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Affaire Hissène Habré : Le Sénégal défie l’ONU

Deux ans après une injonction onusienne, aucune procédure judiciaire n’a été engagée contre l’ancien dictateur tchadien

COMMUNIQUÉ CONJOINT  
 
Association des victimes des crimes et des répressions politiques au Tchad (AVCRP)  
Association tchadienne pour la promotion et la défense des droits de l’Homme (ATPDH)  
Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l’Homme (RADDHO)  
Ligue tchadienne des droits de l’Homme (LTDH)  
Fédération Internationale des Droits de l’Homme (FIDH)

« On court depuis dix-sept ans pour qu’Hissène Habré soit jugé, pour qu’on comprenne la vérité sur ce qu’on a souffert. Aujourd’hui le temps nous est compté. A moins que le Sénégal n’agisse vite, il risque de ne plus y avoir de victimes vivantes le jour du procès. Le Sénégal s’est moqué de nous durant huit années, maintenant il se moque des Nations unies.  
»
Souleymane Guengueng, fondateur de l’Association des Victimes des Crimes et Répressions Politiques au Tchad (AVCRP)
  

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(Genève, 16 mai, 2008) – Deux ans après que le Comité des Nations unies contre la Torture ait demandé de poursuivre ou d’extrader Hissène Habré, aucune action judiciaire n’a encore été prise à ce jour par le gouvernement du Sénégal ont déclaré des organisations de défense des droits de l’Homme.  
 
Le 17 mai 2006, suite à une plainte déposée par les victimes, le Comité des Nations unies contre la torture a conclu que le Sénégal avait violé la Convention contre la torture en refusant de juger ou à défaut d’extrader Habré et a demandé au Sénégal de se conformer à ses engagements internationaux en poursuivant l’une ou l’autre voie. L’ancien dictateur est accusé de crimes internationaux extrêmement graves, commis durant son mandat à la tête du Tchad de 1982 à 1990, dont l’usage systématique de la torture. En juillet 2006, à la demande de l’Union africaine, le Sénégal accepta de juger Hissène Habré ; cependant, à ce jour les autorités sénégalaises n’ont pas concrétisé leur engagement.  
 
Les organisations de défense des droits humains ont déclaré que le Sénégal a l’obligation absolue de juger ou d’extrader l’ancien dictateur pour les faits de torture dont il est accusé.  
 
Habré, qui vit au Sénégal, a d’abord été inculpé par la justice sénégalaise en février 2000 mais le Sénégal a finalement refusé de le juger puis de l’extrader suite à une demande de la justice belge en 2005.  
 
«On court depuis dix-sept ans pour qu’Hissène Habré soit jugé, pour qu’on comprenne la vérité sur ce qu’on a souffert. Aujourd’hui le temps nous est compté. A moins que le Sénégal n’agisse vite, il risque de ne plus y avoir de victimes vivantes le jour du procès », regrette Souleymane Guengueng, fondateur de l’Association des Victimes des Crimes et Répressions Politiques au Tchad (AVCRP) et chef de file des requérants à l’origine de la saisine du Comité des Nations unies contre la torture. « Le Sénégal s’est moqué de nous durant huit années, maintenant il se moque des Nations unies ».  
 
En novembre 2007, le Sénégal a déclaré au Comité des Nations unies qu’il était prêt à juger Habré mais avait besoin d’une aide internationale. A cet égard, les organisations de défense des droits humains relèvent que la Commission européenne, la France, la Suisse, la Belgique ainsi que les Pays-Bas, ont déjà accepté d’aider au financement du procès et qu’une mission d’évaluation des besoins, envoyée par l’Union européenne, s’est déjà rendue au Sénégal en janvier dernier. Cette mission a proposé que le Sénégal définisse une stratégie de poursuite, travaille sur la base d’un calendrier précis, et nomme un coordinateur administratif et financier pour le procès.  
 
« Ce n’est pas l’argent qui manque, mais la volonté politique réelle du Sénégal d’organiser le procès du Président Hissène Habré», a déclaré Alioune Tine, de la Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l’Homme (RADDHO), basée à Dakar. «Absolument rien n’empêche le Sénégal d’ouvrir l’enquête judiciaire aujourd’hui même et que Habré soit entendu. Ce serait le meilleur gage pour dissiper les suspicions légitimes des victimes ».  
 
Le Sénégal est en train d’amender sa constitution pour clarifier la compétence de ses tribunaux de juger des faits de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre perpétrés par le passé. Mais parallèlement, l’ex-coordinateur des avocats d’Hissène Habré, M. Madické Niang, a été nommé au poste de ministre de la justice, une fonction clé pour l’organisation du procès.  
 
Dans sa décision de mai 2006 (Guengueng c. Sénégal, http://www.hrw.org/pub/2006/french/cat051806.pdf), le Comité des Nations unies a jugé que le Sénégal avait violé par deux fois la Convention contre la torture, tout d’abord, en ayant failli à son obligation de traduire Habré en justice lors du dépôt de plainte par les victimes en 2000, puis, en ne respectant pas son obligation de le juger ou de l’extrader à la suite de la demande d’extradition formulée par la Belgique en septembre 2005. Le Comité a jugé que le Sénégal était « tenu de soumettre la présente affaire à ses autorités compétentes pour l’exercice de l’action pénale ou, à défaut, dans la mesure où il existe une demande d’extradition émanant de la Belgique, de faire droit à cette demande ou, le cas échéant, à tout autre demande d’extradition émanant d’un autre Etat en conformité avec les dispositions de la Convention». Le Comité a demandé au Sénégal de lui faire un rapport, dans un délai de 90 jours, sur les mesures prises pour donner effet à ses recommandations.  
 
Historique  
 
Hissène Habré a dirigé le Tchad de 1982 à 1990, jusqu’à sa fuite vers le Sénégal lors de la prise de pouvoir par l’actuel président Idriss Déby Itno. Son régime de parti unique fut marqué par des violations massives des droits humains perpétrées à travers tout le pays, qui ont compris des campagnes d’épuration ethnique. Les dossiers de la police politique d’Hissène Habré, la Direction de la documentation et de la sécurité (DDS), découverts par Human Rights Watch en mai 2001 (http://www.hrw.org/french/themes/habre-police.htm) révèlent l’identité de 1.208 personnes qui sont décédées en détention et font état de 12.321 personnes victimes d'autres violations.  
Habré a d’abord été inculpé au Sénégal en 2000, avant que la justice sénégalaise ne se déclare incompétente pour le juger. Ses victimes se sont alors tournées vers la Belgique et, après quatre années d’enquête, un juge belge a délivré, en septembre 2005, un mandat d’arrêt international accusant M. Habré de crimes contre l’humanité, crimes de guerre et actes de torture. Les autorités sénégalaises ont arrêté M. Habré en novembre 2005 et le gouvernement sénégalais a demandé à l’Union africaine de se prononcer sur « la juridiction compétente » pour juger M. Habré. Le 2 juillet 2006, l’Union africaine, s’appuyant sur les recommandations du Comité des Éminents juristes africains, a demandé au Sénégal de juger Habré « au nom de l’Afrique », ce que le Président Wade a accepté.  
 
Pour lire une lettre écrite en avril 2008 aux Communautés Africaines du Comité International pour le juste jugement d'Hissène Habré, veuillez visiter:  
http://hrw.org/french/docs/2008/04/29/africa18668.htm  
 
Pour plus d’information sur le dossier d'Hissène Habré, veuillez visiter:  
http://www.hrw.org/french/themes/habre.htm  
 
Pour plus d’informations, veuillez contacter :  
A Paris, Jacqueline Moudeina (ATPDH) (français): +33-634-30-42-99  
A Bruxelles, Reed Brody (Human Rights Watch) (anglais, français, espagnol, portugais): +32-498-62-57-86 (mobile)  
A Dakar, Alioune Tine (RADDHO) (français, anglais): +221-644-33-96  
A New York, Souleymane Guengueng (AVCRP) (français): +1-646-541-7450  
A N’Djaména, Dobian Assingar (FIDH) (français): +235-629-06-80

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