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(les événements de l'an 2000) Extrait sur la Tunisie |
Evolution des droits de l'Homme Le combat des militants tunisiens pour pouvoir exercer leur droit à se réunir pour parler des abus des droits de l'Homme commis dans le pays a été à l'avant-plan des événements survenus l'année dernière. Des confrontations publiques, dont des grèves de la faim, largement couvertes par les média, de prisonniers politiques et de militants sous contrôle judiciaire, ont contribué à la libération de certains prisonniers et à la décision prise par le gouvernement de restituer les passeports et le droit de voyager à d'éminents avocats spécialisés en droits de l'Homme et à des militants, alors qu'il n'y avait pas consenti pendant des années. Toutefois, le gouvernement est resté hostile à toute critique publique et a criminalisé les activités politiques « non-autorisées ». Le manque de pluralisme politique a été évident dans la réélection du Président Zine al-Abidine Ben Ali pour un quatrième mandat le 24 octobre 1999, avec 99,4 pour cent des voix, et dans l'obtention de 94 pour cent des voix lors des élections municipales du 28 mai, par le Rassemblement Constitutionnel Démocratique (RCD) au pouvoir. L'augmentation des protestations au cours de cette année ne reflète pas un accroissement de la tolérance officielle mais plutôt une plus grande audace provoquée par la frustration de ne pas bénéficier de droits fondamentaux. Les résultats économiques du gouvernement n'ont pas non plus été satisfaisants. La première crise sur le front social a éclaté au début du mois de février lorsque les taxis et les conducteurs de camion ont fait la grève pendant trois jours pour protester contre l'introduction d'un nouveau code de la route et contre la possibilité qu'il donnait à la police de commettre des abus et d'extorquer des pots-de-vin sous le couvert de la mise en vigueur du nouveau système. La semaine suivante, les lycéens et les étudiants, ainsi que des jeunes chômeurs ont manifesté dans les rues de plusieurs villes du sud comme Hamma, Gabès, Jebeniana, El-Amra, Medenine, Djerba, Douz, Gafsa et Sfax, car la rumeur disait que le prix du pain allait augmenter. Pendant plus d'une semaine, ils ont manifesté contre l'augmentation du prix des produits alimentaires de base, le chômage et la corruption du gouvernement. La police a arrêté des centaines de manifestants. Beaucoup d'entre eux ont déclaré avoir été maltraités pendant leur détention mais la plupart ont été libérés sans qu'aucune charge ne soit retenue contre eux, ou ont été condamnés à des peines avec sursis. Cependant, plus de quarante manifestants ont été condamnés à des peines de trois à quatre mois de prison ferme. Le 7 novembre 1999, après la réélection du Président Ben Ali et le jour du douzième anniversaire de son arrivée au pouvoir, les autorités ont libéré plus de 1.000 prisonniers, dont 600 prisonniers politiques, sous certaines conditions, dans le cadre d'une prétendue amnistie. La plupart des personnes libérées étaient des sympathisants ou des militants de base d'al-Nahda (Renaissance), un mouvement islamiste interdit, emprisonnés pour avoir participé à des réunions d'une organisation « non-autorisée » ou pour avoir fait des dons aux familles des membres emprisonnés du mouvement. Les autorités ont également libéré cinq membres du Parti Communiste des Ouvriers Tunisiens (PCOT, interdit) - Ali Jellouli, Nejib Baccouchi, Noureddine Benticha, Chedli Hammami et Taha Sassi - inculpés pour délits d'opinion et condamnés en juillet 1999 après un procès injuste. Un sixième, Fahem Boukaddous, qui avait été sévèrement torturé en 1999, a été maintenu en détention jusqu'en juin 2000. Tous les membres importants d'al-Nahda sont toujours détenus et purgent de longues peines de prison dans des conditions très difficiles. Les prisonniers politiques libérés font face à des mesures punitives, dont certaines approuvées par les tribunaux, telles que des "contrôles administratifs" qui les obligent à se présenter, souvent tous les jours, au bureau de police local et à d'autres mesures arbitraires, telles des restrictions à leurs déplacements et coupure de leurs lignes téléphoniques. Certains ont été licenciés ou renvoyés de leur travail dans le secteur public et le secteur privé est soumis à des pressions pour ne pas les recruter. Beaucoup d'entre eux font l'objet d'une surveillance policière lourde et intimidante. Le 28 août, Hamadi Romdhane a été arrêté pour avoir refusé de se soumettre au contrôle administratif. En tant qu'ancien prisonnier, les autorités lui ont dit que les contrôles administratifs des personnes libérées lors de l'amnistie de novembre 1999 avaient été levés mais qu'ils avaient été rétablis par la suite. Il a été obligé à se présenter quotidiennement à un poste de police situé à douze kilomètres de son domicile. Il a refusé de s'y soumettre par peur de ne pouvoir trouver un travail dans de telles conditions. Les autorités ont persisté à réprimer les efforts de création d'associations autonomes et critiques à l'égard du gouvernement. Elles ont continué à refuser de reconnaître le Rassemblement pour une Alternative Internationale de Développement (RAID) ainsi que le Conseil National pour les Libertés en Tunisie (CNLT), un groupe de contrôle des droits de l'Homme. Les partisans de ces associations pouvaient donc être arrêtés et emprisonnés en raison de leur appartenance à des organisations « non-autorisées ». En avril, la police a arrêté Fathi Chamkhi, le président du RAID, Mohamed Chourabi, un autre membre du RAID, et le propriétaire d'un magasin de photocopies, Iheb el-Hani, parce qu'ils possédaient des documents du RAID et du CNLT et les ont accusé de diffusion de « fausses » nouvelles de nature à troubler l'ordre public, diffamation envers les autorités, incitation à violer les lois du pays et appartenance à une association non-autorisée. Ils ont tous deux été relâchés le 8 mai mais leurs dossiers restent ouverts, ce qui les expose à un harcèlement futur. Au cours de cette année, des militants locaux des droits de l'Homme ont été cités à comparaître devant des procureurs ou des juges ou ont été brièvement détenus et ensuite libérés. A la mi-octobre, on comptait parmi les personnes faisant l'objet d'une enquête ou poursuivies en justice, Nejib Hosni, avocat spécialisé en droits de l'Homme, Mustapha Ben Jaafar, secrétaire général du Forum Démocratique pour le Travail et les Libertés, une autre association « non-autorisée », et Mohamed Hedi Sassi, un militant du PCOT. Le gouvernement s'est montré particulièrement intolérant lorsque les membres du CNLT ont refusé de se plier aux efforts officiels visant à les faire taire. En décembre 1999, les forces de sécurité ont fouillé à deux reprises les bureaux des Editions Aloès, une maison d'édition créée par Sihem Ben Sedrine, membre fondateur du CNLT et épouse d'Omar Mestiri, secrétaire général du CNLT, et ont saisi des ordinateurs et des archives. Le 13 janvier, Jean-François Poirier, de nationalité française et co-fondateur et directeur littéraire des Editions Aloès, a été sommairement démis de sa fonction de maître assistant de philosophie à l'Institut des Sciences Humaines de Tunis. Le 13 février, on lui a ordonné de quitter le pays après s'être rendu en février dans le sud du pays accompagné de Ben Sedrine et Taoufik Ben Brik, un journaliste, pour couvrir les manifestations des lycéens et des étudiants. Ben Brik, également membre fondateur du CNLT, a entamé une grève de la faim le 3 avril pour protester contre la confiscation de son passeport par le gouvernement un an auparavant, contre le harcèlement par la police dont sa famille était victime et parce que les média tunisiens refusaient de publier ses écrits. Le 10 avril, il a été accusé de diffusion de « fausses » nouvelles et de diffamation envers les autorités. Ces accusations, qui pouvaient être sanctionnées d'une peine de prison allant jusqu'à neuf ans, découlaient d'articles qu'il avait écrits dans la presse suisse, notamment sur le harcèlement de Ben Sedrine. C'est également le 10 avril que la police a évacué par la force et fermé la maison d'édition Aloès de Ben Sedrine, l'endroit où Taoufik Ben Brik faisait la grève de la faim, car une réunion qui y avait été organisée la veille pour parler de la liberté de la presse, réunion à laquelle des journalistes étrangers avaient assisté, aurait constitué "une menace à l'ordre public". Le 26 avril, la police a arrêté et passé à tabac Ben Sedrine, Jalal Zoughlami-frère de Ben Brik- et Ali Ben Salem, un avocat de 70 ans, après une confrontation au cours de laquelle la police voulait empêcher des journalistes étrangers et des partisans tunisiens de rendre visite à Ben Brik à son domicile. Le 3 mai, un tribunal a accusé Jalal Zoughlami d'avoir verbalement et physiquement brutalisé un officier de police qui frappait Ben Salem et l'a condamné à trois mois de prison. Peu après, les autorités ont abandonné les charges contre Ben Brik, lui ont rendu son passeport et l'ont autorisé à se rendre en France, où il a continué sa grève de la faim pour protester contre l'emprisonnement de son frère. La cour d'appel a réduit les peines de Jalal Zoughlami en prenant en considération le temps qu'il avait passé en prison avant son procès et il a été libéré le 15 mai. Le 15 mai, lors d'une réunion télévisée du Conseil des Ministres, le Président Ben Ali a défendu "le droit inaliénable de tout citoyen" à un passeport et à voyager à l'étranger. Malgré la restitution des passeports à des militants de renom, les autorités continuent toutefois à les refuser à des opposants moins connus et aux membres des familles des prisonniers politiques et des militants expatriés. D'autres formes de harcèlement, comme une surveillance policière systématique et intensive et des perquisitions à toute heure, continuent avec la même vigueur. Mehdi Zougah, ressortissant nationalité franco-tunisien, est rentré en Tunisie en août après avoir récupéré son passeport après six ans d'attente. Alors qu'on lui avait apparemment assuré qu'il pouvait rentrer en toute sécurité, il a été arrêté à son arrivée et a été détenu secrètement pendant douze jours. On a ensuite annoncé qu'en 1998 il avait été condamné par contumace à douze ans de prison pour appartenance à une organisation illégale. Toujours détenu au moment du bouclage de ce rapport, Zougah devait comparaître en justice le 8 janvier 2001 pour appartenance à une organisation illégale. Cette année, certains militants politiques et leur famille n'ont pas connu répit. Le 28 juin, Nadia Hammami, âgée de dix-sept ans, et Najoua Rezgui, respectivement fille et épouse d'Hama Hammami et d'Abdeljabbar Maddouri, deux militants condamnés du PCOT, ont entamé une grève de la faim pour demander que cesse le harcèlement. Nadia et ses sœurs, Oussaima, onze ans, et Sarah, onze mois, ont été privées de passeport, apparemment en raison des activités politiques de leur père et de leur mère, Radhia Nasraoui, avocate spécialisée en droits de l'Homme. Hama Hammami, un militant politique non-violent, avait souffert de mauvais traitements et avait été torturé durant sa détention. Il s'était caché après avoir été inculpé et condamné par contumace en juillet 1999 à plus de neuf ans de prison pour diffamation de l'ordre public, diffusion de « fausses » nouvelles, et organisation de réunions non-autorisées. Nadia Hammami a cessé sa grève de la faim après 13 jours sur les conseils de médecins. Elle et ses sœurs ont finalement reçu leurs passeports. Najoua Rezgui, dont le mari se cachait également après une condamnation similaire en juillet 1999, a été elle-même arrêtée à plusieurs reprises. Najoua Rezgui a arrêté sa grève de la faim après 20 jours. Des prisonniers ont fait la grève de la faim pour obtenir de meilleurs traitements et conditions carcérales. La plupart des quelques 1.000 prisonniers politiques en Tunisie purgent des peines pour "appartenance à une organisation non-autorisée", généralement al-Nahda, ou pour des délits non-violents comme la distribution de tracts ou la participation à des réunions. Des rapports du CNLT d'octobre 1999 et de la Fédération Internationale des Droits de l'Homme (FIDH) et du Comité pour le Respect des Libertés et des Droits de l'Homme en Tunisie (CRLDHT) de juin 2000 parlent de prisons surpeuplées, de mauvaises conditions d'hygiène, de couverture sanitaire inappropriée, de mesures disciplinaires cruelles et dégradantes et de mauvais traitements régulièrement infligés aux prisonniers par les gardes. Le 9 avril, les prisonniers Fahem Boukaddous et Abdelmoumen Belanes, tous deux condamnés pour appartenance au PCOT et souffrant de problèmes de santé, ont entamé une grève de la faim. Sadok Chorou, Samir Diallo et Fathi al-Ouraghi, tous condamnés pour appartenance à al-Nahda, leur ont emboîté le pas pour demander une couverture sanitaire adéquate. L'enseignant Taoufik Chaieb, en prison depuis 1996 pour ses liens avec al-Nahda, a entamé une grève de la faim le 11 juillet, et qui aura duré environ deux mois. Lorsque son état s'est gravement détérioré, le Président Ben Ali l'a libéré par amnistie présidentielle le 5 septembre. Au moins trois personnes sont mortes en détention dans des conditions douteuses. Le 10 mai, El-Id Ben Saleh aurait été attaqué et tué par d'autres détenus dans la prison de Gafsa. Le 22 juillet, Chaker El-Azouzi aurait été battu à mort par la police à Hammamet après avoir été arrêté. Le 17 septembre, Ridha Jeddi est décédé au bureau de police de Menzel Bourguiba. Son corps présentait ce qui ressemblerait à des marques de torture lorsqu'il a été rendu à sa famille. La Ligue Tunisienne des Droits de l'Homme (LTDH), indépendante, a demandé que l'on enquête sur ces trois cas mais, jusqu'au moment du bouclage de ce rapport, aucune information ne porte à croire que cela a été fait. Le 3 mai, Journée internationale de la liberté de la presse, au cours d'une réunion avec des éditeurs de journaux privés, le Président Ben Ali a déclaré aux média: « Ecrivez comme vous le souhaitez. Soyez critiques si ce que vous dites est vrai, » et il a ajouté « si quelqu'un vous cause des problèmes par rapport à cela, contactez-moi. » Il n'y a toutefois eu aucun changement observable dans le ton complaisant de la presse écrite privée tunisienne, qui continue d'ignorer les problèmes nationaux en matière de droits de l'Homme et contribue au climat d'intimidation en publiant des articles porteurs d'attaques scabreuses contre opposants. Le 23 mai, Riad Ben Fadel, l'éditeur de la version arabe du mensuel parisien "Le Monde diplomatique", a été blessé par balle deux jours après avoir critiqué la façon dont les autorités géraient l'affaire Ben Brik. Le Président Ben Ali a rencontré Ben Fadel après l'incident et lui a promis qu'une enquête serait ouverte. En juin, le Président Ben Ali a réprimandé la chaîne de télévision tunisienne contrôlée par l'Etat parce qu'elle ne « répondait pas assez aux préoccupations et attentes des citoyens » et parce qu'elle ne « promouvait pas le pluralisme d'idées et la diversité d'opinions. » La radio, également contrôlée par l'Etat, et la télévision restent toutefois les porte-parole du gouvernement et n'accordent pas de temps d'antenne aux critiques politiques et aux militants des droits de l'Homme. La défense des droits de l'Homme Les militants des droits de l'Homme font face à des restrictions pouvant aller du boycott de leurs activités militantes par la presse contrôlée par l'Etat et l'interdiction de leurs rassemblements, jusqu'aux licenciements, voire poursuite judiciaire avec risque d'emprisonnement. La surveillance inclut les écoutes téléphoniques, les coupures de lignes et l'interception du courrier et des fax. A la fin de l'année, le gouvernement avait restitué les passeports de la plupart des militants les plus connus mais maintenait les restrictions de déplacement de certains. L'expérience de Moncef Marzouki, porte-parole du CNLT, est un exemple typique. En novembre 1999, après la publication de plusieurs communiqués du CNLT, il a été présenté devant le juge d'instruction pour répondre d'accusations telles que soutenir une association « non-autorisée » et diffusion de « fausses » nouvelles de nature à troubler l'ordre public. En mai, il a récupéré son passeport et sa ligne téléphonique a été rétablie après quatre ans de coupure. Toutefois, en juin, après un court voyage à Paris et Washington, il a été renvoyé de son poste de professeur de médecine communautaire à l'Université de Sousse pour avoir voyagé sans autorisation. Le 19 octobre, les autorités l'ont empêché de quitter le territoire pour participer à une réunion en Espagne. Moncef Marzouki a été renvoyé de l'université un jour après un discours du Président Ben Ali adressé aux cadres du parti RCD au pouvoir au cours duquel il avait menacé de poursuivre des citoyens, dont les noms n'ont pas été mentionnés, dont les critiques de la Tunisie à l'étranger «ne sont rien d'autre qu'une trahison». Faisant référence sans équivoque au CNLT, le Président Ben Ali a déclaré «Il est hors de question qu'au nom des libertés publiques des structures illégales soient créées et revendiquent le statut d'association, d'organisation ou de comité ». Le CNLT a continué d'émettre des critiques virulentes sur les violations des droits de l'Homme malgré la ténacité du gouvernement à leur refuser une reconnaissance légale. En octobre 1999, il a publié un rapport sur les conditions de vie dans les prisons et, en mars 2000, un compte-rendu détaillé des violations des droits de l'Homme commises dans le pays. La Ligue Tunisienne des Droits de l'Homme (LTDH), l'Association Tunisienne des Jeunes Avocats et l'Association Tunisienne des Femmes Démocratiques (ATFD), toutes légalement reconnues, se sont également exprimées contre les violations des droits de l'Homme malgré la pression exercée par le gouvernement et les obstacles dressés pour les empêcher d'organiser des réunions. En avril, la police a empêché la section tunisienne d'Amnesty International (AI) d'organiser une réunion publique sur la situation des droits de l'Homme en Arabie Saoudite. Des officiers de la sécurité ont empêché Mahmoud Ben Romdhane, président du conseil international de l'organisation, et d'autres membres et invités, y compris des diplomates étrangers, de se rendre au bureau de l'organisation situé à Tunis et l'avocat Hachemi Jegham, ancien président de la section tunisienne d'AI, a été physiquement traîné hors du bâtiment. En juillet, Donatella Rovera et Hassina Giraud d'AI et Patrick Baudouin du FIDH n'ont pas pu entrer dans le pays par l'aéroport de Tunis-Carthage. Le rôle de la Communauté internationale Les Nations-unies Le rapporteur spécial des Nations-unies sur la liberté d'opinion et d'expression s'est rendu en Tunisie en avril 1999 et a publié son rapport le 25 février 2000. Le rapport conclut que la Tunisie «a encore un long chemin à parcourir pour profiter pleinement de son contexte économique favorable pour adopter des mesures visant à renforcer la protection des droits de l'Homme et, en particulier, le droit à la liberté d'opinion et d'expression». Il affirme être particulièrement préoccupé par les châtiments et le harcèlement dont souffrent les familles des personnes détenues, le contrôle de la communication audiovisuelle et de la majorité de la presse écrite par l'Etat, et les efforts «insuffisants» du gouvernement pour lever les «contraintes inutiles» imposées aux journalistes. Le rapporteur spécial a recommandé la révision et l'amendement des lois qui régissent la presse, les partis politiques et les associations et a demandé au gouvernement d'abolir «toutes les mesures de censure directes ou indirecte» et de «mettre un terme a l'intimidation et au harcèlement dont feraient l'objet les personnes qui cherchent à exercer leur droit à la liberté d'opinion et d'expression». Le rapport enjoint également le gouvernement de répondre favorablement aux demandes constantes du rapporteur spécial sur la torture et à celles du rapporteur spécial pour l'indépendance des juges et des avocats de visiter le pays. L'Union européenne La confrontation entre le gouvernement tunisien et les groupes de défense des droits de l'Homme bénéficie d'une couverture considérable dans les média de France et d'autres pays de l'UE, tout particulièrement la grève de la faim de Taoufik Ben Brik (voir plus haut). Le ministre suisse des Affaires étrangères, Joseph Deiss, a déclaré à Tunis le 2 mai avoir remis à son homologue tunisien un mémorandum contenant l'espoir de la Suisse pour que ce problème soit résolu conformément aux principes de droit défendus par les deux pays. Le même jour, dans un discours adressé à l'Assemblée nationale française, le ministre français des Affaires étrangères, Hubert Vedrine, a déclaré que la France attachait une grande valeur à la liberté de la presse et qu'elle a demandé aux autorités tunisiennes à plusieurs reprises et de différentes façons de mettre fin à cette situation rapidement et humainement. Ben Brik a poursuivi sa grève de la faim à Paris après que le gouvernement tunisien lui ait rendu son passeport le 1er mai. Le 15 juin, le Parlement européen a adopté une résolution d'urgence qui pousse la Tunisie à «instaurer un véritable multipartisme» et à «garantir l'exercice des droits et libertés fondamentaux.» La résolution demande au Conseil d'association UE - Tunisie, créé par l'Accord d'association de l'UE avec la Tunisie, de «fournir dans les meilleurs délais une évaluation jointe du respect des droits de l'Homme en Tunisie» et enjoint la Commission européenne de présenter au parlement «un rapport sur l'évolution de la situation en matière des droits de l'Homme en Tunisie». Les Etats-Unis Une visite du Président Ben Ali à Washington, D.C., prévue à la mi-juillet a été reportée en raison de l'engagement du Président Clinton dans les négociations israélo-palestiniennes de Camp David et n'a pas été reprogrammée par la suite. Le sous-secrétaire d'Etat des USA pour la démocratie, les droits de l'Homme et le travail, Harold Koh, a effectué une visite de trois jours en Tunisie en juin, au cours de laquelle il a rencontré des partisans des droits de l'Homme, des journalistes et des représentants du gouvernement. Le 14 juin, lors d'une conférence de presse, Harold Koh a manifesté son admiration pour les progrès sociaux et économiques enregistrés par le gouvernement et a déclaré « il est maintenant important que des progrès similaires soient réalisés dans le domaine des droits civils et politiques. » Il a identifié comme préoccupations essentielles un plus grand pluralisme politique, la transparence et l'indépendance de la justice et la censure des média. Il a également affirmé que «d'autres progrès seraient les bienvenus» dans la démarche du gouvernement pour «garantir le droit de tous les Tunisiens à voyager librement, à parler ouvertement et à constituer des associations indépendantes, y compris des organisations de défense des droits de l'Homme». L'évaluation franche du secrétaire adjoint Harold Koh de la situation des droits de l'Homme en Tunisie n'a pas trouvé son parallèle dans la diplomatie publique américaine au cours de l'année. Dans la justification officielle du projet de budget soumis par le Département d'État au Congrès, le sous-secrétaire d'état des Affaires du Proche-Orient, Edwin S. Walker Jr., a qualifié la Tunisie, sans réserve, comme «un pays démocratique stable». L'administration a demandé 2,5 millions de dollars U.S. en aide militaire et près d'un million de dollars U.S. pour la formation militaire en Tunisie pour l'année fiscale 2001. La Tunisie a été invitée à participer à la conférence ministérielle de la Communauté des démocraties organisée à Varsovie, Pologne, à la fin juin, conférence qui bénéficiait d'un fort soutien des USA. Le chapitre relatif à la Tunisie du Rapport du Secrétaire d'État américain sur les pratiques en matière des droits de l'Homme de 1999 présente un panorama détaillé de la situation des droits de l'Homme mais, les paragraphes d'introduction semblent minimiser la critique en qualifiant le bilan du gouvernement en matière de droits de l'Homme d' «inconsistant», mot qui semble se justifier par la référence aux élections présidentielles et législatives d'octobre qui «ont constitué un modeste pas en avant vers la démocratie». La présentation par le sous-secrétaire Harold Koh du Rapport du Département d'État était inopportunément indulgente envers la Tunisie. Il n'a pas mentionné ce pays lorsqu'il a abordé la répression des dissidents et des défenseurs des droits de l'Homme par les gouvernements du Moyen-Orient et a poursuivi en louant le gouvernement pour avoir mis en liberté conditionnelle le vice-président de la Ligue Tunisienne des Droits de l'Homme, Khemaïs Ksila, en répétant, sans faire preuve d'esprit critique, les fausses accusations qui avaient conduit Khemaïs Ksila à purger deux ans de prison. Rapports de Human Rights Watch à consulter: The Administration of Justice in Tunisia: Torture, Trumped-up Charges and a Tainted Trial, 2/00 |
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