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Tchad : les victimes de Hissène Habré demandent réparation

Le 3 février marque le quatrième anniversaire de l’inculpation au Sénégal de l'ancien président

(N’Djaména, Tchad, le 31 janvier 2004) – A la veille du quatrième anniversaire de l’inculpation au Sénégal de l'ancien président tchadien Hissène Habré, ses victimes organisent un rassemblement aujourd’hui à N’Djaména pour demander que des réparations leur soient accordées pour les souffrances qu’elles ont subies pendant son régime.

« Hissène Habré est poursuivi á l’étranger, mais nous, ses victimes, sommes oubliées. Quatre ans après l’inculpation de Hissène Habré et quatorze ans après qu’il ait été chassé du pouvoir, nous attendons toujours que notre souffrance et les épreuves que nous et nos familles avons endurées soient reconnues officiellement par la société tchadienne. »
Ismaël Hachim Abdallah, président de l’Association des Victimes de Crimes et Répressions Politiques du Tchad
  

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l'affaire Habré

L’ancien tyran, qui est actuellement sous enquête en Belgique, vit toujours en résidence surveillée au Sénégal, depuis que la justice sénégalaise s’est déclarée incompétente pour le juger. L’inculpation de Habré à Dakar le 3 février 2000 a inspiré ses victimes à chercher justice au Tchad.  
 
«Hissène Habré est poursuivi á l’étranger, mais nous, ses victimes, sommes oubliées», a déclaré Ismaël Hachim Abdallah, président de l’Association des Victimes de Crimes et Répressions Politiques (AVCRP) du Tchad, qui représente plus de 800 victimes de Habré. « Quatre ans après l’inculpation de Hissène Habré et quatorze ans après qu’il ait été chassé du pouvoir, nous attendons toujours que notre souffrance et les épreuves que nous et nos familles avons endurées soient reconnues officiellement par la société tchadienne.»  
 
Une Commission d’Enquête nationale du Ministère tchadien de la Justice a chiffré en 1992 le sombre bilan des années Habré à « plus de 40 000 victimes, plus de 80 000 orphelins, plus de 30 000 veuves et plus de 200 000 personnes se trouvant, du fait de cette répression, sans soutien moral et matériel ». Malgré ce triste constat, aucune réparation matérielle n’a été accordée aux victimes.  
 
Les recommandations de la Commission d’Enquête « d’édifier un monument à la mémoire des victimes de la répression Habré », de « décréter un jour de prière et de recueillement pour lesdites victimes » et de transformer l’ancien siège de la DDS et la prison souterraine de la « Piscine » en un musée n’ont jamais été mises en oeuvre.  
 
D’après l’AVCRP, le Tchad a « une obligation à la fois juridique et morale de réparer les dommages causés par ses agents. » En décembre dernier, l’AVCRP a présenté un mémorandum juridique aux autorités tchadiennes afin de justifier, d’un point de vue juridique, le droit à réparation des victimes de violations, au regard des différents instruments internationaux et régionaux relatifs aux droits de l’homme liant le Tchad et de présenter une certaine pratique des réparations qui ont déjà été octroyées dans certains pays comme l’Afrique du Sud, le Chili et l’Argentine ayant fait place à la démocratie. Les expériences tenues dans d’autres pays ont montré qu’il pouvait exister différentes formules de réparation adéquates. Selon le droit international, le droit à réparation inclue la restitution, la compensation, l’indemnisation et la réhabilitation des victimes.  
 
La manifestation de l’AVCRP aura lieu à 10.00h heure de N’Djaména à la grande salle des conférences du Ministère des Affaires Étrangères à N’Djaména.  
 
L'AFFAIRE HISSENE HABRE : Les investigations dans le cadre de l'enquête sur les plaintes pour violations graves des droits humains déposées en Belgique contre l'ancien dictateur tchadien, Hissène Habré, se poursuivent activement suite à la commission rogatoire menée par un juge d'instruction belge en février-mars 2002 au Tchad. Habré, le "Pinochet africain" et Président du Tchad de 1982 à 1990, vit maintenant en résidence surveillée au Sénégal, où il a été inculpé il y a trois ans de complicité de crimes contre l'humanité, d'actes de torture et de barbarie avant que la justice sénégalaise ne se déclare incompétente pour le juger. En novembre 2002, le gouvernement tchadien a adressé une lettre au juge belge afin de lever toute immunité que Hissène Habré aurait pu invoquer. Le 5 août dernier, le parlement belge a abrogé sa loi de compétence universelle, mais grâce à des dispositions transitoires, ces modifications n'affectent pas le cas Habré.  
 
Pour plus d'informations sur l'affaire Habré, consultez le site de Human Rights Watch : http://www.hrw.org/french/themes/habre.htm