé des preuves de coordination entre les milices Janjawid et les rebelles du RDL, et il y a des preuves indirectes et diverses que non seulement les Janjawid mais aussi le RDL reçoivent du matériel et dautres aides des forces du gouvernement soudanais. Les rebelles du RDL ont plusieurs bases dans lOuest du Darfour autour de Al Geneina, où les milices Janjawid et les rebelles du RDL occuperaient des camps presque adjacents (et où le gouvernement soudanais a une présence militaire substantielle),47 ainsi que dans le sud de lOuest du Darfour. Ils auraient aussi été repérés dans lOuest du Darfour en compagnie des milices des Forces Populaires de Défense cautionnées par larmée du gouvernement soudanais.48
Les déclarations des témoins oculaires indiquent un lien de renseignements militaires entre les rebelles du RDL et les milices Janjawid. Des responsables locaux racontent que des rebelles du RDL sont venus à Modoyna le 16 décembre 2005, et quils y ont passé la nuit tranquillement. Quand le RDL a quitté Modoyna le 17 décembre, un rebelle du RDL a prévenu un membre du groupe local dautodéfense que les Janjawids prévoyaient un raid contre Modoyna le lendemain. 49 Comme prévu, une milice Janjawid a attaqué Modoyna le jour suivant, le 18 décembre.50
Une attaque coordonnée du RDL et des Janjawids a eu lieu le 16 décembre 2005, à Borota. Les rebelles du RDL, qui portaient des bandanas rouges avec les lettres RDL et conduisaient des véhicules portant le même sigle, ont pris le contrôle de Borota pendant deux heures avant de se retirer. Le même soir, les milices Janjawid ont attaqué six villages des environs.51
[16] Un groupe daide humanitaire estime que vingt-six à vingt-huit villages dans la région ont été attaqués ou détruits par les Janjawids au cours de la même période. Entretien de Human Rights Watch, Tchad, 13 janvier 2006. [17] Petites amulettes en cuir contenant des citations du Coran, censées protéger celui qui les porte contre le mal. Elles sont connues sous le nom de hijab du côté soudanais de la frontière. [18] Entretien de Human Rights Watch, Tchad, 27 janvier 2006. [19] Ibid. Nouba est une épithète raciste péjorativevoir ci-dessous. [20] Ces hameaux sont Yayulata, Oussouri, et Ishbara. Les attaques précédentes dans la région de Borota se sont produites entre le 16 décembre et le 6 janvier. [21] Des sources locales évaluent le nombre des victimes entre cinquante-trois et soixante-douze civils ; la plupart des comptes-rendus des médias relèvent trente-six victimesvoir par exemple Tchad: Government says Sudanese insurgents killed 36 herders in east, IRIN, 27 septembre 2005, [online] http://www.reliefweb.int/rw/rwb.nsf/db900SID/KKEE-6GMS5S?OpenDocument&rc=1&cc=tcd. [22] La torture et autres mauvais traitements infligés aux prisonniers sont un problème grave dans les centres de détentions tchadiens, aussi la situation de ces détenus doit être contrôlée. Human Rights Watch a recueilli récemment le témoignage dun militant politique du Darfour qui a été tenu au secret et torturé dans la capitale tchadienne en 2005. Entretien de Human Rights Watch, Abuja, Nigeria, 15 décembre 2005. [23] Entretien de Human Rights Watch, Tchad, 27 et 28 janvier 2006. [24]Des Tchadiens arabes ont été reconnus parmi les attaquants Jangada dans dautres incidents. Par exemple, de nombreux villageois des environs de Borota ont déclaré à Human Rights Watch quils avaient grandi avec deux Tchadiens Arabes qui avaient rejoint les Jangadas et étaient revenus participer aux attaques à Borota. Leur nom, communiqués à Human Rights Watch, était apparemment bien connu de nombreux habitants. Des villageois déplacés de la région de Koumou à environ 100 kilomètres au sud-est de Borota ont également donné les noms dautres Tchadiens Arabes quils connaissaient et qui avaient apparemment rejoint les Janjawids. [25] Entretien de Human Rights Watch, Tchad, 27 janvier 2006. [26] Entretien de Human Rights Watch, Tchad, 31 janvier 2006. [27] Entretien de Human Rights Watch, Tchad, 3 février 2006. [28] Voir le rapport de Human Rights Watch, Empty Promises? [29] Au Tchad, les Masalit constituent la majorité entre Adré, située à vingt-cinq kilomètres à louest de la ville soudanaise de Al Geneina, et Adé, 175 kilomètres au sud. Les Dajo prédominent dans les régions au sud et à lest de Adé. [30] Entretiens de Human Rights Watch, 29 janvier au 1 février 2006. Goz Beida (à quarante kilomètres de la frontière soudanaise) est à soixante-quinze kilomètres au sud-ouest de Adé. [31] Entretien de Human Rights Watch, Tchad, 31 janvier 2006. [32] Voir le rapport de Human Rights Watch, Le Darfour en feu. [33] Confronting, Ending, and Preventing War Crimes in Africa, Pierre-Richard Prosper, Ambassadeur pour les questions de crimes de guerre, Témoignage devant le Comité des relations internationales, Sous comité pour lAfrique, Washington, DC, 24 juin 2004, [online] http://www.state.gov/s/wci/rm/33934.htm. [34] Voir Human Rights Watch, Darfur Destroyed. [35] Entretien de Human Rights Watch, Tchad, 27 janvier 2006. [36] Entretien de Human Rights Watch, Tchad, 26 janvier 2006. [37] Entretiens de Human Rights Watch, 25-30 janvier 2006. [38] Entretien de Human Rights Watch, Tchad, 28 janvier 2006. [39] Communication confidentielle à Human Rights Watch, Tchad, 31 janvier 2006. [40] Voir le rapport de Human Rights Watch, Impunité inébranlable. [41] Entretien de Human Rights Watch, 29 janvier 2006. [42] Des dossiers médicaux examinés par Human Rights Watch au dispensaire de Goungour ont fait état de quinze civils blessés à Goungour le 11 décembre et de deux tués. Toutes les victimes avaient reçu des blessures par balles. [43] Des fragments de roquettes portant des caractères cyrilliques semblables aux fragments recueillis par Human Rights Watch en 2005 après les attaques du gouvernement soudanais près de Jebel Mara au Darfour. [44] Entretien de Human Rights Watch, Tchad, 20 janvier 2006. [45] Entretien de Human Rights Watch avec des responsables tchadiens (identités gardées secrètes), Tchad, 20 janvier 2006; SUDAN-TCHAD: Cross-border conflict escalates, IRIN, 16 mars 2004, [online] http://www.reliefweb.int/rw/rwb.nsf/db900SID/OCHA-64D58K?OpenDocument&rc=1&cc=tcd. [46] Voir Human Rights Watch, Darfur Destroyed, pour plus de détails sur limplication de Hamid Dawai dans les attaques dans la région de Beida en 2003 et 2004. [47] Une vidéo aurait été diffusée lannée dernière sur la chaîne de télévision Al Jazeera montrant le dirigeant du RDL Muhammad Nour paradant avec des armes et des véhicules neufs, en compagnie dun sous-officier Janjawid. Entretien de Human Rights Watchs, Tchad, 3 février 2006. [48] Communication confidentielle, 6 février 2006. [49] Les rebelles du RDL ont prévenu les habitants de Modoyna quils devraient rentrer leur bétail qui se trouvaient dans les champs, parce que les Janjawids prévoyaient un raid pour le lendemain. Entretien de Human Rights Watch, Tchad, 29 janvier 2006. [50] Entretien de Human Rights Watch, Tchad, 29 janvier 2006. [51] Larmée française (qui patrouille la frontière Darfour/Soudan à la demande du gouvernement tchadien) est arrivée à Borota quelques heures plus tard. Le lendemain, les soldats français auraient permis aux rebelles du RDL de traverser Borota avec leurs véhicules alors quils se dirigeaient vers Adré, que les rebelles ont attaqué le jour suivant. Entretien de Human Rights Watch, responsable de district administratif, Borota, Tchad, 20 janvier 2006.
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