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Sénégal: Affaire Hissène Habré - Processus marqué par une lenteur excessive

L’Union africaine devrait nommer un envoyé spécial pour assurer un meilleur suivi de l'affaire

(Bruxelles – 26 janvier 2007) – Six mois après que le Sénégal a accepté le mandat de l’Union africaine de poursuivre l’ancien dictateur tchadien, Hissène Habré, le processus est marqué par une lenteur excessive, a déclaré aujourd’hui Human Rights Watch.

« Le Sénégal a l’opportunité de montrer que les juridictions africaines peuvent rendre justice aux victimes de crimes commis en Afrique mais le Sénégal a pris un départ lent dans cette affaire »
Reed Brody de Human Rights Watch
  

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Le jugement de Hissène Habré

Dans un rapport publié à l’occasion du prochain Sommet de l’Union africaine qui examinera les progrès accomplis par le Sénégal dans cette affaire, Human Rights Watch précise que le Sénégal n’a toujours pas adopté la législation nécessaire pour pouvoir juger Hissène Habré.  
 
Hissène Habré a été pour la première fois inculpé au Sénégal, en février 2000, pour crime contre l’humanité et actes de tortures perpétrés sous sa présidence de 1982 à 1990. Après avoir refusé de le poursuivre en 2001 ou de l’extrader vers la Belgique en 2005, le Sénégal a accepté, le 2 juillet 2006, le mandat de l’Union africaine de juger Habré au Sénégal. Le 2 novembre 2006, le gouvernement sénégalais a annoncé la création d’une commission chargée d’organiser le procès et la révision de la législation sénégalaise pour permettre de juger Habré. Bien qu’un projet de loi ait été approuvé par le gouvernement en novembre, son adoption par l’assemblée nationale sénégalaise n’a pas encore eu lieu.  
 
« Le Sénégal a l’opportunité de montrer que les juridictions africaines peuvent rendre justice aux victimes de crimes commis en Afrique » a déclaré Reed Brody de Human Rights Watch. « Mais, le Sénégal a pris un départ lent dans cette affaire. »  
 
Les victimes de Hissène Habré se sont associées à l’appel fait au Sénégal d’agir rapidement.  
 
« Nous nous battons depuis seize ans pour traduire Hissène Habré en justice, et de nombreux survivants à son régime sont déjà morts depuis la première arrestation de Habré au Sénégal il y a maintenant sept ans », a déclaré Ismaël Hachim Abdallah, Président de l’Association des Victimes des Crimes et Répressions Politiques au Tchad (AVCRP). « À ce rythme, il n’y a aura bientôt plus de victimes en vie le jour de l’ouverture du procès. »  
 
Dans son rapport, Human Rights Watch a souligné que le Sénégal devait désormais faire face à « la tâche complexe et coûteuse d’enquêter et de poursuivre des crimes commis massivement il y a plusieurs années dans un autre pays. » Le groupe a lancé un appel à la communauté internationale d’assister le Sénégal dans la recherche de fonds et de formations pour juger Habré, tout en soulignant le nécessaire engagement politique du Sénégal. Bien que le Sénégal se soit plaint de ne pas avoir reçu d’aide internationale, Human Rights Watch a noté que les autorités sénégalaises n’avaient pas encore présenté de plan ou de budget ni élaboré de requête de financement.  
 
Human Rights Watch a également demandé à l’Union africaine, dont le Sommet aura lieu du 29 au 30 janvier à Addis Abeba, d’assister le Sénégal et de suivre ses progrès en nommant un envoyé spécial mandaté pour cette affaire.  
 
Cet appel fait écho à une lettre adressée à l’Union africaine et signée par douze organisations africaines et internationales de défense des droits de l’Homme. Lundi dernier, le Président Idriss Déby Itno a publiquement demandé à l’Union africaine d’assurer le suivi avec le Sénégal.  
 
« L’Union africaine a demandé au Sénégal de poursuivre Hissène Habré et le Sénégal n’a pratiquement rien fait depuis six mois, à l'exception de la mise en place d'une Commission d'experts pour aider à organiser le procès et l'adoption du projet de lois par le conseil des ministres. Nous exigeons concrètement que la procédure soit ouverte dans les meilleurs délais pour que le Sénégal soit en phase avec ses obligations internationales vis-à-vis de l’Union africaine », a déclaré Alioune Tine de la Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l’Homme (RADDHO), organisation non gouvernementale basée à Dakar. « Il nous semble également qu’il est de la responsabilité de l’Union africaine d’assurer que sa décision soit suivie d’effet ; il en va de sa crédibilité et de celle de toute l’Afrique. »  
 
Historique  
 
Hissène Habré a dirigé l’ancienne colonie française du Tchad de 1982 à 1990 jusqu’à son renversement en 1990 par l’actuel Président Idriss Déby Itno et sa fuite vers le Sénégal. Son régime de parti unique fut marqué par des atrocités constantes. En 1992, une Commission d’Enquête du Ministère Tchadien de la Justice, a accusé le gouvernement Habré de 40 000 assassinats politiques et de torture systématique.  
 
Hissène Habré a d’abord été inculpé au Sénégal, en 2000, avant que la justice sénégalaise ne se déclare incompétente pour le juger. Ses victimes se sont alors tournées vers la Belgique et, après quatre années d’enquête, un juge belge a délivré un mandat d’arrêt international accusant Hissène Habré de crimes contre l’humanité, crimes de guerre et d’actes de torture perpétrés durant son mandat présidentiel de 1982 à 1990. Conformément à la demande d’extradition formulée par la Belgique, les autorités sénégalaises ont arrêté M. Habré en novembre 2005.  
 
Lorsque la Cour sénégalaise a refusé de statuer sur la requête d’extradition, le gouvernement sénégalais a annoncé qu’il demanderait à l’Union africaine de se prononcer sur « la juridiction compétente » pour juger Hissène Habré. Le 2 juillet 2006, l’Union africaine, s’appuyant sur les recommandations du Comité des Éminents Juristes Africains, a demandé au Sénégal de juger Hissène Habré « au nom de l’Afrique », ce que le Président du Sénégal, Abdoulaye Wade, a accepté.  

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