Justice compromise
L’héritage des tribunaux communautaires gacaca du Rwanda
Copyright: 2007 National University of Rwanda-Centre for Geographic Information System & Remote Sensing
I. Résumé
Le Rwanda est sur le point d’achever l'une des expériences de justice transitionnelle les plus ambitieuses de l'histoire, mêlant les traditions locales de résolution des conflits avec un système juridique moderne punitif de manière à rendre la justice pour le génocide de 1994 dans le pays. Le président rwandais Paul Kagame a décrit l'initiative comme une « solution africaine aux problèmes africains ».[1] Depuis 2005, un peu plus de 12 000 tribunaux gacaca communautaires ―qui tirent leur nom du mot kinyarwanda qui signifie « gazon » (le lieu où les communautés se réunissent pour régler les différends) ― ont jugé environ 1,2 million d’affaires. Ces tribunaux laisseront derrière eux un héritage mitigé.
Certains Rwandais ont accueilli favorablement le travail rapide des tribunaux et la forte implication des communautés locales, en soulignant que les juridictions gacaca les ont aidés à mieux comprendre ce qui s'est passé dans la période la plus sombre de l'histoire du pays et ont atténué les tensions entre les deux principaux groupes ethniques du pays (la majorité hutue et la minorité tutsie). D'autres sont plus sceptiques : certains rescapés du génocide se plaignent que tous les auteurs n’ont pas été arrêtés ou punis de manière adéquate pour leurs crimes. Certaines des personnes reconnues coupables et condamnées à des dizaines d’années d’emprisonnement maintiennent que les procès ont été gravement viciés, que des particuliers et des responsables gouvernementaux ont manipulé le cours de la justice, que les juridictions gacaca se sont politisées au fil des ans, et que les tensions ethniques restent élevées. Des deux côtés, il existe des doutes, ainsi que des espoirs hésitants, sur la contribution du système gacaca à une réconciliation à long terme.
Ce rapport reconnaît les défis immenses auxquels le gouvernement rwandais a été confronté en choisissant un système qui pourrait traiter rapidement des dizaines de milliers d’affaires d'une manière qui serait largement acceptée par la population. Ce rapport explique la décision du gouvernement d’utiliser le système gacaca afin de traiter les circonstances extraordinaires auxquelles il était confronté après le génocide, et il décrit la tentative du gouvernement pour trouver un équilibre entre les procédures régulières classiques et la nécessité écrasante de rendre rapidement justice.
Le rapport relève un certain nombre des principaux accomplissements du système gacaca. À travers l’utilisation de dizaines de cas, il illustre également le prix payé par la population ordinaire pour les compromis faits dans la décision d'utiliser le système gacaca pour juger des affaires liées au génocide, notamment des erreurs judiciaires flagrantes, l'utilisation des juridictions gacaca pour régler des comptes personnels et politiques, la corruption et les irrégularités de procédure.
Ce rapport n'est pas la première évaluation du processus gacaca. Avocats Sans Frontières (ASF) et Penal Reform International (PRI) ont surveillé de près le processus dès le début et ont émis des dizaines de rapports détaillés sur un ensemble de sujets liés au système gacaca. Les organisations rwandaises de droits humains, en particulier la Ligue des droits de la personne dans la région des Grands Lacs (LDGL) et la Ligue rwandaise pour la promotion et la défense des droits de l’homme (LIPRODHOR), ont également suivi le processus et ont rendu compte de leurs résultats. Des livres et articles académiques ont également été écrits sur le système gacaca. Le présent rapport s'inspire de ces écrits et soulève certains problèmes qui ont déjà été documentés par d'autres, mais s'efforce d'analyser le processus gacaca spécifiquement du point de vue des droits humains, en notant ses réalisations et ses limites dans ce contexte.
Lorsque le Front patriotique rwandais (FPR), le parti actuellement au gouvernement dans le pays, a initialement pris le pouvoir en juillet 1994 après avoir mis fin au génocide, il a été confronté à la nécessité de rendre la justice pour les meurtres de plus des trois-quarts de la population tutsie du pays, ainsi que de nombreux Hutus qui se sont opposés à la tuerie ou ont tenté de protéger les Tutsis. Au total, plus d'un demi-million de personnes ont péri dans l'espace de seulement treize semaines. Le défi aurait dépassé même le système judiciaire le plus avancé du monde. Au Rwanda, la tâche a été rendue encore plus difficile parce que le génocide avait tué un grand nombre de juges et autres membres du personnel judiciaire et avait détruit une grande partie des infrastructures judiciaires.
Quelques mois après la fin du génocide, les prisons rwandaises étaient pleines à craquer de personnes soupçonnées de génocide. En 1998, environ 130 000 prisonniers étaient entassés dans un espace destiné à 12 000 personnes, entraînant des conditions qui ont été universellement reconnues comme inhumaines et qui ont coûté la vie à des milliers de personnes. Des tribunaux classiques ont commencé à juger des affaires de génocide en décembre 1996, mais d’ici 1998 ils avaient seulement réussi à juger 1 292 suspects de génocide. À ce rythme, les procès pour génocide se seraient poursuivis pendant plus d'un siècle, laissant de nombreux suspects derrière les barreaux dans l’attente de leur procès pendant des années et même des décennies. Le processus aurait pu être accéléré si des avocats et des juges étrangers avaient été présents pour aider, mais le gouvernement rwandais a rejeté ces propositions.
Au lieu de cela, le gouvernement a proposé de mettre en place des tribunaux communautaires pour juger les crimes liés au génocide en utilisant le modèle coutumier de gacaca. Visant à accélérer les procès de génocide, à réduire la population carcérale et à reconstruire rapidement le tissu social de la nation, le nouveau modèle de gacaca, tout comme son prédécesseur coutumier, serait géré par des juges locaux et encouragerait la participation des membres de la communauté locale. L’un des objectifs visés par le gouvernement en encourageant la participation de la communauté était de faire des Rwandais ordinaires les principaux acteurs dans le processus consistant à rendre la justice et à favoriser la réconciliation. Une série de lois gacaca réglementeraient les procès liés au génocide, en mélangeant certaines normes fondamentales de procès équitable avec des procédures plus informelles.
Certaines autorités gouvernementales ont craint que le système gacaca ne soit pas le mécanisme approprié pour les procès pour génocide, étant donné la gravité et la complexité des crimes. Le modèle coutumier de gacaca avait été utilisé uniquement pour des litiges civils mineurs ― portant sur des biens, des héritages, des dommages corporels et des relations conjugales ― les cas plus graves, tels que les meurtres, étant réservés à la décision des chefs de village ou du représentant du roi. Ces autorités gouvernementales craignaient que les juges aient du mal à appliquer correctement la loi, étant donné que nombre d’entre eux n'avaient pas d'éducation formelle ni de formation. Ils ont averti du risque de partialité, en soulignant que le contexte local signifiait que les juges connaitraient inévitablement les parties dans une affaire, ce qui réduirait leur objectivité et augmenterait le risque de corruption. Plus important encore, ces autorités ont averti que les procédures gacaca ne parviendraient pas à se conformer aux obligations internationales du Rwanda en matière de procès équitable. Près de dix ans après le commencement du processus gacaca, bon nombre de ces préoccupations se sont révélées être bien fondées.
Ces préoccupations ont été rejetées et, en juin 2002, le gouvernement rwandais a lancé une forme contemporaine de gacaca pour juger les cas de génocide, gérée par une nouvelle institution qui allait être connue plus tard sous le nom de Service National des Juridictions Gacaca (SNJG). Pendant plus de deux ans, des tribunaux gacaca dans 12 zones pilotes ont utilisé les informations fournies par les membres de la communauté locale pour compiler des dossiers sur ce qui s'était passé dans chacune de ces zones entre 1990 et 1994. Les tribunaux ont dressé des listes des victimes et des suspects, et classé ces derniers en quatre catégories en fonction de la gravité des crimes allégués. Les affaires les plus graves (première catégorie), impliquant les meurtriers de masse, les violeurs et les dirigeants qui avaient incité aux meurtres, ont été transférées aux tribunaux classiques, le reste devant être jugé par les tribunaux gacaca.
Les premiers procès gacaca ont commencé en 2005. Ils étaient censés se terminer à la fin de 2007, mais le délai a été prolongé à plusieurs reprises au cours des trois années suivantes. À la mi-juillet 2010, le gouvernement a annoncé que les derniers procès gacaca dans le pays avaient été achevés. Cependant, deux mois plus tard, il a déclaré de manière inattendue que le processus gacaca se poursuivrait. Cette nouvelle extension permettra au SNJG ― chargé de superviser le processus gacaca ―d’examiner un certain nombre d’erreurs judiciaires présumées et de procéder à une révision le cas échéant. Cependant, les tribunaux gacaca ne sont pas censés traiter de nouveaux cas.
L’expérience du Rwanda en justice communautaire de masse a été un succès mitigé. De nombreux Rwandais sont d’accord pour dire qu'elle a fait connaître ce qui s'est passé dans leurs communautés locales pendant les 100 jours de génocide en 1994, même si toute la vérité n’a pas été révélée. Ils disent que cette expérience a aidé certaines familles à retrouver les corps de parents assassinés qu’elles ont pu enfin enterrer avec une certaine dignité. Elle a également veillé à ce que des dizaines de milliers de criminels soient traduits en justice. Certains Rwandais disent que le processus a aidé à mettre en mouvement la réconciliation au sein de leurs communautés.
Pourtant, le système gacaca souffre de multiples lacunes et échecs : des violations fondamentales du droit à un procès équitable et des limitations de la capacité des accusés à se défendre efficacement ; des prises de décision pouvant être biaisées (souvent causées par les liens des juges avec les parties dans une affaire ou par des vues préconçues de ce qui s'est passé pendant le génocide) conduisant à des allégations d'erreurs judiciaires ; des affaires fondées sur ce qui s’est avéré de fausses accusations, liées, dans certains cas, au désir du gouvernement de faire taire les critiques (journalistes, militants des droits humains et agents de l'État) ou à des différends entre voisins et même entre membres de famille ; l'intimidation par les juges ou les autorités de témoins à décharge ; les tentatives de corruption visant certains juges pour obtenir le verdict désiré ; ainsi que d'autres graves irrégularités de procédure.
Bon nombre de ces lacunes peuvent remonter jusqu’au plus important des compromis effectué dans le choix d'utiliser le système gacaca pour juger les cas de génocide : la réduction des droits de l'accusé à un procès équitable. Bien que ces droits soient garantis tant par le droit rwandais que par le droit international, les lois du processus gacaca n’ont pas mis en place des garanties suffisantes pour s'assurer que toutes les personnes accusées qui comparaissent devant les tribunaux gacaca bénéficient d'un procès équitable. Les lois du processus gacaca ont visé un équilibre en protégeant certains droits, notamment le droit d'être présumé innocent jusqu'à preuve du contraire ; elles en ont modifié certains, tels que le droit d'avoir suffisamment de temps pour préparer sa défense ; et elles en ont complètement sacrifié certains autres, notamment le droit à un avocat. Des dizaines de cas mentionnés dans le présent rapport montrent comment ces lacunes dans la procédure ont contribué directement à des procès gacaca viciés.
Le gouvernement a fait valoir que les droits traditionnels à un procès équitable n'étaient pas nécessaires parce que les membres des communautés locales ― qui ont été témoins des événements de 1994 et savaient ce qui s'est réellement passé ― participeraient aux procès et interviendraient pour dénoncer les faux témoignages d'autres membres de la communauté ou la partialité de la part des juges. Contrairement à ces attentes, cependant, les Rwandais qui ont été témoins de procédures inéquitables ou biaisées ont décidé de ne pas parler parce qu'ils craignaient des répercussions potentielles (allant de poursuites pénales à l'ostracisme social) et au lieu de cela ils ont participé passivement au processus gacaca. Sans la participation active de la population, les procès ont été plus faciles à manipuler et n’ont pas toujours révélé la vérité sur les événements dans les communautés locales.
Un autre obstacle important àla réussite du processus gacaca a été la formation limitée fournie aux juges gacaca, dont la plupart n’avait que peu ou pas d'éducation formelle et, dans la grande majorité des cas, aucune expérience juridique ou formation formelle. Les juges n'étaient pas astreints à une règlementation sur les preuves (expliquer quels types de preuves sont admissibles et le niveau de preuve nécessaire pour condamner une personne) et au lieu de cela ils étaient censés s'appuyer sur le bon sens et les principes généraux d'équité. Les tribunaux ont eu à fournir les motifs de leurs décisions, mais ont été laissés libres d'apprécier les preuves comme ils l'entendaient. Cela a conduit à des résultats contradictoires dans des affaires différentes basées sur des faits similaires ; à des décisions erronées fondées, par exemple, sur une trop grande confiance à des ouï-dire (les paroles qu'une personne attribue à une autre qui n'est pas présente au procès), et à des condamnations fondées sur des preuves faibles. Le fait que les juges gacaca n’ont reçu aucune rémunération de l’État les a également rendus vulnérables à la corruption.
Jugées à l’origine par des tribunaux classiques, les affaires de viol liées au génocide ont été transférées aux tribunaux gacaca en mai 2008. De nombreuses victimes de viol ont fondé leur décision initiale d'engager des poursuites du violeur présumé sur le fait que les tribunaux classiques pourraient prendre des mesures pour respecter leur vie privée et pourraient si nécessaire garder confidentielle l'identité d'une femme. La décision du gouvernement de transférer leurs affaires aux tribunaux gacaca, impliquant par définition la communauté locale, les a prises par surprise et en a laissé quelques unes avec le sentiment d’avoir été trahies. Le SNJG a justifié cette décision en affirmant qu’un grand nombre des victimes de viol étaient mourantes du sida et que les tribunaux classiques étaient incapables de faire face à ces cas assez rapidement. Il a souligné que la décision était fondée sur les demandes de milliers de femmes qui ont été violées en 1994. Cependant, elle permettrait également au gouvernement rwandais d’achever tous les procès pour génocide le plus rapidement possible et de clore ce chapitre de son histoire. Bien que la loi ait prévu que les tribunaux gacaca entendent les affaires de viols à huis clos, les victimes craignaient toujours que la nature de proximité des tribunaux signifie que la population locale saurait de quoi traiteraient les procès à huis clos. D'autre part, certaines victimes de viol dont les cas ont été entendus par tribunaux gacaca à huis-clos ont déclaré que l'expérience avait été moins traumatisante que prévu.
L'une des graves lacunes du processus gacaca a été son incapacité à assurer une justice égale pour toutes les victimes de crimes graves commis en 1994. Entre avril et août 1994, des militaires du Front patriotique rwandais (FPR), qui a mis fin au génocide en juillet 1994 et a formé ensuite le gouvernement actuel, ont tué des dizaines de milliers de personnes. Ils ont également commis d'autres meurtres plus tard dans l'année, après que le FPR ait obtenu le contrôle total du pays. Les tribunaux gacaca n'ont pas poursuivi les crimes du FPR. Initialement, en 2001, les tribunaux gacaca avaient compétence sur les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre, en plus du génocide. Mais l'année suivante, alors que les tribunaux gacaca commençaient leur travail, le président Paul Kagame a mis en garde contre la confusion entre les crimes commis par les militaires du FPR et le génocide et a expliqué que les crimes du FPR étaient simplement des incidents isolés de vengeance, malgré les preuves du contraire. Des modifications apportées aux lois gacaca en 2004 ont retiré aux tribunaux leur compétence sur les crimes de guerre et une campagne nationale du gouvernement a suivi pour s'assurer que ces crimes ne soient pas abordés dans les gacaca. Plus de dix-sept ans après le génocide, les Rwandais qui ont souffert ou ont perdu des membres de famille aux mains du FPR sont toujours en attente de justice.
Alors que le processus gacaca tire à sa fin, le gouvernement rwandais est confronté à un autre défi : corriger les graves injustices qui ont eu lieu grâce à ce processus. De nombreux procès gacaca ont comporté des erreurs judiciaires ou de graves irrégularités de procédure, dont beaucoup n'ont pas été résolues par les procédures existantes d’appel gacaca. La reconnaissance par le gouvernement à la fin de 2010 de la nécessité de corriger les erreurs judiciaires est une étape positive. Toutefois, la proposition que de tels cas soient à nouveau entendus dans le système gacaca risque de reproduire les mêmes problèmes et de ne pas remédier à la situation. Un mécanisme plus approprié pourrait comporter une unité spécialisée au sein du système judiciaire classique, composée de juges professionnels ou d'autres professionnels juridiques formés, pour réexaminer les cas. Un traitement équitable et impartial de ces cas sera d'une importance primordiale pour l'héritage des juridictions gacaca et pour renforcer le système judiciaire rwandais à plus long terme.
II. Recommandations
Au gouvernement rwandais
- Annoncer une date limite définitive pour la clôture du processus gacaca et confirmer que tous les procès en suspens et nouveaux liés au génocide seront jugés par les tribunaux classiques.
- Demander au ministère de la Justice, en consultation avec le SNJG, de créer un mécanisme au sein des tribunaux classiques pour examiner les cas graves d’injustice qui se seraient produits dans le système gacaca.
- Ordonner aux responsables gouvernementaux et aux agents de l’État de ne pas intervenir dans les procédures des tribunaux classiques et gacaca, et de ne pas tenter d’influencer la prise de décisions.
- Ordonner à tous les agents de la police et de l’État de s’abstenir de procéder à des arrestations et détentions illégales ; engager des poursuites contre les agents suspectés de telles pratiques et indemniser les personnes arrêtées et détenues de façon illégale.
- Revoir la politique consistant à utiliser des camps pour les travaux d’intérêt général (ou « TIG ») et veiller, si possible, à ce que les TIG soient effectués dans la communauté locale, plutôt que dans des camps, afin de faciliter la réinsertion des prisonniers au sein de leurs communautés.
- Veiller à ce que les prisonniers condamnés et les personnes prenant part aux TIG soient libérés dès qu’ils ont purgé leur peine et indemniser les personnes qui n’ont pas été libérées dans les temps.
- Élargir la définition officielle de « rescapé du génocide » afin d’inclure les personnes qui ont survécu au génocide et ont été prises pour cible ou ont perdu des membres de leur famille (i) parce qu’elles-mêmes ou bien des membres de leur famille étaient Tutsis ou (ii) parce qu’elles se sont opposées aux meurtres ou ont essayé de protéger des Tutsis ; garantir que tous ces rescapés sont admissibles au programme géré par le gouvernement d’assistance aux rescapés du génocide (sous réserve de remplir les autres critères exigés).
- Fournir aux victimes de violences sexuelles une aide psychologique pour traiter les traumatismes, ainsi que d’autres programmes d’assistance.
- Ordonner l’ouverture d’enquêtes sérieuses et autoriser les poursuites judiciaires contre les membres du FPR auteurs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.
Aux autorités judiciaires rwandaises
- Créer une unité spécialisée au sein du système judiciaire classique, par exemple au sein de la Cour suprême, pour examiner les recours en appel des personnes accusées qui affirment avoir été victimes d’erreurs judiciaires ou de violations graves du droit à une procédure équitable dans le système gacaca ; élaborer un processus d’examen en deux parties qui offrirait : (i) une sélection initiale des appels basée sur certains critères prédéterminés et (ii) un examen des cas paraissant le mériter par des panels spécialisés, ayant à leur tête des juges professionnels (et non des juges du système gacaca) ou par d’autres professionnels juridiques formés. Ces juges professionnels pourraient prendre en considération une série de sources d’information (notamment les procès-verbaux des procès gacaca concernés ainsi que les arguments écrits des parties) et peuvent tenir au besoin des audiences brèves avant de prononcer une décision finale confirmant le jugement transmis par le tribunal gacaca ou révisant le jugement (et la peine prononcée) lorsqu’il apparaît qu’il y a eu des erreurs judiciaires. Les juges pourraient accorder la priorité aux appels de personnes purgeant encore (ou s’apprêtant à purger) des peines d'emprisonnement ou de travaux d’intérêt général.
- Veiller à ce que toutes les nouvelles allégations de génocide soient correctement examinées par des procureurs et des juges formés avant qu’une personne soit poursuivie devant les tribunaux classiques.
- Vérifier que personne n’a été poursuivi deux fois pour le même crime ; examiner toutes les condamnations où une personne a été jugée devant une juridiction gacaca et aussi dans un tribunal classique, ou dans au moins deux juridictions gacaca différentes en lien avec les mêmes événements, afin d’identifier et de rectifier les violations du principe de double incrimination.
- Examiner tous les procès au cours desquels les tribunaux gacaca ont condamné des personnes uniquement pour leur présence à des barrières pendant le génocide ; confirmer que chaque dossier comporte des preuves suffisantes de l’intention et de la conduite criminelle pour soutenir la condamnation.
- Engager des poursuites contre les personnes qui en accusent d’autres à tort.
- Mener des enquêtes et des poursuites contre les membres du FPR auteurs de crimes de guerre et crimes contre l’humanité, et les sanctionner de façon appropriée.
- Surveiller l’exécution des règles et réglementations carcérales relatives à la peine de « réclusion criminelle à perpétuité » afin de garantir que la peine est conforme aux normes nationales et internationales, y compris le droit des prisonniers à avoir des contacts réguliers avec d’autres prisonniers, en plus de visites de l’extérieur de la part de parents ou d’amis.
- Appliquer la proposition actuelle de commuer en peine d'emprisonnement avec sursis toute peine de prison restant à purger pour les condamnés qui ont suivi de façon satisfaisante le programme de TIG et permettre aux condamnés de rentrer chez eux.
- Veiller à ce que les archives du système gacaca, y compris la base de données constituée actuellement par le SNJG et la Commission nationale de lutte contre le génocide, soient mises à la disposition de toute la population sous une forme complète et facilement accessible.
Au pouvoir législatif rwandais
- Amender les lois sur le divisionnisme et l’idéologie du génocide afin de les mettre en conformité avec les normes internationales, en limitant l’étendue des comportements interdits et en exigeant une intention spécifique de la part de l’auteur, afin de garantir la liberté de parole et d’encourager les personnes à témoigner librement dans les procédures judiciaires.
- Inclure dans le projet de code pénal une disposition prévoyant des sanctions pour les agents de l’État qui intimident ou bien soudoient des témoins ou des juges, s’abstiennent d’exécuter des ordres judiciaires ou bien obtiennent des déclarations ou des aveux sous la menace ou la contrainte.
Aux bailleurs de fonds
- Encourager le gouvernement rwandais à créer un mécanisme pour réviser les jugements des tribunaux gacaca comportant des injustices graves.
- Soutenir ce nouveau mécanisme de révision par un financement et une expertise technique.
- Continuer à soulever auprès des autorités rwandaises les affaires impliquant des erreurs judiciaires ou des violations du droit à une procédure équitable et insister pour qu’elles y portent remède.
- Porter à l’attention du SNJG les affaires passées posant problème qui n’ont pas été dûment corrigées, de sorte qu’elles puissent être réexaminées et rectifiées.
- Fournir au système judiciaire rwandais des fonds et une assistance technique supplémentaires afin de renforcer l’Unité d’assistance aux victimes et aux témoins, et de garantir aux témoins à charge et à décharge une égalité d’accès aux services de cette unité.
- Appeler le gouvernement à mettre fin à toute ingérence dans les procédures judiciaires du système gacaca et autres tribunaux et à sanctionner les agents de l’État qui abusent de leur pouvoir ou qui tentent d’influencer les affaires judiciaires.
- Veiller à ce que l’examen externe du processus gacaca, actuellement financé par l’Union européenne (UE) et les Pays-Bas, fournisse une évaluation sérieuse et indépendante, assortie de recommandations pour répondre aux lacunes et pour corriger les erreurs judiciaires.
Aux pays envisageant de recourir à des mécanismes de résolution des conflits similaires au système gacaca pour juger des crimes graves
- Veiller à ce que les droits à un procès équitable soient garantis.
- Offrir à toutes les personnes accusées et aux victimes un accès à un conseil juridique avant le procès.
- Garantir un accès égal à la justice pour toutes les victimes de crimes commis par tous les camps durant la période de conflit concernée.
- Fournir une protection suffisante aux témoins, aux rescapés et aux juges, et veiller à ce que la police et le ministère public enquêtent immédiatement sur les allégations d’intimidation ou de corruption.
- Garantir un environnement dans lequel les témoins puissent témoigner ouvertement et librement, sans crainte de répercussions, et dans lequel la liberté d’expression soit respectée.
- Créer un mécanisme chargé d’examiner les accusations avant d’entamer des poursuites afin de se prémunir contre un détournement du processus judiciaire de la part de citoyens ou d'autorités gouvernementales.
- Établir des exigences claires et des directives écrites sur la charge de la preuve (qui devrait incomber au procureur ou à l’accusation), les normes de preuve (avec tous les éléments substantiels nécessaires pour inculper une personne), et la recevabilité des preuves.
- Vérifier minutieusement les candidatures des juges potentiels et imposer des conditions de niveau d’études ; fournir une formation adaptée préalablement à tous les procès et tout au long du processus.
- Assurer aux juges un paiement ou des avantages afin de réduire le risque de corruption.
- Introduire des mécanismes permettant d’assurer une observation indépendante des procès, en mettant l’accent sur l’identification de la corruption et de la manipulation de procès de la part de particuliers ou d'autorités gouvernementales.
- Accorder la compétence sur les délits de violences sexuelles à des tribunaux classiques ou spécialisés situés en dehors des communautés locales des victimes.
- Désigner un médiateur ou autre organisme indépendant de surveillance pour recevoir les plaintes et superviser des enquêtes sérieuses sur les allégations d’erreurs de droit, de violations du droit à une procédure équitable et autres abus.
III. Méthodologie
Human Rights Watch a suivi de près le travail des tribunaux gacaca depuis leur création en juin 2002. L’organisation a observé toutes les phases du processus gacaca : la collecte d'information, la classification des suspects en catégories, les procès, les appels, et la révision finale des jugements. Human Rights Watch a suivi plus de 350 procès gacaca au total, certains depuis les premières audiences jusqu’au dernier examen ou étape de révision, et d’autres seulement aux étapes ultimes d’appel ou de révision. Nombre de ces procès se sont poursuivis sur plusieurs années. Les affaires ont été choisies dans différentes parties du pays, les observateurs de procès étant répartis sur les quatre provinces du Rwanda et dans la capitale, Kigali.
Les chercheurs et consultants de Human Rights Watch qui ont observé et traduit les audiences gacaca ont consacré plus de 2 000 journées à observer des procès, à mener des entretiens et à enquêter sur des affaires sur une durée de huit ans. Les chercheurs ont mené des centaines d’entretiens auprès de participants de toutes les parties prenantes du processus gacaca, y compris des personnes accusées, des rescapés du génocide, des témoins, d’autres membres des communautés, des juges, des coordinateurs de districts, ainsi que des représentants du gouvernement au niveau local et national.
Human Rights Watch a rencontré en privé des agents du Service National des Juridictions Gacaca (SNJG) et d’autres secteurs du ministère de la Justice, ainsi que des bailleurs de fonds internationaux soutenant le programme gacaca. L’organisation a également participéde manière collective à des réunions de consultation plus larges. Human Rights Watch s’est aussi concerté régulièrement avec d’autres organisations non gouvernementales (ONG) observant le système gacaca et, parfois, a entrepris avec ces ONG des initiatives conjointes pour soulever des sujets de préoccupation particuliers auprès des autorités du SNJG. En outre, Human Rights Watch a rencontré des membres de la Commission nationale des droits de la personne pour aborder des cas particuliers.
Le 30 mars 2011, Human Rights Watch a écrit au ministre de la Justice et à la secrétaire exécutive du SNJG, en leur adressant un résumé des conclusions du présent rapport ainsi que ses principales recommandations. Human Rights Watch a invité le gouvernement à formuler ses commentaires afin que son point de vue soit reflété dans la version finale du rapport. Le 5 mai 2011, le ministre de la Justice a répondu à la lettre de Human Rights Watch en formulant ses commentaires par écrit. Une copie des commentaires du ministre de la Justice ainsi qu’une copie de la lettre de Human Rights Watch sont annexées à ce rapport.
Ce rapport a pour objectif de présenter un échantillon représentatif des conclusions de Human Rights Watch sur le système gacaca relatives à des questions d’une importance essentielle. Étant donné le grand nombre de procès observés et d’entretiens menés, Human Rights Watch n’est pas en mesure d’inclure les références de tous les cas pour lesquels des points préoccupants ou bien des abus ont été identifiés. Un petit nombre de cas présentant de multiples irrégularités sont utilisés tout au long du rapport pour illustrer des tendances plus larges observées au cours des recherches effectuées pour le rapport, et pour éclairer à quel point les procès ont souvent pâti de nombreuses erreurs de procédure.
Ce rapport fournit autant de détails que possible sur les procès observés par Human Rights Watch, notamment les noms des affaires lorsque c’est possible. Nombre de personnes interrogées ont déclaré craindre des représailles de la part des autorités pour avoir parlé ouvertement à Human Rights Watch et n’ont accepté de commenter leurs expériences personnelles et le système gacaca dans son ensemble qu’à condition que la confidentialité leur soit garantie. L’identité et d’autres détails concernant certaines personnes interrogées ne sont donc pas mentionnés.
IV. Le génocide rwandais et la décision d'utiliser le système gacaca
Entre avril et juillet 1994, le Rwanda a connu la période de violence la plus sombre et la plus brutale de son histoire. Le 6 avril 1994, le président Juvénal Habyarimana revenait de négociations de paix en Tanzanie avec le Front patriotique rwandais (FPR) ― un groupe rebelle composé essentiellement de réfugiés tutsis rwandais en Ouganda ― quand l'avion dans lequel il voyageait a été abattu au-dessus de Kigali par des assaillants inconnus. Toutes les personnes à bord ont été tuées. En quelques heures, des extrémistes hutus ont pris le contrôle du gouvernement et de l’armée et ont commencé à exécuter l'élite politique susceptible de s'opposer à leurs projets.
Aidés par des dizaines de milliers de militaires, des milices locales et des citoyens ordinaires, les extrémistes ont lancé une campagne génocidaire de trois mois à l'échelle nationale pour éliminer la population minoritaire tutsie du pays. Plus d'un demi-million de Tutsis et de Hutus qui ont essayé d'arrêter les massacres ou de protéger les Tutsis ont été tués tandis que le monde regardait. Pendant ce temps, le FPR a pénétré au Rwanda depuis l'Ouganda et a commencé à conquérir des parties du pays. À la mi-juillet, le FPR avait mis fin au génocide, en prenant le contrôle de Kigali et du reste du pays.
Dix-sept ans plus tard, le FPR est toujours au pouvoir et les séquelles du génocide pèsent toujours lourdement sur le pays. De nombreux Rwandais continuent de se voir à travers une lentille ethnique et se méfient des personnes d'origine ethnique différente. Les gens parlent souvent des proches qu'ils ont perdus ou des dommages qu'ils ont subis en 1994 et sont en proie à des traumatismes et des mémoires vives du génocide.
Rendre la justice pour les atrocités de masse est un défi de taille, et l'ampleur et la complexité du génocide auraient dépassé même le système judiciaire le mieux équipé. Au Rwanda ― où le système judiciaire était sous-financé avant le génocide ― la tâche a été rendue encore plus difficile en raison du grand nombre de juges et autres membres du personnel judiciaire tués pendant le génocide et de la destruction d’une grande partie des infrastructures du pays.
Des dizaines de milliers de suspects ont été arrêtés après le génocide, souvent sur la base d'une seule accusation non vérifiée de participation au génocide. Le nombre de détenus a augmenté rapidement et a vite débordé le système carcéral. À octobre 1994, un total estimé de 58 000 personnes étaient détenues dans un espace carcéral prévu pour 12 000,[2]et en 1998, le nombre de détenus avait atteint environ 130 000.[3] L’extrême surpopulation et le manque d'hygiène, de nourriture et de soins médicaux ont créé des conditions qui ont été universellement reconnues comme inhumaines et qui ont coûté des milliers de vies.[4] De nombreuses personnes ont été détenues pendant des années sans inculpation et sans que leur cas soit étudié.[5].
En décembre 1996, le gouvernement a commencé à poursuivre les suspects de génocide devant les tribunaux classiques. Au début de 1998, seulement 1 292 personnes avaient été jugées et relativement peu de gens avaient avoué leurs crimes.[6] Les autorités se sont rendu compte qu’à ce rythme, il faudrait des décennies pour juger le grand nombre de détenus. Pourtant, elles ont refusé les propositions de juges étrangers et d'autres juristes de travailler aux côtés des autorités judiciaires du Rwanda pour aider à accélérer le processus.[7]
En janvier 1998, le vice-président Paul Kagame a annoncé que le Rwanda ne pouvait plus payer les 20 millions de dollars par an nécessaires pour subvenir à l'énorme population carcérale. Le gouvernement a proposé que les criminels les plus notoires soient exécutés (la peine de mort étant la peine maximale pour génocide à l'époque) et que d'autres soient jugés par un mécanisme judiciaire coutumier, certains étant condamnés à des peines de prison et d'autres purgeant des peines de travail forcé dans le cadre de projets de travaux d’intérêt général.[8] Le 22 avril 1998, 22 personnes reconnues coupables de génocide ont été exécutées ; il s’agissait des premières et uniques exécutions formelles effectuées en lien avec le génocide. La plupart de ces personnes avaient été condamnées dans des procès sommaires et inéquitables.[9]
Le gouvernement a alors mis en place une commission chargée d'évaluer les problèmes que rencontrait le pays et de proposer des moyens d'y remédier. Entre mai 1998 et mars 1999, la commission s’est réunie chaque semaine pour discuter de questions d'unité, de démocratie, de justice, de sécurité et d'économie et a consulté des représentants de la société rwandaise sur ces questions. Une des préoccupations examinées était de savoir comment assurer la justice pour le génocide. La commission a envisagé la possibilité de moderniser le mécanisme coutumier de règlement des différends des tribunaux gacaca afin de lui permettre de traiter les cas liés au génocide. En août 1999, la commission a jeté les bases pour le nouveau système gacaca.[10] Son rapport a fourni un aperçu des objectifs politiques plus larges du gouvernement et comprenait un éventail de points de vue, dont certains étaient sceptiques quant à la proposition d'utiliser le système gacaca.
Les discussions au sein de la commission étaient fortement axées sur les notions de responsabilité et d'unité nationale.[11] Trois principaux arguments ont été avancés pour l'utilisation du système gacaca pour les procès de génocide. Premièrement, il permettrait d'accélérer le processus de reddition de la justice pour le génocide et allègerait la surpopulation carcérale. La commission a estimé que, sans le gacaca, il faudrait aux tribunaux classiques environ 200 ans pour juger ces affaires. Deuxièmement, comme les tribunaux classiques, les juridictions gacaca briseraient le cycle de l'impunité en exigeant que des individus répondent de leurs crimes, plutôt que des familles entières ou des communautés plus grandes. Troisièmement, la nature participative du processus gacaca pourrait encourager un rapprochement au sein des communautés locales. Les procès se déroulant à l'endroit même où les crimes ont eu lieu et sous les yeux des voisins, des familles et des amis, les communautés locales joueraient un rôle important dans les procédures et veilleraient à ce que justice soit faite, ce qui à son tour, leur donnerait une plus grande appropriation du processus.
Certains des membres de la commission, toutefois, ont exprimé des préoccupations quant à savoir si le système gacaca était le meilleur moyen de résoudre les affaires liées au génocide.[12] Ils craignaient que l’utilisation des tribunaux gacaca ― traditionnellement réservés aux petits litiges civils ― aille minimiser la gravité des crimes. Certains ont également demandé si les citoyens ordinaires, souvent sans éducation et sans formation juridique formelle, avaient les compétences nécessaires pour gérer les procès et pour appliquer les lois nationales correctement. D'autres craignaient que les parents et amis ayant des liens étroits avec la communauté soient indûment influencés et fassent preuve de partialité dans leurs décisions, créant ainsi de nouveaux conflits et de nouvelles tensions.
Certains membres ont exprimé leur inquiétude que des témoins ayant des comptes personnels à régler ou que des malfaiteurs ayant des crimes à cacher ne donnent de faux renseignements. Ils ont souligné que dans certaines parties du pays, il n'y avait plus de survivants pour témoigner ou pour contester un faux témoignage. Enfin, certains membres ont craint que les procès gacaca ne satisfassent pas les normes internationales de procès équitable. Les membres de la commission qui ont exprimé des réserves ont suggéré que le système gacaca serait mieux utilisé comme outil d'enquête pour recueillir des preuves au niveau local qui pourraient aider les tribunaux classiques.[13] Un grand nombre de ces préoccupations se sont avérées être bien-fondées.
Les partisans du système gacaca ont argumenté contre ces réserves et l’ont finalement emporté.[14] Ils ont souligné que l'utilisation du système gacaca pour traiter les crimes de génocide ne banaliserait pas les crimes, mais obligerait plutôt les communautés à faire face aux crimes au niveau où ils ont été commis et aiderait à mettre fin à l'impunité au niveau local. Ils ont également fait valoir que les citoyens ordinaires pouvaient être formés pour appliquer correctement la loi et qu’ils pourraient recevoir l'assistance de juristes si nécessaire.
Certains membres ont indiqué que la tenue des procès en public permettrait de réduire le risque que les juges prennent parti et dissuaderait les membres de la communauté de faire de faux témoignages. De leur point de vue, les avantages de l'utilisation du système gacaca pour individualiser la culpabilité, pour dissiper l'idée que tous les Hutus ont commis un génocide, et pour donner à la population ordinaire un rôle actif dans la prestation de la justice pour le génocide l'emportaient largement sur les limitations possibles.
En juin 2002, le vice-président Paul Kagame a officiellement lancé les juridictions gacaca pour juger les affaires liées au génocide et a annoncé cinq objectifs fondamentaux :
- Révéler la vérité sur ce qui s'est passé ;
- Accélérer les procès du génocide ;
- Éradiquer la culture de l'impunité ;
- Réconcilier les Rwandais et renforcer leur unité ; et
- Prouver que le Rwanda a la capacité de résoudre ses propres problèmes.[15]
V. Phase initiale du système gacaca
Le système gacaca puise son inspiration dans les tentatives passées des communautés locales pour régler des différends. Toutefois, dans sa conception du système gacaca pour les affaires liées au génocide, le gouvernement rwandais a apporté des changements importants au modèle traditionnel, le transformant en un mécanisme judiciaire plus formel et administré par l’État. Le travail des tribunaux a commencé par étapes, permettant des amendements et autres ajustements du système avant que le processus gacaca ne soit étendu à tout le pays en 2005. Alors qu’initialement il était prévu qu’il se termine en 2007, la date de son achèvement a été reportée à plusieurs reprises. Au moment de la rédaction de ce rapport, la date où le processus sera définitivement clôturé n’a pas encore été fixée.
Différences entre les systèmes gacaca coutumier et contemporain
Le gouvernement rwandais a décrit sa décision d’utiliser le système gacaca pour les affaires liées au génocide comme un « retour à nos méthodes traditionnelles de règlement des conflits. »[16] Toutefois, en dehors du nom et de certaines caractéristiques générales, la version de gacaca utilisée pour juger des affaires liées au génocide a peu de ressemblances avec la forme traditionnelle.
Il existe peu de documentation sur les gacaca avant 1994. On pense que cette pratique est née dans la période précoloniale mais a continué à être utilisée pendant la colonisation et après l’indépendance en 1962. Dans le système gacaca coutumier, les aînés respectés de la communauté, connus sous le nom d’inyangamugayo (littéralement « ceux qui détestent l’opprobre ») se réunissaient à la demande pour régler des différends familiaux et interfamiliaux liés aux biens, aux héritages, aux dommages corporels et aux relations conjugales. Des questions plus graves telles que le vol de bétail, le meurtre ou autres crimes étaient laissées à la compétence des chefs communautaires ou du représentant du roi.
Dans le mécanisme coutumier gacaca, les réunions n’impliquaient habituellement que les aînés de la communauté, les parties ayant un différend, leurs proches et les voisins immédiats. Ces rencontres étaient dominées par les hommes plus âgés étant donné que les femmes n’étaient pas autorisées à prendre la parole. La pratique coutumière gacaca mettait en avant le rétablissement de l’harmonie sociale, la sanction du coupable et l’indemnisation de la victime revêtant une moindre importance. La sanction n’était pas individualisée, sachant que les membres de la famille et du clan de l’accusé étaient également tenus pour responsables. Souvent, la partie perdante devait fournir de la bière à la communauté comme moyen de réconciliation.
La version moderne du système gacaca a conservé le rituel des auditions des affaires au niveau local, mais s’en est écartée de cinq façons principales. Premièrement, le système gacaca a traité des crimes graves — le génocide étant sans doute le plus grave des crimes — plutôt que des litiges civils mineurs. Deuxièmement, il était fondamentalement répressif ou punitif par nature, à l’exception des cas impliquant des délits contre la propriété. Les tribunaux gacaca pouvaient prononcer des peines de prison allant de courtes durées jusqu’à la peine de « réclusion criminelle à perpétuité ».[17] La réconciliation et le rétablissement de l’ordre social restaient des objectifs du système gacaca contemporain, mais ils étaient secondaires au processus punitif.[18]
Troisièmement, le processus gacaca était régi par une institution officielle de l’État relevant du ministère de la Justice (le SNJG) et était donc intimement lié à l'appareil d'État chargé des poursuites et de l'incarcération. Quatrièmement, le gacaca appliquait le droit codifié plutôt que le droit coutumier. Enfin, les juges gacaca n’étaient pas des aînés de la communauté mais plutôt des membres élus de la communauté (inyangamugayo) et étaient souvent relativement jeunes. Les femmes représentaient aussi un pourcentage important des juges.
Le cadre juridique régissant les cas de génocide et les tribunaux gacaca
Première loi rwandaise sur le génocide
En 1996, le Parlement rwandais a fourni le cadre juridique permettant aux tribunaux classiques de juger les crimes de génocide commis entre 1990 et 1994.[19] La loi sur le génocide contenait deux caractéristiques novatrices.
Premièrement, cette loi classait les suspects en quatre groupes : la catégorie 1 comprenait les planificateurs, les dirigeants, les organisateurs et les incitateurs du génocide, ainsi que les « meurtriers de grand renom » et les violeurs ; la catégorie 2 comprenait les auteurs d’homicides ; la catégorie 3 comprenait les individus qui avaient tué ou infligé des dommages corporels sans intention de tuer ; et la catégorie 4 comprenait les individus qui avaient commis des infractions contre les propriétés.[20] La loi prévoyait la peine capitale pour ceux de la première catégorie, et des peines de prison variables assorties de dommages et intérêts pour les autres catégories.[21]
Deuxièmement, cette loi introduisait la pratique de droit commun relative à la négociation des peines, autorisant les tribunaux à réduire les peines des personnes ayant avoué leurs crimes et désigné leurs complices.[22] Ces dispositions avaient pour but d’accélérer les procès des suspects de génocide, mais au début très peu de personnes ont avoué leurs crimes. De ce fait, le gouvernement s’est mis en quête de solutions alternatives pour faire face à l’énorme arriéré de dossiers de génocide.
Les lois gacaca
En 2001, le Parlement a adopté une loi créant les tribunaux gacaca, en leur donnant compétence pour juger les crimes graves commis entre le 1er octobre 1990 et le 31 décembre 1994, ainsi que la capacité de juger tous les suspects à l’exception de ceux de la catégorie 1 (dont les affaires sont restées devant les tribunaux classiques).[23] La définition de « génocide » dans cette loi suivait largement la définition contenue dans la Loi sur le Génocide, mais exigeait aussi que les violations soient commises avec une intention génocidaire pour pouvoir être qualifiées de génocide.[24]
Depuis 2001, le Parlement a amendé la loi gacaca quatre fois, généralement pour simplifier et accélérer la manière dont les tribunaux traitent les affaires.[25] La loi de 2004, par exemple, a diminué le nombre de niveaux de juridictions gacaca, réduit le nombre de catégories de quatre à trois, et ramené de 19 à 7 le nombre de juges requis pour entendre les affaires.[26]
Selon la loi de 2004, les tribunaux gacaca devaient fonctionner à deux niveaux locaux (les niveaux de la cellule et du secteur) dans chaque juridiction. Les tribunaux au niveau de la cellule étaient chargés de la phase de collecte d’information et classaient les suspects. Ils jugeaient aussi les affaires de catégorie 3 relatives aux infractions contre les biens. Tous les autres procès liés au génocide (concernant les délits de la catégorie 2 et ensuite de la catégorie 1) se tenaient au niveau du secteur. Des tribunaux gacaca séparés au niveau du secteur traitaient tous les appels.[27]
La loi de 2007 a augmenté le nombre de tribunaux dans chaque région et leur a donné compétence pour juger les assassins notoires, classés auparavant dans la catégorie 1, qui jusqu’alors étaient restés sous la juridiction des tribunaux classiques.[28] Cette loi déclarait également que les juges pouvaient statuer du moment que cinq juges sur les sept étaient présents.[29]
Puis, en 2008, le gouvernement a décidé de transférer aux juridictions gacaca la plupart des affaires de génocide en instance dans les tribunaux classiques afin d’alléger l’arriéré accumulé dans ces tribunaux.[30] Depuis lors, la compétence des tribunaux classiques n’a couvert que les cas des personnes accusées d’être des meneurs et les cas des individus occupant des positions officielles au niveau de la préfecture (province) ou à un niveau supérieur.
Étapes possibles d’une affaire gacaca
Contrairement aux tribunaux classiques, les tribunaux gacaca ne comprenaient pas de procureurs. Les affaires reposaient largement sur des accusations lancées par une « partie civile », généralement la victime du crime ou bien des membres de sa famille. Un groupe de cinq à sept juges entendait chaque cas, l’un des juges présidant les procédures. Le jugement était rendu à la majorité.
Phase pilote du système gacaca
Les tribunaux gacaca contemporains ont été lancés le 18 juin 2002 dans 12 secteurs pilotes à travers le pays.[31] La phase pilote s’est déroulée en trois étapes :
La phase de collecte d’information concernait les membres de la communauté âgés de plus de 18 ans se réunissant chaque semaine en « assemblée générale » pour rassembler des informations sur les personnes qui vivaient dans la cellule en 1994, les personnes tuées (et si possible si elles l’ont été dans cette cellule ou bien en dehors), les personnes dont les biens ont été endommagés, et celles qui ont participé aux meurtres et aux destructions.
Une fois toutes les informations pertinentes collectées, les tribunaux au niveau de la cellule procédaient à la catégorisation des suspects suivant la gravité des crimes présumés. Les suspects de la catégorie 3, accusés de dégâts matériels et de pillage, devaient être libérés de prison et leurs dossiers envoyés aux tribunaux au niveau de la cellule pour y être traités. Les suspects des catégories 1 et 2 devaient rester en détention, les suspects de la catégorie 2 devant être jugés par les tribunaux gacaca au niveau du secteur et les suspects de la catégorie 1 devant être transférés au parquet pour être jugés dans des tribunaux classiques.
Ce n’est qu’à la fin 2004, deux ans et demi après le début de la phase pilote, que les deux premières étapes ont été achevées et que les tribunaux gacaca ont été prêts à passer à la phase du procès. Au lieu d’attendre que les phases de collecte d’information et de catégorisation des suspects soient achevées à l’échelle nationale, le gouvernement a autorisé les juridictions pilotes à commencer les procès le 10 mars 2005.[32] Les procès se sont déroulés de façon expéditive avec plus de 650 personnes jugées au cours des six premières semaines.[33]
Les procès se déroulaient en général sur l’herbe, devant le bureau administratif local de la communauté, même si parfois des sessions ont eu lieu dans des salles de classe ou autres bâtiments publics (en particulier pendant la saison des pluies). Les juges ceints d’écharpes officielles étaient assis sur des bancs à l’avant et disposaient souvent d’une table placée devant eux de sorte qu’au moins l’un d’entre eux puisse prendre des notes sur les procédures. Les personnes accusées étaient assises d’un côté des juges ou face à la communauté, et la partie civile de l’autre côté. Les parties intéressées se levaient et se tenaient face aux juges et à la communauté pendant qu’elles témoignaient. Les membres de la communauté se réunissaient sur l’herbe et sous les arbres à proximité face aux juges et pouvaient parler librement après que les témoins avaient achevé leurs déclarations. Les sessions gacaca pouvaient durer d’une heure jusqu’à une journée entière, certains procès clôturés en une seule session et d’autres nécessitant plusieurs sessions hebdomadaires.
Mise en œuvre du système gacaca au niveau national
Le gouvernement a lancé la phase de collecte d’information au niveau national le 15 janvier 2005.[34] Il y a eu un changement important de procédure par rapport à la phase pilote. Au lieu de collecter les informations lors de réunions hebdomadaires de la communauté, le SNJG a chargé les autorités locales connues sous le nom de nyumbakumi (en charge de « 10 ménages ») de collecter les informations.[35] Ces autorités locales ont recueilli les informations en réunissant des petits groupes ou en faisant du porte-à-porte, et ont ensuite présenté les accusations écrites à l’ensemble de la communauté pour vérification. Il n’y avait pas de véritable débat de la communauté sur la nature ou la véracité des accusations au cours du processus de vérification. Les modifications étaient conçues pour accélérer la collecte des informations pertinentes et pour rendre le processus plus efficace. Toutefois, les nouvelles mesures ont limité la transparence du processus et ont facilité pour les autorités et autres personnes travaillant avec elles la fabrication d’accusations fausses ou mal documentées contre des individus à des fins personnelles ou politiques.[36] Par conséquent, l’utilisation des nyumbakumi a compromis l’intégrité de la phase de collecte d’informations à travers le pays.
À la fin de la phase de collecte d’informations près de 18 mois plus tard, le SNJG faisait état d’accusations portées contre 818 564 personnes, réparties dans les catégories suivantes :[37]
Catégorie 1 * |
77 269 |
Catégorie 2 |
432 557 |
Catégorie 3 |
308 738 |
Total |
818 564 |
Sur ce total, plus de 100 000 suspects seraient décédés ou vivraient en dehors du Rwanda.[38] Une fois les personnes classées dans la catégorie 1 (devant être jugées par les tribunaux classiques) retirées de cette liste, les juridictions gacaca se retrouvaient face à une charge de travail de 610 028 personnes.[39]
Les procès ont commencé à l’échelle nationale le 15 juillet 2006 dans plus de 12 000 juridictions.[40] Trois mois plus tard, le SNJG indiquait que 16 801 accusés avaient été jugés, dont 2546 avaient été acquittés.[41]À décembre 2006, le nombre de jugements était passé à près de 40 000.[42] Le ministre de la Justice Tharcisse Karugarama a annoncé que tous les procès seraient achevés d’ici la fin de l’année 2007.[43]
Reports répétés de la date de clôture du processus gacaca
L’objectif initial était peut-être trop ambitieux. À la fin février 2007, les tribunaux gacaca n’avaient jugé que 50 000 affaires — un nombre apparemment important, mais représentant une faible proportion du total global.[44] Le rythme relativement lent des procès, conjugué à de nouveaux cas surgissant dans tout le pays, rendaient peu probable que les tribunaux gacaca puissent respecter la date limite de décembre 2007. Le Parlement a tenté de remédier à la situation en adoptant une nouvelle loi en mars 2007 qui autorisait les juridictions gacaca à avoir de multiples tribunaux.[45] Ce changement — qui a permis à de multiples procès de se dérouler dans une communauté donnée en même temps — a accéléré les procès mais a eu pour résultat que des témoins et parties intéressées potentiels ont dû parfois choisir de participer entre différents procès.
La pression s’est faite plus forte sur les juges gacaca tandis que la date limite approchait, et les procès ont commencé à se dérouler à une vitesse alarmante, certaines personnes se retrouvant condamnées à la prison à perpétuité lors de procès durant moins d’une heure. Les groupes de défense des droits humains observant le processus ont exprimé la préoccupation que la qualité de prise de décision était sacrifiée au nom de la rapidité.[46]
Le SNJG a finalement réalisé qu’il ne pourrait pas respecter le délai fixé et l’a repoussé à 2008.[47]À la fin du mois de septembre 2008, il a annoncé qu’il avait enregistré 1 127 706 cas (concernant des suspects des catégories 1et 2), dont seulement 4 679 étaient en instance dans les tribunaux gacaca.[48] Toutefois, des accusations de génocide ont continué à surgir et ont donné lieu à de nouveaux dossiers.[49]
Pendant ce temps, les affaires de génocide devant les tribunaux classiques ont progressé lentement avec seulement 222 affaires jugées entre janvier 2005 et mars 2008.[50] Réalisant qu’à ce rythme il faudrait des dizaines d’années pour achever les procès de la catégorie 1, le Parlement a transféré aux juridictions gacaca la plupart des affaires restantes de catégorie 1 en juin 2008. Le SNJG a indiqué que 90 pour cent des affaires transférées (au moins 8 000 cas) concernaient des viols ou des violences sexuelles et se dérouleraient à huis clos.[51] Le SNJG a annoncé que tous les procès gacaca seraient achevés d’ici juin 2009, mais a par la suite prolongé le délai jusqu’à décembre 2009, puis à nouveau jusqu’à avril 2010.[52] Le SNJG a annoncé l’achèvement de tous les procès gacaca en juillet 2010, mais trois mois plus tard, il a indiqué de façon surprenante que le processus gacaca allait se poursuivre.[53] Au moment de la rédaction de ce rapport, le SNJG a signalé l’achèvement du nombre suivant d’affaires :[54]
Catégorie 1 |
15 263 |
Catégorie 2 |
383 118 |
Catégorie 3 |
838 975 |
Total |
1 237 356 |
La phase finale du processus gacaca
L’annonce du SNJG, en octobre 2010, que le processus gacaca allait continuer a surpris de nombreuses personnes qui croyaient que ce processus avait déjà pris fin. La décision de prolonger le processus gacaca a été prise après une réunion de septembre 2010 entre des représentants du ministère de la Justice, du SNJG, du Bureau de l’Ombudsman, de la Commission nationale des droits de la personne (CNDP), et du ministère de l'Administration locale, qui avaient tous reçu des plaintes de citoyens à propos des gacaca.[55] Un rapport confidentiel adressé par la CNDP au Président Kagame, citant plus de 25 cas de grave injustice, ainsi qu’un autre rapport gouvernemental interne préparé par le bureau de l’Ombudsman, citant plus de 230 plaintes reçues en lien avec les gacaca, ont peut-être servi de catalyseurs à cette réunion.[56] La réunion s’est conclue sur un accord prévoyant que toutes les institutions nationales transmettraient leurs plaintes et dossiers gacaca au SNJG au plus tard début novembre 2010 et que le SNJG mettrait en œuvre une procédure pour examiner ces plaintes et toutes autres qu’il aurait reçues auparavant.[57]
Selon le ministre de la Justice, en mai 2011 le nombre cumulé de demandes de révision reçues par les institutions gouvernementales s’élevait à près d’un millier.[58] En mars 2011, le porte-parole du SNJG a indiqué à Human Rights Watch que le SNJG avait identifié 40 cas qui méritaient un examen supplémentaire.[59] Le SNJG n’a pas publiquement divulgué les critères utilisés pour déterminer le choix des cas méritant un examen, ni expliqué la manière dont les cas sont examinés. Une fois que le SNJG aura terminé son examen des dossiers, il prévoie de renvoyer aux juridictions gacaca les affaires méritant une révision pour une nouvelle audience et d’éventuelles mesures correctives.[60]
VI. Concilier les pratiques de résolution de conflit communautaires avec les normes de procès équitable
La question de savoir comment régler rapidement l'arriéré des affaires liées au génocide, sans compromettre les droits de procès équitable, s’est trouvée au centre des discussions sur le système gacaca pendant des années. Le gouvernement rwandais a choisi le système gacaca parce qu’il permettrait la tenue de procès à la fois rapides et informels. Néanmoins le gouvernement a dû faire face à la lourde tâche de concilier ces avantages avec des normes plus formelles de procès équitable inscrites dans le droit rwandais et dans les traités internationaux auxquels le Rwanda est un État partie. Le gouvernement a fait un certain nombre de compromis substantiels, en particulier en ce qui concerne les droits des accusés, les qualifications des juges et les normes juridiques applicables. Il a estimé que la transparence du processus gacaca et la participation de toute la population légitimeraient ce processus et protègeraient les droits de tous les participants, rendant inutiles les garanties formelles de procès équitable. Human Rights Watch estime toutefois que ces compromis n’ont pas protégé suffisamment les droits des parties et ont conduit dans de nombreux cas à des procès inéquitables.
Droits internationaux à un procès équitable limités dans les juridictions gacaca
La constitution rwandaise, les lois nationales et les traités internationaux auxquels le Rwanda est un État partie garantissent certains droits basiques à un procès équitable.[61] Il s’agit notamment du droit à un avocat, le droit d’être présumé innocent, le droit à être informé des charges qui pèsent sur la personne et d'avoir suffisamment de temps pour préparer sa défense, le droit d'être présent à son procès et de se confronter aux témoins, le droit à ne pas s’accuser soi-même, le droit de ne pas être jugé deux fois pour le même crime, et le droit de ne pas être exposé à une arrestation et une détention arbitraires.
Le gouvernement rwandais a tenté expressément ou implicitement de garantir certains de ces droits mais en a modifié d’autres, tels que le droit d'avoir suffisamment de temps pour préparer sa défense. D'autres droits, tels que le droit à un avocat, ont été entièrement sacrifiés afin de parvenir à une résolution rapide des affaires. En 2009, le Comité des droits de l’homme de l’ONU a évalué la conformité du Rwanda avec ses obligations au regard du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et a conclu que le système gacaca ne fonctionnait pas en accord avec les règles fondamentales de procès équitable.[62] Le Comité a soulevé des préoccupations particulières à propos de la protection des droits de l’accusé et de l’impartialité des juges.[63] La Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l'homme, Louise Arbour, a exprimé des préoccupations relatives au respect des procédures lors de sa visite au Rwanda en mai 2007, évoquant la « précipitation inquiétante » des procès, le manque de formation juridique pour les juges gacaca, et les lourdes peines infligées aux personnes condamnées.[64] Le gouvernement rwandais a pour l’essentiel ignoré ces critiques et a exprimé clairement, dans des discussions avec les bailleurs de fonds et les organisations de défense des droits humains, que le respect de ses obligations internationales dans ce contexte n’était pas sa toute première priorité.
Le droit à un avocat
Tant le droit rwandais que le droit international garantissent le droit à l’assistance d’un avocat.[65] Les juridictions gacaca restent une exception à cette règle, l’accusé n’ayant aucun accès à un conseil à aucun moment de la procédure. Le droit à un conseil n’est pas expressément réduit dans aucune des lois gacaca, mais le SNJG a précisé à maintes reprises que cette représentation n’était pas autorisée.[66]
Le gouvernement a justifié sa décision d'exclure les avocats de la défense des tribunaux gacaca par trois motifs. Premièrement, le nombre élevé de personnes accusées rendrait impossible qu’elles aient toutes des avocats sans retarder considérablement les procès. Deuxièmement, les avocats pourraient indûment influencer les juges non-professionnels gacaca qui ont une compréhension limitée de la loi. Troisièmement, la participation de la communauté locale aux procès suffirait à garantir un procès équitable parce que les membres de la communauté pourraient prendre la parole si un témoin mentait et ils pourraient interroger les témoins. Enfin, mettre l’accent sur la participation de la communauté plutôt que sur le recours à des avocats développerait le sentiment d’appropriation de la communauté.
Il y a eu une poignée de cas où les avocats ont néanmoins essayé de comparaître au nom d’une personne accusée. Dans un de ces cas, un avocat défendant un homme accusé devant un tribunal classique a été autorisé à continuer à conseiller son client après le transfert de l’affaire à un tribunal gacaca (mais il n’a pas été autorisé à porter sa robe).[67]
En 2009, dans le procès du défenseur des droits humains François-Xavier Byuma, présenté ci-dessous, le SNJG a aussi autorisé avec réticence qu’un avocat soit présent, mais a ensuite permis au tribunal de prendre des mesures rendant son assistance inefficace.
La nécessité pour le gouvernement rwandais d’achever tous les procès de génocide en quelques années plutôt qu’en plusieurs décennies a rendu impossible le type habituel de représentation légale pour tous les accusés. Toutefois, le gouvernement aurait pu mettre en place des mesures alternatives pour garantir à l’accusé le droit à une assistance juridique. Par exemple, en mai 2002, l’Institut danois pour les droits de l’homme a proposé que le ministère de la Justice rwandais autorise des défenseurs judiciaires nationaux et internationaux (des juristes professionnels, mais n’étant pas avocats), financés par des bailleurs de fonds étrangers, à fournir aux accusés, ainsi qu’aux rescapés du génocide, des conseils juridiques préalables aux procès.[68] Visant à informer de leurs droits les accusés et les victimes et renforçant la transparence du processus gacaca, cette proposition cherchait également à accélérer le processus judiciaire en encourageant les coupables à avouer en échange d’une réduction de peine en vertu du système de négociation de peine.[69] Le ministère de la Justice n’a jamais répondu à la proposition.[70]
Le cas de François-Xavier ByumaLe défenseur des droits humains François-Xavier Byuma a été condamné suite à des accusations liées au génocide lors d’un procès gacaca qui a violé tant le droit rwandais que le principe fondamental selon lequel les personnes accusées doivent être jugées devant un tribunal équitable et impartial. Au moment où des allégations de génocide à son encontre ont surgi pour la première fois début 2007, Byuma dirigeait une organisation pour la défense des droits des enfants (Turengere Abana) et avait récemment commencé une enquête sur une allégation de viol d’une jeune fille de 17 ans par un juge gacaca local.[71] Sachant que ce juge présiderait le tribunal, Byuma a immédiatement écrit au SNJG en exprimant sa crainte de ne pouvoir bénéficier d’un procès équitable. Sa lettre a été jugée « sans fondement et injustifiée ».[72] Le procès de Byuma a débuté à Kigali le 13 mai 2007. Il a été accusé d’avoir été présent à une barrière érigée pour empêcher les Tutsis de fuir le génocide, de détenir une arme à feu et d’avoir participé à un entraînement aux armes. Dès l’ouverture du procès, Byuma a demandé que les juges soient récusés pour conflit d’intérêt, mais le tribunal a rejeté sa requête.[73] En signe de protestation, Byuma a refusé de prendre la parole. Le juge a menacé de l’inculper pour refus de témoignage.[74] Byuma a décidé de se soumettre à la juridiction, en dépit de l’hostilité ouverte dont le juge président a fait preuve tout au long du reste du procès.[75] Lors d’une seconde audience une semaine plus tard, Byuma s’est défendu contre les accusations, mais le juge qui présidait la séance a interrompu bon nombre de ses réponses ainsi que celles des témoins qui tentaient de déposer pour sa défense. À un moment, le juge président a accusé un témoin à décharge de mensonge.[76] Le tribunal a jugé Byuma coupable de participation à un entraînement aux armes et de plusieurs autres chefs d’accusation (dont participation à une attaque, et enlèvement et agression d’une femme tutsie) qui n’étaient pas mentionnés lors de la première lecture de l’acte d’accusation à Byuma avant le procès.[77] Le tribunal l’a condamné à 19 ans de prison. Le tribunal a acquitté deux autres personnes accusées des mêmes crimes, bien que l’une d’elles ait admis sa culpabilité pour l’un des chefs d’accusation. Le 18 août 2007, une cour d’appel a confirmé la condamnation de Byuma à 19 ans de prison malgré de nombreuses irrégularités. Byuma avait présenté un compte rendu d’audience révélant qu’un témoin à charge qui l’avait accusé d’agression avait antérieurement témoigné qu’une personne différente avait commis ce crime (et dont le témoin n’a jamais mentionné le nom lors du procès gacaca). Byuma a fait remarquer que le tribunal avait refusé d’entendre certains des témoins qu’il souhaitait voir cités pour sa défense et n’avait pas concilié les contradictions entre les éléments de preuve présentés. La cour d’appel n’a fourni aucune justification de sa décision confirmant le verdict de culpabilité, ni aucune explication pour avoir ignoré le fait que le juge présidant le tribunal d’instance inférieure avait manifestement un conflit d’intérêt avec Byuma.[78] Après un tollé général des organisations locales et internationales, le SNJG a accepté la requête en révision de Byuma et a fait venir un collège de juges depuis la partie orientale du pays pour trancher l’affaire. Le SNJG a accepté avec réticence d’autoriser un avocat à assister Byuma pour sa défense (à condition qu’il ne porte pas sa robe). Lors de l’audience, toutefois, l’avocat fourni par Avocats Sans Frontières (ASF) n’a pas été autorisé à s’asseoir à côté de son client et s’est vu refuser à maintes reprises la possibilité d’interroger les témoins.[79] Ces restrictions, jointes à l’hostilité ouverte manifestée par le juge présidant la séance envers la présence de l’avocat, ont rendu son aide inefficace. Le tribunal statuant sur la requête en révision de Byuma a accordé peu d’attention aux dépositions des nouveaux témoins à décharge, mais a conclu que de nouvelles preuves avaient été fournies par des témoins à charge, même si certaines de ces informations étaient en contradiction avec des témoignages antérieurs donnés au procès et en appel. Le tribunal a également jugé Byuma coupable de possession d’arme à feu, en violation d’une directive donnée en 2006 par le SNJG qui stipulait que la possession d’une arme à feu ou la présence à une barrière ne constituaient pas en soi un crime. Le tribunal a confirmé la condamnation de Byuma mais a réduit sa peine à 17 ans d’emprisonnement.[80] Le cas de Byuma est également abordé dans le cadre du droit à la présomption d’innocence, du droit à présenter des témoins à décharge et du droit à ne pas s’auto-incriminer. |
La présomption d’innocence
La Constitution rwandaise, le Code rwandais de procédure pénale, le PIDCP et la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) auxquels le Rwanda est également un État partie, garantissent tous qu’une personne accusée est présumée innocente jusqu’à ce qu’elle soit déclarée coupable.[81] Toutefois, ce droit fondamental n’a pas toujours été respecté dans les procès gacaca.
Le Comité des droits de l’homme de l’ONU, dans son Commentaire général sur l’article 14, en référence à la présomption d’innocence a spécifié qu’il est du « devoir pour toutes les autorités publiques de s’abstenir de préjuger de l’issue d’un procès. »[82] Néanmoins, de hautes autorités du gouvernement rwandais et des médias pro gouvernementaux ont dans certains cas, à plusieurs reprises et publiquement, qualifié des personnes de coupables de crimes liés au génocide avant que leurs procès gacaca ne soient terminés, et dans certains cas avant même que des personnes ne soient formellement mises en accusation dans des juridictions gacaca. Le plus souvent, cela s’est produit dans des affaires médiatiques contre des opposants politiques ou des détracteurs du gouvernement. Pareilles déclarations ont créé une atmosphère dans laquelle il était difficile de garantir qu’une personne serait présumée innocente et serait jugée sur la seule base des preuves présentées à son procès.
Il en va de même pour les personnes accusées de « sectarisme » (plus communément appelé le « divisionnisme ») et d’ « idéologie génocidaire » — notions définies en termes vagues par la loi, qui vise à interdire les idées, déclarations ou conduites pouvant entraîner une animosité ou des violences ethniques. La campagne du gouvernement pour dénoncer des personnes soupçonnées de ces crimes, qui s’appuie en partie sur des déclarations faites par les autorités avant les procès et fortement médiatisées, a davantage remis en cause la mesure dans laquelle une personne devant être jugée peut effectivement bénéficier d’une présomption d’innocence.[83] Entre 2003 et 2008, quatre commissions parlementaires ont mené des enquêtes et dénoncé des cas prétendus de « divisionnisme » et d’« idéologie génocidaire », avec peu ou pas de vérification des faits et aucune procédure judiciaire. Dans une déclaration de mai 2007 répondant à des accusations selon lesquelles des policiers avaient tué 20 détenus, le Commissaire général de la police nationale rwandaise, Andrew Rwigamba, (anciennement auditeur militaire général), a affirmé que les détenus avaient fait preuve « d’une détermination extrêmement criminelle, prêts à mourir pour leur idéologie génocidaire. »[84] En fait, les détenus, tous récemment arrêtés, n’avaient été jugés pour aucun crime et aucun d’eux n’avait été inculpé pour « idéologie génocidaire ». La déclaration du commissaire s’inscrivait dans le contexte d’une campagne gouvernementale plus vaste contre l’idéologie génocidaire et à un moment où les procès gacaca fonctionnaient à plein rendement.
Les autorités gouvernementales ont utilisé ces accusations — ainsi que des accusations de « révisionnisme », « négationnisme » et « minimisation grossière du génocide », trois délits proscrits par la Constitution rwandaise et par une loi de 2003 sanctionnant le génocide — comme des outils pour étouffer le débat sur des questions sensibles, pour réduire au silence les opinions indépendantes et les critiques et pour poursuivre les opposants politiques.[85] En avril 2009, le gouvernement a suspendu le service radiophonique en langue kinyarwanda de la BBC pour une durée de deux mois parce qu’il avait tenté d’offrir une tribune publique à des personnes que le gouvernement a qualifiées de « négationnistes du génocide », dont Faustin Twagiramungu, qui fut le premier à avoir occupé le poste de Premier ministre du gouvernement formé par le FPR après le génocide et un des candidats présidentiels en 2003 contre le Président Kagame. L’émission de la BBC n’a jamais été diffusée.[86] Les personnes réclamant justice pour les victimes de crimes commis par des militaires du FPR en 1994 ou qui ont tenté de s’opposer au parti au pouvoir lors de l’élection présidentielle de 2010 ont dû faire face à des dénonciations publiques et, dans certains cas, à des accusations criminelles formelles. Des représentants du gouvernement ont accusé publiquement de « divisionnisme » et « idéologie génocidaire » les opposants politiques Victoire Ingabire (Présidente du parti d’opposition FDU-Inkingi) et Bernard Ntaganda (Président du parti d’opposition PS-Imberakuri) ainsi que Déogratias Mushayidi, détracteur véhément du gouvernement.Tous trois ont été ultérieurement mis formellement en accusation pour ces crimes.[87]
Ces exemples concernent des personnalités de l’opposition et des détracteurs connus, mais les citoyens ordinaires ont aussi été en butte à des accusations d’ « idéologie génocidaire ». Plus de 2 000 affaires ont été portées devant les tribunaux rwandais, dont certaines avant même que la loi de 2008 sur l’idéologie génocidaire ne soit adoptée.[88] Une proportion significative de ces affaires a abouti à des acquittements, mais dans de nombreux cas seulement après que les personnes accusées aient passé de longues périodes en détention.[89] Les lois sur le « divisionnisme » et l’« idéologie génocidaire » ont eu un effet dissuasif sur le respect de la présomption d’innocence, ainsi que de la liberté d’expression (abordée plus loin dans le rapport).
Le droit à la présomption d’innocence signifie aussi qu’un tribunal ne doit pas décider par avance si l’accusé est coupable, ni le traiter comme s’il était coupable, quelle que soit la probabilité de la condamnation. Pourtant Human Rights Watch a documenté des dizaines d’affaires dans lesquelles les juges ont fait preuve de notions préconçues de culpabilité ou ont traité la personne accusée comme si elle était coupable dès le début du procès. Souvent ces types de cas concernaient des juges faisant des remarques désobligeantes ou employant un ton hostile envers la personne accusée. Par exemple, dans un procès qui a eu lieu en janvier 2008 dans l’ouest du pays, le juge qui présidait la séance a ouvert le procès en demandant si l’accusé souhaitait plaider coupable. Quand celui-ci a dit non, le juge a répondu : « Vous n’êtes pas innocent parce que vous êtes poursuivi pour crimes de génocide commis dans cette préfecture. »[90]
Dans une autre affaire en 2009, abordée ci-dessous, le juge présidant le tribunal a encouragé deux des accusés à plaider coupable au début de leur procès. Lorsqu’ils ont refusé, le juge a déclaré sur un ton sarcastique que les accusés ne comprenaient pas manifestement les avantages du plaider coupable — laissant entendre que les accusés auraient dû plaider coupable. Le juge a continué à traiter les deux accusés avec hostilité tout au long du procès.[91]
Human Rights Watch a aussi observé des procès où les juges ont fait preuve de partialité envers les accusés ou les témoins à décharge. Le procès du militant des droits humains François-Xavier Byuma, abordé ci-dessus, en est un excellent exemple.[92] Les juges tant au stade du procès que de la révision ont fait preuve d’une hostilité manifeste envers l’accusé, interrompant fréquemment sa déposition et celles de ses témoins.[93] Lors de la première instance, la raison pour laquelle le juge présidant le tribunal était hostile était évidente : Byuma avait antérieurement enquêté sur des allégations de viol portées contre ce juge.[94] Il n’y avait aucun conflit d’intérêt connu avec les juges lors du procès en révision, pourtant là encore, les juges — et en particulier le juge-président —ont fait preuve de partialité manifeste contre l’accusé dès le début de la procédure, se traduisant par exemple par le ton hostile du juge-président envers l’accusé et ses fréquentes interruptions de la déposition de Byuma.[95]
Les tribunaux gacaca ont aussi violé la présomption d’innocence en transférant la charge de la preuve à l’accusé et en s’appuyant sur l’accusé pour prouver qu’il ou elle n’a pas commis le crime allégué.[96] Cette question sera examinée plus en détail plus loin dans ce rapport.[97]
Le droit d'être informé de l'affaire et d'avoir du temps pour préparer sa défense
En vertu de laConstitution rwandaise, du Code de procédure pénale du Rwanda et du PIDCP, les droits d’un accusé à un procès équitable comprennent le droit à être informé des accusations portées contre lui ou elle, et le droit de disposer du temps suffisant pour préparer sa défense.[98] Dans les procès gacaca, ces droits n’ont pas toujours été respectés : de nombreux accusés n’ont pas reçu l’avis prescrit par la loi sur les affaires en cours contre eux, n’ont pas reçu des informations suffisantes préalables au procès sur les charges pesant contre eux, et n’ont pas eu assez de temps pour préparer leur défense. De nombreux accusés n'ont eu connaissance de la véritable nature des allégations portées contre eux que le jour de leur procès. L’incapacité des accusés à se faire assister d’un avocat n’a fait qu’aggraver ces problèmes.
Une personne risquant d’être inculpée dans le cadre du processus gacaca aurait pu apprendre, grâce à des informations données par des membres de la communauté lors de la phase publique de collecte d’information, qu’elle allait être convoquée devant un tribunal gacaca. Toutefois, en 2005, la procédure a changé : les autorités locales ont fait du porte-à-porte ou se réunissaient avec de petits groupes de membres de la communauté pour recueillir des informations sur les crimes commis (contrairement aux réunions hebdomadaires où les membres de la communauté soulevaient et discutaient les allégations potentielles contre une personne accusée), avec pour résultat que les personnes accusées étaient moins susceptibles d’apprendre que leur procès était imminent.
Procédure d’assignation
Selon la loi, la juridiction gacaca doit délivrer une assignation formelle à toute personne appelée à comparaître à un procès.[99] L’assignation devrait indiquer les informations suivantes : si la personne est citée à comparaître comme accusée ou comme témoin ; si la personne est incarcérée et, si ce n’est pas le cas, l’adresse de la personne ; les charges qui pèsent contre la personne et la catégorie des crimes présumés ; et l’heure, la date et le lieu de l’audience. La citation devrait être signée par le secrétaire de la juridiction gacaca et contresignée par la personne à laquelle elle est adressée au moment où celle-ci la reçoit.
La citation devrait être délivrée à une personne accusée à son domicile actuel ou à son dernier lieu de résidence connu sept jours au moins avant la date prévue pour la comparution de la personne devant une juridiction gacaca.[100] Le coordinateur de district, qui assiste les juges gacaca et supervise la gestion de leur charge de travail, délivre normalement la citation à la personne appelée à comparaître. Lorsque l'accusé n'a pas de résidence connue au Rwanda et est censé vivre à l’étranger, l’assignation devrait être affichée au moins un mois à l’avance sur le mur du bureau gacaca de la juridiction ainsi que dans les bureaux du district et de la province.[101] Si la personne reçoit la citation moins de sept jours avant l’audience, le tribunal devrait automatiquement reporter l’audience et délivrer une nouvelle citation qui respecte le délai prescrit.[102]
Non-respect des procédures d’assignation
Dans certains cas, une simple erreur a pu expliquer pourquoi un accusé n’avait pas reçu de citation, en accord avec la procédure exigée. Dans d’autres cas, l’absence d’envoi d’une citation a pu être délibérée dans le but de déclencher une inculpation, étant donné que les tribunaux sont censés rendre une décision en l’absence de l’accusé si il ou elle ne se présente pas trois fois de suite.[103] Occasionnellement, des autorités locales ou gacaca n’ont pas remis les citations à l’accusé ou à son lieu de résidence, et les ont plutôt données tout simplement à des proches ou des amis pour qu’ils les remettent à l’accusé.[104]
Dans un cas en 2007, une personne a appris par hasard qu’elle avait été accusée de crimes liés au génocide. D’anciens voisins participant aux procès gacaca hebdomadaires avaient entendu le juge-président annoncer qu’un jugement par défaut serait bientôt prononcé contre cet homme.[105] L’accusé n’avait pas reçu de citation à comparaître, même si les autorités envoyaient régulièrement des avis portant sur d’autres décisions administratives à son adresse dans la zone où les crimes étaient censés avoir eu lieu. Deux ans plus tard, lorsque la même affaire est réapparue devant le même tribunal gacaca, le juge-président chargé de délivrer les assignations ne la lui a jamais donnée.[106]
Un autre accusé, Innocent Nizeyimana, a été mis au courant d’un procès gacaca en cours contre lui par le biais d’une connaissance en 2007. Ni lui ni sa famille n’avaient reçu de citation, malgré le fait qu’il était toujours propriétaire dans la région où il avait vécu en 1994, où une citation aurait pu être envoyée. Il résidait également dans un quartier voisin de Kigali. Lorsque Nizeyimana s’est adressé au juge-président, il s’est entendu dire qu’il serait inculpé à la prochaine session s’il ne se présentait pas. Le juge-président a été incapable de dire si une citation avait jamais été envoyée.[107] Dans une procédure ultérieure, les autorités gacaca ont envoyé à Nizeyimana un message texte SMS avec la date et le lieu de la procédure mais n’ont jamais délivré de citation.[108] D’autres personnes accusées ont également reçu une notification de prochaines audiences gacaca par message texte SMS.[109]
Human Rights Watch a documenté de nombreux cas dans lesquels les citations ont été délivrées moins de sept jours avant l’audience, ce qui a compromis la capacité de l’accusé à préparer sa défense.[110] Dans un cas frappant survenu en décembre 2009, Symphorien Kamuzinzi a reçu son assignation à 18 heures la veille de son procès.[111] Le plus souvent, toutefois, les citations ont été délivrées au moins la veille du jour où la personne devait comparaître devant le tribunal gacaca.
Les détenus étaient les plus susceptibles de recevoir leur citation tardivement et, par suite de la notification tardive, ont eu généralement les plus grandes difficultés à garantir que leurs témoins viendraient au procès.[112] Dans certains cas, les détenus n’ont eu connaissance du procès que le matin de la date prévue de leur comparution.[113] Dans un cas, un détenu n’a réalisé pour la première fois qu’il devait comparaître devant un tribunal gacaca que lorsqu’un gardien de prison est venu lui dire de monter dans le véhicule de la prison. L'homme a demandé que l'audience soit reportée, mais le juge-président a refusé et le procès s’est poursuivi. Il a été reconnu coupable et condamné à une peine de « réclusion criminelle à perpétuité ».[114]
Dans certains cas, le tribunal gacaca a immédiatement répondu à l’insuffisance du délai de notification en reportant l’audience.[115] Dans d’autres cas, le défaut de notification par les autorités a permis à des personnes reconnues coupables en première instance de faire appel et d’obtenir une nouvelle audience.[116] Mais dans d’autres cas, les accusés ont été contraints de poursuivre leur procès bien que n’ayant pas reçu de notification appropriée.[117]
Insuffisance des informations fournies sur les accusations portées
Dans de nombreux cas, les assignations ne contenaient pas suffisamment d’informations sur les charges pesant sur l’accusé, comme requis par la loi. Dans la plupart des cas où Human Rights Watch a détecté des irrégularités, la ligne « accusations » était tout simplement laissée en blanc, la personne accusée restant dans l’ignorance des accusations portées contre elle.[118] Lorsque les charges étaient spécifiées, elles consistaient souvent en accusations générales telles que « génocide » ou « meurtre » sans aucun détail sur l’incident ou le crime spécifiques.[119] Des informations aussi vagues ne permettaient pas à l’accusé de préparer sa défense avant son procès.
D’autres informations importantes ont fait défaut dans certaines citations, notamment la catégorie des crimes dont la personne était accusée[120] et le lieu de l’audience gacaca.[121]
Dans plusieurs cas particulièrement troublants, des personnes ont été informées qu’elles devaient comparaître comme « témoin » dans le procès de quelqu’un d’autre et n’ont découvert qu’en arrivant à l’audience qu’elles étaient elles-mêmes mises en accusation.[122] Certains de ces cas mettent en évidence le risque encouru par les témoins, une question abordée plus en détail dans la section VII de ce rapport.
Dans une affaire de 2009 dans la province du Sud, un tribunal gacaca a cité Domina Nyirakabano à comparaître comme témoin mais, à son arrivée, elle a été arrêtée et condamnée à une peine de 30 ans de prison.[123] Elle a fait appel de la condamnation, et celle-ci a été annulée plus de cinq mois plus tard, date à laquelle elle a été libérée.[124]
Lorsque des personnes n’ont pas reçu d’informations suffisantes sur les allégations portées contre elles ou lorsqu’elles ne savaient pas si des accusations étaient en instance contre elles, elles se sont parfois adressées au coordinateur de district, aux juges gacaca, ou à des autorités locales de leur région pour obtenir des renseignements supplémentaires. Nombre de ces personnes ont également mené leur propre enquête sur les accusations, avec l’aide d’amis et de connaissances dans leur communauté. Les lois gacaca sont muettes sur le fait qu’un accusé a le droit ou pas de recevoir des informations complémentaires de la part d’autorités gacaca ou de responsables administratifs locaux avant son procès.
Dans certains cas, les autorités ont volontiers fourni aux personnes les informations qu’elles demandaient. Dans d’autres cas, les personnes ont été obligées de payer pour obtenir des informations sur les accusations portées contre elles, même si un paiement n’était pas légalement requis. Dans ces cas, le paiement équivalait à un pot-de-vin en échange des informations demandées. Par exemple, dans une région proche de Gitarama, une agricultrice a vendu la seule vache qu’elle possédait pour payer plusieurs juges gacaca afin qu’ils lui disent si des accusations de génocide avaient été portées contre elle.[125] De même, des autorités gacaca ont réclamé à un étudiant d’université à Kigali un paiement de 50 000 francs rwandais (environ 82 USD) pour savoir s’il y avait une affaire pendante contre lui.[126]
Refus de reporter des audiences afin de donner à l’accusé suffisamment de temps pour préparer sa défense
Human Rights Watch a documenté de nombreux cas où l'accusé a demandé une prolongation de délai pour obtenir des documents ou pour garantir la comparution de témoins à décharge. Certaines juridictions gacaca ont accordé plus de temps, mais d’autres ont refusé et poursuivi le procès.[127]
Dans un certain nombre de cas d'appel, le condamné n'avait pas reçu de copie du jugement de première instance ou n’avait pas eu assez de temps pour l’examiner avant l’audience d’appel. L’ancien sous-préfet de Cyangugu (autorité locale) Théodore Munyangabe et son co-accusé, l’Abbé Aimé Mategeko, ont demandé à la cour d’appel de leur donner une copie du jugement de première instance et de reporter l’audience jusqu’à ce qu’ils aient eu le temps de l’examiner. Le juge-président a répondu que les juges avaient une copie et il en a lu une partie à voix haute. Les accusés ont alors indiqué aux juges que le jugement n’était pas conforme à ce qui s’était réellement passé au procès, en notant que le jugement énumérait de nouvelles charges contre Munyangabe et indiquait que l’Abbé Mategeko avait avoué certains crimes alors que ce n’était pas le cas. En réponse, le juge-président a déclaré : « Oublions ces détails et passons à la question soulevée par cet appel. »[128] Mais la question soulevée était au centre de l'appel de Munyangabe parce qu’il affirmait qu’il était à nouveau jugé pour le même crime dont un tribunal classique l’avait acquitté. La cour d’appel a procédé au jugement de l’affaire et a confirmé sa condamnation.[129] Le cas de Munyangabe sera abordé plus en détail plus loin dans ce rapport.[130]
Dans d’autres cas, la notification tardive d’une audience a porté préjudice à la capacité d’un accusé de rassembler des témoins à temps pour l’audience. Les personnes détenues ont eu souvent un accès limité à des membres de la famille qui auraient pu sinon les aider à trouver des témoins.[131] Plusieurs exemples sont abordés dans la section suivante.
Le cas de Pascal HabarugiraLe Dr Pascal Habarugira travaillait au service de gynécologie à l’hôpital de l’Université de Butare en 1994 et s’occupait d’un certain nombre de femmes et de nouveaux-nés durant la première période du génocide. Il est retourné brièvement dans sa ville natale de Cyangugu en mai 1994, avant d’atteindre Kigali en août où il a commencé à travailler au Centre Hospitalier de Kigali (CHK). En 1995, il est retourné l’hôpital de l’Université de Butare où il a repris ses fonctions antérieures. L’année suivante, Habarugira a accepté un stage de deux mois à Paris, ce qui a entraîné des rumeurs selon lesquelles il aurait fui le pays, mais il est retourné au Rwanda plus tard cette même année. Les rumeurs ont persisté, et en 1999, il a suivi son épouse en Côte d'Ivoire pour ses études. Le couple est retourné au Rwanda en 2003, et Habarugira a repris ses fonctions à l’hôpital à Butare. Des accusations contre Habarugira ont été portées lors de la phase de collecte d’informations gacaca en 2005, et la police l’a arrêté en mars cette année-là alors qu’il sortait d’une conférence médicale à Kigali.[132] En août 2007, Habarugira est passé en procès devant un tribunal gacaca sur cinq chefs d’accusation : participation à une réunion de planification du génocide, remise d’une patiente tutsie aux militaires pour qu’ils la tuent, présence à une barrière où des massacres ont eu lieu, appartenance à un comité de crise, et strangulation d’un nouveau-né tutsi.[133] Le 5 septembre 2007, le tribunal de première instance a reconnu Habarugira coupable de tous les chefs d’accusation sauf le premier. Cinq autres médecins ont aussi été reconnus coupables d’avoir joué un rôle dans la mort de Tutsis à l’hôpital universitaire de Butare durant le génocide. Tous ont été condamnés à 30 années d’emprisonnement.[134] Habarugira a fait appel de sa condamnation, plaidant que le tribunal de première instance n’avait pas examiné le témoignage de certains témoins à décharge (dont huit rescapés du génocide qui travaillaient avec lui à l’hôpital en 1994) et n’avait pas tenu compte d’importantes incohérences dans le témoignage de plusieurs femmes qui l’accusaient. Il a essayé de prouver que l'un des principaux témoins à charge ne se trouvait pas dans la région pendant le génocide comme elle le prétendait, mais le tribunal a refusé d’appeler un témoin détenu qui pouvait confirmer ce fait ou de faire venir des procès-verbaux d’un autre procès dans lequel la femme avait admis se trouver ailleurs. Un témoignage en appel a révélé que Habarugira n’avait pas remis la femme tutsie aux soldats contrairement aux allégations et que le nouveau-né qu’il avait soi-disant tué était toujours vivant (et présent à l’audience avec sa mère). En dépit des témoignages de poids présentés, la cour d’appel a confirmé l’inculpation du 6 février 2008, mais a réduit sa peine à 19 ans d’emprisonnement sans aucune explication pour la réduction de peine.[135] La Commission nationale des droits de la personne (CNDP), qui avait envoyé des observateurs pour surveiller le déroulement du procès, a constaté tant de violations de procédure lors de l’audience d’appel qu’elle a écrit deux lettres à la secrétaire exécutive du SNJG, appelant à la révision de la condamnation. De façon particulièrement préoccupante, selon la CNDP :[136]
La demande de révision faite par Habarugira a été rejetée, d’abord en avril 2008 par la juridiction gacaca locale, et à nouveau en juin 2008 par le SNJG.[137] Au moment de la rédaction de ce rapport, Habarugira se trouvait toujours en prison. Le cas de Habarugira est également abordé dans le cadre du droit à la présomption d’innocence et du droit à présenter des témoins à décharge. |
Le droit de présenter une défense
Je n’arrive pas à comprendre comment vous pouvez me demander de présenter mes témoins à décharge alors que je ne connais même pas les accusations portées contre moi dans cette affaire ?
— Un homme accusé, lors de son procès.[138]
Le fait que de nombreux accusés n’apprennent les allégations précises portées contre eux que le jour du procès entrave leur capacité à préparer leur défense et à trouver des témoins à décharge. Cela est particulièrement inquiétant étant donné que la plupart des poursuites menées pour génocide au Rwanda reposent presqu’entièrement sur des dépositions de témoins.
Le droit rwandais ne garantit pas à l’accusé le droit de faire comparaître des témoins à décharge, mais le Code rwandais de procédure pénale suggère qu’un tel droit existe, car il définit la procédure pour les dépositions de témoins.[139] Le PIDCP stipule qu’un accusé a le droit « [d’] interroger ou faire interroger les témoins à charge et à obtenir la comparution et l'interrogatoire des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge. »[140] La CADHP garantit aussi le « droit à [une] défense. »[141]
La campagne du gouvernement contre le « divisionnisme » et l’« idéologie génocidaire » s’est révélée être un obstacle important à l’obtention de témoignages à décharge dans les tribunaux gacaca.[142] Un certain nombre de personnes interrogées par Human Rights Watch ont exprimé la crainte qu’elles pourraient être accusées d’ « idéologie génocidaire » et emprisonnées si elles prenaient la défense de personnes accusées ou si elles dénonçaient les faux témoignages de rescapés. Étant donné que l’idéologie génocidaire est passible de jusqu’à 25 ans d’emprisonnement, ou de prison à perpétuité pour les récidivistes et les personnes reconnues coupables de génocide, les risques perçus étaient élevés et peu susceptibles d’inciter des voix isolées à se présenter pour la défense.[143]
L’impact de la loi sur l’idéologie du génocide en matière d’obtention de témoignages à décharge a été si important qu’il a contribué à la décision du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) — créé par le Conseil de sécurité de l’ONU et chargé de juger les crimes qui ont eu lieu au Rwanda en 1994 — et de plusieurs juridictions étrangères de refuser le transfert au Rwanda d’affaires liées au génocide aux fins de poursuites.[144] En réponse, le gouvernement a adopté une législation en 2009 qui exclut que des témoins soient poursuivis pour toutes déclarations faites au sein du tribunal (autres que le parjure).[145] Pourtant, la nouvelle loi ne semble pas avoir apaisé les craintes des Rwandais avec lesquels Human Rights Watch s’est entretenu.
En avril 2010, le ministre de la Justice a annoncé que le gouvernement examinait la loi sur l’« idéologie génocidaire » et avait commandé une étude pour évaluer les faiblesses de cette loi.[146] En janvier 2011, le ministre a indiqué au Conseil des droits de l’homme de l’ONU qu’une proposition serait bientôt déposée devant le Conseil des ministres et envoyée ensuite au Parlement pour examen.[147] En mai 2011, le ministre a informé Human Rights Watch qu’une « révision significative [de la loi sur l’idéologie du génocide] avait été rédigée pour répondre aux préoccupations selon lesquelles la loi était trop vague et sujette aux abus.»[148] Cela peut représenter un pas important vers le respect de la liberté d’expression, mais arrive trop tard pour avoir un impact positif sur le processus gacaca. Au moment de la rédaction de ce rapport, ni le contenu ni le calendrier exact pour l’adoption de toute modification n’étaient connus.
Des autorités de l'État et des membres éminents de la communauté ont occasionnellement intimidé ou tenté d’influencer des témoins et leurs dépositions, entravant encore davantage les efforts pour obtenir des témoins à décharge. Ces questions sont abordées de façon plus détaillée à la section VII de ce rapport.[149]
Human Rights Watch a documenté un certain nombre de cas dans lesquels les tribunaux ont fait obstacle au droit d’un accusé à convoquer des témoins pour sa défense, notamment en refusant d’entendre des témoins à décharge qui étaient physiquement présents ou en rejetant la demande de l’accusé de citer des témoins à décharge potentiels, comme dans le cas de Pascal Habarugira, abordé ci-dessus.[150] Dans son rapport annuel de 2009 sur les droits de l’homme, le Département d’État des États-Unis a également exprimé des préoccupations sur le refus des tribunaux gacaca de permettre à l’accusé de présenter des témoins à décharge.[151]
Une notification tardive de la date du procès à de nombreuses personnes accusées et se trouvant en détention a compromis gravement leur capacité à garantir la comparution de leurs témoins au procès. Dans un cas en 2008, la police a arrêté un homme à Kigali et l’a détenu au poste de police pendant cinq jours avant de le transférer dans sa région natale pour qu’il y soit jugé le lendemain. Du fait de son arrestation et de sa détention loin du lieu du procès et sans aucun contact avec sa famille, cet homme n’a pas pu citer des personnes qui auraient pu déposer pour sa défense.[152]
Dans un autre cas en 2008, les tribunaux ont refusé à une femme détenue la possibilité de présenter des témoins à décharge lors de son procès ainsi qu’en appel. Le tribunal de première instance l’a reconnue coupable et condamnée à 30 ans de prison. La cour d’appel a refusé de reporter l’audience ou de convoquer des témoins dont cette femme estimait qu’ils détenaient des preuves à décharge. La cour a justifié sa décision en alléguant que la femme ne lui avait pas fourni les noms de ces témoins dans son appel écrit. La femme, âgée de 64 ans, a expliqué qu’elle ne savait ni lire ni écrire et qu’elle avait demandé à une autre personne de rédiger la lettre faisant appel du jugement. Elle a déclaré qu’elle avait été dans l’incapacité de vérifier le contenu de l’appel écrit, mais les juges n’en étaient pas persuadés et ils ont soutenu que la responsabilité de garantir la présence des témoins lui incombait.[153]
Les tribunaux gacaca ont également refusé parfois à l’accusé le droit de confronter les témoins à charge. Human Rights Watch a observé des procès où l’accusé était physiquement présent au tribunal mais n’était pas autorisé à suivre son propre procès en détail. Par exemple, dans le sud du pays, deux tribunaux gacaca distincts ont fait en sorte que les accusés soient écartés des procédures afin qu’ils soient dans l’incapacité d’entendre ou de voir ce qui se passait dans leurs propres procès.[154] Un cas similaire s’est produit à Kigali en octobre 2008, lorsqu’un tribunal a demandé à cinq co-accusés de s’asseoir séparément et bien à l’écart du procès, jusqu’à ce que ce soit leur tour de témoigner.[155] Les raisons pour lesquelles les tribunaux ont ordonné la séparation des accusés dans ces types de cas n’étaient pas directement évidentes. Il est possible que les juges, qui n’avaient pas une formation juridique suffisante, aient fait une confusion avec la pratique consistant à maintenir les témoins hors de portée de voix du procès (dans le but d’empêcher que leurs témoignages ne soient influencés par d’autres témoins) et l’aient appliquée aux personnes accusées. Refuser à un accusé le droit de suivre les témoignages l’impliquant dans un délit et le droit à contre-interroger les témoins a clairement violé le droit de ces personnes à se défendre.
Le droit de témoigner pour sa propre défense et le droit de ne pas témoigner contre soi-même
Le PIDCP garantit à une personne accusée le droit « à ne pas être forcée de témoigner contre elle-même ou de s'avouer coupable ».[156]
La loi gacaca de 2004 omet de garantir ce droit, étant donné que son préambule stipule que tous les Rwandais ont l’obligation légale de témoigner.[157] L’article 29 ajoute que : « Toute personne qui omet ou refuse de témoigner sur ce qu’elle a vu ou sur ce dont elle a connaissance, de même que celle qui fait une dénonciation mensongère, est poursuivie par la Juridiction Gacaca qui en a fait le constat. » Les peines de prison vont de trois à six mois, avec des peines plus longues pour les récidivistes.[158] Bien que l’article 29 ne mentionne pas expressément les obligations des accusés, ils étaient normalement censés témoigner pour leur propre défense et le droit à garder le silence au procès ne leur a pas été accordé. Exiger de l’accusé qu’il témoigne a de fait renversé la présomption d’innocence en faisant en sorte qu’il revienne à l’accusé de prouver qu’il n’a pas commis les crimes allégués. En l’absence d’avocats dans les tribunaux gacaca, la charge reposant sur les accusés de se défendre eux-mêmes a été encore plus lourde.
Human Rights Watch n'a connaissance que d'un cas où un accusé a refusé de témoigner : celui du militant des droits humains François-Xavier Byuma, abordé ci-dessus.[159] Après avoir demandé la récusation du juge présidant le procès au motif qu’il avait un conflit d’intérêt, Byuma a refusé de témoigner. Le juge-président a répondu en formulant la menace que « le tribunal peut juger les personnes qui refusent de témoigner », forçant ainsi Byuma à renoncer et à se défendre lui-même.[160]
Avocats Sans Frontières (ASF), qui a mis en œuvre un programme d’observation des juridictions gacaca dans tout le Rwandade 2005 à 2010, a exprimé à maintes reprises sa préoccupation quant au fait que les personnes accusées se voyaient exiger de prêter serment de dire la vérité avant de s’exprimer devant les juridictions gacaca, en violation de leur droit à ne pas témoigner contre elles-mêmes.[161] ASF a documenté des procès au cours desquels les accusés ont été inculpés non seulement de crimes liés au génocide mais aussi de parjure ou pour ne pas avoir avoué leurs crimes.[162] Fin 2006, le SNJG a adressé aux juges une instruction leur indiquant qu’un accusé ne peut être poursuivi pour faux témoignage donné pendant son procès.[163] Toutefois, cette instruction ne demandait pas aux tribunaux de prévenir les personnes accusées qu’en témoignant sur les faits, elles pouvaient s’accuser elles-mêmes et que toute déclaration de leur part pourraient être retenue contre elles.
Le gouvernement a mis en œuvre un certain nombre de programmes incitant les personnes accusées, en particulier les détenus, à avouer les crimes qui leur étaient reprochés. La loi gacaca offrait des peines sensiblement réduites aux personnes qui avouaient, à savoir des peines de prison plus courtes, la possibilité de purger une partie de la peine sous forme de travaux d’intérêt général (ou « TIG »), et des remises de peines.[164] Si un nombre important de détenus ont avoué leurs crimes au début, seulement un tiers d’entre eux l’avaient fait à 2002.[165] Toutefois, cette proportion a augmenté au cours des années suivantes, avec plus de la moitié de la population carcérale ayant avoué à la fin 2004.[166]
Dans de nombreuses régions du pays, les autorités pénitentiaires, avec l'encouragement du gouvernement et des autorités judiciaires, ont organisé des comités pour entendre les aveux des détenus, avant même le début du processus gacaca.[167] Elles ont même invité les chrétiens évangéliques à faire du prosélytisme dans les prisons pour essayer de persuader les prisonniers d’avouer. En plus de la perspective de réductions de peines, les personnes qui avouaient pourraient bénéficier de meilleures conditions de détention et de la promesse d'une libération anticipée.[168] Pour être acceptés, des aveux devaient comporter les noms des victimes et des complices, ainsi qu’une description détaillée des crimes commis. Le refus d’impliquer nommément d’autres individus pouvait être un motif de rejet des aveux. Les divers avantages offerts aux prisonniers qui avouaient ont conduit à une vague d’aveux partiels et même faux.[169] Certains prisonniers étaient prêts à avouer des crimes qu’ils n’avaient pas commis, des délits mineurs quand d’autres crimes avaient en fait été commis, et à dénoncer d’autres personnes à tort.[170]
Encourager les aveux était un moyen évident de réduire l'arriéré des cas liés au génocide, mais les circonstances dans lesquelles de nombreux prisonniers ont avoué ont signifié que les informations qu’ils ont fournies étaient souvent peu fiables. Il y avait aussi de nombreuses contradictions entre les aveux. La qualité incertaine des aveux a jeté le doute sur certains procès gacaca. De plus, les autorités qui ont exercé des pressions sur les gens pour qu’ils avouent ont omis de fournir des informations suffisantes pour s’assurer qu’ils comprenaient les droits auxquels ils allaient renoncer en avouant. Si un tribunal gacaca constatait plus tard qu’une personne avait fait des aveux partiels ou avait avoué des crimes qu’elle n’avait pas commis, il pouvait prononcer des peines de prison sévères et exclure la personne de la participation au programme de TIG. De fait, un certain nombre de prisonniers ont été remis en prison au motif que leurs aveux étaient incomplets.
Protection contre la double incrimination
La plupart des systèmes juridiques acceptent le principe général selon lequel un accusé ne peut être jugé deux fois pour la même infraction (connu sous le nom de « double incrimination »), sauf si de nouvelles preuves sont révélées ou bien s’il existe des preuves que le premier procès comportait une erreur judicaire. La protection contre la double incrimination prévoit pour les personnes accusées la garantie qu’une fois jugée, l’affaire est terminée, et contribue à renforcer la confiance du public dans le système judiciaire. Tant le Code pénal rwandais que le PIDCP interdisent la double incrimination.[171]
Les accusations liées au génocide peuvent revêtir de multiples aspects, impliquant potentiellement un certain nombre d'actes criminels distincts qui peuvent avoir été commis à différents moments et en différents endroits. Cela peut rendre difficile de distinguer clairement entre les cas impliquant une violation du principe de la double incrimination et les cas où une personne est accusée dans des affaires distinctes avec des infractions sans rapport entre elles. Toutefois, tant le ministre de la Justice que la secrétaire exécutive du SNJG ont reconnu que des dizaines de personnes traduites à plusieurs reprises devant des juridictions gacaca ont subi une violation de leur droit à être protégées contre la double incrimination.[172]
Vide juridique relatif à la double incrimination
En théorie, les recours en appel contre les jugements des tribunaux classiques devraient être jugés par des cours d’appel classiques. De même, les décisions rendues dans les juridictions gacaca devraient être tranchées par des cours d’appel gacaca.
Toutefois, la loi gacaca de 2004 a prévu une exception à cette règle et donné aux tribunaux gacaca le pouvoir de poursuivre des personnes pour des crimes pour lesquels elles avaient déjà été jugées par des tribunaux classiques de première et deuxième instances, indépendamment du fait qu’elles aient été condamnées ou acquittées.[173] Sans explication, la loi stipule simplement que tout désaccord entre les jugements de deux tribunaux dans la même affaire devrait être résolu par la cour d’appel gacaca.[174] Cette disposition a conduit un juge de la Cour suprême à conclure que les tribunaux gacaca étaient devenus la nouvelle Cour suprême.[175]
Les juges, entre autres personnes, ont pris conscience des risques de la double incrimination dès 2005 lorsque des tribunaux gacaca ont commencé à mener des enquêtes et des poursuites contre des personnes déjà jugées par des tribunaux classiques.[176] Les juges de la Cour suprême ont demandé au ministre de la Justice de remédier au problème en 2006, soit par une réforme législative soit par d'autres moyens.[177] Human Rights Watch et d’autres organisations internationales qui suivaient le processus gacaca ont soulevé des préoccupations similaires auprès du SNJG, en lui fournissant des exemples détaillés d’affaires où des violations avaient eu lieu.[178]
En mai 2008 — plusieurs années après que les juges et les organisations non gouvernementales aient commencé à soulever la question auprès du SNJG — le Parlement a amendé la loi afin de combler le vide juridique. Selon la nouvelle loi, les affaires jugées par les tribunaux gacaca ne peuvent faire l’objet d’un appel que devant des cours d’appel gacaca dans la même juridiction, et les affaires jugées par des tribunaux classiques ou militaires peuvent seulement être révisées par leurs cours d’appel respectives.[179]
Toutefois, la loi était mal rédigée, laissant toujours un vide juridique. Les affaires jugées par des tribunaux classiques en première instance qui n’ont pas fait l’objet d’un appel au plus haut niveau peuvent être ramenées devant un tribunal gacaca, même après que la date limite pour faire appel ait expiré dans les tribunaux classiques.[180] En outre, la loi ne prévoit pas de recours pour des affaires où des violations de la double incrimination ont déjà eu lieu. Elle laisse également ouverte la question épineuse de savoir si une affaire peut être relancée au cas où de nouvelles preuves apparaissent, ou si de nouvelles allégations ont été faites concernant les événements qui ont fait l’objet d’une précédente affaire.
Affaires impliquant une violation du principe de la double incrimination
Dans certains cas où une affaire déjà jugée par les tribunaux classiques a reparu devant un tribunal gacaca, le tribunal gacaca ne savait pas comment gérer la question et a demandé un conseil juridique au SNJG, en général en ajournant brièvement l’audience. Selon la secrétaire exécutive du SNJG, un juge gacaca s’est excusé au beau milieu d’une audience et a prétendu se rendre aux toilettes afin de l’appeler pour lui demander conseil sur l’opportunité de poursuivre l’affaire. La secrétaire exécutive du SNJG a conseillé au juge de classer l’affaire, ce qu’il a fait.[181] Dans d’autres cas, le tribunal s’est déclaré non compétent pour connaître de l’affaire. Le SNJG a parfois rappelé aux juges gacaca qu’ils ne devaient pas juger des affaires qui avaient déjà fait l’objet d’un jugement devant les tribunaux classiques, et qu’ils devaient examiner si les allégations formulées dans les deux affaires étaient identiques afin de déterminer s’il convenait de statuer sur l’affaire.[182]
Dans un certain nombre d’autres affaires, toutefois, des tribunaux gacaca ont rejeté l’argument selon lequel une affaire devrait être rejetée parce que l'accusé avait déjà été poursuivi pour la même infraction.[183] Dans un cas, un militaire a arrêté un homme en 1997 sur la base d'une seule déclaration de témoin. L’homme a passé sept ans en prison avant qu’un tribunal classique ne l’acquitte au motif qu'il avait été confondu avec une autre personne du même nom. Deux ans plus tard, en août 2006, un tribunal gacaca l’a cité à comparaître comme témoin dans une autre affaire. À son arrivée, le tribunal l’a accusé de la même infraction pour laquelle il avait été antérieurement acquitté. Le tribunal l’a inculpé et condamné à une peine de 30 ans de prison. Quatre mois plus tard, une cour d’appel a infirmé la décision. Il a été libéré deux semaines plus tard.[184]
Des juges gacaca du district de Huye ont expliqué à Human Rights Watch que deux hommes avaient été confrontés à des chefs d’accusation dans des tribunaux gacaca qui étaient identiques à des affaires déjà jugées dans les tribunaux classiques.[185] Dans la première affaire, le tribunal gacaca a reconnu l’homme coupable et l’a condamné à 19 ans d’emprisonnement.[186] Dans la seconde affaire, le tribunal gacaca a inculpé un ancien parlementaire en décembre 2009 et l’a condamné à la peine de « réclusion criminelle à perpétuité » alors même qu’un tribunal classique l’avait déjà acquitté des mêmes chefs d’accusation.[187]
Human Rights Watch a aussi documenté des cas où des accusés ont été jugés deux fois par la même juridiction gacaca, ou par une juridiction gacaca voisine, sur des chefs d’accusation identiques. Habituellement, la deuxième affaire a été introduite après que la personne ayant formulé les accusations n’ait pas été satisfaite du verdict d’origine.
Dans un cas, dans le sud du pays, un homme a été accusé dans trois juridictions différentes d'implication dans la mort d'une femme âgée tutsie. Dans la première juridiction, le tribunal a acquitté l'homme.[188] Aucun appel n’a été déposé. Le fils de la victime (la partie civile) avait déjà accusé une autre personne du meurtre de sa mère et cette personne avait été condamnée par le tribunal gacaca.[189]L’été suivant, en juillet 2008, l’affaire a refait surface dans une juridiction voisine au niveau de l’appel. Le tribunal a déclaré qu'il n'avait pas compétence pour connaître de l'affaire, puisque la question avait déjà été décidée par une autre juridiction.[190] Un mois plus tard, l’affaire est réapparue devant une troisième juridiction. Cette fois, le tribunal a inculpé l'homme et l'a condamné à 19 ans de prison.[191]
Odette Uwimana a vécu une expérience similaire en décembre 2009. Un tribunal gacaca l’a acquittée d’implication dans la mort d’une femme tutsie. La décision a été confirmée en appel.[192] Mécontent de l’acquittement, un membre de la famille de la victime a alors porté les mêmes accusations contre le mari d’Odette Uwimana, Vincent Uzarama, dans la même juridiction.[193] Uzarama a été acquitté mais son épouse — qui n’était ni un témoin ni une accusée dans l’affaire — a été à nouveau inculpée et condamnée à 15 ans de prison, décision confirmée en appel.[194] Le SNJG a ensuite nommé de nouveaux juges pour entendre l’affaire.[195] Le nouveau tribunal a acquitté Uwimana et ordonné qu’elle soit libérée en mars 2010, date à laquelle elle avait passé près de six mois en détention.[196]
Des violations du principe de la double incrimination se sont également produites de façons plus subtiles dans une tentative pour circonvenir l’interdiction de poursuites répétées. Dans certains cas, les personnes accusées se sont retrouvées devant des chefs d’accusation légèrement modifiés ou de nouveaux témoins qui n’avaient pas témoigné dans l’affaire d’origine. Dans une affaire, un homme acquitté par un tribunal gacaca en octobre 2007 a été à nouveau arrêté dix mois plus tard sur les mêmes allégations. L’homme a contesté le fait que la partie civile dans la nouvelle affaire ne s’était pas présentée dans l’affaire initiale, mais le tribunal gacaca a poursuivi le procès et l’a condamné à 19 ans de prison.[197] L’affaire faisait partie des 18 affaires de la juridiction où des personnes accusées ont été rejugées à la direction du coordinateur de district.[198]
Dans une affaire de 2008, un homme s’est retrouvé accusé deux fois, la première fois dans un tribunal classique qui l’a acquitté,[199] puis la deuxième devant un tribunal gacaca, pour avoir été supposément impliqué dans des meurtres à l’hôpital de Gahini dans l’est du Rwanda. Quand l’homme a contesté le fait sur la base de la double incrimination, le tribunal gacaca a affirmé qu’il était jugé non pas pour avoir tué des Tutsis à l’hôpital (les allégations du premier procès) mais plutôt pour avoir mutilé les cadavres. Le tribunal gacaca l’a condamnéà 30 ans d’emprisonnement, décision confirmée en appel.[200]Étant donné que ces actes n’avaient pas été soulevés dans le premier procès, l’affaire semblait être une tentative de contourner la règle interdisant la double incrimination. La demande de l’homme en révision de son procès a été rejetée, et il est toujours en prison.
Dans une autre affaire, un homme s’est retrouvé jugé deux fois dans la même juridiction gacaca. L’affaire initiale impliquait des accusations de catégorie 2 liées à sa présence présumée à une barrière où des personnes ont été tuées, bien que pas en sa présence.[201] La cour d’appel a infirmé la décision et ordonné sa libération.[202] Toutefois, en septembre 2008, un nouveau tribunal l’a mis en accusation sur des charges de catégorie 1 basées sur des allégations selon lesquelles il avait demandé au maire de la localité d’ériger des barrières dans une zone où des meurtres ont eu lieu plus tard. L’homme a contesté la validité du procès au motif qu’aucun élément nouveau n’avait été présenté pouvant justifier un second procès. Il a aussi fait remarquer que personne ne l’avait accusé d’actes répréhensibles et que la seule preuve dans l’affaire consistait en une déclaration qu’il avait faite au cours de la phase de collecte d’information à propos d’une conversation qu’il avait eue avec le maire de la localité en 1994 sur la nécessité de protéger la communauté.[203] Bien que plus d’une dizaine de témoins aient déposé en sa faveur, et aucun à charge, le tribunal l’a inculpé et condamné à la peine de « réclusion criminelle à perpétuité ».[204] Un responsable local a reconnu auprès de Human Rights Watch que l’affaire était mal fondée et que la déclaration antérieure de l’homme était utilisée pour ouvrir une nouvelle affaire avec des chefs d’accusation légèrement modifiés. Le responsable a déclaré que la deuxième décision avait provoqué un tollé parmi la population locale.[205] Au stade de la révision, un tribunal a confirmé la condamnation mais a réduit la peine à sept ans d’emprisonnement.[206] Ce cas est non seulement un exemple de double incrimination, il illustre aussi le fait que la participation de la communauté locale ne protège pas toujours les personnes accusées contre des procès inéquitables.
Des scénarios similaires de double incrimination se sont déroulés lorsque les juridictions gacaca ont entamé un nouveau cycle de collecte d’informations dans tout le pays en 2009. Par exemple, en octobre 2007 un tribunal gacaca dans la province de l’Ouest a acquitté un homme qui avait été maintenu en détention pendant 13 ans sans jugement. Près de deux ans plus tard, un détenu a soulevé des accusations presqu’identiques contre le même homme. Le tribunal a omis d’examiner si les nouvelles allégations étaient identiques à celles soulevées dans la première affaire et il a inculpé l’homme, le condamnant à une peine de huit ans de prison.[207]
Le cas de Théodore MunyangabeThéodore Munyangabe était une haute autorité locale (sous-préfet) de la préfecture de Cyangugu avant, pendant et après le génocide. Il était l’une des rares autorités à être restée en fonction après le génocide, ayant fait l’objet de nombreux éloges pour ses actions visant à protéger et aider les Tutsis.[208] En mars 1995, il a été arrêté par la police sur des accusations d’implication dans le génocide. Un tribunal classique l’a jugé et reconnu coupable, le condamnant à mort, ce qui était la peine maximale à l’époque. Une cour d’appel a infirmé sa condamnation en juillet 1999 et a ordonné sa libération. La police a placé Munyangabe en résidence surveillée quelques jours après sa libération, toutefois, et l’a officiellement arrêté de nouveau un mois plus tard sur de nouvelles accusations de génocide non précisées.[209] Munyangabe est resté en prison pendant neuf ans, sans autre audience ni procès, jusqu’à ce qu’il soit finalement traduit devant un tribunal gacaca en novembre 2008. Le tribunal de première instance a conclu que l’affaire était identique à celle jugée devant les tribunaux classiques et a rejeté les accusations.[210] Au lieu d’être libéré cependant, Munyangabe a été traduit devant une juridiction gacaca voisine et accusé des mêmes crimes. Munyangabe a soutenu que l’affaire devait être rejetée au motif de la double incrimination, mais le tribunal n’était pas de cet avis et le procès s’est poursuivi. L’une des irrégularités les plus flagrantes au procès a été le fait que le juge-président ait obtenu d’un homme sous la contrainte qu’il fasse une déclaration écrite contre l’accusé. Après qu’un représentant local du FPR ait témoigné que l’ancien chauffeur de Munyangabe lui avait dit que l’accusé avait participé à une réunion secrète pour planifier le génocide, le tribunal a cité le chauffeur à comparaître pour témoigner. Le chauffeur a nié avoir jamais fait cette déclaration, ajoutant que le représentant du FPR et un second homme avaient sans succès tenté de faire pression sur lui pour qu’il accuse Munyangabe. Le juge-président a immédiatement réprimandé le témoin et a menacé de l’arrêter pour parjure. Quand le témoin a persisté qu’il n’avait jamais fait cette déclaration, le juge a ajourné la procédure et dit au témoin de rentrer chez lui et de réfléchir aux conséquences d’un faux témoignage. Le lendemain, le témoin a réapparu et a donné à contrecœur au tribunal une déclaration écrite impliquant l’accusé dans la réunion en question. Le tribunal a inculpé Munyangabe en grande partie sur la base de cette déclaration et l’a condamné à la peine de « réclusion criminelle à perpétuité ».[211] En appel, Munyangabe a fait valoir qu'il avait été illégalement condamné pour les mêmes crimes pour lesquels un tribunal classique l’avait déjà acquitté. Le tribunal a rejeté cet argument et a jugé que la réunion de planification du génocide présumée constituait une nouvelle accusation. Munyangabe a souligné que la question de ces réunions avait été soulevée dans l’affaire devant le tribunal classique mais avait été rejetée. Il a également noté que la nouvelle allégation n’avait pas été soulevée au cours de la phase nationale de collecte d’informations du processus gacaca et que le nouveau témoin s’était contredit lui-même à plusieurs reprises. Il a demandé au tribunal de citer le chauffeur à comparaître, mais le tribunal a refusé et a confirmé la condamnation de Munyangabe.[212] Au cours de l’appel, deux rescapés du génocide ont été intimidés et arrêtés pour avoir tenté de défendre Munyangabe. Les deux hommes se sont présentés pour témoigner le premier jour, mais l’audience a été reportée. Peu après que la communauté locale se soit dispersée ce jour-là, la police a arrêté les deux hommes sans explication et les a gardés en détention toute la nuit. Le procureur local a obtenu leur libération le lendemain après que d’autres rescapés de la communauté se soient plaints des arrestations.[213] Malgré le harcèlement, les deux hommes ont tout de même décidé de témoigner. Le premier homme a dû subir l’hostilité des juges mais n’a pas eu d’autres problèmes lors de son témoignage. Le deuxième homme a déclaré que la partie civile avait soudoyé d’autres rescapés pour accuser Munyangabe et que Munyangabe n’avait commis aucun acte répréhensible durant le génocide. Après que l’homme a quitté l’audience, la partie civile (une femme) l’a accusé d’avoir tenté de l’intimider. Le tribunal a ordonné que l’homme soit arrêté et ramené au tribunal gacaca pour interrogatoire. Pendant ce temps, le juge a réprimandé les autres rescapés présents à l’audience et leur a rappelé la « nécessité de parler d’une seule voix et de ne pas se battre les uns contre les autres. »[214] Il a menacé d’envoyer en prison pour parjure toute autre personne critiquant la partie civile. Des militaires sont allés jusqu’au domicile du second témoin et l’ont ramené au tribunal gacaca. Avant qu’ils ne soient revenus cependant la procédure de la journée s’était achevée et l’homme a été placé en détention. Après de vives protestations de la part d’autres rescapés locaux se trouvant sur les lieux, le juge-président a ordonné sa libération.[215] La juridiction gacaca a rejeté la requête en révision de Munyangabe en novembre 2009.[216] Munyangabe a alors écrit au SNJG pour se plaindre mais il n’avait pas encore reçu de réponse au moment de la rédaction de ce rapport. Le cas de Munyangabe est également abordé dans le cadre du droit à disposer du temps nécessaire pour préparer sa défense et des risques encourus par les témoins de la défense. |
Le droit d’être présent à son propre procès
Le Rwanda autorise les procès in absentia, c’est-à-dire des procèsoù l’accusé est absent.[217] La justification de ces procès est que des individus ne devraient pas être en mesure de se soustraire à la justice en ne se présentant pas à leur procès. Bien que cette pratique ne soit pas admise dans les systèmes de droit coutumier, elle est une procédure standard dans les pays de droit civil et a généralement été acceptée comme licite au regard du droit international, pour autant que certaines procédures soient suivies.[218] Le Comité des droits de l‘homme de l’ONU a insisté sur deux exigences de procédure : premièrement, l’accusé doit être dûment informé du procès ; et deuxièmement, le tribunal doit impérativement protéger tous les droits de l’accusé à une procédure équitable.[219]
Au cours des quelques dernières années, les tribunaux gacaca ont poursuivi des centaines, voire des milliers, de personnes en leur absence.[220] Non pas nécessairement que cela ait été fait en violation de la loi, mais étant donné que les tribunaux gacaca négligent souvent de protéger d'autres droits fondamentaux énoncés ci-dessus, les procès in absentia sont particulièrement problématiques.
Procès in absentia pour des raisons politiques
Dans un certain nombre de cas apparemment motivés politiquement, des personnes ont soudain appris que des tribunaux gacaca les avaient condamnées in absentia. Certaines affaires impliquaient des allégations qui avaient surgi plutôt récemment, et qui n’avaient pas été soulevées durant la phase nationale de collecte d’informations (2002-2004). D’autres semblent être le fait d'autorités judiciaires rwandaises visant à obtenir la détention d’un suspect vivant à l’étranger. Par exemple, en 2006 le TPIR a acquitté Emmanuel Bagambiki, ancien préfet de Cyangugu, de génocide.[221] Des autorités de la justice rwandaise ont qualifié l’acquittement d’ « impardonnable » et de « ridicule ».[222]Peu après, les procureurs rwandais ont mis Bagambiki en accusation pour viol, ce que les procureurs du TPIR avaient envisagé mais rejeté pour manque de preuves (les autorités judiciaires rwandaises n’avaient pas protesté contre cette décision à l’époque). Un tribunal gacaca a reconnu Bagambiki coupable de viol in absentia en octobre 2007 et a depuis demandé sonextradition de la Belgique, où il vit en exil.[223]
Avocat rwandais et ancien enquêteur de la défense du TPIR, Léonidas Nshogoza s’est retrouvé accusé par un tribunal gacaca alors que le TPIR envisageait de le mettre en accusation pour corruption d’un témoin de l’accusation afin de lui faire modifier son témoignage devant le tribunal. Lorsque les premières allégations ont surgi en juin 2007, la police rwandaise a arrêté Nshogoza et l’a mis en accusation pour corruption et déni de génocide.[224] Il est resté en prison sans procès pendant plus de cinq mois avant d’être libéré en novembre 2007.[225] Pendant ce temps, en décembre 2007, le coordinateur de district dans sa région natale de Mahembe a envoyé des instructions aux juges gacaca locaux pour qu’ils ouvrent un dossier contre lui. Ils se sont exécutés, montant rapidement un dossier, et le mettant en accusation pour implication dans la mort de quatre des enfants de sa sœur [226] et fixant la date du procès au 22 janvier 2008, qui a été reportée d’une semaine après que Nshogoza ne se soit pas présenté.[227]
Trois juges gacaca ont indiqué à Human Rights Watch, indépendamment l’un de l’autre, qu’ils étaient surpris d’entendre parler de l’affaire de Nshogoza parce que tous les procès gacaca dans le secteur avaient été officiellement terminés. Deux des juges ont indiqué que le coordinateur de district avait envoyé une lettre le 29 janvier leur ordonnant de se prononcer immédiatement sur l’affaire et d’émettre un jugement par défaut le 7 février si l’accusé ne se présentait pas.[228] L’un de ces juges ainsi qu’une autorité locale ont déclaré à Human Rights Watch qu’ils estimaient que l’affaire n’était pas fondée, position partagée par plusieurs membres de la communauté qui vivaient dans la région en 1994. Le tribunal de première instance a acquitté Nshogoza in absentia, une décision confirmée en appel.[229] Le 8 février 2008, Nshogoza s’est livré au TPIR après que le tribunal a délivré un mandat d’arrêt contre lui.[230] Le TPIR a condamné Nshogoza pour outrage au tribunal, pour avoir rencontré un témoin de l’accusation en violation des ordres de protection du tribunal, et pour divulgation à un tiers d’informations protégées sur le témoin, mais il l’a acquitté de l’accusation de corruption. Le TPIR l’a condamné à une peine de 10 mois d’emprisonnement, mais l’a libéré car il avait déjà passé plus d’un an en détention.[231]
Le cas de Léopold Munyakazi est un exemple frappant d’une affaire de génocide ayant apparemment des motifs politiques. En septembre 2008, Munyakazi, vivant alors aux États-Unis, a fait l’objet d’allégations dans une procédure gacaca au moment même où le gouvernement rwandais demandait un mandat d’arrêt international à son encontre pour la deuxième fois.[232] Peu de temps après le génocide, Munyakazi a passé une période en prison pour des accusations liées au génocide, mais en 1999 le parquet général au Rwanda a ordonné sa remise en liberté pour manque de preuves. Il a ensuite travaillé pour une université nationale du Rwanda, poste pour lequel il a demandé et obtenu des certificats de bonne conduite de la part de plusieurs représentants du gouvernement. En juillet 2004, alors qu’il participait à une conférence universitaire aux États-Unis, des amis l’ont contacté pour l’avertir de rumeurs inquiétantes circulant à son sujet au Rwanda. Munyakazi a décidé de ne pas retourner au Rwanda.[233] Peu de temps après, une commission parlementaire l’a accusé — ainsi que des centaines d’autres personnes et organisations — de « divisionnisme ».[234] Il a demandé l’asile aux États-Unis et a commencé à enseigner dans une université au Maryland.[235] En octobre 2006, Munyakazi a donné une conférence universitaire remettant en question le discours officiel rwandais sur le génocide, qui a attiré l’attention des autorités rwandaises.[236] Un mois plus tard, le parquet a émis un mandat d’arrêt international contre Munyakazi sur des accusations de génocide et de négationnisme.[237]
À l’automne de 2008, le parquet a redoublé d’efforts pour obtenir l’extradition de Munyakazi et a fait équipe avec la chaîne de télévision américaine NBC (et son émission « To Catch a Predator », « Chasse au prédateur ») pour retrouver Munyakazi aux États-Unis.[238] Vers la même époque, en septembre 2008, le parquet a émis un deuxième mandat d’arrêt contre lui,[239] et des parents au Rwanda ont reçu une citation pour sa comparution devant un tribunal gacaca.[240] Le procès gacaca a commencé un an plus tard fin 2009 en l’absence de Munyakazi, mais l’affaire semble avoir été renvoyée ensuite à la direction du SNJG.[241] Human Rights Watch n’a pas pu confirmer l’implication du SNJG et n’a pas été en mesure de trouver la justification de ce renvoi.
Autres procès in absentia
Le cas de Jean-Népomuscène MunyangabeEn novembre 2007, Jean-Népomuscène Munyangabe a appris qu’il avait été reconnu coupable de génocide et condamné à 18 ans d’emprisonnement dans un tribunal gacaca du sud du Rwanda. À l'époque, il travaillait pour le Programme alimentaire mondial des Nations Unies au Tchad (où il se trouvait depuis 2005). Ni lui ni sa famille, qui résidait toujours au Rwanda, n’avaient été informés de l’affaire en cours contre lui, alors même que son emploi à l’époque était bien connu dans la région.[242] Convaincu de sa propre innocence, Munyangabe a pris congé de son poste au Tchad et il est retourné au Rwanda pour contester la condamnation.[243] Il a déposé son appel écrit en janvier 2008. Il a été arrêté et maintenu en détention pendant près de trois mois jusqu’à ce que son procès ait lieu.[244] Un verdict définitif a été prononcé en juillet 2008 après une série de procédures gacaca défectueuses, abordées ci-dessous.Munyangabe a été reconnu coupable d’implication dans la mort de deux Tutsis qui avaient cherché refuge dans sa maison familiale et il a été condamné à 19 ans d’emprisonnement.[245] Le procès a révélé que, plutôt que d'être responsables de meurtres commis pendant le génocide, Munyangabe et sa famille avaient activement cherché à protéger les Tutsis des tueurs en 1994 en les cachant dans leur maison. Les deux victimes sont venues chercher refuge dans leur maison mais ont changé d’avis quand elles ont constaté que d’autres Tutsis s’y cachaient déjà et elles ont eu peur d’être découvertes par les milices locales. Les victimes ont convaincu le père de Munyangabe de les aider à fuir vers le Burundi, mais ils ont été interceptés sur la route et les deux Tutsis ont été tués. Le père de Munyangabe a été tué peu après le génocide à son retour au Rwanda. Sept témoins, dont quatre voisins et trois rescapés du génocide qui s’étaient réfugiés dans la maison de sa famille ont déposé en faveur de Munyangabe. Une parente de la victime a affirmé qu’elle avait vu Munyangabe voyageant avec son père et les victimes ce soir-là avant que la tuerie n’ait lieu, mais son témoignage a été contredit par plusieurs autres témoins. D’autres personnes qui ont accusé Munyangabe ont simplement déclaré qu’il était ami avec une famille voisine ayant commis des crimes pendant le génocide et qu’il devait avoir commis le génocide aussi. Une personne a émis l’hypothèse que Munyangabe avait abandonné ses études à Butare et était revenu dans sa maison familiale en 1994 pour commettre des crimes. Toutes ces personnes étaient des membres de la famille de la victime, et aucune n’était un témoin direct des événements en question. Le tribunal gacaca a acquitté Munyangabe et a ordonné sa libération immédiate le 4 avril 2008. Le coordinateur de district a transmis l’ordre de libération à la prison où Munyangabe était détenu, mais il est ensuite revenu le récupérer et a empêché la libération de Munyangabe. La partie civile a interjeté appel de l’acquittement, et Munyangabe a été maintenu en prison, au prétexte qu’ainsi il ne pourrait pas fuir le pays.[246] Le procès en appel, qui a commencé le mois suivant, s’est ouvert sur le refus du juge-président de se récuser en dépit des allégations selon lesquelles il était un ami proche de la partie civile dans l’affaire. Trois autres audiences ont eu lieu, au cours desquelles le juge-président a agi de façon partiale, a pris des décisions sans consulter les autres juges, a réagi avec colère aux déclarations faites par l’accusé, a interrompu et mis en détention au moins trois témoins à décharge sur des allégations de parjure et tenté de manipuler le procès-verbal écrit de la procédure.[247] Le 17 juin 2008, le procès a été suspendu indéfiniment. Le SNJG est intervenu pour transférer l’affaire à une autre juridiction, mais les nouveaux juges n’ont siégé que pendant une seule séance et ont condamné Munyangabe malgré l’absence de nouveaux éléments de preuve. Il a été condamné à 19 ans d’emprisonnement.[248] En mai 2010, le SNJG a refusé la demande de Munyangabe en révision, le laissant sans autre recours.[249] Au moment de la rédaction de ce rapport, il était toujours en prison. Le cas de Munyangabe est également abordé dans le cadre du droit de ne pas être détenu arbitrairement et du droit à une justice impartiale. |
Dans certains cas, des griefs privés ont contribué à expliquer la décision de tenir des procès en l’absence de l’accusé. Le cas de Jean-Népomuscène Munyangabe ci-dessus en est un exemple, la partie civile — une famille influente dans le sud dont plusieurs membres de premier plan vivent et travaillent à Kigali — utilisant la présence de l’accusé à l’étranger pour obtenir un jugement sans même que lui ou sa famille ne soient au courant de l’affaire.[250]
Tous les procès gacacain absentia n’ont pas été mal fondés ou intentés pour des raisons politiques ou personnelles. Dans certains cas, l’accusé a fui le pays ou s’est caché, apparemment pour échapper à la justice.[251] Dans d’autres cas, des individus ont choisi de ne pas comparaître parce qu'ils pensaient qu'ils ne bénéficieraient pas d’un procès équitable, ou bien parce qu’ils craignaient d’être jugés deux fois ou inculpés de chefs d’accusation supplémentaires, en particulier durant la nouvelle phase de collecte d’informations en 2009.[252] Toutefois, les autorités ont également accusé publiquement un grand nombre de Rwandais, qui ont peut-être quitté le pays pour des raisons légitimes, de vouloir se soustraire à la justice.[253] Par exemple à la fin de l’été et au début de l’automne 2009, des centaines de Rwandais ont traversé la frontière pour se rendre au Burundi. Les entretiens menés par Human Rights Watch auprès de personnes qui se sont réfugiées dans les provinces de Kirundo et de Ngozi au Burundi en octobre 2009 laissent à penser que nombre d’entre elles ont pu avoir une crainte plausible de persécutions — et non de poursuites — au Rwanda.[254] De même, des réfugiés rwandais interrogés par d’autres ONG début 2010 en Ouganda ont déclaré avoir fui en partie parce qu’ils craignaient que les autorités rwandaises ainsi que des particuliers ne manipulent les tribunaux gacaca à leurs propres fins.[255] Human Rights Watch n'est pas en mesure de vérifier si certaines de ces personnes peuvent avoir participé au génocide ou peuvent avoir des affaires pendantes devant des tribunaux gacaca ; cependant, on ne peut pas présumer, comme le gouvernement rwandais l’a fait, que la plupart d’entre elles ou toutes cherchaient à échapper à la justice simplement parce qu’elles ont quitté le Rwanda.
Le droit de ne pas être arrêté arbitrairement
Le droit rwandais ainsi que le droit international garantissent le droit de ne pas être arrêté ou détenu arbitrairement.[256] Le Rwanda a réalisé d'importants progrès sur ce front au cours des dix-sept dernières années, mais les préoccupations restent importantes. Fin novembre 2010, la secrétaire exécutive de la CNDP a présenté au Parlement le rapport annuel de la Commission sur les droits de la personne et a signalé des problèmes persistants en matière d’arrestation et de détentions arbitraires, ainsi que de détention préventive prolongée.[257]
Selon le PIDCP, les victimes d’arrestation ou de détention illicites ont droit à une indemnisation.[258] Toutefois, ni les lois gacaca ni le Code de procédure pénale ne prévoient un tel droit. En décembre 2003, la Commission nationale de l’unité et la réconciliation a recommandé la création d’un fonds de compensation pour les personnes ayant été emprisonnées à tort au lendemain du génocide et pour les héritiers des personnes innocentes décédées en prison.[259] La CNDP a formulé des recommandations similaires, notamment dans sa présentation de 2010 au parlement.[260] Le gouvernement n’a jamais pris de mesures pour accorder une indemnisation pour les cas de détention illicite et ne semble pas être prêt à envisager de telles mesures suite aux récentes recommandations de la CNDP.
Dans les années qui ont suivi le génocide, des dizaines de milliers de personnes ont été arrêtées sur la base d'une seule accusation non vérifiée de participation au génocide et ont été détenues pendant de longues périodes (pendant des années, dans de nombreux cas) sans aucune forme de procédure équitable.[261] En 1998, la population carcérale avait atteint environ 130 000 personnes, avec des conditions de détention mettant la vie des personnes en péril.[262] Le coût et la logistique énorme nécessaires pour subvenir à une population carcérale aussi colossale ont été parmi les facteurs qui ont conduit le gouvernement à décider de lancer le processus gacaca pour les cas de génocide.[263] À 2008, à la suite de plusieurs milliers de libérations, la surpopulation carcérale avait diminué.
Aujourd’hui, la population carcérale s’est stabilisée à un peu plus de 60 000 personnes, ce qui est encore bien au-dessus de la pleine capacité des établissements pénitentiaires du pays.[264] Près des deux tiers de la population carcérale ont été reconnus coupables d’accusations liées au génocide.[265] Les conditions de détention restent dures. En février 2011, environ 130 personnes se trouvaient toujours en détention dans l’attente de leur procès pour accusations liées au génocide, certaines ayant déjà passé de nombreuses années en prison.[266]
Ces dernières années, les autorités ont introduit un certain nombre de mesures positives pour réduire le risque de détention arbitraire et s’assurer que les prisonniers qui ont purgé leur peine sont libérés. En 2004, des modifications du Code de procédure pénale ont donné aux juges des pouvoirs d’habeas corpus pour contraindre la police et les procureurs à présenter au tribunal les personnes pouvant être illégalement détenues. Ces modifications ont également autorisé les juges à sanctionner les agents de l’État responsables de détention arbitraire, mais les sanctions détaillées à la disposition des juges n’ont pas encore été exposées dans un code pénal amendé. Les modifications de 2004 ont également précisé que les détenus doivent initialement être placés en détention aux brigades de police, ce qui facilite leur localisation par les parents et autres personnes.[267]
L’arrestation et la détention arbitraires demeurent un problème au Rwanda. Human Rights Watch a rencontré un certain nombre de cas dans lesquels la police a arrêté des personnes sans fondement légal et les a gardées en détention pendant plusieurs jours. Dans certains cas, la police a détenu des personnes accusées avant ou après des procès gacaca sans ordonnance d'un tribunal. Par exemple, dans un cas survenu en 2006 dans le nord du pays, la police a arrêté un officier de la garde présidentielle alors qu’il assistait aux obsèques de son grand-père. Il a été détenu au bureau du coordinateur de cellule pendant deux jours jusqu’à son procès, surveillé par des membres des forces de défense locales (LDF), les forces paramilitaires soutenues par le gouvernement qui font des patrouilles dans les communautés locales.[268] La police a arrêté un autre homme en juin 2008 et l’a gardé en détention pendant trois jours jusqu’à son procès, où il a été reconnu coupable.[269] Dans l’ouest du pays, la police a arrêté un autre homme en août 2008 et l’a détenu pendant cinq jours dans l’attente de son procès.[270]
Human Rights Watch a aussi documenté des cas où les tribunaux gacaca ont ordonné la détention de personnes accusées ou de témoins sans établir que la personne avait l’intention de fuir ou qu’elle pourrait causer préjudice à autrui ou à elle-même si elle restait en liberté. En avril 2010, un tribunal gacaca dans le sud du pays a ordonné qu’un homme qui assistait à une audience d’appel contre son acquittement soit détenu en attendant la fin de la procédure deux jours plus tard (où il a été déclaré coupable).[271]
Human Rights Watch a également documenté quelques cas dans lesquels des individus ont été maintenus en détention bien qu’ils aient été acquittés. Le cas de Jean-Népomuscène Munyangabe, abordé ci-dessus, illustre ce problème.[272]
De même, en février 2008, un tribunal gacaca aacquitté Justin Nsengimana des chefs d’accusation de distribution d’armes, de port d’une arme illégale et de viol pendant le génocide.[273] Il est resté en prison à Butare pendant deux ans au motif qu’il y avait une affaire de catégorie 1 pendante contre lui devant les tribunaux classiques. Toutefois, Nsengimana n’a jamais été traduit devant un tribunal classique. Au lieu de cela, en février 2010, il a fait face à de nouvelles accusations dans le même tribunal gacaca qui l’avait jugé et acquitté des accusations antérieures.[274] Le tribunal l’a reconnu coupable des deux mêmes chefs d’accusation liés aux armes et d’avoir participé à des massacres à Butare, et l’a condamné à la peine de « réclusion criminelle à perpétuité ».[275]
Dans un autre cas, Viateur Munyandekwe a été acquitté par un tribunal gacaca trois fois : tout d’abord le 26 août 2007, pour des accusations de non-assistance à un voisin en danger et de participation au meurtre d’un homme ;[276] puis le 18 janvier 2009 pour des accusations de viol ;[277] et enfin le 17 mars 2010, pour les mêmes accusations d’avoir tué un homme.[278] Toutefois, il est resté en détention tout le temps des trois procès, et n’a été finalement libéré qu’en 2010 après plus de 31 mois de détention.[279]
Différences entre les normes judiciaires des tribunaux classiques et celles des tribunaux gacaca
D'autres différences entre le système classique de la justice du Rwanda et les tribunaux gacaca ont trait aux qualifications des juges et aux normes juridiques appliquées dans les procès. En optant pour le système gacaca, les autorités rwandaises ont fait des compromis qui étaient nécessaires selon elles pour accélérer la résolution des affaires et pour éviter que celles-ci ne s’enlisent du fait de formalités légales. Toutefois, l’absence de garanties suffisantes a conduit à de graves irrégularités.
Qualifications, formation, rémunération et destitution des juges
Il aurait été impossible de doter les plus de 12 000 tribunaux gacaca en professionnels qualifiés juridiquement. La guerre et le génocide avaient dévasté le système judiciaire, avec seulement 237 juges en mesure de reprendre le travail en août 1994 sur plus de 600 juges en service avant le génocide.[280] Si le nombre de juges avait plus que triplé d’ici 1996, il était encore insuffisant pour faire face à la charge de travail énorme des affaires liées au génocide.[281] Par conséquent, dans le cadre de la décision de transférer ces affaires aux tribunaux gacaca, des juges gacaca (inyangamugayo) devaient être élus par les communautés locales pour être formés à traiter des dossiers complexes et à appliquer de manière uniforme les normes juridiques.[282]
Qualifications des juges gacaca
En octobre 2001, la population a élu environ 259 000 hommes et femmes non professionnels pour servir en tant que juges gacaca dans les affaires de génocide.[283] La première loi gacaca, adoptée en 2001, a établi les critères pour les candidats : les juges devaient être âgés de 21 ans au moins, être des personnes d’« intégrité » au sein de leur communauté, et des citoyens ordinaires.[284] Les « personnes intègres » étaient définies comme des individus dotés d’une haute moralité qui n’avaient pas participé au génocide, qui n’avaient pas de convictions sectaires ou « divisionnistes », et qui n’avaient pas été condamnés à plus de six mois d’emprisonnement.[285]
Au moment de leur élection en octobre 2001, un nombre important de juges gacaca n’avaient pas terminé l’école primaire, même si ceux qui se trouvaient au niveau du district et de la province tendaient à avoir un plus haut niveau d’éducation.[286] De même, la majorité des juges au niveau de la cellule et du secteur étaient des agriculteurs, alors qu’un grand nombre de juges aux niveaux plus élevés étaient des enseignants ou des fonctionnaires.[287] Les femmes étaient bien représentées parmi les juges gacaca mais restaient minoritaires.[288]
Formation judiciaire
En avril et mai 2002, les juges gacaca ont participé à six sessions d'une journée de formation obligatoire dans tout le pays (réparties sur trois semaines), qui ont été menées principalement par des magistrats et des étudiants en droit.[289] Chaque groupe de 70 à 90 juges a reçu une formation sur les principes de base de la loi gacaca, les compétences en gestion, l’éthique et les traumatismes.[290] Compte tenu du faible niveau de scolarité et d’alphabétisation de nombreux juges, et des complexités et ambiguïtés de la loi gacaca, on a du mal à voir comment cette formation pourrait avoir été suffisante pour préparer les juges à rendre des décisions dans des affaires liées au génocide.[291]
La Cour Suprême a publié un manuel pour les juges gacaca, qui portait principalement sur les questions de procédure, avec peu d'explications sur les éléments matériels qui doivent être prouvés pour condamner une personne, le poids qui devrait être accordé aux différentes formes de preuves, et les normes de preuve applicables.[292] Le conseiller juridique résident du Département de la Justice des États-Unis au Rwanda a exprimé des préoccupations à l’époque sur le fait que les « juges et procureurs qui donnaient la formation juridique à des personnes responsables de la formation effective des juges gacaca enseignaient des instructions largement différentes sur la catégorisation. »[293] Les effets des instructions divergentes sont vite devenus évidents lorsque divers tribunaux gacaca ont adopté des approches remarquablement différentes de la catégorisation des infractions et ont rendu des décisions très différentes dans des affaires portant sur des faits similaires.
En 2005, le SNJG a également distribué des brochures simplifiées pour aider les juges dans les questions de procédure mais sans donner d’indications supplémentaires sur la personne qui porte la charge de la preuve, la façon d’évaluer les preuves ou le niveau de preuve nécessaire pour condamner une personne.[294] En 2006 et 2007, d’autres sessions de formation courtes, en général de plusieurs jours, ont également été fournies aux juges.[295]
En 2008, après la décision de transférer la plupart des affaires de catégorie 1 (dont la majorité concernait des viols) aux tribunaux gacaca, le SNJG a lancé un nouveau programme de formation pour sensibiliser les juges sur les problèmes concernés dans les affaires de violences sexuelles. Le programme s’adressait uniquement aux juges sélectionnés pour entendre les affaires de catégorie 1 et comprenait deux parties. D’abord, des représentants du SNJG se sont déplacés dans tout le pays pour instruire les juges sur la façon de gérer les aspects de procédure. Puis l’Institut pour la pratique juridique et le développement (ILPD), financé par les Pays-Bas, a envoyé une équipe d’avocats et de conseillers rwandais dans tout le pays pour mener des exercices de jeux de rôles auprès des juges afin de les sensibiliser aux traumatismes et autres questions pertinentes dans les affaires de viols.[296]
Rémunération
Les juges gacaca ne reçoivent aucune rémunération monétaire pour leurs services, même si ces dernières années le SNJG leur a alloué des compensations en nature ainsi qu’une petite somme d’argent (voir ci-dessous). Dès le début, des commentateurs ont exprimé la crainte qu’exiger des juges qu’ils prennent un ou deux jours par semaine en dehors de leur propre travail pendant plusieurs années consécutives sans compensation monétaire appropriée pourrait être une incitation à la corruption.[297] De ce fait, le gouvernement rwandais a essayé de développer des moyens alternatifs pour indemniser les juges gacaca et pour garantir leur engagement envers le processus judiciaire, notamment en leur fournissant une assurance maladie nationale et en organisant des cérémonies officielles au niveau des communautés locales pour reconnaître leurs services.[298]
En 2005, le SNJG et la Coopération technique belge ont proposé d’autres moyens pour améliorer la reconnaissance du rôle des juges, y compris la distribution de bicyclettes ou de chèvres, des contributions financières à une banque locale pour des prêts de microcrédit, et une journée nationale pour célébrer les juges.[299] Le gouvernement a rejeté nombre de ces propositions, mais le SNJG a distribué des radios à tous les juges en 2007 et des bicyclettes à chaque juridiction en 2008. Il a également versé un paiement unique de 4 300 francs rwandais (environ 7 USD) à chacun des juges.[300]
Suspension des juges
Selon la loi, les juges gacaca peuvent être remplacés s’ils omettent à plusieurs reprises de se présenter aux audiences sans raison valable, sont reconnus coupables et condamnés à une peine de prison de six mois ou plus, s’ils incitent au sectarisme, occupent des positions politiques ou gouvernementales, ou font quoi que ce soit d’incompatible avec leur rôle de personnes intègres.[301] En 2005, le SNJG a émis une directive spéciale sur le licenciement et le remplacement des juges.[302]
Initialement, de nombreux juges ont été suspendus pour leur participation présumée au génocide. La Coopération technique belge a indiqué qu’à décembre 2003, plus de 650 juges gacaca et 15 coordinateurs de district avaient été destitués en raison de ces allégations.[303] Le SNJG a indiqué plus tard que 45 396 juges ont dû être destitués (et remplacés) en raison de leur implication présumée dans le génocide.[304] Dans les années qui ont suivi, un certain nombre de juges ont également été destitués pour corruption, c’est-à-dire pour avoir sollicité et accepté des pots-de-vin de la part de personnes accusées ou d’autres parties intéressées. La secrétaire exécutive du SNJG a indiqué en janvier 2008 que 56 000 juges inefficaces ou corrompus avaient été renvoyés.[305] Au total, plus de 92 000 juges (soit 35 pour cent du nombre total) ont été destitués depuis la création du système gacaca. La décision du SNJG de renvoyer les juges présumés corrompus ou coupables d’infractions a été une mesure positive. Toutefois, le fait qu’une telle démarche ait été nécessaire a renforcé le manque de confiance des Rwandais à l’égard des tribunaux et a augmenté leurs inquiétudes quant à l’impartialité des juges.
Charge de la preuve et normes de preuve
Contrairement au système judiciaire classique, les tribunaux gacaca n'ont pas de procédures régissant la preuve qui est admissible ou inadmissible, qui a la charge de prouver qu'une personne a commis un crime, et quelle norme doit être utilisée pour déterminer la culpabilité. D’après les observations de procès faites par Human Rights Watch, certains principes juridiques généraux semblaient être observés, par exemple la notion qu’un témoignage oculaire est préférable à des ouï-dire, que le témoignage d’un parent peut être biaisé et que la corroboration par plusieurs témoins rend une allégation plus crédible et fiable. Néanmoins, les pratiques gacaca ont manqué d’uniformité ou de cohérence. Des témoignages par ouï-dire se sont vu régulièrement accorder crédit et un poids significatif sans que des mesures soient prises pour convoquer la personne ayant fait la déclaration initiale. Des condamnations ont été aussi souvent fondées sur des affirmations non corroborées ou incohérentes de la part de témoins, dont certains n'avaient pas une connaissance directe des événements en question.
Charge de la preuve
Du fait que les procès gacaca ne comportent pas de procureur, au début d’un procès les juges-présidents annoncent les accusations portées contre l’accusé et donnent un aperçu général des allégations. La parole est ensuite donnée à l’accusé pour fournir des informations et exposer sa défense. Les juges posent souvent des questions complémentaires. Puis les témoins des événements sont appelés, d’abord ceux qui témoignent contre l’accusé, suivis des témoins à décharge le cas échéant. La partie civile, normalement la victime ou des proches de la victime, fait habituellement une déclaration. Une fois que les témoins ont été entendus, la procédure est ouverte à la population en général si elle souhaite faire des déclarations ou poser des questions à toute personne qui s’est déjà exprimée.
Bien que la loi exige qu'un accusé soit présumé innocent, dans la pratique la charge a généralement incombé à l’accusé de prouver qu’il ou elle n’a pas commis le crime allégué. L’absence de ministère public fait peser encore plus lourdement la charge de la preuve sur l’accusé. De nombreux juges ont ouvertement manifesté de l'hostilité envers l'accusé, fait des remarques désobligeantes ou interrompu le témoignage de l'accusé. Ce dernier a également dû amener ses propres témoins pour l’aider à se défendre contre les allégations. Si la personne accusée n’a pas été en mesure de trouver des témoins à décharge, elle a en général été reconnue coupable. Human Rights Watch a documenté un certain nombre de cas où les tribunaux ont condamné une personne malgré le fait qu’aucun témoin n’avait déposé contre elle et que seuls des témoins à décharge disculpant l’accusé avaient comparu au procès.[306]
Normes de preuve
Souvent, les juridictions gacaca ont appliqué des normes de preuve divergentes. Les lois gacaca ne donnaient pas d’indications objectives sur le poids à accorder aux témoignages, au niveau nécessaire de corroboration pour établir les faits et à la quantité de preuves nécessaires pour inculper une personne. En conséquence, les juges ont été laissés à leur subjectivité pour décider sur ces questions. La seule exigence formulée par la loi gacaca 2004 était que les « jugements doivent être motivés » et doivent être signés ou attestés par tous les membres du tribunal gacaca.[307] Les jugements gacaca diffèrent de ceux des tribunaux classiques en ce qu’ils ne sont pas des opinions écrites formelles. Plus précisément, ce sont de brefs résumés manuscrits (connus sous le nom de « fiches de jugement ») qui sont inclus dans le registre des procès-verbaux pour chaque juridiction et sont signés par les juges et les accusés.[308] De nombreux jugements n’étaient justifiés par aucun argument pour expliquer quels éléments de preuve avaient été retenus ou rejetés pour en arriver à une décision.[309] Dans certains cas, même les accusations qui ont été retenues ou rejetées contre l'accusé ne figuraient pas dans le jugement. Ces carences ont rendu le processus des appels plus difficile pour les personnes accusées, ainsi que pour les juges entendant les appels.
En 2004, le SNJG a pris certaines mesures pour aider les juges à résoudre des affaires et pour garantir un certain degré de cohérence entre les juridictions. Il a lancé une initiative grâce à laquelle les juges gacaca rencontrant des problèmes particulièrement complexes pourraient demander de l’aide à des experts juridiques.[310] Le SNJG disposait d’une équipe d’experts basés à Kigali qui répondaient aux appels téléphoniques de toutes les juridictions du pays et qui rendaient visite aux juges occasionnellement afin de discuter des problèmes.[311]
Deux domaines illustrent l’ampleur des divergences dans les décisions des tribunaux : ce sont l’intention légale et la crédibilité des témoins. L’exigence de l’« intention », par rapport à laquelle le tribunal doit établir l’état d’esprit de l’accusé et conclure si oui ou non la personne accusée avait l’intention de commettre le crime allégué, s’est avérée naturellement l’un des concepts les plus difficiles à maitriser pour les juges.[312] Afin de condamner une personne pour génocide en vertu du droit rwandais et international, un tribunal doit constater que cette personne avait l’intention « de détruire, ou tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux. »[313] Si le tribunal ne peut prouver l’intention, il devrait acquitter l’accusé du crime spécifique de génocide. En pratique, toutefois, les juges ont rarement pris en compte la question de l’intention et ne l’ont presque jamais incluse dans les arguments des décisions.[314] Le résultat est que de nombreuses personnes ont été reconnues coupables de génocide sans aucune preuve qu’elles avaient l’intention de détruite, en totalité ou en partie, le groupe ethnique tutsi. Étant donné que la plupart des affaires gacaca concernaient le génocide, le SNJG aurait dû informer les juges sur la nécessité d’examiner l’intention de l’accusé et aurait dû fournir des indications détaillées sur la question.
Cette question s'est avérée particulièrement problématique lorsque les juges ont été confrontés à la question de la responsabilité de complicité. Au regard des lois gacaca, un complice est quelqu’un qui « par n’importe quel moyen, aura prêté une aide indispensable à commettre l’infraction » et qui est puni au même degré que l’auteur principal du crime.[315] Toutefois, les lois gacaca étaient muettes quant à savoir si une personne doit avoir l’intention d’aider quelqu’un d’autre à commettre un délit avant de pouvoir être qualifiée de complice, laissant la décision à la discrétion des juges.[316] Certains tribunaux ont jugé que les personnes présentes à des barrières où des meurtres ont eu lieu ultérieurement, ou qui ont été contraintes à participer à des patrouilles nocturnes pour garantir la sécurité dans leur quartier, étaient complices. D’autres tribunaux ont exigé que des personnes soient physiquement présentes lors des meurtres commis ou qu’elles aient eu l’intention que leurs actions causent des morts ultérieures.[317]
Étant donné que de nombreuses personnes ont été obligées de participer à des patrouilles de quartier en 1994, le SNJG aurait pu aisément prévoir que la question de savoir si les complices devaient avoir eu l’intention de certaines conséquences se poserait dans un nombre important de cas. Pourtant, le SNJG a omis de fournir des conseils, même après avoir été mis au courant des approches divergentes des juges par des observateurs indépendants comme ASF. Plus précisément, le SNJG aurait dû préciser aux juges que la simple présence d’une personne à des barrières ou sur toute autre scène de crime n’était pas suffisante pour l’inculper de complicité et qu’ils devaient exiger la preuve que les actions de la personne constituaient clairement une aide ou un encouragement à commettre un crime. Ce n’est qu’en mars 2007 que la secrétaire exécutive du SNJG a finalement déclaré publiquement que la présence d’une personne à une barrière n’était pas en soi suffisante pour inculper cette personne d’un crime.[318] Aucune autre orientation n’a été donnée sur la responsabilité de complicité.
Les tribunaux ont aussi accepté régulièrement des ouï-dire au lieu de citer à comparaître la personne ayant fait la déclaration initiale ou de demander si cette personne pourrait comparaître comme témoin. Bien que la preuve par ouï-dire soit autorisée dans de nombreux pays, y compris les tribunaux classiques au Rwanda et de nombreuses juridictions de droit civil en Europe, les tribunaux reconnaissent en général qu’il s’agit d’une forme secondaire de la preuve dont la fiabilité doit être vérifiée. Les tribunaux gacaca ne semblent pas avoir fait régulièrement cette distinction et ont au contraire accordé souvent un poids significatif aux déclarations par ouï-dire.
Dans le cas de Jean-Népomuscène Munyangabe, abordé ci-dessus, un membre de la communauté a déclaré au tribunal qu’un autre homme lui avait dit, au cours d’une précédente audience gacaca, que l’accusé avait participé à une attaque en avril 1994. Le juge-président a demandé à l’homme pourquoi la personne qui avait fait cette déclaration n’avait pas témoigné de ce fait lors de l’audience précédente, mais n’a pas demandé si l’homme pouvait comparaître devant le tribunal pour témoigner et n’a pas envisagé de reporter l’audience pour citer cet homme à comparaître.[319] Dans d’autres cas, les tribunaux ont accepté des témoignages écrits — en général sous forme de notes manuscrites — comme des preuves fiables sans aucune discussion sérieuse pour savoir si la personne qui avait écrit la note aurait pu comparaître devant le tribunal pour témoigner et être interrogée par les juges et l’accusé. Les tribunaux ont aussi omis de vérifier l’authenticité de ces notes manuscrites.[320]
Dans certains cas, les juges ont aussi eu du mal à évaluer la qualité d’un témoignage. Parfois, ils n’ont pas identifié la partialité évidente de la part de témoins contre l’une des parties ou ont omis de creuser davantage quand des incohérences évidentes ont surgi dans une déposition de témoin ou entre différents témoins.
Dans le cas de Pascal Habarugira, abordé ci-dessus, l’accusé a fait remarquer plusieurs incohérences dans la déposition de deux témoins clés au stade de l’appel.[321] Il a déclaré qu’il pourrait fournir au tribunal la preuve de ces incohérences en présentant des jugements écrits rendus dans d’autres procès au cours desquels ces personnes avaient témoigné. Le juge-président a réprimandé l’accusé, lui disant qu’il essayait de transformer l’affaire en un procès formel comme s’il s’agissait d’un tribunal classique. Il a déclaré que cette incohérence n’était pas pertinente pour la valeur des dépositions des témoins et que l’accusé devait « arrêter de faire perdre du temps. »[322]
Dans le cas de Théodore Munyangabe, également abordé ci-dessus, un témoin clé s’est contredit de façon importante entre le procès de première instance et le procès en appel.[323] Lorsque l’accusé a relevé les incohérences en appel, le juge-président a rejeté son argument et il a lu à haute voix la déposition faite par le témoin lors du procès. L’accusé, ainsi qu’un certain nombre de membres de la communauté, ont fait objection, disant que la déposition lue par le juge (comme en témoignait le procès-verbal du tribunal de première instance) n’était pas identique à celle présentée au procès et que la déclaration avait dû être modifiée après le procès. Les juges ont rejeté l’argument et, s’appuyant sur la déclaration antérieure du témoin, ont confirmé la condamnation.[324]
Détermination des peines et des réparations
La question de ce qui constitue une peine appropriée pour le génocide et les délits afférents a été vivement débattue tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du Rwanda. Le génocide est parmi les plus odieux des crimes, et en tant que tel la peine doit refléter la gravité du crime.[325] Le gouvernement rwandais a exprimé sa déception à l’occasion de ce qu’il considérait comme des peines « clémentes » prononcées par le TPIR.[326] Depuis que le Rwanda a aboli la peine de mort en 2007, la peine maximum pour le génocide devant les tribunaux rwandais (que ce soit les tribunaux classiques ou les tribunaux gacaca) est la peine de « réclusion criminelle à perpétuité ».[327]
Pour déterminer les peines, les tribunaux gacaca suivent des directives qui peuvent être globalement résumées comme suit :
- Les prévenus de la catégorie 1 sont condamnés à une peine obligatoire de « réclusion criminelle à perpétuité »;
- Les prévenus de la catégorie 2 sont condamnés à des peines d’emprisonnement allant de cinq ans à la réclusion criminelle à perpétuité, selon la nature du délit et si la personne a eu ou non l’intention de tuer ; et
- Les prévenus de la catégorie 3 sont condamnés à payer des indemnités correspondant aux dommages causés.[328]
Les personnes qui avouent bénéficient d’une réduction de peine, celles qui avouent avant même d’être accusées recevant les peines les plus légères.[329]
Selon la loi, les personnes condamnées peuvent aussi être déchues de certains droits civiques, tels que le droit de vote, le droit de servir dans les forces armées ou la fonction publique, et le droit d’exercer la profession d’enseignants ou de médecins.[330] Les enfants ayant moins de 14 ans au moment des faits ne peuvent pas faire l’objet de poursuites, tandis que les enfants ayant entre 14 et 18 ans bénéficient de peines réduites.[331]
Libérations provisoires
Au fil des ans, le gouvernement rwandais a tenté de réduire la population carcérale en libérant certaines catégories de détenus, principalement les personnes âgées, les malades chroniques, les mineurs et les détenus n’ayant pas de dossier. Le 1er janvier 2003, le Président Kagame a annoncé la libération provisoire de prisonniers ayant avoué leurs crimes (sauf ceux de la catégorie 1) et qui avaient déjà purgé leurs peines.[332] Parmi les personnes libérées figuraient des suspects de génocide et des suspects de délits sans lien avec le génocide.[333]
En 2003, le gouvernement avait libéré plus de 24 000 détenus et les avait envoyés dans des « camps de solidarité » (connus sous le nom de « ingando ») pour deux mois de rééducation, avant de les réintégrer dans leurs communautés.[334]À la mi-2005, le gouvernement a mis en liberté provisoire 20 000 autres détenus et, début 2007, il en a encore libéré 9 000 de plus.[335] Ces libérations ont contribué à réduire la population carcérale mais ont eu pour conséquence que de nombreux rescapés du génocide ont craint pour leur sécurité.[336] Un certain nombre de prisonniers ayant bénéficié de ces libérations provisoires ont par la suite été à nouveau arrêtés lorsque les procès gacaca ont commencé.
« Réclusion criminelle à perpétuité »
La peine de «réclusion criminelle à perpétuité » a remplacé la peine de mort en 2007 et a constitué la peine obligatoire pour tous les prévenus de catégorie 1 qui n’avouent pas ou ne plaident pas coupable pour leurs crimes.[337]
La loi rwandaise a d’abord défini les « modalités » comme l’emprisonnement en « isolement » et a prévu qu’une législation supplémentaire établirait des modalités plus spécifiques pour son application.[338] Les Nations Unies et le TPIR ont exprimé leur inquiétude que cette peine pourrait être équivalente à un isolement carcéral prolongé, constituant de ce fait un traitement inhumain.[339] Les organisations rwandaises et internationales de défense des droits humains ont de même critiqué cette peine et appelé à son abolition.[340]
L’application obligatoire de la peine de « réclusion criminelle à perpétuité » a été problématique dans le système gacaca car cette peine a parfois été infligée à la suite d’une procédure défectueuse devant des juges non-professionnels, dans des circonstances où tous les droits de l’accusé à une procédure équitable n’avaient pas été respectés. Dans certains cas, cela a signifié que la peine la plus sévère a été infligée après des procès sommaires qui, dans certains cas, n’ont pas duré plus d’une heure.
Le gouvernement rwandais a soutenu que la peine de « réclusion criminelle à perpétuité » n’était pas équivalente à l’isolement carcéral prolongé, mais a admis la nécessité d’une définition plus précise. Il a affirmé que personne ne serait placé en isolement tant que la nouvelle législation définissant la peine ne serait pas entrée en vigueur.[341] En tout état de cause, le Rwanda ne disposait pas des installations nécessaires pour mettre la mesure en application étant donné le grand nombre de personnes condamnées à la peine de « réclusion criminelle à perpétuité » et la disponibilité très limitée d’installations pénitentiaires. En novembre 2008, en réponse aux préoccupations exprimées par le TPIR et les pays envisageant l’extradition de suspects de génocide vers le Rwanda, le gouvernement a adopté une législation interdisant l’application de la peine dans des affaires renvoyées aux tribunaux rwandais par le TPIR ou par des pays étrangers.[342]
En septembre 2010, plus de trois ans après l’introduction de cette peine dans le droit rwandais, le Parlement a adopté une nouvelle législation la définissant de façon plus détaillée. La nouvelle loi prévoit que :
1° une personne condamnée ne peut bénéficier d’aucune mesure de grâce ou d’amnistie, de la libération conditionnelle ni de la réhabilitation, sans qu’elle ait accompli au moins vingt ans (20) d’emprisonnement ;
2° une personne condamnée est détenue dans une cellule individuelle réservée aux personnes reconnues coupables de crimes inhumains...
La cellule doit avoir des dimensions suffisantes et l’équipement nécessaire [matériel].[343]
La loi garantit à la personne condamnée à cette peine certains droits fondamentaux, tels que le droit à recevoir des visites de ses parents, à faire des exercices physiques, à recevoir des soins médicaux, à pratiquer des activités de loisirs, ainsi que son culte.[344] Toutefois, elle ne précise pas la fréquence avec laquelle ces droits peuvent être exercés, dont tous restent à déterminer par les règles et réglementations internes des prisons. Elle ne garantit pas non plus une interaction régulière avec d’autres prisonniers, qui est la seule forme de contact sur laquelle peuvent compter les prisonniers (en particulier ceux qui sont détenus pendant de longues périodes et dont les parents, les amis et les avocats peuvent cesser de leur rendre visite au fil des ans).
Human Rights Watch se félicite des mesures gouvernementales visant à mettre la peine de« réclusion criminelle à perpétuité » en accord avec les obligations légales nationales et internationales du Rwanda et reconnait qu’à ce jour, les prisonniers n'ont pas été maintenus à l'isolement. Toutefois, Human Rights Watch reste prudent sur l'application éventuelle de cette peine jusqu'à ce qu'il soit démontré dans la pratique que les prisonniers bénéficient de tous ces droits fondamentaux, y compris des contacts réguliers avec d'autres prisonniers.
Travaux d'intérêt général
Parallèlement à la mise en place des juridictions gacaca, le gouvernement a introduit une alternative à l'emprisonnement pour les affaires de génocide et liées au génocide : les travaux d’intérêt général.[345] Alors que la plupart des pays réservent les travaux d’intérêt général aux personnes responsables de délits mineurs, le Rwanda ne les a introduits que pour les affaires liées au génocide.[346] La peine alternative présentait trois principaux avantages. Premièrement, les travaux d’intérêt général allègeraient la surpopulation carcérale. Deuxièmement, ils pourraient contribuer à réinsérer les personnes condamnées au sein de leurs communautés locales. Troisièmement, ils constitueraient un moyen pour les prévenus indigents de faire réparation à la société et de contribuer au développement national.[347]
Le programme de travaux d’intérêt général, connu sous son acronyme « TIG », est devenu opérationnel en 2005 et a permis aux prévenus de catégorie 2 ayant avoué leurs crimes (et dont les aveux ont été acceptés comme complets et véridiques) de purger la première partie de leur peine en prison et la deuxième partie en travaux d’intérêt général.[348] Le programme à l’origine était consensuel : les prisonniers pouvaient décider soit de purger la totalité de leur peine en prison, soit d’en commuer la moitié en travaux d’intérêt général.[349] Par la suite, le gouvernement a supprimé l’exigence du consentement du prisonnier et le programme est devenu obligatoire pour toute personne remplissant les conditions.[350] En 2008, le Parlement a modifié les lois gacaca afin d’exiger que les personnes condamnées à la prison et aux travaux d’intérêt général effectuent en premier la partie de la peine consistant en travaux d’intérêt général, avec la possibilité de voir le reste de la peine suspendu si la personne terminait de façon satisfaisante le programme de TIG.[351]
La loi rwandaise prévoit deux types de travaux d’intérêt général : ils peuvent être effectués soit dans la communauté locale d’un prévenu, soit dans un camp spécial de TIG. Ces dernières années, le gouvernement a donné la priorité à l'utilisation des camps.[352] Les personnes qui effectuent les travaux d’intérêt général dans leurs communautés d’origine vivent avec leur famille et exécutent ces travaux trois jours par semaine. Il s’agit généralement de construire et réparer des routes, des écoles et des logements pour les rescapés du génocide. Les prévenus passent souvent le reste de la semaine à labourer leur propre terre ou à effectuer des travaux rémunérés. En revanche, ceux qui vivent dans des camps de TIG travaillent six jours par semaine mais purgent leur peine dans la moitié du temps : par exemple, une personne condamnée à huit ans de travaux d’intérêt général peut terminer sa peine en seulement quatre ans dans un camp de TIG.[353] Dans les deux cas, les projets impliquent un travail manuel intense pendant de nombreuses heures par jour et peuvent être extrêmement exigeants physiquement.[354]
Le gouvernement rwandais a qualifié le programme de travaux d’intérêt général d’énorme succès.[355] Les points de vue des citoyens rwandais sont quant à eux mitigés. Les rescapés du génocide ont exprimé deux préoccupations principales lors des entretiens menés par Human Rights Watch. Tout d’abord, certains ont qualifié les travaux d’intérêt général de peine plus légère que l’emprisonnement et incompatible avec la gravité du crime de génocide. Ils ont donc considéré que les « tigistes » (ou personnes effectuant un travail d’intérêt général) s’en tiraient à bon compte.[356]
Ensuite, certains rescapés ont exprimé la peur d’avoir à vivre aux côtés des personnes condamnées dans leurs communautés locales et ils craignaient que les prévenus n’exercent des représailles contre eux.[357] Human Rights Watch n’a pas connaissance d’actes de représailles commis alors qu’une personne condamnée participait aux TIG. Quelques rescapés ont indiqué qu’ils ont été soulagés ensuite en constatant qu’il n’y avait pas eu de tensions importantes entre eux et les tigistes.[358] Néanmoins, pour de nombreux rescapés l’amertume et la peur de représailles sont toujours restées présentes.
Plusieurs condamnés pour génocide, d’autre part, ont déclaré à Human Rights Watch qu’ils considéraient le programme de travaux d’intérêt général comme une forme de travail forcé et qu’ils se sentaient exploités par le gouvernement. D’autres se sont plaints des conditions régnant dans les camps de TIG et, en particulier, de ne pas recevoir suffisamment de nourriture pour les sustenter alors qu’ils devaient effectuer de longues heures de travail manuel.[359]
Au cours d’un entretien mené dans un camp de TIG, un homme interrogé a révélé qu’il avait purgé sa peine de travaux d’intérêt général mais qu’il n’avait pas encore été libéré. Alors que Human Rights Watch tentait de poursuivre l’entretien, une haute autorité qui avait entendu les remarques a promptement escorté les chercheurs de Human Rights Watch hors du camp.[360]
À la mi-2009, plus de 90 000 personnes avaient été condamnées à des travaux d’intérêt général.[361] Environ 26 000 personnes avaient terminé les TIG à la fin de 2010, tandis que plus de 19 000 continuaient de purger leur peine.[362] Plus de 27 000 n’avaient pas encore commencé le programme en raison des moyens limités.[363] Quant à savoir si le programme de travaux d’intérêt général atteindra ses objectifs, cela reste à voir. Il a certainement réussi à réduire la population carcérale et a contribué à la reconstruction matérielle du pays. Le succès du programme dans la réintégration des tigistes au sein de leurs communautés locales est plus discutable, en particulier pour ceux des camps de TIG qui vivent loin de leurs communautés d’origine et n’ont guère la possibilité d’échanger avec le monde extérieur.
Indemnisation
L’indemnisation des victimes a été dès le début un sujet de controverse. Les personnes accusées de délits de catégorie 3, définis comme des infractions contre les biens (résultant des saccages et des pillages), ont été condamnées à verser des indemnités à leurs victimes pour le montant des dommages causés.[364] Toutefois, les lois gacaca n’ont jamais prévu d’indemnisation directe des victimes par les prévenus des catégories 1 et 2. La loi sur le génocide de 1996 et la loi sur le système gacaca de 2011 prévoient que les tribunaux gacaca établissent des listes des dommages subis par les victimes (y compris les dommages corporels et les coûts afférents) et les transmettent à un fonds de compensation gouvernemental qui n’avait pas encore été créé.[365] La loi gacaca de 2004 stipule que « les autres actions à mener en faveur des victimes sont déterminées par une loi particulière », ce qui a donné à de nombreux rescapés du génocide l’espoir qu’ils recevraient une compensation monétaire. Toutefois, à ce jour, personne n’a reçu aucune compensation monétaire ou autre.
La plupart des rescapés du génocide interrogés par Human Rights Watch ont mentionné le manque d’indemnisation comme l’une des principales lacunes du processus gacaca. Dans un pays où la plupart de la population tire sa subsistance de l'agriculture et a des ressources financières limitées, de nombreuses victimes comptaient sur les réparations comme une sanction tangible qui aurait reconnu leur souffrance et les aurait aidées dans leur vie quotidienne. En réalité, il aurait été très difficile de fixer un prix aux dommages subis par les victimes du génocide et autres crimes commis en 1994. En outre, la plupart des accusés sont pauvres et auraient été incapables de payer une quelconque indemnisation. Néanmoins, la décision de ne pas faire en sorte que les coupables indemnisent les victimes et leurs familles et de ne pas proposer une indemnisation gouvernementale a déçu de nombreux rescapés.[366]
En décembre 2008, le gouvernement a annoncé une refonte du Fonds de soutien et d’assistance aux rescapés du génocide (FARG).[367] Ce fonds a été créé en 1998 avec un financement du gouvernement mais a rencontré des difficultés au fil des ans, notamment du fait d’allégations de corruption, de mauvaise gestion financière et une mauvaise qualité de construction des logements destinés aux rescapés du génocide.[368] Le principe de départ du FARG était simple : fournir une aide financière aux rescapés du génocide sous forme de frais de scolarité pour les enfants, d’assistance médicale, de construction de maisons et de soutien aux activités génératrices de revenus.[369] Dans le cadre de la nouvelle loi, le gouvernement a entamé en janvier 2009 le processus de confirmation que les bénéficiaires du FARG étaient réellement des rescapés du génocide éligibles à l’aide.[370] En quelques jours, les autorités ont découvert plus d’une dizaine de cas de fraudes, notamment des bénéficiaires fantômes et des fonds mal gérés.[371] Un scandale s’en est suivi, entraînant le retrait de centaines d’individus de la liste des bénéficiaires, le renvoi de plusieurs hauts fonctionnaires du FARG et l’arrestation de plus d’une centaine de personnes.[372] Même après le remaniement, le FARG a continué de connaître certaines des mêmes difficultés.[373]
Le fonds des rescapés du génocide a connu un succès mitigé. Ses avantages — en particulier les frais médicaux, les frais de scolarité et le logement — se sont avérés une aide précieuse pour de nombreux rescapés du génocide. Toutefois, le FARG a une définition étroite d’une personne pouvant être caractérisée de « rescapé ». Il exclue les femmes tutsies qui étaient mariées à des Hutus avant le génocide et les enfants issus de ces mariages, ainsi que les veuves hutues qui ont perdu leurs maris tutsis lors du génocide.[374] Les hommes hutus et leurs épouses ou enfants qui ont été blessés ou tués ne peuvent prétendre au statut de rescapés, même s’ils ont été tués en essayant de protéger des Tutsis.
Une veuve tutsie mariée à un homme hutu mort pendant le génocide déplorait le fait qu’elle ne pouvait bénéficier des soins médicaux alors qu’elle était handicapée suite à des blessures infligées pendant le génocide.[375] Une autre veuve tutsie avec des enfants s’est retrouvée sans abri après que l’aide du FARG lui ait été refusée pour la même raison.[376] Des responsables du FARG ont réfuté l’affirmation de Human Rights Watch selon laquelle il omet d’aider les personnes éligibles.[377] Cependant, Human Rights Watch ainsi que des ONG locales travaillant avec ces groupes vulnérables ont documenté un certain nombre de tels cas.[378] Des allégations de corruption et de mauvaise gestion de fonds dans le FARG ont laissé de nombreux rescapés du génocide sans illusions sur les promesses du gouvernement de les aider.[379]
De la même façon, Ibuka, la principale organisation de rescapés du génocide,[380] ne fournit pas d’aide aux femmes tutsies mariées avec des Hutus, et ne fournit aucune aide aux Hutus.[381] Une femme tutsie a déclaré :
Ibuka ne m’aidera pas parce que mes enfants sont des Hutus. Ils refusent de me donner le certificat de rescapée parce que j’ai été mariée avec un Hutu. Maintenant, je suis malade du VIH à la suite d’un viol pendant le génocide, et je n’ai pas d’argent pour continuer à obtenir des médicaments. Mes enfants trouvent la situation injuste. Leur père a été tué à cause de leur mère et pourtant ils ne sont pas considérés comme des victimes du génocide.[382]
VII. La dynamique communautaire du système gacaca
La réussite du processus gacaca a reposé jusqu’à présent sur la participation des communautés locales. Les objectifs de la participation de la communauté ont été de découvrir la vérité sur ce qui s'est passé pendant le génocide, de sauvegarder le droit à un procès équitable des accusés comme des victimes, et de contribuer au processus de guérison de la communauté dans son ensemble. Parfois, la participation locale a contribué à maintenir l'intégrité du processus et à atteindre ces objectifs. Cependant, le désintérêt d'une partie importante de la population et le silence des autres (qui ont assisté aux procès, mais ne se sont pas exprimés publiquement) ont limité le succès du système gacaca, car on ne pouvait pas toujours compter sur le public pour dénoncer un faux témoignage ou des erreurs judiciaires. Les personnes avaient des raisons justifiées de craindre que si elles parlaient, elles risquaient d'être elles-mêmes poursuivies ou d’encourir des problèmes avec leurs voisins ou avec le gouvernement. La manipulation de certains procès, avec des citoyens privés utilisant le système gacaca pour essayer de régler des comptes ou le gouvernement l'utilisant pour faire taire les critiques, et une influence indue exercée par d'autres acteurs tels que les coordinateurs de district, ont également contribué à un certain niveau de désillusion.
La participation communautaire
Lorsque le processus gacaca a commencé, les communautés locales à travers le pays ont participé aux procès en grand nombre. Les juges se sont présentés précocement et semblaient motivés pour exercer leurs fonctions. Les Rwandais ont été curieux de voir comment le processus se déroulerait.[383] Peut-être pouvait-on s'y attendre, ce niveau de participation enthousiaste a fortement diminué au fil des ans.
En 2002, les membres de différentes communautés avec qui Human Rights Watch a mené des entretiens ont indiqué qu'ils avaient trouvé les phases préliminaires du processus — la création de listes des familles, des victimes et des criminels, et la collecte d'informations initiales — bureaucratiques, lentes et fastidieuses.[384]Certaines personnes se sont plaintes que les témoignages individuels ont été trop longs ou que les débats entre les membres de la communauté auraient dû être reportés jusqu'à la tenue effective du procès.[385] Dans certaines zones urbaines, en particulier à Kigali, les résidents qui n'avaient pas vécu dans la région pendant le génocide n’ont pas vu l’intérêt de participer au processus gacaca.[386] Dans les zones où il restait peu de rescapés du génocide, il y avait encore moins d'intérêt.[387]
Plusieurs facteurs ont dissuadé les rescapés du génocide de prendre un intérêt plus significatif et soutenu dans le processus gacaca. Premièrement, comme un ancien président d'Ibuka l’avait déclaré en 2003 : « Il n'y a aucune incitation pour les rescapés [dans le système gacaca]: il n'y a pas eu d’indemnisation ou de réparation… »[388] Deuxièmement, les rescapés risquaient d'être traumatisés de nouveau par le processus gacaca,[389] en particulier s’ils montraient de l'émotion ― un signe de faiblesse dans la culture rwandaise.[390] Troisièmement, de nombreux rescapés du génocide ont craint des représailles dans leurs communautés locales s’ils décrivaient ce qui leur était arrivé ou contestaient les témoignages d'autres personnes.[391]
Les Hutus sont souvent restés à l’écart du système gacaca, de peur d'être dénoncés publiquement ou inquiets de ne pas avoir la possibilité de se défendre.[392] Selon un juge, les gens étaient également réticents à s’exprimer en réponse à de faux témoignages, de peur d'être accusés eux-mêmes.[393] Les Hutus dont les parents ont été tués et les biens détruits par les militaires du FPR ont été incapables de présenter ces cas, ce qui a entraîné leur frustration et leur déception à l’égard du processus.[394]
Autant les rescapés du génocide que les génocidaires se sont inquiétés du fait que parler de ce qu'ils savaient aux juridictions gacaca conduirait à l'ostracisme social ou à des répercussions de la part de leurs proches et de leurs voisins, ou bien créerait des problèmes avec les autorités locales.[395] En conséquence, la pratique du «ceceka » (qui signifie « se taire ») est apparue, avec des résidents locaux présents aux juridictions gacaca, mais choisissant délibérément de ne pas parler.[396] Les répercussions pour avoir témoigné ont pris la forme de poursuites pour parjure, idéologie du génocide, minimisation du génocide, ou même complicité dans le génocide. Il se pourrait également qu’il y ait eu un pacte implicite entre certains Hutus pour ne pas dénoncer d'autres Hutus.[397] Quelles qu’en soient les raisons, le fait que les résidents dans de nombreuses communautés n'ont pas participé activement au processus gacaca a nui à la fiabilité des procédures et affaibli l'argument du gouvernement selon lequel la participation populaire assurerait des procès équitables.
Beaucoup de Rwandais ne pouvaient pas non plus se permettre de sacrifier une journée ou plus sans cultiver leurs champs ou autres formes d'emploi rémunéré. La population consacrant déjà un jour de la semaine ou du mois (selon la région) à des travaux communautaires obligatoires (connus sous le nom de « umuganda »), beaucoup de gens ont été réticents à consacrer une journée ou deux de plus chaque semaine au processus gacaca.[398]
Comme la participation communautaire diminuait, les autorités locales et les juges gacaca ont essayé de convaincre des personnes d’assister aux audiences. Lorsque la persuasion a échoué, ils ont fermé les magasins le jour des audiences gacaca et ont menacé d’infliger une amende aux habitants qui omettaient d’assister aux sessions.[399] Une personne a déclaré à Human Rights Watch que les amendes allaient de 1 000 à 2 000 francs rwandais (jusqu’à 3,30 USD).[400] Dans certaines régions, les forces de défense locales sont également allées de maison en maison, réunissant les membres de la communauté pour les amener jusqu’aux juridictions gacaca.[401] Les juges gacaca ont parfois fait appel aux forces de défense locales pour empêcher les gens de quitter les sessions gacaca plus tôt que prévu.
En 2004, le gouvernement était tellement préoccupé par le faible taux de participation qu'il a introduit une disposition rendant la participation aux audiences gacaca obligatoire lorsque le Parlement a révisé les lois gacaca la même année.[402] Néanmoins, l'absentéisme a augmenté au fil des ans, tout particulièrement lorsque les procès ont traîné en longueur et que le délai de clôture des juridictions gacaca a été prolongé à plusieurs reprises. À la fin de l’année 2007 ou au début de l’année 2008, les juges et les autorités locales ont perdu le contrôle de la participation aux séances hebdomadaires et ont arrêté d’infliger des amendes aux personnes qui n’y assistaient pas.
Les risques encourus par les témoins
Pourquoi est-ce que toute personne qui dit la vérité et défend un homme est considérée comme traitre?
— Un rescapé du génocide lors d’une déposition en tant que témoin à décharge devant une juridiction gacaca[403]
La loi gacaca soumet tous les Rwandais à une obligation légale de déclarer ce qu'ils savent.[404] Mais les individus s'exprimant dans le cadre de la procédure gacaca, soit en tant que témoins formels ou comme membres de la communauté, ont parfois pris se faisant de grands risques personnels. Un responsable local a déclaré à Human Rights Watch que « les témoins ont peur d'être arrêtés en vertu de l'article 29 [qui prévoit des peines pour ceux qui se parjurent, font des déclarations diffamatoires, ou refusent de témoigner]. En témoignant pour la défense, vous risquez de voir vos déclarations qualifiées de mensonges. »[405] Une rescapée du génocide qui a été violée pendant le génocide a déclaré que « même les gens qui savent des choses ne parlent pas parce qu'ils ne veulent pas causer de problèmes avec leurs voisins. »[406]
Les lois rwandaises mal définies sur le « divisionnisme » et l’« idéologie génocidaire » ont également eu un effet dissuasif sur la volonté des individus à s'exprimer devant les juridictions gacaca.[407] De nombreuses personnes interrogées par Human Rights Watch entre 2005 et 2010 ont exprimé la crainte d'être accusées de ces crimes, ou de « minimiser le génocide », si elles témoignaient devant les juridictions gacaca.
Le risque de représailles a été un obstacle particulier pour les personnes ayant perdu des proches aux mains du FPR. Elles ont été dans l’incapacité de recourir au système gacaca pour demander réparation pour ces décès parce que la compétence du processus gacaca ne couvrait que les crimes liés au génocide commis contre les Tutsis (voir ci-dessous). Les personnes qui ont parlé publiquement des crimes du FPR ou remis en question la doctrine officielle du génocide — à savoir que seuls les Hutus étaient des tueurs et que seuls les Tutsis étaient des victimes — se sont parfois elles-mêmes trouvées rapidement confrontées à des accusations d' « idéologie génocidaire » à la suite de leur témoignage.
Lors d'un procès gacaca dans le sud du Rwanda en octobre 2006, un témoin à décharge, Célestin Sindikuwabo, a déclaré que l'accusé avait fui au Burundi en 1994 parce que lui et d'autres personnes avaient vu des militaires du FPR tuer des gens. Le tribunal a acquitté l'accusé, mais la police a arrêté Sindikuwabo plusieurs jours plus tard, suite à sa déclaration. En mars 2007, un tribunal classique a reconnu Sindikubwabo coupable et l’a condamné à 20 ans de prison pour « minimisation grossière du génocide ».[408]
Un autre homme s’est retrouvé accusé d'avoir minimisé le génocide, après avoir déclaré, lors d'une session hebdomadaire gacaca de 2006 durant la phase de collecte d'informations, qu'un groupe de Tutsis cherchant refuge dans une église en 1994 avait pillé des patates douces dans des fermes hutus voisines et qu’ils devaient également être obligés à présenter des excuses devant les juridictions gacaca. L'homme, qui se trouvait être un rescapé du génocide, a passé près de dix mois en détention avant d’être acquitté par un tribunal classique.[409]
Les menaces et l’intimidation de témoins, examinées ci-dessous, ont également dissuadé des témoins potentiels de se manifester. Dans certains cas, des témoins ont même été tués. Selon le gouvernement, 120 personnes ont été tuées entre 2004 et la fin de l'année 2008 soit en raison de leur appartenance ethnique, soit de leur participation au processus gacaca― une forte hausse, par rapport aux 42 personnes tuées entre 1995 et 2003.[410] Le taux d'homicides a plus que quintuplé au cours de la période du processus gacaca, avec le plus grand nombre de décès en 2006 lorsque les procès ont commencé à l'échelle nationale. Le gouvernement a indiqué que la plupart des personnes tuées étaient des rescapés du génocide, mais qu'un certain nombre de Hutus qui ont comparu comme témoins devant les juridictions gacaca ont également été tués.[411] La plus forte concentration de meurtres a eu lieu dans la partie sud du pays, en particulier dans le district de Karongi près de la ville de Kibuye.[412] Human Rights Watch n'a pas été en mesure de déterminer le nombre de décès en 2009, mais le gouvernement rwandais semble avoir fait état de six morts auprès de l'ambassade des États-Unis, tandis qu’Ibuka en a signalé 24.[413] En novembre 2010, l’Unité de soutien des victimes et des témoins (Victim and Witness Support Unit, VWSU) n’avait enregistré qu’un seul décès d'un rescapé du génocide en 2010.[414]
Le risque d’être arrêté ou détenu arbitrairement, ou d'être accusé de parjure ou de complicité dans le génocide
Certains témoins ont été arbitrairement arrêtés, détenus et, dans certains cas, poursuivis pour faux témoignage. Initialement, les tribunaux gacaca étaient autorisés à inculper immédiatement un témoin de parjure et à le condamner au cours de la même audience.[415] Cependant, en 2006, le SNJG a officiellement ordonné aux tribunaux de juger les cas de parjure seulement après que l’affaire où le parjure allégué s'est produit ait été conclue, et de le faire dans une audience distincte. Les mêmes instructions ont également stipulé que les individus accusés de parjure ne devraient pas être placés en détention provisoire.[416] Cependant, Human Rights Watch a documenté un certain nombre de cas où des individus, le plus souvent témoins à décharge, ont été jugés en comparution immédiate pour parjure, même après les instructions de 2006.
Dans une affaire de 2007, un témoin à décharge travaillant dans un hôpital pendant le génocide a déclaré au tribunal qu'il ne savait pas comment les victimes retrouvées mortes à l'hôpital avaient été tuées parce qu'il ne se trouvait pas à l'hôpital à ce moment-là. Il a suggéré que le tribunal le demande à son ancien chef de service qui était également présent à l'audience. Le chef de service, un rescapé du génocide, a accusé le témoin de déni du génocide, ce qui a entraîné un autre membre de la communauté présent au procès à faire de même. Le tribunal a immédiatement accusé, jugé et inculpé le témoin de parjure, en le condamnant à cinq mois d'emprisonnement.[417]
Dans une affaire de 2009, un tribunal a menacé d'inculper les douze témoins à décharge de complicité avec l'accusé, sans explication, même si aucun d'eux n'avait fait de déclarations les impliquant dans les crimes allégués. Le tribunal a ensuite ordonné qu’ils soient tous arrêtés.[418] Les douze témoins sont restés en détention jusqu'à la fin des trois semaines de procès, date à laquelle le tribunal les a reconnus coupables de parjure et les a condamnés à des peines de prison allant de trois à six mois.[419]
Dans une troisième affaire en 2010, deux hommes qui avaient déjà avoué leurs crimes et fini de purger leurs peines de prison ont comparu comme témoins à décharge dans une affaire distincte. Le juge qui présidait a interrompu leur témoignage et leur a demandé de s'asseoir sur le sol à côté des juges pour le reste de l'audience.[420] La police a détenu les deux hommes pendant une nuit et le tribunal les a reconnus coupables de parjure le lendemain matin, pour avoir témoigné qu'ils n'avaient pas vu l'accusé dans la communauté pendant le génocide.[421]
Dans une quatrième affaire, celle de l'ancien sous-préfet Théodore Munyangabe abordée ci-dessus, le juge a contraint un témoin à faire une déclaration mettant en cause l'accusé dans la planification de massacres pendant le génocide. Au stade de l'appel de l'affaire de Munyangabe, deux rescapés du génocide ont été arrêtés et détenus pendant une nuit après qu'ils soient venus témoigner pour sa défense.[422]
Dans une affaire de 2008 entachée d'irrégularités, un tribunal gacaca a accusé treize témoins à décharge de parjure et a jugé qu'ils avaient tous menti pour défendre l'accusé. Dès l'audience suivante, le tribunal les a condamnés, ainsi que cinq autres témoins à décharge. Tous, sauf trois d'entre eux, ont été condamnés à des peines de prison allant de six à douze mois.[423]
Dans d'autres affaires, les personnes citées à comparaître comme témoins se sont retrouvées elles-mêmes accusées en tant que co-accusées.[424] Dans certaines de ces affaires, le tribunal a agi intentionnellement dans ce qui semblait être une tentative pour tromper les personnes afin de les faire comparaître à une audience. Dans d'autres, les accusations soudaines ont résulté du témoignage de la personne en tant que témoin, généralement au nom de l'accusé. Dans une affaire, une femme qui a témoigné pour la défense d'un homme accusé d'implication dans la mort d’un membre de sa famille dont elle savait qu'il était innocent a été inculpée en tant que co-instigatrice et condamnée à 19 ans de prison. La décision a été confirmée en appel, mais a été annulée au stade de la révision suite à l’intervention du SNJG.[425] Dans une autre affaire, un tribunal a puni un homme pour avoir comparu en tant que témoin à décharge en l’accusant et en le déclarant coupable d'un crime pour lequel il avait déjà été condamné.[426] De même, dans une autre affaire, un tribunal a accusé de génocide un témoin de la défense, Célestin Rusanganwa, et l'a placé en détention. Le tribunal a acquitté l'accusé dans l'affaire initiale, mais a déclaré Rusanganwa coupable et l'a condamné à 19 ans de prison.[427]
La peur d'être frappé d’ostracisme par la communauté
Les personnes détenant des informations pertinentes ont parfois choisi de ne pas se présenter, craignant des répercussions dans leurs communautés locales ou avec le gouvernement. Dans plusieurs cas documentés par Human Rights Watch, des personnes détenant des informations qui auraient pu en aider d’autres à se défendre contre des accusations liées au génocide, mais qui ont choisi de garder le silence, ont plus tard présenté des excuses à l'accusé ou à sa famille.
Un rescapé du génocide a éclaté en sanglots en septembre 2007 alors qu’il racontait à un chercheur de Human Rights Watch à quel point il avait honte d'avoir refusé de témoigner en tant que témoin à décharge à l'audience gacaca d'un homme accusé de génocide qui avait sauvé sa vie et celles de plus d'une dizaine de membres de sa famille.[428] Le fait que certains des accusés ou leurs proches aient déclaré qu'ils comprenaient pourquoi des témoins potentiels à décharge ne s'étaient pas présentés et les ont pardonnés de ne pas avoir témoigné est révélateur de la peur réelle des témoins potentiels à décharge.[429]
En septembre 2008, un juge gacaca dans la partie sud du pays a tenté de causer des problèmes à un homme qui témoignait en défense d'un accusé. Le juge, qui n'avait pas compétence sur l’affaire et qui n’assistait au procès qu’en tant que membre du public, a demandé la carte d'identité de l'homme après qu’il ait témoigné. Lorsque l'homme a refusé de la donner et a demandé pourquoi le juge interférait dans la procédure, le juge a ordonné à l'homme de présenter sa carte d'identité aux juges chargés de l’affaire. Un juriste du SNJG observant le procès a alors accusé le témoin d'être un agent des services de renseignements et d'intimider la population. L'homme a réagi en accusant avec véhémence le juge et l'avocat du SNJG d'essayer de l'intimider pour le dissuader de témoigner en faveur de l'accusé et de chercher à lui causer des problèmes au sein de la communauté locale.[430] Human Rights Watch n'a pas connaissance du fait que l'homme ait subi des représailles après l'audience.
Intimidation
Les personnes comparaissant en tant que témoins à charge et à décharge devant les juridictions gacaca ont fait l’objet de tentatives d’intimidation, le plus souvent par la police et d’autres agents de l'État, mais aussi par des rescapés du génocide et des parties civiles. Dans certaines affaires, des individus accusés de génocide ont été soupçonnés d’être à l’origine des actes d'intimidation, visant les membres de la communauté ou des témoins qui les ont accusés de crimes.
La loi gacaca de 2004 prévoit que toute personne reconnue coupable d'exercer des pressions ou des menaces sur un témoin ou un juge est passible d'une peine d’emprisonnement de trois à six mois.[431] La peine est doublée pour les récidivistes. Les individus doivent être poursuivis devant les tribunaux classiques dans le cadre du code pénal.[432] Le cas échéant, une unité spéciale de protection au sein du parquet conduit des enquêtes et des poursuites pour ces affaires. Dans la seule année 2009, il y a eu 473 enquêtes aboutissant à 181 affaires entendues devant les tribunaux classiques.[433]
Selon la VWSU, la plupart des actes d’intimidation ont eu lieu au cours de la phase nationale des procès devant les tribunaux gacaca. La majorité des affaires documentées par la VWSU a impliqué des accusés ou leurs proches menaçant verbalement des rescapés du génocide et leurs proches. Ces cas ont attiré l'attention de la VWSU quand les rescapés du génocide ont demandé l'aide ou la protection de l'unité. La VWSU a également enregistré des incidents où des personnes accusées ont menacé d'autres détenus ou des condamnés libérés et leurs proches en réponse aux déclarations de ces personnes les accusant devant les juridictions gacaca.[434]
La VWSU a également relevé un nombre significativement plus faible d’affaires où des rescapés du génocide ont intimidé d'autres rescapés qui ont défendu des particuliers devant les juridictions gacaca et où des juges ou bien des membres de la communauté ont intimidé des témoins à décharge.
Dans un entretien avec Human Rights Watch, le coordinateur de la VWSU, Théoneste Karenzi, a déclaré que « nous avons été contactés par beaucoup de rescapés, mais par beaucoup moins de « non-rescapés. »[435] Au Rwanda, seuls les Tutsis peuvent être considérés comme des « rescapés ».[436] Sur la base des entretiens menés avec des témoins à décharge, Human Rights Watch craint que l'origine ethnique ne puisse avoir été un facteur dans la confiance des témoins pour contacter la VWSU et ne puisse avoir entraîné une sous-déclaration des incidents impliquant des témoins à décharge.
La VWSU a pris des mesures en 2009 pour faire connaître ses services grâce à des annonces radio et un documentaire à la télévision décrivant ses services, ainsi qu’en organisant des réunions avec la police et les autorités locales dans chaque district. Cependant, il est peut-être trop tôt pour que cette campagne de sensibilisation montre des résultats en ce qui concerne l’encouragement des « non-rescapés » (c’est-à-dire des Hutus) ou des témoins à décharge à solliciter l'assistance de la VWSU.
Human Rights Watch a documenté un certain nombre d’affaires où des juges ont été intimidés. Deux juges gacaca du nord du pays ont contacté Human Rights Watch en novembre 2006 pour signaler qu’ils avaient été chargés par le coordinateur de district de formuler des accusations contre un certain homme. Un certain nombre de juges ont résisté parce que personne n’avait porté d’accusations contre cet homme pendant la phase de collecte d'informations. Selon les juges, cependant, deux autres juges de la juridiction ont rapidement produit un témoignage écrit contre l'accusé, qui à leur avis a été fabriqué, et une date d'audience a été fixée. Avant le procès, le coordinateur de district a dit aux juges de condamner l'homme, en les avertissant : « Si vous ne le faites pas, vous serez punis. » Plus tard, lors des délibérations entre les juges, un militaire a fait irruption dans la salle et a essayé de parler avec les juges. Les juges lui ont fait quitter les lieux, mais les deux juges qui ont parlé à Human Rights Watch ont dit qu'ils avaient peur parce que l'affaire était suivie « d'en haut » (ils ont affirmé ne pas savoir par qui ou pour quelle raison).[437]
Dans un autre cas, un commandant de la police locale a arrêté deux juges gacaca le 14 août 2005, après qu’ils aient refusé de porter des accusations liées au génocide contre un individu dont le commandant de la police voulait qu’il soit reconnu coupable. Le commandant de la police a accusé les juges de vouloir faire dérailler le processus gacaca. Un nouveau juge a été nommé président de l'affaire, mais s’est vite retrouvé dans une situation similaire. Quand il a présenté le dossier au commandant de la police, celui-ci a jeté le document par terre et a dit que le juge devait changer le rapport, comme indiqué précédemment, ou il irait lui aussi en prison.[438] Les deux autres juges ont été accusés de minimisation grossière du génocide. Ils ont passé plus de 14 mois en détention et ont finalement été acquittés en octobre 2006.[439]
La présence policière et militaire aux procès gacaca a souvent semblé provoquer de l'anxiété chez les résidents locaux. La loi gacaca de 2004 permet aux agents de sécurité d'être présents lors des procès, à la fois pour garantir l'ordre et pour participer en tant que membres de la communauté, mais ne dit pas s’ils peuvent porter des armes.[440] Il est habituel de voir des agents de sécurité dans les tribunaux classiques, mais leur présence dans les tribunaux gacaca plus informels — tout particulièrement lorsqu’ils sont armés et en uniforme — semble influencer la volonté des participants de s'exprimer dans la procédure gacaca. En général, Human Rights Watch a observé moins de participation communautaire lorsque des policiers ou des militaires participaient à la procédure. Certains participants ont confié à Human Rights Watch qu'ils avaient peur de parler quand la police ou des militaires venaient aux procès gacaca et qu’ils craignaient d’être arrêtés.[441]
Dans certains cas, des policiers ou des soldats armés ont délibérément abusé de leur position d'autorité lors d'audiences pour influencer des témoins et des membres de la communauté. Par exemple, lors d’une audience en 2007, un observateur de Human Rights Watch a entendu un membre de la partie civile, un homme influent qui travaillait à l'hôpital local, dire au téléphone qu'il allait envoyer une voiture pour amener des gens à l'audience. Environ 30 minutes plus tard, une voiture appartenant à l'hôpital, que l'homme conduisait souvent, est arrivée sur les lieux où la procédure gacaca se déroulait. La voiture transportait trois policiers : le commandant de la police locale et deux agents armés. Tous trois se sont joints à l'audience et sont restés là pendant toute sa durée.
À la fin de l'audience, le procès n'était pas terminé et l'accusé était libre de partir. Toutefois, l’observateur de Human Rights Watch a vu le commandant de police faire monter l'accusé dans la voiture de l'hôpital avec les deux autres agents de police et a entendu le commandant dire : « Tu ne m'échapperas pas. » Un grand nombre de résidents locaux, y compris les rescapés du génocide qui avaient témoigné pour la défense de l'accusé, se sont interposés devant le véhicule et ont bloqué la route pour empêcher la police de retenir l'accusé. Après quelques minutes, la police a réussi à disperser la foule et a emmené l'accusé au poste de police.[442] Il est resté en détention jusqu'à la prochaine audience de la semaine suivante. Plusieurs personnes ont affirmé à Human Rights Watch que les accusations portées contre lui étaient fausses.[443] Lors de l'audience, Human Rights Watch a entendu quelques-unes de ces personnes, y compris un juge gacaca local qui n'avait pas participé à l'affaire, témoigner que la partie civile avait tenté de faire pression sur eux pour accuser l'homme.[444] Les tribunaux de première instance et d'appel ont tous deux acquitté l'homme, mais au procès en révision, un tribunal gacaca l’a reconnu coupable d'accusations liées au génocide et l’a condamné à 19 ans de prison.[445]
Lors du procès de l'ancien candidat à la présidentielle Théoneste Niyitegeka, en 2008, quatre militaires sont arrivés plus d'une heure après le début de l'audience et se sont rendus à l'avant de la foule, en interrompant momentanément la procédure et en faisant bien remarquer leur présence.[446] Plus tard, le même jour, un véhicule de la police militaire est arrivé et s'est garé à côté du lieu où la procédure se déroulait alors que les juges délibéraient, semant la peur parmi la population et amenant certains à penser que l'issue du procès était prédéterminée.[447]
Dans une autre affaire, plusieurs policiers en uniforme se sont assis avec la partie civile et ont été vus en train de parler ensemble pendant tout le procès. Leur présence a amené quelques habitants à conclure que le soutien de la partie civile par la police signifiait que l'accusé serait déclaré coupable et a découragé au moins deux personnes de témoigner pour la défense de l'accusé.[448]
Le système gacaca comme moyen de régler des comptes personnels
Dans le processus gacaca, il y a eu beaucoup de conflits personnels qui n’avaient rien à voir avec le génocide.
— Rescapé du génocide, Butare, le 14 août 2009
Entre 2005 et 2010, Human Rights Watch a documenté des dizaines de cas dans lesquels des individus se sont servis du processus gacaca pour essayer de régler des comptes personnels, en accusant faussement quelqu'un de génocide ou de crimes liés au génocide. Dans la plupart des cas, tant l'accusateur que l'accusé avaient résidé au Rwanda durant plus d'une décennie et l'accusateur n'a donné aucune raison pour ne pas avoir fait les allégations plus tôt (par exemple pendant la phase de collecte d'informations). L'hostilité ethnique entre les Hutus et les Tutsis semblait parfois expliquer ce comportement, mais le plus souvent de simples griefs personnels et des motifs financiers en étaient la cause. Le suivi des procès par Human Rights Watch indique que de tels cas ont augmenté autour de 2007, peut-être en partie parce que les gens ont vu la façon dont le processus fonctionnait et se sont sentis de plus en plus confiants pour utiliser le système gacaca afin de régler des différends sur les terres, l'héritage et les inégalités économiques locales.
Une augmentation dramatique du nombre de tels cas à la fin de 2007 et au début de 2008 a conduit les organisations internationales qui suivaient le processus gacaca à demander au SNJG qu’il annonce une date de clôture du processus gacaca. Il n'y a pas de prescription pour le génocide, ce qui signifie que tous les cas survenant après une date butoir seraient traités par les tribunaux classiques. Ces tribunaux seraient dotés de professionnels du droit formés pour examiner correctement les nouveaux cas et pour aider à identifier — et espérons-le décourager — les fausses accusations.[449] Le SNJG a rejeté ces préoccupations lors d'une réunion avec les organisations internationales et ne semble pas avoir examiné la proposition.[450] Les cas de fausses accusations fondées sur des vengeances personnelles et d'autres intérêts hors de propos ont continué tout au long de 2009 et 2010.
Une affaire représentative de la manière dont le système gacaca risque d’être abusivement utilisé pour régler des comptes personnels est celle dans laquelle une famille a utilisé le processus gacaca pour tenter de régler un litige foncier reposant sur un accord de 1959 impliquant un voisin et son fils.[451] Une famille a accusé son voisin et son fils de génocide. Bien que le tribunal gacaca ait acquitté le père,[452] il a reconnu le fils coupable et l’a condamné à 30 ans de prison.[453] Pendant le procès, la partie civile qui avait porté l'affaire devant les juridictions gacaca a reconnu que les familles avaient un litige foncier, mais a nié que c’était la raison pour laquelle sa famille avait porté des allégations de génocide devant les tribunaux.[454] Le tribunal de première instance l'a crue.[455] Toutefois, la cour d'appel a accepté la preuve que la partie civile avait porté de fausses accusations et avait essayé d'utiliser le système gacaca pour régler les vieux comptes sur la terre, et elle a condamné la partie civile pour parjure ; une seconde cour d'appel gacaca a renversé cette décision.[456]
Dans une autre affaire, un homme qui en 1994 avait vécu dans la ville de Gisenyi au nord-ouest du pays a été accusé d'avoir commis des crimes liés au génocide à plus de 125 kilomètres de Kibuye, sa ville natale où il est retourné après le génocide. Selon l'accusé, l'affaire est née d'un litige privé qu'il avait avec la famille d'un rescapé local du génocide. L'enfant du rescapé avait volé des objets dans sa maison en mars 2000 et il avait été condamné à rembourser 20 000 francs rwandais (environ 33 USD). Selon l'accusé, le rescapé — qui avait été le représentant d'Ibuka dans la communauté — a alors porté contre lui des accusations liées au génocide, en représailles pour avoir porté l’affaire de vol devant les autorités locales.[457] L'accusé a réussi à prouver qu'il se trouvait à 125 kilomètres, à Gisenyi, au moment des massacres et qu'il était arrivé à Kibuye plus tard en 1994. Toutefois, il a admis avoir été en possession d'une grenade, apparemment pour sa propre protection (il l’a plus tard remise au FPR une fois qu'ils ont eu pris le contrôle du pays). Le tribunal gacaca l’a déclaré coupable de possession illégale d'une grenade pendant le génocide et lui a infligé une peine de prison de 19 ans ; sa demande de révision du jugement a été rejetée.[458]
Des affaires peuvent également impliquer des parties qui ont des intérêts commerciaux concurrents. Le cas d’Aphrodis Mugambira, un homme d'affaires à Kibuye qui possède un hôtel et d'autres biens de valeur dans la région, est un exemple frappant d’intérêts personnels qui régissent des affaires gacaca, ainsi que de la violation du droit à ne pas être jugé deux fois pour le même crime. Mugambira a passé près de 10 ans en prison sans procès après le génocide avant d'être finalement poursuivi en justice. En novembre 2002, un tribunal classique l'a reconnu coupable de crimes de catégorie 1, mais la décision a été infirmée en appel en 2003 et il a été acquitté.[459] Pendant sa détention, un ancien responsable gouvernemental de haut rang s’était approprié l’hôtel de Mugambira.[460] Après la libération de ce dernier, le responsable, peut-être de peur que Mugambira ne veuille récupérer ses terres, a uni ses forces avec un policier influent et d’autres hommes d'affaires dans la région pour porter de nouvelles accusations contre lui devant les juridictions gacaca.[461] En août 2008, la police a de nouveau arrêté Mugambira sur exactement les mêmes chefs d’accusation pour lesquels il avait déjà été jugé par les tribunaux classiques. Le tribunal gacaca l’a déclaré coupable et condamné à « la réclusion criminelle à perpétuité », une décision confirmée en appel.[462] Après que le SNJG se soit dit préoccupé par une éventuelle violation de la règle de double incrimination, l'affaire a été rejetée à l'étape de révision.[463] Cette affaire est un exemple des occasions malheureusement rares, où le SNJG est intervenu pour corriger des erreurs de procédure ou des dénis de justice. L'intervention du SNJG dans ce cas a abouti à un résultat positif, mais le simple fait que le SNJG ait dû intervenir pour corriger de tels problèmes démontre les faiblesses inhérentes au sein des mécanismes de recours et du système gacaca dans son ensemble.
Une autre affaire concernait une rescapée du génocide qui s'était cachée dans la maison d'un homme pour échapper aux massacres, mais qui plus tard s’est brouillée avec cet homme. Une fois nommée juge gacaca, la rescapée du génocide a porté plainte contre son ex-sauveteur, apparemment parce qu'il ne l'avait pas épousée. En première instance et à nouveau en appel, l'accusé a affirmé que les allégations étaient fausses et avaient été portées à titre de représailles à cause de la rupture de leur amitié. Il a souligné le fait que tous les témoins à charge appartenaient à la famille de la femme.[464] Plusieurs membres de la communauté, notamment des rescapés du génocide, ont confirmé que les deux personnes avaient été des amis proches et que les relations s'étaient détériorées lorsque l'accusé avait refusé de se marier avec la femme.[465] Le tribunal de première instance l'a acquitté. Lors de l'audience d'appel, l'un des juges a dû être récusé parce qu'il était un proche de la femme.[466] La cour d'appel a ensuite confirmé l'acquittement, mais la police a détenu l’homme sur des allégations de tentative de corruption de la femme pour qu’elle abandonne l'affaire. Un tribunal classique l'a également acquitté de ces accusations, mais là encore, la police l'a gardé en détention en attendant une révision de l'affaire initiale.[467] Malgré l'absence de nouveaux éléments de preuve ou d’une preuve d'erreur manifeste dans une procédure antérieure, le tribunal gacaca l’a inculpé sur des accusations d'implication dans la mort d'une femme et dans une attaque génocidaire dans la région et l'a condamné à 15 ans d'emprisonnement.[468]
Dans une affaire de 2008, deux infirmières à l'hôpital de Gahini dans l'est du Rwanda s’étaient disputées peu après le génocide, amenant l’une des deux à accuser l’autre d'avoir refusé d’effectuer la suture des plaies d'un jeune garçon tutsi blessé lors du génocide (qui a été tué plus tard dans l'hôpital).[469] Au cours du procès, d’autres rescapés du génocide ont accusé la femme de « haïr les Tutsis », bien qu’ils n'aient fourni aucune preuve. Le tribunal a inculpé la femme et l'a condamnée à 15 ans d'emprisonnement.[470] L'un des juges de première instance était connu comme ayant un conflit personnel avec la famille de l'accusée à propos de leur paroisse locale.[471] Le jugement a été infirmé en appel, mais au stade de la révision, le tribunal a de nouveau inculpé la femme et l'a condamnée à six ans d'emprisonnement avec une conversion de la peine de prison en travaux d’intérêt général.[472]
Dans certains cas, le système gacaca aurait même été utilisé pour résoudre des conflits au sein des familles. Dans une affaire de 2009, une femme juge gacaca se serait fâchée avec sa sœur au sujet de leur héritage après la mort de leurs parents. Elle a utilisé son statut dans la communauté pour persuader d’autres personnes d'accuser sa sœur de délits liés au génocide. Après qu’un tribunal gacaca ait condamné sa sœur, plusieurs résidents de la communauté, y compris des rescapés du génocide, ont écrit conjointement au SNJG pour expliquer ce qui s'était passé. Le SNJG est intervenu et la femme a été libérée.[473]
Faire taire les opposants et les voix critiques
Les citoyens ordinaires n’ont pas été les seuls à manipuler le processus gacaca à des fins personnelles. Des représentants du gouvernement et des politiciens influents ont également déposé des allégations auprès des tribunaux gacaca dans des contextes qui suggèrent fortement que l'objectif était de faire taire des détracteurs véhéments et des opposants politiques potentiels.
Le cas du Dr Théoneste Niyitegeka
Le Dr Théoneste Niyitegeka, chirurgien dans un hôpital au centre du Rwanda, qui s'est occupé de nombreuses personnes blessées pendant le génocide, a connu des problèmes peu de temps après avoir décidé de se présenter à l’élection présidentielle de 2003. Sa candidature a été rejetée et il a déposé une plainte, après que la police l'ait détenu pendant trois jours d'interrogatoire à propos de déclarations qu'il avait faites récemment.[474] Après sa libération, le Dr Niyitegeka a continué de pratiquer la médecine, et a parfois commenté la politique rwandaise dans la presse locale et étrangère. En 2005, il a critiqué le système gacaca lors d'une interview à la radio avec Voice of America (la Voix de l'Amérique). Après que la police l'a interrogé à propos de ses commentaires sur le programme, Niyitegeka a quitté le pays pour une courte période, retournant au Rwanda quand il a pensé que la situation s'était calmée. Peu de temps après son retour, des inconnus ont fait sauter sa voiture devant sa maison. Plus tard, des militaires sont venus à son domicile et ont tenté en vain de faire pression sur lui pour qu’il se rétracte publiquement à propos de sa critique du système gacaca.[475]
Des accusations ont ensuite été portées contre lui devant les juridictions gacaca. En octobre 2007, un tribunal gacaca l’a acquitté des accusations d'avoir remis des patients aux militaires pour qu’ils soient tués en 1994.[476] Une cour d'appel a infirmé la décision, condamnant Niyitegeka à 15 ans d'emprisonnement, sans fournir aucune explication pour sa décision.[477] Cette décision a surpris de nombreuses personnes, car les deux seuls témoins contre Niyitegeka se sont contredits et plus d'une dizaine de témoins — notamment des médecins, des infirmières et des patients — ont témoigné en sa faveur.[478] Une rescapée du génocide a témoigné que le médecin lui avait prodigué d'excellents soins pour une blessure grave et qu'il avait soigné sans distinction des malades hutus et tutsis. Niyitegeka a demandé la révision de sa condamnation, mais sa demande a été rejetée.[479] Au moment de la rédaction de ce rapport, il était toujours en prison.
Le cas du Père Guy Theunis
Un autre cas troublant qui semble avoir eu des motivations politiques est celui du père Theunis, un prêtre belge, militant des droits humains et journaliste qui a vécu au Rwanda entre 1970 et 1994. Theunis a été le rédacteur en chef de la revue Dialogue, initialement publiée au Rwanda et désormais disponible en Belgique, qui a souvent publié des articles critiques à l’égard du gouvernement rwandais.[480] En 1990, Theunis a aidé à lancer l'une des premières organisations rwandaises de droits humains, l'Association rwandaise pour la défense des Droits de la personne et des Libertés publiques (ADL). Avant et après le génocide, il a documenté les violations de droits humains affectant aussi bien les Tutsis que les Hutus.
Theunis est rentré en Belgique peu de temps après le début du génocide. Il est retourné brièvement au Rwanda en 2004 sans rencontrer aucun problème. Cependant, en septembre 2005, il a été arrêté alors qu’il passait par le Rwanda en provenance de la République démocratique du Congo pour se rendre en Europe. Le parquet a ficelé à la hâte une procédure contre le père Theunis, et il a été traduit devant un tribunal gacaca cinq jours seulement après son arrestation (en contraste absolu avec les dizaines de milliers de Rwandais en attente de jugement pendant de longues périodes en prison).[481] Theunis a été accusé d'incitation à commettre le génocide à travers ses écrits.
La véritable impulsion pour cette affaire semblait provenir de personnes hostiles à l'Église catholique pour son rôle dans le génocide,[482] notamment de certains membres de haut rang du FPR qui auraient cherché à prendre le contrôle de Dialogue et de ses actifs.[483]
Une vingtaine de témoins, dont plusieurs étaient des membres en vue du FPR, ont dénoncé le père Theunis pour avoir soutenu le génocide. Ils s'appuyaient sur une lecture déformée de certains de ses écrits, en ignorant, par exemple, la distinction entre ses propres propos et ceux qu'il citait (indiqués par des guillemets). Ses tentatives pour prévenir d’autres personnes du génocide ont été présentées à tort comme des efforts visant à décourager l’implication internationale. Certains des témoins ont lu des déclarations préparées à l’avance, ce qui est très inhabituel dans les sessions gacaca où les participants parlent en général de façon spontanée. L'affaire a été très politisée ; un officier militaire de haut rang présent dans la salle a fait remarquer à un chercheur de Human Rights Watch lors de la procédure qu'il était « heureux » de voir l'Église catholique humiliée.[484]
Lors de l'audience du procès du père Theunis, environ 1 700 personnes, certaines alertées par des annonces répétées à la radio, étaient présentes.[485] Les restrictions habituelles sur la participation des ressortissants étrangers et sur les enregistrements sonores et visuels ont été assouplies, apparemment pour attirer une plus grande attention sur les audiences.
Les juges gacaca ont conclu l'audience en classant le père Theunis comme suspect de catégorie 1 et ont renvoyé son procès devant les tribunaux classiques.[486] Guy Theunis est resté en détention. Suite à une requête du gouvernement belge, l'affaire a été transférée en Belgique en novembre 2005.[487] La police belge a libéré Theunis (qui était retourné en Belgique) pendant qu’elle menait son enquête. Concluant que le dossier était « dépourvu de toute preuve réelle », les autorités judiciaires belges ont depuis classé l’affaire.[488]
Autres affaires
Ces dernières années, plusieurs parlementaires ont été confrontés à des accusations de génocide dans des affaires qui semblent avoir peu de rapport avec le génocide. Alfred Mukezamfura, un journaliste qui est plus tard devenu un membre éminent du parlement après le génocide et a été président de la Chambre des Députés de 2003 à 2008, a été accusé d'incitation au génocide pour la première fois au printemps de 2008. Mukezamfura dirigeait le Parti démocrate centriste, qui a soutenu la candidature de Paul Kagame à l'élection présidentielle de 2003, mais était connu pour s’être prononcé contre la ligne officielle du gouvernement. Il s’est rendu en Belgique en mars 2008 pour recevoir des soins médicaux, et y a demandé l'asile après que des rumeurs ont commencé à circuler au Rwanda à propos de son implication dans le génocide. Les tribunaux gacaca l’ont jugé par contumace et condamné à « la réclusion criminelle à perpétuité », après avoir conclu que plusieurs de ses articles publiés dans la revue hebdomadaire Imvaho dirigée par le gouvernement en 1994 avaient appelé la population à prendre les armes et à commencer à tuer les Tutsis.[489]
Un autre politicien, Stanley Safari, qui a servi sous le gouvernement de Juvénal Habyarimana (Président du Rwanda de 1973 jusqu'à son assassinat en 1994) et qui plus tard est devenu membre du parlement pour le Parti de la prospérité et de la Solidarité (PSP), a été tout d'abord confronté à des accusations de génocide au printemps 2009.[490] Safari était devenu de plus en plus critique envers le gouvernement. Entre autres choses, il avait déclaré à une délégation de haut niveau en visite au Rwanda pour examiner si le pays devrait être admis dans le Commonwealth, que la liberté de s'exprimer librement des partis politiques était limitée et qu'il n'y avait pas de véritable démocratie au Rwanda.[491] Safari a quitté le pays quelques jours à peine avant qu’un tribunal gacaca ne l’ait reconnu coupable de génocide, en le condamnant à la « réclusion criminelle à perpétuité ».[492] Plusieurs jours plus tard, le Sénat l'a expulsé, invoquant le fait qu’il ne s’était pas présenté pour le travail. Peu de temps après sa fuite, une commission parlementaire a entendu des accusations selon lesquelles les idées divisionnistes de Safari avaient provoqué des querelles internes au sein du PSP.[493]
Plusieurs mois auparavant, Béatrice Nirere, membre FPR du parlement, a été confrontée à des problèmes similaires en raison apparemment des ambitions politiques d'un autre membre du FPR. Béatrice Nirere avait été sous-préfet de Byumba avant 1994. Pendant la phase de collecte d'informations à l'échelle nationale pour le système gacaca, personne ne l'a accusée d’aucun acte répréhensible. Il a fallu attendre plusieurs mois après qu'elle ait été élue à la chambre basse du Parlement en septembre 2008 pour que des accusations liées au génocide fassent surface. Un tribunal gacaca l’a condamnée à « la réclusion criminelle à perpétuité » en mars 2009, une décision confirmée en appel.[494] Au moment de la rédaction de ce rapport, elle était toujours en prison. Un député du FPR, qui figurait plus bas que Nirere sur la liste des candidats nominés du FPR (et qui n'avait donc pas été sélectionné), a fomenté les accusations contre elle et a repris le siège de Nirere au parlement après sa condamnation
D’autres détracteurs véhéments du gouvernement rwandais auraient également été confrontés à des accusations à motivation politique devant les tribunaux gacaca. Léopold Munyakazi, un universitaire rwandais en exil, a été pris pour cible après avoir remis en cause le discours officiel du gouvernement sur le génocide, alors qu’il enseignait aux États-Unis. Le gouvernement rwandais a réagi en émettant une série de mandats d'arrêt internationaux contre lui et plus tard en lançant une procédure gacaca à son encontre en son absence. Le procès gacaca a été ensuite renvoyé à la direction du SNJG.[495]
Jean-Léonard Rugambage, un journaliste indépendant, a été arrêté sur des chefs d’accusation de génocide en septembre 2005, dix jours seulement après avoir publié un article dans le journal Umuco accusant des responsables gacaca de la région de Gitarama de mauvaise gestion et d’interférences avec les témoins.[496] Il a été jugé par une juridiction gacaca en novembre 2005.[497] Lorsque Rugambage a accusé l'un des juges de partialité et a appelé à ce qu’il soit récusé, le tribunal l'a condamné à un an de prison pour manque de respect envers un juge (outrage au tribunal). Il a ensuite été classé en catégorie 1 et déferré devant les tribunaux classiques. Cependant, en juillet 2006, le SNJG est intervenu et a ordonné la libération du journaliste pour manque de preuves et irrégularités de procédure. Le Comité pour la protection des journalistes a fait valoir que Rugambage avait été « victime de procédures abusives visant à le punir pour ses articles critiques. »[498]
Le 24 juin 2010, un assaillant inconnu a tué par balles Jean-Léonard Rugambage devant son domicile, le jour même où le journal pour lequel il travaillait, Umuvugizi, publiait un article alléguant l'implication de hautes autorités gouvernementales rwandaises dans la tentative d'assassinat de Faustin Nyamwasa Kayumba, ancien général rwandais (devenu un détracteur véhément du gouvernement), la semaine précédente en Afrique du Sud.[499] Le gouvernement a engagé des poursuites contre deux hommes pour l’assassinat de Rugambage. L’un des deux hommes avait immédiatement avoué lors de son arrestation, et affirmé que lui et son co-accusé voulaient venger la mort d'un frère dont ils ont allégué qu’il avait été tué par Rugambage pendant le génocide.[500] Ces allégations avaient formé la base de l'affaire contre Rugambage devant les juridictions gacaca, mais n'ont jamais été prouvées, et Rugambage n'avait pas été déclaré coupable d'assassinat. En octobre 2010, les deux hommes ont été reconnus coupables et condamnés à la réclusion à perpétuité.[501] L'un d'eux a reçu l'ordre de commencer à purger sa peine immédiatement, mais le deuxième — un agent de police — a été laissé en liberté sous caution dans l’attente d’un appel prévu pour juillet 2011.[502]
Human Rights Watch a mené sa propre enquête sur l’assassinat de Rugambage et a identifié plusieurs pistes suggérant que Rugambage aurait été assassiné en représailles pour ses articles critiques. Rugambage s'était également plaint d'une surveillance accrue dans les jours précédant son assassinat. Cependant, il n'existe aucune preuve que la police ait fait un effort pour explorer ces pistes, et elle a informé Human Rights Watch que leur enquête a été fermée après que l'un des suspects a avoué.[503] La police a présenté exclusivement la théorie selon laquelle il s'agissait d'une vengeance liée à des événements datant de 1994, dans une tentative apparente d'exclure la possibilité de collusion officielle dans l’assassinat de Rugambage.
VIII. L’indépendance et l’impartialité du processus gacaca
La création des juridictions gacaca a été une bonne chose car elle a permis à la population de jouer un rôle important dans le processus gacaca. Mais je déplore [s’adressant aux juges] votre parti pris ...
—Un témoin comparaissant devant une juridiction gacaca à Save, le 18 septembre 2008
Les juges gacaca sont chargés d’affaires relatives à des événements qui se sont produits dans leur propre région. Ayant vécu le génocide, beaucoup ont leurs propres opinions bien arrêtées sur ce qui s'est passé et connaissent certaines ou toutes les parties dans chacune des affaires, qu'ils soient parents, amis, voisins ou partenaires commerciaux. Les observateurs rwandais et internationaux estiment que ces facteurs ont donné lieu à des conflits d'intérêts potentiels ou à une partialité inhérente, et que même avec la meilleure volonté du monde, la plupart des juges gacaca ont inévitablement du mal à évaluer les éléments de preuve de façon impartiale.
Le processus gacaca a également fait l’objet de corruption généralisée et d’exemples d'ingérence politique dans le système judiciaire. Les deux phénomènes se produisent également dans le système judiciaire classique, mais semblent avoir été plus prononcés dans les juridictions gacaca. Les juges ne sont pas les seuls à en avoir profité : les accusés et les rescapés du génocide ont également tenté d’obtenir un gain personnel en se livrant à la corruption. Parfois, les autorités locales, notamment les coordinateurs de district, ont interféré avec le processus de décision. Autant le manque d'indépendance des tribunaux que la corruption ont affaibli la confiance du public dans le système et conduit à des décisions qui ne reflétaient pas ce qui s'est réellement passé pendant le génocide.
Les conflits d'intérêts potentiels pour les juges
Comme indiqué plus haut, à ce jour, le SNJG a démis plus de 45 000 juges gacaca de leurs fonctions en raison d’accusations de leur implication dans le génocide. Bon nombre de ces juges ont été traduits devant des tribunaux gacaca, après qu'ils aient été renvoyés de leur poste.[504] Les juges qui sont eux-mêmes rescapés du génocide ou qui ont perdu des membres de leur famille peuvent également avoir du mal à rester impartiaux. Mais au-delà de ces cas plus clairs, il n'a pas toujours été facile d'identifier les conflits d'intérêt moins évidents, comme par exemple les liens familiaux ou les liens d'affaires peu connus entre les principales parties dans une affaire.
Dans un cas qui démontre la vulnérabilité émotionnelle des juges, une juge a accusé une femme d'implication dans la mort de son propre enfant. La femme a répondu : « Vous autres nous avez dit que nous devrions dire la vérité, et pourtant vous êtes une juge et vous ne dites pas la vérité. » En réponse, la juge a crié : « Tais-toi ! Je sais que mon enfant ne se lèvera plus de la mort. »[505] Human Rights Watch n'a pas recensé de nombreux cas impliquant de tels échanges émotionnels avec les juges, mais l'affaire illustre les difficultés que certains juges ont à mettre de côté leur expérience personnelle au moment de juger des affaires gacaca. Une juge gacaca, qui est une rescapée du génocide, a ouvertement déclaré à Human Rights Watch qu'elle a trouvé difficile de rester impartiale dans de nombreuses affaires parce que les victimes et les accusés étaient tous des voisins.[506] Cependant, il y a eu également beaucoup de juges qui sont des rescapés du génocide et qui n’ont fait preuve d’aucune partialité, ce qui démontre une capacité évidente à mettre de côté leurs sentiments et à se concentrer sur les éléments de preuve disponibles.
En vertu de la loi, un(e) juge doit se récuser si (i) l’une des parties est un conjoint ou un membre de sa famille (parents, frères et sœurs et jusqu’au niveau des cousins), (ii) un grave conflit ou une amitié existe entre le juge et l'une des parties, ou (iii) si le juge est le tuteur d'une des parties.[507] Habituellement, au début de chaque procès, le juge qui préside demande aux parties si quelqu'un a une objection à la présence de l'un des juges. Si quelqu'un soulève une objection, les juges se retirent pour décider de la question. De nombreux cas sont résolus correctement, mais Human Rights Watch a documenté un certain nombre de cas où les juges ont refusé de se récuser dans de telles situations.[508]
La corruption et les gains personnels par le biais du système gacaca
Beaucoup de Rwandais — autant les rescapés du génocide que les accusés, les témoins et les juges — ont déclaré à Human Rights Watch qu’au fil des ans, le système gacaca est devenu une « affaire » lucrative. Presque toutes les personnes interrogées ont convenu que la corruption a influé sur la prise de décision des juridictions gacaca. Certains ont parlé de leurs propres expériences ou de cas dont ils avaient une connaissance directe.
Parmi ces cas, ont figuré l’acceptation par les juges de pots-de-vin d’accusés riches en échange d'acquittements, ou de demandes à l'accusé de verser de l'argent en échange d'un acquittement ; l’accusation de personnes riches de la communauté de crimes par des rescapés du génocide afin de recevoir une compensation monétaire pour laisser tomber l'affaire ; la réception de pots-de-vin de la part de l'accusé par des témoins ; et d’affaires présentées par des parties civiles en échange de fausses allégations, de changement de leur témoignage, ou de la défense d'un accusé. Le SNJG a pris conscience de la corruption et, dans certains cas, la police a tenté d'arrêter les responsables. Le SNJG a affirmé à Human Rights Watch qu'il ne tient pas de statistiques sur ces cas.[509] Human Rights Watch a également demandé à l’Ombudsman du Rwanda son opinion sur la question de la corruption dans le système gacaca, mais il n'a fourni aucune information.[510] En janvier 2008, la secrétaire exécutive du SNJG a indiqué que 56 000 juges inefficaces ou corrompus avaient été retirés de leurs fonctions.[511] Il n'était pas possible de déterminer le nombre de ces cas concernant la corruption initiée par des juges par rapport aux cas des juges acceptant un paiement de l'une des parties à une affaire. Sur la base de ses propres recherches et observations, Human Rights Watch estime qu'il y a eu beaucoup plus de cas non détectés.
La corruption se produit également dans les tribunaux classiques, bien que le phénomène de l'argent changeant de mains physiquement entre les juges et les parties ne semble pas être aussi répandu que dans le système gacaca, selon les recherches de Human Rights Watch. Dans un rapport de 2008, le Bureau de l'Ombudsman a classé le système judiciaire rwandais comme la deuxième institution étatique la plus corrompue, juste après la police de la route.[512] En février 2011, la présidente de la Cour suprême a dénoncé le problème persistant de la corruption dans les tribunaux classiques et a réaffirmé que le gouvernement entend poursuivre les contrevenants.[513]
Des juges qui exigent des pots-de-vin
Dans le système gacaca, le plus grand nombre de cas liés à la corruption documentés par Human Rights Watch met en cause des juges acceptant des pots-de-vin de la part de personnes accusées. Comme l'un des accusés l’a déclaré : « Il faut donner de l'argent. Les juges gacaca n'ont pas été payés alors ils ont parfois pris des dispositions pour recevoir de l'argent de ceux qui ont été accusés. »[514] Plusieurs rescapés du génocide qui ont vu des accusés en liberté en dépit des preuves solides à leur encontre ont confirmé, de même que l'organisation des rescapés Ibuka.[515] Penal Reform International (PRI) a signalé une augmentation du nombre de cas de corruption après que les procès gacaca ont été accélérés en 2007 et après que les activités gacaca ont été répertoriées en tant que composantes de « contrats de performance » du gouvernement local (objectifs de référence fixés par le gouvernement national).[516]
Dans un certain nombre d’affaires, les juges ont eu recours à des personnes intermédiaires ― ayant connaissance à la fois du juge et de l'accusé ― pour contacter l'accusé ou sa famille afin de réclamer de l'argent en échange d'un acquittement.[517] L'accusé ou la famille a payé en espèces, par chèques ou en déposant de l’argent sur le compte bancaire de la personne intermédiaire. Les montants versés dépendaient en grande partie du statut socio-économique de l'accusé, avec des cas documentés allant de 100 000 francs rwandais (environ 165 USD) à 5 millions de francs rwandais (environ 8 200 USD). Dans une affaire de 2009, l'accusé a fait un chèque mais a ensuite signalé l'incident à la police qui a forcé l'intermédiaire à retourner le chèque et a arrêté l'intermédiaire.[518] Dans une autre affaire, un prêtre a dit à la police qu’après son acquittement, l'un des juges s'est approché de lui et lui a demandé de l'argent afin que le juge puisse « décourager » la partie civile de faire appel du verdict. La police a arrêté le juge et il a été poursuivi devant un tribunal classique.[519] Le plus souvent, cependant, la transaction s'est déroulée comme prévu et l'accusé a obtenu une résolution favorable de son affaire, comme décrit ci-dessous.
Dans certains cas, le paiement initial s'est avéré ne pas être suffisant pour garantir un acquittement. Dans une affaire de 2009 à Kigali, un homme a versé à une personne intermédiaire la somme de 100 000 francs rwandais (environ 165 USD). Peu de temps après, l'intermédiaire est revenu et a dit que les juges exigeaient une somme supplémentaire de 300 000 francs rwandais (environ 495 USD) pour garantir un acquittement, à payer lorsque l'affaire serait terminée.[520] L'homme a été acquitté et a payé le reste de la somme. Human Rights Watch a documenté un cas similaire dans un autre quartier de Kigali, où un accusé a versé un total de 1,3 million de francs rwandais (2 140 USD), dont une partie au préalable et une partie après, de manière à obtenir un acquittement.[521]
Dans certains cas, l'accusé ou ses proches ont refusé de payer un pot-de-vin. Dans une affaire de 2009, un homme était convaincu (à juste titre, comme il s'est avéré) que sa femme serait acquittée de toute faute par les juridictions gacaca et a refusé de payer. Elle a été acquittée par la suite.[522] Pour d'autres, le refus de payer un pot-de-vin a abouti à une condamnation.[523]
Dans la plupart des cas, un seul ou quelques-uns des juges ont été impliqués dans l'arrangement. Une rescapée du génocide a raconté qu'un grand nombre d’affaires avaient dû être examinées dans son secteur, parce que le coordinateur de district avait coopéré avec les juges dans la prise de pots-de-vin de personnes accusées.[524] Dans quelques cas isolés, des juges ont approché des personnes accusées connues pour avoir payé des pots-de-vin dans le passé dans le but de leur demander une rémunération similaire afin de « faire disparaitre » de nouvelles affaires ou pour les faire acquitter dans de telles affaires.[525]
Des accusés qui cherchent à être acquittés ou à éviter le procès
Human Rights Watch a également documenté des cas où l'accusé a approché des juges ou des rescapés du génocide, soit directement, soit par un intermédiaire, et leur a offert de l'argent en échange d'un acquittement ou pour encourager les victimes à laisser tomber l'affaire. Dans certains de ces cas, la personne a avoué aux chercheurs de Human Rights Watch qu'elle était coupable, mais a déclaré qu'elle ne voulait pas subir l'humiliation d'une condamnation ou être envoyée en prison. Dans d'autres cas, les individus ont maintenu leur innocence, mais ont dit qu'ils avaient offert de payer un pot-de-vin parce qu'ils avaient peur d’être condamnés sur la base de considérations extérieures, ou parce qu'ils n'avaient pas suffisamment de témoins à décharge pour aider à prouver leur innocence.
Dans une affaire de 2009 à Kigali, le frère d'un homme accusé s'est adressé à l'une des juges gacaca qu'il connaissait personnellement et lui a demandé si elle serait prête à accepter de l'argent en échange d'un acquittement. La juge a consenti, mais l'affaire a ensuite été transférée à une autre juridiction pour un nouveau procès. Le frère s'est adressé à l'un des nouveaux juges et lui a versé 100 000 francs rwandais (environ 165 USD). Le tribunal a néanmoins inculpé l'homme et l'a condamné à 19 ans de prison. En appel, le frère a versé au juge qui présidait, un ami de la famille, 250 000 francs rwandais (environ 412 USD) à répartir entre les cinq juges. Le tribunal a malgré tout condamné l'homme, mais a imposé une peine réduite, inférieure à la période de temps que l'homme avait déjà passée en détention provisoire. Il a donc été libéré.[526]
Un autre homme a déclaré à Human Rights Watch que sa famille avait offert aux juges 120 000 francs rwandais (environ 198 USD) en échange d'un acquittement.[527] Ils ont accepté et il a été acquitté en 2009.
Dans une autre affaire, un homme a avoué avoir versé un pot-de-vin à un juge gacaca afin d'obtenir un acquittement et a été poursuivi pour corruption devant un tribunal classique. Le tribunal a condamné l'homme à huit ans d'emprisonnement et a imposé une amende s'élevant au double de ce qu'il avait versé au juge gacaca.[528] Le procureur a également fait valoir que l'acte de corruption d'un juge gacaca indiquait que l'accusé avait minimisé la gravité du génocide. Le tribunal ne l’a pas suivi et a acquitté l'homme de ce chef d’accusation en 2008.[529]
Human Rights Watch n’a documenté qu’un seul cas dans lequel un accusé a offert de payer une victime pour qu’elle abandonne l'affaire. Une victime de viol a déclaré à Human Rights Watch qu'elle avait accepté de l'argent d'un homme qui l'avait violée pendant le génocide, en échange de quoi elle laisserait tomber l’affaire.[530]
Des rescapés du génocide en quête de dédommagements
Le dénuement et la frustration de nombreux rescapés du génocide engendrés par l'absence d’indemnisations pour leurs pertes et leurs blessures ont expliqué, au moins en partie, pourquoi certains se sont adressés à des personnes accusées et ont proposé d’abandonner l'affaire intentée contre eux en échange d'argent.[531] Human Rights Watch n’a documenté qu’une poignée de ces cas, qui ont tous compté avec la participation d’intermédiaires. Dans un cas particulièrement troublant en 2009, une partie civile et plusieurs autres rescapés du génocide dans la communauté ont proposé d'abandonner une plainte contre une femme accusée en échange de paiement, mais l’ont ensuite dénoncée pour corruption lorsqu’elle s’est avérée incapable de payer une somme supplémentaire qui lui était réclamée.[532]
Un autre accusé, Jean-Népomuscène Munyangabe, dont le cas a déjà été abordé, a demandé la récusation du juge-président, car il soupçonnait qu'il avait reçu un pot-de-vin de la partie civile portant l'affaire.[533] Après que le juge-président a refusé de se récuser, le frère cadet de Munyangabe a déclaré aux membres de la communauté qui assistaient à l'audience qu'il avait été témoin à deux reprises de réunions privées entre la partie civile et le juge-président, et a suggéré que c'était une preuve que le juge était corrompu. Le juge-président a réagi avec colère, contraignant le jeune homme à s’asseoir à côté de la police pour le reste de la procédure et en ouvrant ensuite un dossier contre lui pour faux témoignage.[534]
Une femme qui a accusé un homme d'implication dans la mort d’une femme tutsie, s’est ensuite rétractée après avoir été reconnue coupable de parjure. Elle a expliqué au tribunal que le fils de la victime, qui était partie civile dans cette affaire, lui avait donné de l'argent, des vêtements et des tôles pour le toit de sa maison en échange de son témoignage impliquant l'homme.[535]
Dans un autre cas, devant le tribunal gacaca une femme de ménage a accusé son employeur de l'avoir violée. Le tribunal de première instance l'a reconnu coupable d'accusations liées au génocide, mais l'accusation de viol n'a pas été prise en compte, car c’était une infraction de catégorie 1. Lors de son appel, la femme de ménage est revenue sur ses accusations, en disant que son oncle l'avait encouragée à accuser faussement son employeur en lui promettant une vache.[536]
Ingérence extérieure dans la prise de décisions
Dans certains cas, des tierces parties ont interféré avec le processus gacaca. La plupart des cas ont impliqué le coordinateur du district, qui a parfois exercé une influence considérable sur les juges gacaca et le processus gacaca en général. Un juge gacaca a déclaré à Human Rights Watch que le coordinateur de district a régulièrement influencé les décisions de sa juridiction.[537] Comme indiqué précédemment, les coordinateurs ont parfois omis de fournir des convocations aux détenus et aux accusés en temps opportun ou ont omis de fournir aux prisons des billets d'élargissements, de sorte que les personnes acquittées sont restées détenues. Dans certains de ces cas, les omissions semblent avoir été délibérées.
Un cas troublant documenté par Human Rights Watch est celui de Prudence Nsabimana. Après avoir été acquitté en première instance et en appel par les juridictions gacaca dans la partie sud du pays et libéré de prison, Nsabimana a signalé à la secrétaire exécutive du SNJG qu'un conseiller juridique du SNJG avait conspiré avec le coordinateur de district pour différer sa libération de la prison de Muhanga.[538] Lorsque le conseiller juridique a appris que Nsabimana s’était adressé au SNJG à son sujet, il s’est à nouveau employé avec le coordinateur de district à obtenir une nouvelle convocation pour l'arrestation de Nsabimana sur des accusations de corruption, que la police a effectuée le lendemain matin.[539] L'affaire de corruption n’a jamais vu la lumière du jour, mais l’affaire initiale de Nsabimana est réapparue au stade de révision. Le tribunal a inculpé Nsabimana de blessures à une femme tutsie et de pillage de son véhicule. Le tribunal a condamné Nsabimana à 15 ans d'emprisonnement, qu'il purge actuellement.[540]
Tout aussi problématiques ont été les cas où le coordinateur de district semble avoir dirigé le cours du processus gacaca. Généralement, l’implication s'est produite en coulisses et a pris la forme de coordinateurs de district disant aux juges d'ouvrir un dossier ou comment juger une affaire. Parfois, les coordinateurs de district ont rejoint les juges lors des délibérations dans une affaire particulière et ils auraient indûment influencé leurs décisions. Les motifs des coordinateurs de district étaient variables, allant de leurs propres intérêts privés à une aide pour des proches ou des amis qui cherchaient à porter des accusations de génocide à l’encontre d’une personne.
Dans un secteur, Human Rights Watch a suivi la piste de trois affaires distinctes contre un homme jusqu’au coordinateur de district qui a lancé les accusations. Dans la première affaire, le tribunal a acquitté l'homme.[541] Dans la seconde affaire, le tribunal a déclaré qu'il n'avait pas compétence parce que les allégations étaient identiques à celles entendues dans la première affaire. Dans la troisième affaire, le tribunal a inculpé l'homme et l'a condamné à 19 ans de prison pour les mêmes crimes que dans la première affaire. Après la condamnation, l’organisation pour les rescapés du génocide Ibuka a écrit au SNJG pour dénoncer ce qui s'était passé en appelant le SNJG à annuler la condamnation.[542] Au moment de la rédaction de ce rapport, l'homme était toujours en prison.
IX. Affaires de viol : l'antithèse du processus gacaca
Jusqu'en 2008, les affaires de viol liées au génocide ont été entendues par les tribunaux classiques. Parce que seul un nombre limité de femmes se sont présentées dans les années qui ont suivi immédiatement le génocide, le gouvernement a encouragé à plusieurs reprises les femmes à signaler les cas de viol en les rassurant sur le fait que leurs affaires seraient jugées de manière confidentielle par les tribunaux classiques.
En mai 2008, le gouvernement a changé de cap et a adopté une nouvelle loi qui a transféré tous ces cas devant les tribunaux gacaca. La nouvelle loi prévoyait que les affaires soient entendues à huis clos afin de protéger la vie privée des victimes.
Cette décision posait deux problèmes principaux. Premièrement, en dépit de la nature à huis clos de la procédure, porter ces cas devant les tribunaux gacaca a signifié que des communautés entières étaient au courant d’affaires de viol impliquant des femmes qui avaient d'abord décidé de signaler le crime parce que leur vie privée serait mieux respectée par les tribunaux classiques et que leurs histoires seraient relatées à huis clos si c’était nécessaire. En conséquence, l'objectif de protection de la vie privée des victimes de viol a été sérieusement compromis et la confiance de ces femmes trahie. Deuxièmement, la décision de tenir le procès à huis clos devant les juridictions gacaca, qui étaient censées s’appuyer sur la participation communautaire pour éprouver la véracité des témoignages, a conduit à des risques considérables autant pour les victimes que pour les accusés. Compte tenu d'autres préoccupations en matière de procès équitable énoncées ci-dessus, les procès gacaca à huis clos ont soulevé de graves risques d'erreurs judiciaires. Les tribunaux gacaca tiraient leur légitimité de la participation populaire, donc entendre ces affaires à huis clos contredisait le raisonnement même du recours aux tribunaux locaux. Bien que la décision de tenir ces procès à huis clos ait été sans nul doute bien intentionnée, elle n'était tout simplement pas compatible avec la nature du système gacaca.
Comme les observateurs extérieurs n’ont pas été autorisés à observer ces procès, peu de données de première main existent sur la façon dont les procès pour viol ont été traités. Human Rights Watch a mené dans différentes parties du pays plus de 20 entretiens avec des victimes de viol, ainsi que des juges et des conseillers spécialisés dans les traumatismes, qui ont participé à des audiences gacaca. Human Rights Watch s'est également entretenu avec des associations de femmes et de rescapés du génocide qui ont fourni une aide psychologique aux victimes de viol dont les affaires ont été jugées par les juridictions gacaca. En raison de l'accès limité aux prisons, Human Rights Watch n'a pas été en mesure de mener d’entretiens avec les personnes accusées de viol.
La décision de transférer les affaires de viol devant les juridictions gacaca
En mai 2008, le Parlement a adopté une loi transférant toutes les affaires de catégorie 1 devant les juridictions gacaca, sauf les affaires où l'accusé a occupé une position gouvernementale au niveau de la préfecture ou plus élevé.[543] Un peu plus de 8 000, soit 90 pour cent de ces affaires, concernaient des viols ou des violences sexuelles.[544]
La décision de transférer ces cas devant les juridictions gacaca a été un choc pour beaucoup des victimes de viol interrogées par Human Rights Watch, dont certaines avaient été réticentes à se présenter en premier lieu et ne l’ont seulement fait qu’après avoir reçu l'assurance que leurs affaires seraient jugées par des tribunaux classiques et non pas dans leurs communautés locales. Les principales associations de femmes, notamment Avega (l'association des veuves du génocide), Haguruka, Profemme et l'Association rwandaise des conseillers en traumatisme (ARCT), ainsi qu’Ibuka, se sont opposées au transfert des cas de viol aux juridictions gacaca.[545] Toutefois, ces groupes ont déclaré n’avoir rencontré qu’une seule fois des hauts responsables du SNJG pour exprimer leurs préoccupations et, en l'absence d'une campagne publique sérieuse pour faire connaître leurs préoccupations et leur opposition, la proposition a été adoptée. La représentante juridique d’Avega a déclaré avec franchise : « Nous savions que la loi passerait, nous ne nous y sommes donc pas opposées publiquement. »[546] Une autre a admis : « Nous ne nous sommes peut-être pas battues du mieux que nous aurions pu pour que les affaires de viol ne soient pas transférées. »[547]
Prenant la défense de la décision du gouvernement, la secrétaire exécutive du SNJG a déclaré à Human Rights Watch qu'elle a parcouru le pays pour rencontrer des victimes de viol qui lui ont dit souhaiter que leurs affaires soient entendues par les tribunaux gacaca parce que beaucoup d'entre elles étaient mourantes du VIH / SIDA et voulaient que justice soit faite avant de mourir. Elle a affirmé qu’après que la décision avait été prise, elle n'avait reçu que quelques lettres de femmes qui ne voulaient pas que leurs affaires soient jugées devant les juridictions gacaca.[548] Parmi les plus de 20 victimes de viol que Human Rights Watch a interrogées dans différentes régions du pays (plus d'un quart d'entre elles étaient infectées par le VIH / SIDA), une seule a indiqué préférer que son affaire soit jugée devant une juridiction gacaca, parce que les procédures étaient moins formelles et qu'elle pouvait « parler plus librement. »[549]
La plupart des victimes interrogées par Human Rights Watch ont dit qu'elles avaient peur à l'idée de parler devant les juridictions gacaca au sujet de leur viol et n’avaient poursuivi leur affaire qu'à contrecœur. Elles ont donné diverses raisons pour expliquer leur réticence. Premièrement, la plupart craignaient que leurs déclarations ne restent pas confidentielles, étant donné que les juges étaient tous des membres de leurs communautés locales et parfois même étaient liés à l'accusé.[550] Quatre des associations de femmes, ainsi qu’Ibuka, ont également cité le manque de confidentialité comme l'une des principales raisons pour lesquelles elles se sont opposées au transfert des cas de viol devant les juridictions gacaca,[551] tandis qu'une autre organisation a déclaré que bon nombre des femmes qu'elle avait aidées devant les juridictions gacaca ont estimé que la confidentialité de leurs déclarations n'avait pas été protégée.[552] Deuxièmement, certaines ont affirmé que même si la nature exacte de leur affaire était protégée, elles ont estimé que tout le monde dans la communauté saurait quand même que l'affaire concernait le viol car, le jour des sessions gacaca, que ce soit à huis clos ou en audiences publiques, les membres de la communauté verraient une femme et un homme entrer dans une pièce (ainsi que d'autres) et devineraient donc la nature de l'affaire.[553]
Deux femmes ont déclaré qu'elles ne croyaient pas que leur affaire serait jugée de façon équitable et impartiale, étant donné les liens des juges au sein de la communauté. Une femme a dit qu'elle n'avait pas confiance dans le processus, parce que le frère de l'homme qui l'avait violée avait servi en tant que juge pour des affaires de viol distinctes et qu'elle croyait qu'il avait également commis des crimes pendant le génocide.[554] Une autre victime de viol a également déclaré que les personnes jugeant les affaires de viol dans sa région étaient souvent étroitement liées à des personnes accusées d'implication dans le génocide.[555]
Plusieurs victimes de viol ainsi qu’une représentante d'une association de femmes ont évoqué la corruption dans les affaires de viol.[556] Une femme a confié à Human Rights Watch qu'elle aurait préféré que son cas aille devant les tribunaux classiques où il serait plus difficile pour la famille d'une personne accusée de corrompre les juges.[557] La représentante d'une organisation de femmes a indiqué que, dans le système gacaca, les personnes accusées ont parfois demandé aux femmes d'accepter de l'argent en échange de l'abandon de leur affaire.[558] Deux psychologues spécialisés en traumatisme qui ont accompagné des femmes dans le processus gacaca ont signalé que certaines femmes ont accepté des pots-de-vin de la part de membres de la communauté pour prétendre faussement qu'elles avaient été violées. L’affaire du Dr Justin Nsengimana abordée ci-dessus — dans laquelle la femme l’a d'abord accusé de viol et a ensuite changé son récit et révélé que son oncle lui avait offert une vache pour qu’elle accuse son ancien employeur — en est un exemple.[559] Selon un juge gacaca qui a traité des affaires de viol, des individus ont parfois été faussement accusés de viol quand il s’est avéré difficile de les inculper d'autres infractions.[560] Certains Rwandais ont pensé que les allégations de viol étaient plus faciles à prouver parce qu'elles dépendaient en grande partie, voire entièrement, de la déposition d'un seul témoin — la victime.
Deux femmes ont estimé que le fait d’avoir leur affaire jugée par les tribunaux gacaca minimisait la gravité du viol.[561] Plusieurs femmes ont également affirmé qu'elles trouvaient que les peines étaient trop clémentes, en particulier lorsque l'accusé a fait des aveux.[562] Les associations de femmes et Ibuka ont exprimé la même opinion.[563] Un tiers des victimes de viol interrogées par Human Rights Watch ont exprimé leur frustration au sujet du fait qu'elles n’avaient reçu aucune compensation monétaire après que l'accusé ait été reconnu coupable.[564] En vertu du droit statutaire, une victime de viol dont l’affaire est entendue devant les tribunaux classiques a droit à des réparations civiles.[565]
Les affaires de viol qui n’ont pas été portées devant les juridictions gacaca
Quelques femmes ont demandé au SNJG de mettre fin à leur affaire une fois que celle-ci avait été transférée devant les tribunaux gacaca. Dans un de ces cas, le SNJG a offert de désigner une juridiction gacaca d'une autre région pour entendre l'affaire.[566] Dans d'autres cas, les femmes ont décidé de ne pas poursuivre leur affaire parce qu'elles n'avaient pas parlé du viol à leur conjoint ou à d'autres membres de la famille et ne voulaient pas qu’ils le sachent ou que cela crée des problèmes pour leur famille dans leur communauté.[567] Certaines femmes ont choisi de ne pas poursuivre leur affaire parce qu'elles craignaient d’être encore traumatisées si elles parlaient de nouveau de ce qui leur était arrivé.[568]
La moitié des victimes de viol qui ont parlé à Human Rights Watch, notamment celles qui avaient subi des viols multiples et qui avaient vu d'autres femmes poursuivre leurs affaires devant les juridictions gacaca, ont déclaré qu'elles avaient été carrément incapables de faire juger leurs affaires de viol, soit parce qu’elles ne connaissaient pas l'accusé ou parce que l'accusé était mort.[569] Selon un psychologue spécialisé en traumatisme : « Beaucoup de femmes qui ont été violées par des militaires ou par des Interahamwe [les milices qui ont participé au génocide] ne pouvaient pas porter leur affaire en justice parce qu'elles ne connaissaient pas l'identité de l'agresseur. »[570] Une victime qui n’a pas été en mesure de faire juger son affaire a dit : « Je connaissais le visage de la personne mais pas son nom. »[571] Une autre victime de viol a signalé qu'elle avait été incapable de présenter une réclamation contre un seul des neuf hommes qui l'ont violée car ils étaient tous morts.[572] Pourtant, une autre femme a expliqué : « Cela aurait été un soulagement de le voir avouer, mais je ne peux rien faire. Il ne vous reste que le traumatisme du fait qu’il ne vienne pas. »[573] Ces récits suggèrent que les procès gacaca, et les poursuites en général, n'ont pas suffi à donner satisfaction à certaines victimes de viol.
L’avis des victimes de viol sur le système gacaca
Les femmes qui ont comparu devant les juridictions gacaca en relation avec des affaires de viol ont eu des expériences mitigées, certaines ayant un sentiment très négatif sur l'expérience et d'autres l’ayant trouvée moins difficile que prévue. En vertu des règles gacaca, les femmes ont le droit d'amener un psychologue spécialisé en traumatisme et un parent ou un ami pour les accompagner à l'audience, même lorsqu’elle se déroule à huis clos.[574] Un certain nombre d'organisations ont fourni aux victimes de viol des psychologues spécialisés en traumatisme, notamment Avega, ARCT et Ibuka. La VWSU a également amené des femmes ayant exprimé leur peur de témoigner devant les juridictions gacaca dans les salles communes où leur procès aurait lieu afin de les familiariser avec l'environnement avant le procès.[575] Alors que beaucoup de femmes ont bénéficié des services de psychologues spécialisés en traumatisme avant leur procès et de nouveau lors de l'audience, si nécessaire, d'autres ont eu moins de chance en raison du nombre limité de services d'aide psychologique à travers le pays et se sont présentées seules ou bien avec un parent ou un ami.[576]
Les juridictions gacaca ont souvent bouclé les affaires de viol en une seule audience durant de plusieurs heures à une journée complète, mais pour certaines, trois à quatre séances ont été nécessaires pour statuer sur une affaire. Un juge gacaca a déclaré à Human Rights Watch que le règlement des cas de viol avait été « problématique » car si généralement les victimes et les accusés se sont présentés, les témoins convoqués ont souvent négligé de le faire. Dans certains cas, cela a conduit le tribunal à ajourner l’affaire deux ou trois fois, après quoi le tribunal a tout simplement rendu sa décision avec ou sans les témoins.[577]Dans la majorité des cas décrits à Human Rights Watch, les seules personnes qui ont témoigné devant l'audience gacaca étaient la victime et l'accusé.
Deux outils de procédure ont été introduits pour rendre l'expérience plus facile pour les victimes de viol. D'abord, comme dans les autres affaires, les victimes avaient le droit de demander qu’un juge soit récusé pour le jugement de leur affaire. Contrairement aux affaires des catégories 1 et 2, cependant, la possibilité de récuser un juge a semblé presque automatique et n’a pas nécessité que la victime prouve la partialité ou le conflit d'intérêt réels d'un juge. Une femme a récusé un juge parce qu'elle pensait qu'il ne respecterait pas son droit à la confidentialité.[578]Deuxièmement, plutôt que de comparaître en personne, les femmes pouvaient écrire une lettre contenant leurs allégations, qui était donnée au coordonnateur de district qui la présentait ensuite au tribunal gacaca.[579] Cette procédure n'aurait pas été possible dans les tribunaux classiques. Bien que la procédure ait compromis le droit d'un accusé à faire face directement à son accusatrice (la victime du viol) pour contester sa crédibilité, elle a fourni un certain degré de soulagement aux femmes qui étaient trop effrayées pour comparaître devant les juridictions gacaca ou pour faire face aux hommes accusés de les avoir violées. Human Rights Watch a documenté deux cas où cette procédure a été utilisée.
Pour la plupart des femmes, l'expérience de comparution devant les juridictions gacaca a été émotionnellement difficile, et plus difficile selon elles que ne l’aurait été un procès classique, mais leurs affaires se sont déroulées relativement en douceur. Une femme a déclaré qu'elle ne pouvait pas révéler à l'audience tout ce qui lui était arrivé parce qu'elle connaissait tous les juges de sa communauté et ne se sentait pas à l'aise pour leur parler de l'incident.[580] Une autre femme a estimé que les juges gacaca ont posé des questions « incorrectes » ou insensibles lors de l'audience.[581] La plupart des personnes interrogées, cependant, ont estimé que les juges avaient agi correctement et avec sensibilité par rapport à la situation, une femme décrivant comment les juges « semblaient être à son écoute » et une autre se rappelant comment les juges lui ont donné un moment pour se calmer quand elle a fondu en larmes.[582]
Quelques femmes ont indiqué avoir connu des problèmes en raison de leurs affaires de viol. Une femme a dit que des gens avaient jeté à quatre reprises des pierres sur sa maison après le procès et avaient laissé des notes manuscrites avec des paroles menaçantes.[583] Elle a déclaré qu'elle sentait qu'elle devait rentrer tôt chaque soir et se sentait privée de sa capacité à se déplacer librement dans sa communauté. Deux femmes ont signalé que des membres de la communauté les avaient accusées d'avoir porté de fausses accusations simplement parce qu'elles avaient décidé de donner suite à leurs affaires de viol.[584] Une autre victime de viol, qui se trouvait être juge pour des affaires de catégorie 2 (sans lien avec sa propre affaire de viol), a indiqué que les menaces et les actes d’intimidation de la part de membres de la communauté (notamment des pierres lancées sur sa maison) avaient été si intenses qu'elle a été forcée de déménager ailleurs.[585] Une autre victime de viol a également dû déménager en raison de messages menaçants qu’elle a reçus chez elle.[586] Avega a documenté plusieurs cas où les victimes de viol avaient reçu des menaces de la part des individus qu’elles avaient accusés.[587]
Un cas troublant est celui d'une femme dont le violeur présumé a tenté de l'intimider, ou peut-être même de lui faire du mal, la veille de son procès en novembre 2008. Quand elle l’a vu, accompagné d’un autre homme, arriver devant sa maison sur une moto, elle a immédiatement appelé la police et s’est cachée, laissant une autre femme dans la maison pour faire face aux hommes et pour tenter de gagner du temps. La police est arrivée rapidement sur les lieux et a réussi à arrêter le violeur présumé.[588] L'homme a déclaré à la police qu'il avait violé la femme et venait lui demander pardon et lui offrir 200 000 francs rwandais (environ 330 USD). Cependant, quand ils fouillé l'homme, ils ont trouvé peu d'argent sur lui —loin du montant qu'il prétendait offrir à la femme.[589] Le procès a eu lieu le lendemain, et l'homme –qui n'a pas avoué– a été reconnu coupable et condamné à la « réclusion criminelle à perpétuité».[590]
X. Une justice sélective et qui omet de traiter les crimes du Front patriotique rwandais
Le plus gros problème avec le système gacaca, ce sont les crimes dont nous ne pouvons pas discuter. On nous dit qu’on ne peut pas discuter de certains crimes, les meurtres commis par le FPR, devant les juridictions gacaca, même si les familles ont besoin de parler. On nous dit de nous taire sur ces questions. C'est un gros problème. Ce n'est pas de la justice.
— Un membre de la famille d'une victime de crimes du FPR, le 30 mai 2004
L'une des lacunes les plus graves de la loi gacaca est qu'elle ne traite pas les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité commis par le FPR, alors qu'il cherchait à mettre fin au génocide d'avril à juillet 1994 et consolidait son contrôle sur le pays dans les mois qui ont suivi. Selon au moins quatre organismes des Nations Unies et un certain nombre d'ONG qui ont recueilli des témoignages, des militaires du FPR ont commis des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité au cours de cette période. Une étude menée par le Haut Commissariat pour les réfugiés a estimé que des militaires du FPR ont tué entre 25 000 et 45 000 personnes entre avril et août 1994.[591] Ces crimes ne sont pas équivalents à un génocide, mais les droits des victimes sont équivalents : en vertu du droit rwandais et international, tous les citoyens ont le droit à la justice, indépendamment de leur origine ethnique et de leur appartenance politique ou bien de celles de l'auteur présumé, que le crime soit un génocide, un crime de guerre ou un crime contre l'humanité.[592]
En vertu de la loi gacaca de 2001, les tribunaux gacaca ont compétence sur les crimes de guerre.[593] Toutefois, des considérations politiques ont vite éliminé tout espoir que les victimes des crimes du FPR et leurs proches seraient en mesure d'obtenir justice par le biais du système gacaca. En juin 2002, dans son discours de lancement du processus gacaca, le président Kagame a déclaré que ce serait une grave erreur de confondre le génocide avec « des actes de vengeance commis par des individus. »[594] La loi gacaca de 2004 a retiré les crimes de guerre de la compétence des tribunaux, limitant leurs attributions au génocide et aux crimes contre l'humanité, et une campagne nationale lancée par le gouvernement a insisté pour que les crimes du FPR ne soient pas mentionnés devant les juridictions gacaca.[595]
Les autorités gouvernementales ont souvent dit que quiconque ayant souffert aux mains d'un militaire devrait le dénoncer à la police afin qu’il soit poursuivi en justice. Mais étant donné que la discussion des crimes de guerre du FPR a été et continue d'être assimilée à l’expression d’une « idéologie génocidaire » ou d’une opinion selon laquelle un « double génocide » a eu lieu, peu de Rwandais étaient susceptibles de déposer de telles plaintes.[596]
L'incapacité à traiter ces crimes devant les juridictions gacaca et à fournir aux personnes ayant perdu des proches aux mains des militaires du FPR une quelconque forme de recours a provoqué l'amertume et la frustration pour certains Rwandais. L'exclusion de ces crimes de la compétence des juridictions gacaca n’aurait pas été si grave s'il y avait eu d'autres moyens pour les victimes de ces crimes d’obtenir justice. Mais très peu de soldats du FPR, et encore moins d’officiers, ont été inculpés ou jugés dans le cadre de ces crimes, et il est presque tabou de parler de ces événements en public au Rwanda. Le résultat est que la plupart des victimes et des proches des victimes des crimes du FPR ont presque renoncé à obtenir justice. En 2009, le Comité des droits de l'homme des Nations Unies a appelé le Rwanda à mener des enquêtes et des poursuites sur les militaires du FPR responsables du « grand nombre de personnes, notamment des femmes et des enfants, qui auraient été tuées à partir de 1994. »[597] Aucune autre mesure n'a été prise depuis cette époque.
Le gouvernement rwandais affirme que les crimes du FPR ont fait l’objet de poursuites. Toutefois, à ce jour, le système judiciaire militaire n’a poursuivi que 36 officiers, anciens ou actuels, pour meurtre ou pour toute autre violation des droits des civils au cours de l’année 1994.[598] La plupart des condamnés étaient de simples soldats ou des officiers de rang inférieur et ont reçu des sentences de moins de quatre ans qui n'étaient pas proportionnées à la gravité des crimes. Le TPIR, pour sa part, a omis de poursuivre les crimes du FPR, même si ceux-ci relèvent parfaitement de son mandat.[599]
Beaucoup de Rwandais sont réticents quant à parler ouvertement du devoir de rendre des comptes pour les crimes du FPR, mais ceux qui sont prêts à aborder le sujet ont exprimé leur frustration et leur insatisfaction à l’égard du processus gacaca. Certains estimaient que le gouvernement a essayé d'imposer un unique récit historique inexact — selon lequel le FPR a arrêté le génocide et sauvé le peuple du Rwanda des atrocités sans eux-mêmes commettre de crimes — tandis que d'autres ont pensé que le FPR n'a pas voulu admettre les crimes, car cela aurait affaibli son autorité morale. L'incapacité des victimes des crimes du FPR à présenter leurs plaintes devant les tribunaux gacaca, et le nombre très limité d'options pour pouvoir le faire dans un autre cadre, ont entravé les efforts de réconciliation.
XI. Les opinions sur le système gacaca
Le processus gacaca a-t-il atteint ses objectifs déclarés ? A-t-il révélé la vérité sur ce qui s'est passé pendant le génocide, accéléré les procès, éradiqué la culture de l'impunité, réconcilié les Rwandais, et prouvé que le Rwanda a la capacité de régler ses propres problèmes ?[600]
Sur une période de cinq ans, Human Rights Watch a interrogé un large éventail de personnes impliquées dans le processus gacaca, notamment des victimes, des rescapés du génocide, des criminels, des témoins, d’autres membres de la communauté, des juges, des autorités gouvernementales locales et nationales, et des organisations non gouvernementales. Ces Rwandais ont expliqué à Human Rights Watch comment ils percevaient le système gacaca et son rôle dans les répercussions du génocide. Bien que leur point de vue ait été spécifiquement lié aux procès gacaca, certaines de leurs préoccupations auraient pu s’avérer tout aussi pertinentes pour les tribunaux classiques.
Les points de vue des rescapés du génocide
Un certain nombre de rescapés du génocide ont déclaré à Human Rights Watch que le processus gacaca a joué un rôle positif dans leur vie. Ils ont affirmé que le plus important était qu’ils avaient appris, ainsi que l'ensemble de la communauté, ce qu’il était advenu de leurs proches, et aussi que le processus leur a permis de donner aux membres de leur famille « un enterrement décent. » D’autres rescapés du génocide ont contesté cette position, en disant que toute la vérité n’avait pas été révélée au cours du processus gacaca du fait d’aveux partiels, de fausses accusations portées par toutes les parties impliquées dans le processus, et de jugements qui n’ont pas toujours reflété les éléments de preuve présentés au procès. La plupart ont convenu qu'ils ont appris de précieux renseignements sur les événements de 1994. L’ancien secrétaire exécutif d'Ibuka, Benoît Kaboyi, a résumé la réussite du processus gacaca en soulignant que celui-ci « nous a plus ou moins bien informés [la population] au sujet de ce qui s'est passé » et « nous a informés de l'endroit où se trouvent les morts. »[601]
Les rescapés du génocide avaient des opinions plus partagées sur le fait que le système gacaca était le cadre approprié où traiter les affaires liées au génocide et sur la façon dont les procès gacaca se sont déroulés dans leurs communautés. Presque toutes les personnes interrogées ont convenu que le processus gacaca a réduit la population carcérale et a traité les affaires plus vite que les tribunaux classiques.
De nombreux rescapés du génocide avaient des préoccupations relatives à la corruption et à la partialité des juges. Un certain nombre de personnes ont fait référence au programme de travaux d’intérêt général et à la libération anticipée de prisonniers de certaines catégories comme des exemples de pratiques de condamnations légères. Seules quelques personnes ont dit qu'elles pensaient que les peines étaient proportionnelles aux crimes commis contre elles ou leurs familles. Un certain nombre de rescapés du génocide se sont également plaints que les juridictions gacaca n'ont accordé aucune indemnisation financière aux victimes qui avaient perdu des proches ou qui ont été elles-mêmes blessées ou violées : seuls les victimes dont les biens ont été pillés ou détruits ont reçu des dédommagements.
Les opinions ont également divergé quant à savoir si le processus gacaca avait permis d'éradiquer la culture de l'impunité et d’empêcher de futures violences. Un nombre important de rescapés du génocide, les veuves en particulier, ont exprimé la crainte de nouvelles violences. Certains pensaient que les personnes qu'ils avaient accusées pourraient se venger une fois libérées de prison. Les personnes qui avaient reçu des menaces ou qui avaient été intimidées craignaient que les individus ayant pris part au génocide ne reviennent pour terminer ce qu'ils avaient commencé.
Human Rights Watch a également relevé un large éventail d'opinions sur le rôle du système gacaca dans la promotion de la réconciliation. Un certain nombre de rescapés du génocide ont affirmé qu'ils étaient désormais en mesure d'accueillir leurs voisins qui avaient commis des actes répréhensibles contre eux, ou bien qu’ils ont enfin pu assister à des événements communautaires où ces voisins étaient présents. Un juge a déclaré que « le système gacaca a amélioré la situation parce que les gens se rapprochent lentement les uns des autres alors qu’ils ne le faisaient pas auparavant. »[602] Toutefois, bon nombre de ces rescapés du génocide ont indiqué que ces rencontres étaient superficielles et que les tensions restaient fortes entre les victimes, les criminels et leurs familles. Ainsi que l’a expliqué un rescapé du génocide : « Nous nous saluons, mais nous ne nous rendons pas visite même si nous avons été amis et avons partagé de la bière avant le génocide. »[603]
Une femme a déclaré que le processus avait réduit sa haine envers l'homme qui l'avait violée.[604] Mais la plupart des rescapés du génocide ont indiqué qu'ils demeurent méfiants à l’égard de ceux qui leur ont fait du tort. Un certain nombre de rescapés ont aussi mis en avant le manque de remords de la part des criminels, en disant que seuls ceux qui ont détruit ou volé des biens personnels ont exprimé des remords véritables et demandé pardon. Comme une rescapée du génocide l’a expliqué :
Le jeune homme qui m'a violée m'a chuchoté lors du procès que si je lui pardonnais, il me rendrait hommage dans le futur. Il n'est jamais venu me voir depuis qu'il a été libéré. Je ne le vois jamais alors qu’il vit dans le même quartier.[605]
D'autres rescapés du génocide ont fait des récits similaires. Certains ont estimé que les aveux étaient incomplets ou manquaient de précision, souvent parce que les aveux étaient principalement destinés à obtenir la sortie de prison. Certains rescapés du génocide ont expliqué qu'ils se sentaient forcés de pardonner publiquement à ceux qui leur avaient fait du tort, même si dans leur cœur, ils ne leur avaient pas pardonné. Ainsi que l'a dit une femme : « Il s’agit de réconciliation imposée par le gouvernement. Le gouvernement a forcé les gens à demander et donner le pardon. Personne ne le fait volontairement ... Le gouvernement a gracié les tueurs, pas nous. »[606] D'autres ont parlé de « l'insistance » du gouvernement sur la réconciliation, mais ont rappelé à quel point les situations économiques des rescapés du génocide sont demeurées terribles. Un certain nombre de rescapés du génocide ont exprimé leur amertume quant à l'incapacité du gouvernement à leur donner une aide financière et à assurer leur sécurité.
Selon de nombreux rescapés du génocide, la réconciliation est demeurée précaire. Nombre d’entre eux ont évoqué la nécessité de vivre en paix et de coexister avec leurs voisins hutus, mais la plupart ont admis qu'ils voyaient encore les gens à travers le prisme du « hutu » et « tutsi ».
Les points de vue des personnes accusées de génocide et de leurs familles
De nombreuses personnes accusées d'avoir joué un rôle dans le génocide ont fait écho aux opinions exprimées par les rescapés du génocide en disant que la principale réussite du processus gacaca a été d'aider les gens à comprendre ce qui s'était passé pendant le génocide et de leur permettre de retrouver et d'enterrer leurs proches. En général, cependant, les accusés sont restés plus critiques sur le rôle que le processus gacaca a joué dans la reconstruction du pays. Leurs familles ont souvent exprimé des opinions similaires.
La plupart des accusés (dont certains ont été plus tard reconnus coupables) ont estimé que les procès gacaca ont contribué à réduire la population carcérale et ont veillé à ce que certains des innocents soient libérés. La plupart ont compris qu'il n'aurait pas été possible de résoudre le grand nombre d'affaires liées au génocide aussi rapidement par le biais des tribunaux classiques. Cependant, nombre des accusés ont estimé que les considérations politiques ont fortement influencé le processus gacaca et que les jugements rendus n’ont pas toujours été justes ou fondés sur des faits réels. La plupart des personnes ont fait référence à des irrégularités dans leur affaire et estimaient que leurs droits avaient été sacrifiés pour accélérer le processus. De la même manière que de nombreux rescapés du génocide, des accusés ont soulevé des préoccupations relatives à la corruption, les fausses accusations et la partialité de certains juges. En outre, certains ont trouvé que leur affaire avait peu à voir avec le génocide et plus à voir avec des différends privés avec des voisins, des amis, ou même des membres de leur famille.
Les personnes qui ont avoué leurs crimes ont eu tendance à être plus optimistes au sujet du processus. Un homme a indiqué qu'il avait avoué l'ensemble de ses crimes et que la communauté et sa famille se sont félicitées de sa confession.[607] Bien qu'il ait reconnu avoir avoué seulement parce qu'il craignait les accusations de rescapés du génocide, il a exprimé son soulagement de l'avoir fait. La plupart des personnes qui ont avoué ont convenu que cela avait permis de révéler ce qui s'était passé et avait accéléré leur sortie de prison pour rejoindre leurs familles.
Un certain nombre de personnes accusées ont déploré le fait que les Hutus n’aient pas pu demander justice pour les crimes commis par le FPR. Nombre d’entre elles ont hésité à parler ouvertement de cette question, en partie parce qu'elles avaient peur de ce qui pourrait leur arriver si elles parlaient à des observateurs extérieurs. Celles qui étaient prêtes à le faire ont déclaré trouver injuste que seuls certains crimes puissent être soulevés devant les juridictions gacaca et que la perte de leurs proches aux mains du FPR soit restée « non reconnue. » D'autres ont affirmé que le processus gacaca avait des objectifs hypocrites et avait été créé pour imposer un sentiment de culpabilité collective à tous les Hutus. Une personne a décrit le processus gacaca comme un « moyen de cibler les Hutus. »[608] Pour ces personnes, le processus gacaca n'était pas de nature à briser le cycle de l'impunité et avait au contraire causé seulement davantage de problèmes.
Commentant la contribution du processus gacaca à la réconciliation, l’épouse d'un homme reconnu coupable a déclaré : « Le système gacaca a laissé les Hutus et les Tutsis encore plus divisés que jamais. »[609] Un certain nombre de personnes interrogées en ont convenu et ont évoqué des tensions accrues entre les deux groupes ethniques. Quelques-unes — beaucoup moins que le nombre de rescapés du génocide — ont déclaré que les juridictions gacaca ont contribué à alléger les tensions ethniques et ont donné des exemples de personnes qui sont maintenant en mesure de se saluer ou de se parler.
La réconciliation a-t-elle été obtenue ?
Les entretiens menés par Human Rights Watch indiquent que de nombreux rescapés du génocide et personnes accusées d'implication dans le génocide considèrent le système gacaca comme ayant eu un certain succès, notamment en mettant en lumière de nouvelles informations sur le génocide et en accélérant les efforts pour obtenir justice. Les personnes interrogées étaient en désaccord sur la question de savoir si le système gacaca était le cadre approprié pour résoudre ces affaires, si les tribunaux gacaca ont fonctionné de façon équitable, et si les peines prononcées ont été proportionnelles aux crimes. La plus grande variation des opinions est survenue à l'égard de la question de la réconciliation.
Human Rights Watch n'a pas procédé à une étude approfondie portant sur l'aspect de réconciliation du processus gacaca. Les points de vue ci-dessus ont été recueillis à partir de conversations avec des Rwandais dans le cadre de la collecte d'informations sur les procès gacaca et d'autres recherches relatives aux droits humains au Rwanda. Néanmoins, trois conclusions principales peuvent être tirées de ces entretiens. Premièrement, la justice seule ne peut pas amener la réconciliation et ne peut être qu'une étape dans un processus beaucoup plus long et plus complexe. Le système gacaca peut avoir placé les Rwandais sur la voie de la réconciliation, au moins superficiellement, en leur permettant de vivre ensemble dans une paix relative et de se saluer les uns les autres ou d'échanger quelques mots, mais ― et ce n’est pas étonnant 17 ans seulement après le génocide ― il existe encore de la méfiance au sein des communautés entre les deux principaux groupes ethniques.
Deuxièmement, le processus gacaca a rouvert certaines blessures et renforcé les divisions ethniques. En pratique, le gouvernement a interdit de mentionner publiquement les termes « hutu » ou « tutsi », dans une tentative visant à apaiser les tensions ethniques et à renforcer la notion d'« un Rwanda », mais le système gacaca a renforcé d'autres étiquettes qui suivent des lignes ethniques : celles de « victime » et de « criminel ». Seuls les Tutsis peuvent être des victimes dans le système gacaca et généralement seulement les Hutus peuvent être les criminels.[610] Le fait que les juridictions gacaca n’ont pas accordé réparation à toutes les victimes, les Tutsis comme les Hutus, a provoqué l'amertume de certains Rwandais et a conduit à accroître les tensions dans certaines communautés. Troisièmement, la réconciliation au Rwanda signifie davantage la « cohabitation », ou la coexistence pacifique en tant que nécessité quotidienne, que le pardon sincère venant du cœur des rescapés du génocide.[611]
XII. Soutien international au système gacaca
Le processus gacaca n'aurait pas été possible sans l'appui significatif des bailleurs de fonds internationaux. La Belgique, les Pays-Bas et l'Union européenne (UE) ont été les principales sources de financement au cours des dix dernières années. L'Autriche et la Suisse ont également contribué au processus.
Human Rights Watch n'a pas été en mesure de déterminer les motivations de la décision des bailleurs de fonds étrangers de financer le processus gacaca, en partie parce que bon nombre des représentants des bailleurs de fonds impliqués dans les décisions de politique initiales ne travaillent plus sur le Rwanda et n'ont pas pu être joints pour recueillir leurs commentaires. Investir dans le processus gacaca était une décision risquée, comme un universitaire l’a écrit dans un rapport de 2000 préparé pour le gouvernement belge qui envisageait alors de financer le système gacaca :
Comment faire pour décider d'une politique à l'égard de la proposition pour gacaca ?....[ I] l est clair que la proposition est à la fois très prometteuse et très dangereuse ; longtemps préparée et pleine d'incertitude ; localement dirigée et faiblement implantée socialement ; contenant les semences de la réconciliation et pouvant aboutir à un accroissement potentiel des conflits ; préparant une diminution de la population carcérale (actuelle) tout en conduisant éventuellement à l'augmentation du nombre des nouveaux détenus. Il n'y a moyen d'être sûr de rien : c'est un pari gigantesque pour les autorités et la population rwandaises, comme il le serait pour tout bailleur de fonds le soutenant (avec la différence que pour les bailleurs de fonds, ce n'est pas une question de vie ou de mort, tandis que c’est le cas pour les Rwandais).[612]
Malgré les risques inhérents, un certain nombre de pays européens ont fait le choix de soutenir le processus gacaca.
La Belgique a été le premier et le principal donateur au processus gacaca, versant environ 8,1 millions € (soit à peu près 11,3 millions USD) au SNJG entre 2000 et 2008. La plus grande partie de ce financement a servi à la formation des juges gacaca et à fournir un soutien logistique, y compris des tables, des chaises, des ordinateurs portables, et des écharpes pour les juges.[613] La Belgique a également soutenu des initiatives visant à améliorer le niveau de vie des juges gacaca, en menant une étude pour déterminer les besoins des juges et en leur fournissant ensuite à chacun une radio et un paiement unique de 4 300 francs rwandais (environ 7 USD). Le financement de la Belgique a facilité l'achat d'un vélo pour chaque juridiction gacaca en 2008.[614] En plus de financer le SNJG, la Belgique a fourni 1,5 million € (environ 2,1 millions de dollars) chaque année, pour un total de 12 millions € (soit environ 16,8 millions de dollars), aux ONG assurant un suivi du processus gacaca et du système judiciaire en général, les deux organisations principales étant ASF et PRI.[615]
Les Pays-Bas ont été un autre donateur important du processus gacaca, fournissant plus de 5 millions € (7 millions USD) au processus gacaca entre 2002 et 2009.[616] Une partie importante de ce financement a été acheminée par un fonds commun, auquel participaient la Suisse et l'Autriche, qui a fourni une assistance technique au SNJG. L'aide principale offerte à travers ce fonds commun, ou Bureau d'Appui Technique, était la formation de juges gacaca. La Suisse et l’Autriche, comme nous le verrons ci-dessous, ont abandonné le projet après la fin de la phase pilote en 2005, mais les Pays-Bas ont poursuivi leur soutien à la formation des juges au cours des années suivantes. Le gouvernement néerlandais a contribué de manière significative à une initiative de formation des juges en 2008, lorsque les affaires de viol ont été transférées aux juridictions gacaca.[617]
L'UE a participé à hauteur d’environ 3 millions € (4,2 millions USD) au processus gacaca entre 2002 et 2009.[618] Le financement a été versé directement au SNJG et a été utilisé principalement pour la formation des juges et la publication du bulletin Inkiko-Gacaca — une initiative gouvernementale pour informer sur les activités du processus gacaca. Comme d'autres bailleurs de fonds, l'UE a financé des ONG impliquées dans le processus gacaca, allant de celles observant les procès à celles apportant une assistance psychologique aux victimes de viol dont les affaires seraient jugées par les juridictions gacaca. En 2010, l'UE a cessé de financer les projets spécifiques pour se reconvertir dans le soutien budgétaire sectoriel — en apportant son soutien financier au secteur judiciaire dans son ensemble et en permettant au gouvernement rwandais de déterminer la façon dont l'argent devait être dépensé.[619]
L'Autriche a fourni 1,2 million € (1,68 million USD) au processus gacaca entre 2002 et 2010, avec des fonds initialement versés au fonds commun de soutien du Bureau d'Appui Technique et plus tard directement au SNJG pour la création d'un centre de documentation audio-visuelle.[620] L'Autriche a consacré un supplément de 570 000 € (environ 796 000 USD) sur la même période à des groupes de la société civile observant le processus gacaca.[621]
La Suisse a contribué à hauteur d’un million de francs suisses (environ 1,11 million USD) au processus gacaca lors de la phase pilote de 2002 à 2004. Toutefois, elle a retiré son soutien avant que les procès ne commencent à l'échelle nationale en 2005, après avoir conclu que le processus semblait aggraver les tensions sociales.[622] La Suisse a tenté de réorienter ses fonds vers la réforme de certains problèmes du système gacaca, mais le gouvernement rwandais n'a pas été réceptif à la proposition de la Suisse qui n’a fourni aucun autre financement.[623] Cependant elle a continué à financer au moins une ONG assurant l’observation de procès gacaca jusqu'en 2008.[624]
Certains diplomates ont soulevé de manière efficace des cas particuliers où des erreurs judiciaires se sont produites et, parfois, ont exhorté le SNJG à être plus transparent en fournissant des informations sur le nombre d'affaires en instance et jugées. Les diplomates se sont souvent appuyés sur les ONG assurant le suivi du processus gacaca pour les alerter sur les affaires problématiques, mais ils ont parfois également envoyé du personnel de l'ambassade locale pour observer certains procès.
Les bailleurs de fonds ont rarement fait usage de leur influence, cependant, pour répondre aux problèmes plus fondamentaux et systémiques décrits dans ce rapport. Compte tenu de l'étendue de leur soutien financier et politique au système judiciaire, les bailleurs de fonds auraient dû utiliser leur position pour insister sur l'incorporation de certaines normes minimales dans les procès gacaca et pour faire pression sur le gouvernement rwandais afin qu’il prenne des mesures correctives pour mettre fin à la corruption et à l’utilisation abusive du processus gacaca à des fins personnelles ou politiques.
XIII. Conclusion
Le Rwanda a été confronté à d'énormes défis à la suite du génocide. Il n'aurait jamais pu y avoir une solution simple pour traiter les centaines de milliers d’affaires liées au génocide dans un délai raisonnable. La décision du gouvernement rwandais d’envisager le système gacaca n’était pas une manière déraisonnable d'offrir une certaine forme de justice pour le génocide. Ce système avait l'avantage de traduire rapidement les suspects en justice et de fournir une réparation aux victimes, tout en réduisant la population carcérale.
Toutefois, comme nous avons tâché de le démontrer dans ce rapport, les compromis requis par l'adaptation de la pratique coutumière à base communautaire afin de pouvoir juger de graves infractions pénales ont abouti à l’intégration d'importantes violations de procédures juridiques dans le processus, ainsi qu’à une certaine déception de la part de nombreux Rwandais.
Un certain nombre de compromis ont peut-être été inévitables dans le contexte du système gacaca, mais certains droits fondamentaux — tels que le droit à ne pas être poursuivi deux fois pour le même crime, et le droit d'être informé des accusations avec une précision suffisante et suffisamment de temps pour préparer et présenter une défense (notamment par le biais de témoins à décharge)— auraient dû être mieux protégés. En l’absence de professionnels juridiques formés pour aider les parties ou pour évaluer les éléments de preuve et décider des affaires, la protection de ces droits était encore plus importante pour garantir des procès équitables.
Le gouvernement n'a pas fourni aux juges gacaca une formation et des conseils juridiques suffisants, en dépit de la complexité des concepts pénaux auxquels ils allaient être confrontés. Il ne les a pas non plus payés pour leur travail. Avec des juges élus par leurs communautés locales, il était éminemment prévisible qu'il serait difficile, voire impossible, pour nombre d’entre eux d'empêcher leur propre point de vue sur le génocide, leurs relations avec les membres de la communauté et leurs propres intérêts économiques d'interférer avec leur prise de décisions. Un cadre juridique plus solide et plus robuste était nécessaire pour assurer l'impartialité des juges et pour insister sur des jugements motivés et basés sur des faits.
De même, davantage de garanties auraient été nécessaires pour empêcher les particuliers et les autorités gouvernementales d'abuser du processus gacaca pour servir leurs intérêts personnels. Le caractère informel du processus gacaca et sa dépendance vis-à-vis des acteurs locaux, dont beaucoup avaient leurs propres priorités, a signifié que des personnes accusées, des rescapés du génocide, des membres influents de la communauté, des juges et des agents de l'État ont tous à un moment donné exercé une influence abusive sur le processus gacaca.
Le processus gacaca s’est déroulé de façon différente à travers le pays et a évolué au fil des années, en partie en raison des modifications de la loi et en partie du fait de variations locales sur le terrain. Le gouvernement a apporté certaines améliorations au processus, telles que l'abolition de la peine de mort et la permission pour les condamnés de suspendre une partie de leur peine de prison et de faire des travaux d’intérêt général en premier lieu. Parfois, le SNJG a répondu positivement à des rapports signalant des irrégularités — par exemple, en fournissant des conseils juridiques aux juges gacaca ou en recommandant des mesures correctives dans certaines affaires. Pourtant, ces cas ont été sporadiques et incohérents. L'incapacité ou la réticence du SNJG à surveiller efficacement et à remédier aux problèmes du système gacaca dans son ensemble a découlé de l'insuffisance des ressources, d’un manque de volonté politique, ainsi que d’une incapacité à surveiller les affaires de manière proactive et à être à l'écoute des communautés locales et des observateurs extérieurs à propos des tendances inquiétantes qui se sont développées dans tout le pays. En 2008, et peut-être même plus tôt selon certains, le SNJG était devenu indifférent aux préoccupations de nombreux bailleurs de fonds et ONG quant à l'étendue et la portée des irrégularités. Son manque de réaction aux rapports de plus en plus fréquents faisant état de détournement du processus gacaca à des fins personnelles et politiques a été particulièrement grave.
Cependant, les faiblesses structurelles et systémiques du processus gacaca qui ont compromis son aptitude à fournir des procès équitables et impartiaux ont été plus sérieusement aggravées par le climat politique en vigueur dans le pays et par les restrictions à la liberté d'expression. La campagne du gouvernement contre le « divisionnisme » et l’« idéologie génocidaire » a eu un effet paralysant sur la capacité et la volonté des Rwandais à s'exprimer. Particulièrement préjudiciable dans le contexte du système gacaca, cet effet a parfois empêché les membres des communautés locales de s'exprimer librement sur ce qu'ils ont vu en 1994 et leur a fait craindre des répercussions négatives s’ils témoignaient pour la défense de personnes accusées de génocide. Les Rwandais se sont rendu compte que toute déclaration faite dans le cadre des juridictions gacaca pouvait avoir des répercussions négatives pour eux, et de nombreuses personnes en possession d’informations pertinentes ont choisi de garder le silence. Bien que seulement une poignée d'individus qui ont témoigné devant les juridictions gacaca aient ensuite été formellement inculpés d'« idéologie génocidaire », de « divisionnisme » ou de minimisation du génocide, bien d'autres ont été accusés de parjure ou de complicité dans le génocide à la suite de leur témoignage — le plus souvent lorsqu’ils ont défendu des personnes accusées.
La décision du gouvernement de retirer les crimes commis par le FPR en 1994 de la compétence des tribunaux gacaca — ce qui signifiait que certaines victimes n’obtiendraient jamais justice par le biais des tribunaux communautaires ou ne seraient même pas reconnues en tant que victimes — a également limité le potentiel du système gacaca de favoriser la réconciliation à long terme.
Alors que le gouvernement cherche à mettre fin au processus gacaca, il a reconnu que certaines erreurs judiciaires doivent être corrigées et a commencé à élaborer un processus pour examiner ces affaires. Certaines autorités judiciaires ont été franches, tant en public que lors d'entretiens avec Human Rights Watch, sur l'importance de cette dernière étape pour assurer l'héritage du système gacaca.
Human Rights Watch reconnaît que cette étape est d'une importance cruciale. Pourtant, la proposition que les affaires ayant été identifiées comme d'éventuelles erreurs judiciaires soient réentendues devant les juridictions gacaca, où elles sont survenues en premier lieu, risque de répéter un grand nombre des problèmes évoqués dans le présent rapport. Une option plus judicieuse serait que le gouvernement mette en place une unité spéciale au sein du système judiciaire classique pour assumer ce rôle. Cette unité, qui pourrait être située au sein de la Cour suprême, comprendrait un mécanisme d'examen en deux parties. Premièrement, elle recevrait les appels des accusés qui affirment avoir subi des dénis de justice ou de graves violations de procédure, et elle fournirait un premier examen de ces appels en fonction de certains critères juridiques prédéterminés. Afin de limiter le nombre d’affaires, un examen serait accordé seulement aux personnes purgeant (ou s’apprêtant à purger) des peines d’emprisonnement ou condamnées à des travaux d’intérêt général. Deuxièmement, l'unité transmettrait les affaires qui semblent être bien fondées à des comités d'examen spécialisés, dirigés par des magistrats professionnels (et non des juges gacaca) ou d'autres professionnels du droit. Si le nombre de demandes reçues par l'unité pourrait se compter par milliers, le processus de sélection initial déterminerait les affaires qui méritent un examen.
Les comités d'examen spécialisés — composés de plusieurs personnes — prendraient en considération diverses sources d'information sur chaque affaire examinée, notamment le procès-verbal du tribunal gacaca ayant traité l'affaire et les observations écrites et autres documents transmis par les diverses parties. Le cas échéant, les comités d'examen pourraient tenir des audiences courtes avec les parties, entendre d'autres témoignages importants, ou réclamer des documents supplémentaires. Avec les informations recueillies, les comités d'examen pourraient rendre une décision définitive, soit en confirmant les jugements déjà rendus par les juridictions gacaca soit en révisant les jugements (et les peines) quand des erreurs judiciaires ont été constatées.
Ce ne sera pas une tâche facile, et elle va requérir le soutien financier et l'assistance technique de bailleurs de fonds étrangers. Human Rights Watch estime que ce serait un bon investissement qui permettrait d’optimiser le plein potentiel du système gacaca, d’assurer une justice équitable et impartiale pour le génocide, et de renforcer le système judiciaire rwandais à plus long terme.
Annexe I : Lettre adressée par Human Rights Watch au ministre rwandais de la Justice, le 30 mars 2011
M. Tharcisse Karugarama
Ministre de la Justice
Ministère de la Justice
P.O. Box 160
Kigali
Rwanda, le 30 mars 2011
Objet : Rapport que Human Rights Watch compte publier sur le système gacaca
Monsieur le Ministre,
Je vous écris pour vous informer que Human Rights Watch compte publier un rapport sur les juridictions gacaca dans les prochains mois. S’appuyant sur plusieurs années de recherche et d'observations directes des procès gacaca, ce rapport analyse le processus gacaca sous l’angle des droits humains, met en relief les succès enregistrés et les sujets de préoccupation, et formule des recommandations visant à renforcer le système judiciaire au Rwanda.
Nous tenons à faire en sorte que la perspective du gouvernement rwandais soit reflétée dans notre rapport. Celui-ci comprend déjà des informations fournies à Human Rights Watch par des représentants du ministère de la Justice et du Service National des Juridictions Gacaca (SNJG) au cours des dernières années. Toutefois, afin de nous assurer que le rapport est complet et exact, nous vous saurions gré de nous transmettre votre réponse à nos principales constatations et recommandations (résumées ci-dessous) avant le 29 avril 2011. Nous écrivons également au SNJG pour recueillir son point de vue.
Outre ces questions spécifiques, nous apprécierions toute mise à jour supplémentaire sur le processus gacaca et sur d’autres projets de réforme du système judiciaire rwandais en matière de poursuites futures pour génocide et crimes liés au génocide.
Résumé des constatations
Le rapport que Human Rights Watch compte publier reconnaît les défis énormes auxquels le gouvernement rwandais était confronté en choisissant le système gacaca pour traiter un aussi grand nombre d’affaires de génocide. Il relève un certain nombre des principales réalisations du processus gacaca, notamment le travail rapide des tribunaux, la forte implication des communautés locales ayant témoigné des événements qui ont eu lieu pendant le génocide, et la possibilité que le système gacaca a offerte aux rescapés du génocide d’apprendre ce qui était arrivé à leurs proches.
Le rapport relève également un certain nombre de préoccupations relatives aux droits humains, ainsi que des irrégularités et des violations de procédure régulière – qui ont toutes donné lieu à certains compromis dans la façon de rendre la justice pour le génocide.
Nos préoccupations ont trait principalement à l'absence de garanties de procès équitable et aux limitations de la capacité des accusés à se défendre efficacement. Human Rights Watch a documenté, entre autres, des affaires où :
- la présomption d'innocence a été compromise ;
- les accusés n'avaient pas suffisamment d'informations sur les accusations portées contre eux préalablement à leur procès ;
- les accusés n'ont pas eu suffisamment de temps pour préparer leur défense, et
- des individus ont été jugés deux fois pour les mêmes infractions, par exemple d'abord dans un tribunal classique, puis dans un tribunal gacaca, ou deux fois par différentes juridictions gacaca.
Le rapport documente également :
- l'utilisation abusive des tribunaux gacaca par des particuliers pour régler des comptes ou résoudre des griefs personnels sans rapport avec le génocide ;
- l'ingérence politique dans un certain nombre de procès, en particulier ceux d’individus considérés comme des détracteurs du gouvernement ;
- la corruption de certains juges, accentuée par le manque de rémunération ;
- l'intimidation des témoins ;
- les obstacles au libre témoignage des témoins lors des audiences gacaca ;
- le climat politique général au Rwanda qui a également dissuadé de nombreuses personnes de s'exprimer dans les procès gacaca par crainte de représailles. Les répercussions pour les témoins à décharge potentiels peuvent comprendre des arrestations arbitraires, des accusations de parjure, des accusations d’« idéologie du génocide » ou des accusations de complicité dans le génocide.
D'autres préoccupations ont trait à certaines des prémisses fondamentales du système gacaca dès le départ, par exemple le manque de formation juridique professionnelle des juges et l'absence d’avocats pour les accusés. Le manque de formation juridique professionnelle pour les juges, en particulier, a donné lieu à des pratiques divergentes dans les différentes juridictions gacaca, par exemple dans les normes des éléments de preuve, de prise de décision et de condamnation, ainsi que dans des comportements envers l'accusé, les parties civiles et les membres des communautés locales participant aux procès gacaca.
Le rapport comprendra des études individualisées et des exemples à travers le pays pour illustrer ces tendances et d'autres observées durant les procès gacaca.
Nous vous saurions gré de nous transmettre votre réponse aux préoccupations résumées ci-dessus, et en particulier, de nous fournir toute information sur les mesures prises pour remédier à ces problèmes.
Recommandations
Comme tous les rapports de Human Rights Watch, celui sur le système gacaca fera un certain nombre de recommandations au gouvernement rwandais et aux autorités judiciaires, ainsi qu’aux bailleurs de fonds pour aider à renforcer le système judiciaire après la clôture des juridictions gacaca.
La clôture des juridictions gacaca et les mécanismes d’examen supplémentaire
Human Rights Watch estime que le traitement juste et impartial des affaires en suspens, après la clôture des juridictions gacaca, sera d'une importance primordiale pour l'héritage du système gacaca et pour renforcer le système judiciaire rwandais à plus long terme.
À notre connaissance, la majorité des juridictions gacaca ont fermé, mais un petit nombre d’affaires sont encore à l'étude. Pouvez-vous confirmer le nombre d’affaires qui sont encore en cours, à quel stade se trouvent-elles actuellement, et quand prévoyez-vous qu’elles soient résolues ?
À notre connaissance, il est actuellement prévu que le SNJG, en consultation avec d'autres institutions publiques, examinera les affaires dans lesquelles de graves irrégularités ou des erreurs judiciaires auraient été commises et déterminer si ces affaires devraient bénéficier d'un examen supplémentaire. Pourriez-vous fournir des informations sur les critères spécifiques pour l'examen et le processus ou mécanisme à travers lequel ces affaires seront examinées ?
Human Rights Watch proposera la création d'une unité spécialisée au sein du système judiciaire classique, par exemple au sein de la Cour suprême, pour examiner les appels des personnes qui prétendent avoir subi des erreurs judiciaires ou de graves violations de procédures dans les juridictions gacaca. Nous recommanderions que l'examen soit effectué par des juges professionnels (et non pas des juges gacaca) ou d'autres professionnels juridiques formés, et que des critères précis soient établis pour prioriser les affaires à examiner. Par exemple, ils peuvent accorder la priorité aux appels de personnes purgeant encore (ou s’apprêtant à purger) des peines de détention.
Nous souhaiterions recevoir vos commentaires sur cette proposition.
Futures poursuites pour génocide ou pour des affaires liées au génocide
À notre connaissance, un nouveau projet de loi est actuellement à l'étude concernant les poursuites des affaires de génocide et liées au génocide à la suite de l'achèvement du processus gacaca. Les autorités judiciaires ont informé Human Rights Watch que toute nouvelle affaire serait portée devant les tribunaux nationaux.
Nous vous serions reconnaissants pour toute information sur les mesures prises ou prévues dans les domaines suivants :
- veiller à ce que toutes nouvelles allégations de participation au génocide soient dûment examinées par des procureurs et des juges spécialement formés avant qu’une personne ne soit poursuivie devant les tribunaux classiques ;
- corriger les infractions de double incrimination, pour s'assurer que personne ne soit poursuivi deux fois pour le même crime, et examiner toutes les condamnations où une personne a été jugée à la fois devant une juridiction gacaca et un tribunal classique, ou dans deux ou plusieurs juridictions gacaca différentes pour les mêmes infractions.
Recommandations supplémentaires
Pour veiller à ce que notre rapport reflète les mesures qui peuvent déjà être en cours, nous vous serions reconnaissants si vous pouviez nous informer des progrès réalisés en termes d'action gouvernementale dans les domaines suivants :
- les mesures prises pour veiller à ce que les agents de l'État ne s'immiscent pas dans les procès gacaca ou classiques et ne tentent pas d'influencer la prise de décision ;
- les mesures prises pour veiller à ce que tous les policiers et agents de l'État s'abstiennent de procéder à des arrestations et détentions illégales, et toutes poursuites ou mesures disciplinaires prises contre les personnes responsables de tels actes ;
- les mesures prises pour indemniser les personnes qui ont été illégalement arrêtées et détenues ;
- les poursuites engagées contre des personnes qui ont faussement accusé d'autres personnes ;
- les propositions de convertir en peine avec sursis toute période d’emprisonnement restante pour les condamnés qui ont achevé avec succès leurs travaux d’intérêt général ; et
- la révision de la loi de 2008 sur « l'idéologie du génocide », annoncée en 2010.
Nous vous remercions par avance pour vos réponses à ces questions, et pour toute information complémentaire que vous êtes disposé à partager avec nous. Comme mentionné ci-dessus, nous aimerions recevoir une réponse avant le 29 avril 2011 pour nous permettre d'incorporer dans notre rapport toute information nouvelle que vous puissiez fournir.
Vous pouvez me joindre à l’adresse : rothk@hrw.org
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de ma respectueuse considération.
Kenneth Roth
Directeur exécutif
Annexe II : Réponse à Human Rights Watch du ministre rwandais de la Justice, en date du 5 mai 2011
(Traduction de l’original en anglais)
Commentaires à propos du rapport que HRW compte publier sur le processus gacaca
[1] Tout d’abord, nous prenons bonne note de votre initiative nous demandant d’apporter nos commentaires sur vos conclusions avant que le rapport ne soit rendu public.
[2] Nous apprécions également que vous mentionniez dans votre rapport les défis énormes auxquels le gouvernement du Rwanda était confronté dans le choix de méthodes alternatives pour juger le grand nombre d’affaires de génocide.
Brèves informations sur le contexte
[3] L’une des particularités du génocide des Tutsis au Rwanda en 1994 est l’implication d’une grande partie de la population rwandaise. Appliquer le type de procédure régulière évoqué dans votre rapport dans de telles circonstances était tout simplement impossible : une crise économique, structurelle et institutionnelle serait devenue une impasse insurmontable. Une large portion de la population demeurait improductive et derrière les barreaux pendant des années, ne faisant qu’aggraver les effets du génocide dévastateur. C’était là l’un des multiples défis que le Rwanda essayait de relever lorsque les juridictions gacaca ont été créées. Le processus gacaca était conçu comme un moyen de permettre à tous les Rwandais d’être les principaux acteurs dans le procès des auteurs du génocide, avec pour principal objectif de reconstruire notre société.
[4] Comme point de départ général, il est primordial que nous rappelions les principaux piliers du système gacaca comme alternative au système judiciaire conventionnel :
- Révéler la vérité sur les événements liés au génocide ;
- Accélérer la tenue de procès liés au génocide ;
- Éradiquer la culture d’impunité ;
- Susciter la réconciliation et renforcer l’unité entre les Rwandais ;
- Démontrer la capacité de la société rwandaise à résoudre ses propres problèmes.
Commentaires/informations sur les préoccupations relatives aux droits humains soulevées dans vos conclusions :
a) l’ « absence de garanties de procès équitable » et les « limitations de la capacité des accusés à se défendre efficacement ».
[5] Dans vos conclusions, il semble que Human Rights Watch envisage une conception de « procédure régulière » qui est développée par le droit jurisprudentiel et façonnée par une notion occidentale de la justice. Ces conclusions ne tiennent pas compte du fait que la procédure équitable est un concept relativement nouveau au Rwanda, et que le système gacaca a été créé comme une mesure extraordinaire pour résoudre une situation extraordinaire de violations de droits humains.
6] Aussi, le rapport fait état de « préoccupations relatives aux droits humains » à propos du fonctionnement du système gacaca. Toutefois, le rapport omet de mentionner que c’est le gouvernement du Rwanda qui a identifié des préoccupations relatives aux droits humains avant que le système gacaca ne soit mis en œuvre, instaurant le processus gacaca comme une solution pratique à ces préoccupations.
[7] En fait, le système gacaca n’est pas et n’a jamais eu pour but d’être un instrument judiciaire ; il s’agit plutôt d’un système d’évolution sociale, culturelle et juridique ayant pour objectif, entre autres, de parvenir à la réconciliation des Rwandais et à la reconstruction de la société rwandaise qui a été déchirée par le génocide des Tutsis en 1994.
b) Détournement du processus gacaca par des particuliers comme moyen de résoudre des griefs personnels, corruption de juges et ingérence politique dans les procès.
[8] Un certain nombre d’organismes gouvernementaux et non-gouvernementaux se sont impliqués dans l’observation des tribunaux gacaca, notamment la Commission nationale des droits de la personne, qui a été soutenue particulièrement dans ses activités de monitoring par la Communauté européenne. Le SNJG, qui est responsable des tribunaux gacaca, a déployé son personnel dans tout le pays pour assurer le monitoring et veiller à ce que les juges gacaca respectent des règles minimum de procédure comme le prévoit la loi organique sur les juridictions gacaca.
[9]Même si des irrégularités peuvent se produire, nous avons confiance en nos institutions pour mener à bien leur mandat de protection des droits de notre peuple. Nous estimons également que votre rapport ne devrait pas conclure, en se basant sur quelques cas isolés, que des « compromis dans la façon de rendre la justice pour le génocide » se sont produits. Nous vous pressons également de vous rappeler la réputation très positive du Rwanda pour la lutte contre la corruption. Selon l’indice de perception de la corruption publié par Transparency International en 2010, le Rwanda a la meilleure réputation en ce qui concerne la corruption dans toute l’Afrique de l’Est, et occupe la huitième place pour l’Afrique sub-saharienne.
c) Absence d’avocats
[10] Le système gacaca, c’est la « justice à partir et au sein de la population ». De ce fait, il est important de rappeler les raisons étayant la décision de ne pas autoriser des avocats à participer au processus gacaca « à leur manière officielle et traditionnelle ». La manière complexe dont le génocide a été perpétré exigeait une réponse extraordinaire ; nous avons déterminé que tout citoyen devrait avoir le pouvoir d’être un avocat, un procureur et un témoin. L’idée de ne pas autoriser les avocats dans leur style formel faisait partie des conditions que nous avons créées pour permettre à la population de parler librement de ce qu’ils avaient vu et vécu pendant le génocide. Ne pas autoriser d’avocats était aussi un moyen d’accroître le sentiment d’appropriation de la communauté sur le processus, au lieu de leur imposer un processus.
[11] Votre rapport semble qualifier cette caractéristique du système gacaca d’irrégularité, mais malheureusement, le rapport omet de noter l’équilibre trouvé dans une situation manifestement difficile. En fait, les suspects ne se sont pas vu refuser leur droit à se défendre et à fournir des témoins à décharge. Il s’agit d’un style de jugement qui est familier aux Rwandais, car comme vous le savez le système gacaca a été une caractéristique du système de la justice rwandaise il y a de nombreuses années, et le système plus récent des Abunzi suit également ce modèle. Les avocats font aussi partie de la population et avaient une chance égale de participer et de prêter leurs connaissances juridiques et leur expérience aux procès gacaca en tant que membres de la communauté.
Sur la clôture du processus gacaca
[12] Depuis leur création, il a toujours été prévu que les juridictions gacaca ne dureraient pas indéfiniment : leur unique objectif était de juger les affaires de génocide. Au moment présent, les juridictions gacaca ne sont pas clôturées officiellement parce que le projet de loi organique organisant leur clôture est encore à l’étude, mais il sera bientôt adopté.
[13] Quant à votre question sur le nombre d’affaires gacaca encore en cours, les institutions gouvernementales telles que la Commission des droits de la personne, le bureau de l’Ombudsman, le Service National des Juridictions Gacaca et le ministère de la Justice ont reçu approximativement 1 000 demandes de révision, qui sont en instance. L’organisme chargé des juridictions gacaca au niveau national a été mandaté pour faire une évaluation minutieuse afin de déterminer la façon dont les organismes appropriés devront traiter les appels et les demandes de révision. En ce qui concerne votre question à propos d’un nouveau projet de loi concernant les poursuites des affaires de génocide, vous devriez vous référer à la prochaine loi sur la clôture du système gacaca, qui déterminera le cadre dans lequel seront jugées les affaires en instance une fois que le système gacaca sera clôturé.
Autres informations pertinentes
[14] En réponse à certaines de vos autres questions et préoccupations, nous souhaiterions que vous notiez les points suivants :
- En ce qui concerne l’indemnisation de personnes détenues et plus tard acquittées, elle n’est pas encore un principe incorporé dans notre système de justice, et vous ne la retrouverez pas non plus comme un principe suivi dans nos pays voisins.Toutefois, nous prenons très au sérieux la discipline et l’honnêteté de nos forces de police, comme vous le savez. Si nous renforçons toujours les compétences et les capacités de ces forces, nous ne tolérons ni la corruption ni autres abus de pouvoir, et nous faisons confiance aux dirigeants de cette institution pour gérer ces questions avec intégrité.
- En ce qui concerne la révision de la loi sur l’idéologie de génocide, à la suite de recherches et de conseils d’experts, une révision significative a été rédigée pour répondre aux préoccupations selon lesquelles la loi était trop vague et sujette aux abus. En fait, vous constaterez de nombreuses lois nouvelles et révisées qui vont arriver au cours de l’année prochaine et qui reflètent les principes de transparence et d’obligation de rendre des comptes, ainsi que des droits accrus de liberté d’expression et d’accès à l’information.
Conclusion
[15] Le système gacaca n’est pas une solution complète au nombre important et écrasant d’affaires de génocide ; toutefois, il s’est avéré meilleur que la plupart des autres processus disponibles, en particulier étant donné le grand nombre d’affaires et de criminels. Si nous avions compté sur le système traditionnel de justice, de nombreux suspects seraient encore en attente d’une première audience.
[16] Nous regrettons qu’après de nombreuses années de dur labeur de la part des Rwandais tentant de résoudre les problèmes innombrables laissés par le génocide des Tutsis, les rapports et conseils de Human Rights Watch semblent ne se focaliser que sur les critiques au lieu de suggestions pragmatiques et culturellement appropriées. Par exemple, le précédent rapport de Human Rights Watch était malheureusement biaisé selon l’expérience de l’accusé, et négligeait ainsi de souligner l’un des plus importants objectifs du processus gacaca : la réconciliation des Rwandais et la révélation de la vérité sur ce qui s’était réellement passé pendant le génocide des Tutsis en 1994. La création même du système gacaca est une preuve manifeste que le Rwanda a jugé inacceptable de laisser des suspects en prison pour un temps indéterminé, et en conséquence ceci a donné lieu à l’un des objectifs du système gacaca, d’accroître la vitesse à laquelle les affaires de génocide ont été entendues.
[17] Étant donné le développement du secteur de la justice avant 1994 et la dévastation totale qui a suivi, nous avons dû élaborer de nouvelles procédures et solutions pour gérer la situation chaotique existante. Nous aurions espéré que le prochain rapport de Human Rights Watch aurait reflété une perspective plus réaliste à propos du type de ressources dont disposait le Rwanda dans les années qui ont suivi le génocide, et aurait pris en considération quelques-unes des grandes réussites que le Rwanda a obtenues depuis lors en dépit des défis auxquels le pays était confronté.
[18] Nous accueillons assurément les critiques constructives tandis que nous œuvrons à la construction d’un système de justice moderne et développé, mais les rapports qui caractérisent le système gacaca comme une institution juridique formelle, appliquant un cadre de travail procédural strict aux tribunaux communautaires et des concepts juridiques occidentaux à un secteur de justice émergent, ne sont pas en fait, constructifs. Nous espérons que vous pourrez trouver un moyen d’équilibrer des critiques informées et perspicaces avec un respect pour l’énormité des défis auxquels le Rwanda était confronté à la suite du génocide, quand nous avons déterminé que notre principal objectif, par-dessus beaucoup d’autres, était la reconstruction de notre société qui avait été complètement dévastée.
Meilleures salutations,
Tharcisse Karugarama
Ministre de la Justice/Procureur général
Remerciements
Les recherches et la rédaction du présent rapport ont été assurées par Leslie Haskell, chercheuse sur le Rwanda à Human Rights Watch. Ce rapport contient également des informations rassemblées par plusieurs observateurs locaux des juridictions gacaca et par d’anciens chercheurs de Human Rights Watch. Il a été revu par Carina Tertsakian, chercheuse senior, et Rona Peligal, directrice adjointe de la division Afrique. Des opinions précieuses ont été émises sur une version antérieure de ce rapport par Sara Darehshori, conseillère senior au sein du programme Justice internationale, par Lars Waldorf, ancien chercheur de Human Rights Watch au Rwanda et maître de conférences au Centre for Applied Human Rights (Université de York), et par Zarir Merat, ancien chef de mission d’Avocats Sans Frontières au Rwanda. Le rapport a été révisé par Aisling Reidy, conseillère juridique senior, et par Babatunde Olugboji, directeur adjoint de programme auprès de Human Rights Watch. Rachel Nicholson, Lianna Merner, Grace Choi, Anna Lopriore et Fitzroy Hepkins ont également apporté leur concours à ce rapport. La traduction française a été assurée par Danielle Serres, avec l'assistance de Simon Marrero. La vérification de la fidélité de la traduction a été effectuée par Peter Huvos, éditeur du site Web en français.
Ce rapport n’aurait pas été possible sans le soutien d’Alison Des Forges, conseillère senior au sein de la division Afrique, disparue tragiquement en février 2009, et de son époux, Roger Des Forges.
Human Rights Watch tient à remercier les centaines de Rwandais qui ont accepté de partager avec nous leurs expériences personnelles et leurs points de vue sur le système gacaca au cours de ces dix dernières années. Certaines personnes craignaient de subir des conséquences néfastes si elles parlaient avec Human Rights Watch, mais ont néanmoins décidé courageusement de communiquer leurs histoires. Nous souhaitons également remercier le ministre de la Justice, la Secrétaire exécutive du SNJG, et les nombreux autres représentants rwandais de la justice qui ont accepté de s’entretenir avec nous, et qui nous ont apporté de précieuses informations.
[1] Remarques du Président Paul Kagame à l’Institut international pour la paix, New York, 21 septembre 2009.
[2]Bureau du Coordonnateur résident des Nations Unies, « Rwanda: United Nations Situation report covering the month of October », octobre 1994.
[3] Human Rights Watch, Toujours en Lutte: La justice, un parcours semé d’obstacles pour les victims de viol au Rwanda, vol. 16, no. 10(A), septembre 2004,http://www.hrw.org/fr/reports/2004/09/30/toujours-en-lutte, p. 11. ; Amnesty International, “Annual Report 1999,” http://www.amnestyusa.org/annualreport.php?id=ar&yr=1999&c=RWA (consulté le 26 octobre 2010) ; International Crisis Group, « Tribunal pénal international pour le Rwanda : l’urgence de juger », Rapport Afrique No. 30, 7 juin 2001, http://www.crisisgroup.org/fr/regions/afrique/afrique-centrale/rwanda/030-international-criminal-tribunal-for-rwanda-justice-delayed.aspx (consulté le 26 octobre 2010), p. 40.
[4] Human Rights Watch, La loi et la réalité : Les progrès de la réforme judiciaire au Rwanda (New York: Human Rights Watch, juillet 2008), http://www.hrw.org/en/reports/2008/07/24/law-and-reality-0, p. 14; Carina Tertsakian, Le Château: The Lives of Prisoners in Rwanda (London: Arves Books, 2008), p. 36 ; Médecins Sans Frontières, « Report on the Medical Conditions at Gitarama Prison », juin 1995 ; André Sibomana, Gardons espoir pour le Rwanda: Entretiens avec Laure Guilbert et Hervé Deguine (Paris: Desclée de Brouwer, 1997), pp. 163-65.
[5] Alison Des Forges, Aucun témoin ne doit survivre (New York: Human Rights Watch/Fédération internationale des droits de l'homme, 1999), p. 856.
[6] Human Rights Watch, La loi et la réalité : Les progrès de la réforme judiciaire au Rwanda, p.17.
[7] William A. Schabas, « Justice, Democracy, and Impunity in Post-Genocide Rwanda: Searching for Solutions to Impossible Problems », Criminal Law Forum, vol. 7 (1996), p. 528; Human Rights Watch/Africa, World Report 1996: Rwanda, http://www.hrw.org/legacy/reports/1996/WR96/Africa-08.htm#P599_141723.
[8] Integrated Regional Information Network (IRIN), news report no. 340, 24-26 janvier 1998 ; Human Rights Watch, La loi et la réalité : Les progrès de la réforme judiciaire au Rwanda, p 17.
[9] « HRW and FIDH Condemn Planned Execution of 23 in Rwanda », communiqué de presse de Human Rights Watch, 23 avril 1998, http://www.hrw.org/en/news/1998/04/23/hrw-and-fidh-condemn-planned-execution-23-rwanda; Amnesty International, « Rwanda: 23 People Sentenced to Death, Including Silas Munyagishali and Froduald Karamira », AI Index: AFR 47/11/98, 22 avril 1998, http://www.amnesty.org/en/library/asset/AFR47/011/1998/en/dfb8fc45-dab9-11dd-80bc-797022e51902/afr470111998en.html (consulté le 9 novembre 2010) ; Amnesty International, « Rwanda: Further Information on Imminent Executions », AI Index: AFR 47/15/98, 27 avril 1998, http://www.amnesty.org/en/library/asset/AFR47/015/1998/en/aab5b143-dab6-11dd-80bc 797022e51902/afr470151998en.html (consulté le 9 novembre 2010).
[10] Gouvernement du Rwanda, Report on the Reflection Meetings Held in the Office of the President of the Republic from May 1998 to March 1999 (Kigali: Bureau du Président de la République, 1999).
[11] Ibid., pp. 11-41, 55-86.
[12] Ibid., pp. 62-63.
[13] Le Haut commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (UNHCHR) a exprimé des inquiétudes similaires à propos de l’utilisation du système gacaca pour les poursuites liées au génocide et a recommandé plutôt d’utiliser le gacaca pour rassembler des faits qui pourraient être présentés devant les tribunaux classiques. Voir Haut commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, « Gacaca : Le Droit Coutumier au Rwanda », 31 janvier 1996, p. 39 (document en possession de Human Rights Watch).
[14] Gouvernement du Rwanda, Report on the Reflection Meetings Held in the Office of the President of the Republic from May 1998 to March 1999 (Kigali: Bureau du Président de la République, 1999), pp. 63-65.
[15] « Discours de Paul Kagame à l’occasion du lancement officiel des travaux des juridictions Gacaca », Kigali, 18 juin 2002, reproduit dans Penal Reform International (PRI), « Rapport de la Recherche sur la Gacaca : PRI Rapport III, Avril – Juin 2002 », http://www.penalreform.org/publications/gacaca-research-report-no3-jurisdictions-pilot-phase-0 (consulté le 2 septembre 2010), annexe.
[16] Richard Sezibera, « The Only Way to Bring Justice to Rwanda », The Washington Post, 7 avril 2002, repris par The Global Policy Forum, http://www.globalpolicy.org/component/content/article/168/29030.html (consulté le 3 mars 2010).
[17] Le Parlement a introduit la peine de « réclusion criminelle à perpétuité » lorsqu’il a aboli la peine de mort en 2007. La loi définit cette peine comme suit : « (i) le condamné ne peut bénéficier d’aucune mesure de grâce ou d’amnistie, de la libération conditionnelle ni de la réhabilitation, sans qu’il ait accompli au moins vingt ans (20) d’emprisonnement et (ii) le condamné est mis dans l’isolement. » Loi organique no.31/2007 du 25 juillet 2007 portant abolition de la peine de mort, Journal Officiel, no. 46 édition spéciale. Voir aussi Loi no. 32/2010 du 22/09/2010 relatif à l’exécution de la peine de réclusion criminelle à perpétuité.
[18] Bert Ingelaere, « The Gacaca Courts in Rwanda », in Luc Huyse and Mark Salter, eds., Traditional Justice and Reconciliation after Violent Conflict: Learning from African Experiences (Stockholm: IDEA, 2008), p. 37.
[19] Loi organique no. 8/96 du 30 août 1996 sur l’Organisation des poursuites des infractions constitutives du crime de génocide ou de crimes contre l’humanité, commises à partir du 1er octobre 1990 (ci-après « Loi sur le Génocide »). La loi négligeait une partie essentielle de la définition du génocide contenue dans la Convention internationale pour la prévention et la répression du crime de génocide : l’intention de l’auteur d’éliminer tout ou partie d’un groupe donné. Ainsi des personnes inculpées de crimes tels que le vol commis entre avril et juin 1994, pouvaient —et furent— inculpées de génocide sans considérer si elles cherchaient simplement à tirer profit de façon opportuniste de la situation ou si elles cherchaient réellement à éliminer des personnes appartenant à l'ethnie tutsie. Voir Caroline Stainier, Albert Muhayeyezu, Jean Jacques Badibanga et Hugo Moudiki Jombwe, Vade-mecum, Le crime de génocide et les crimes contre l'humanité devant les juridictions ordinaires du Rwanda (Bruxelles : Avocats sans Frontières, 2004), pp. 119-139.
[20]Loi sur le Génocide, art. 2.
[21] Loi sur le Génocide, arts. 14-18. La peine de mort a été ensuite remplacée par la réclusion à perpétuité ou la « réclusion criminelle à perpétuité ». Loi organique n° 31/2007 du 25 juillet 2007 portant abolition de la peine de mort.
[22] Loi sur le Génocide, arts. 10-13.
[23] Loi organique no. 40/2000 du 26 janvier 2001 établissant les « Juridictions Gacaca » chargées des poursuites et du jugement des infractions constitutives du crime de génocide et d’autres crimes contre l’humanité, commis entre le 1er octobre 1990 et le 31 décembre 1994 (ci-après « Loi 2001 sur les Gacaca »). La plupart des affaires jugées devant les tribunaux gacaca se rapportaient à la seule année 1994.
[24] Loi 2001 sur les Gacaca, art. 1. Cette exigence était aussi contenue dans des amendements ultérieurs aux lois gacaca. Voir Loi organique du 19 juin 2004 portant organisation, compétence et fonctionnement des Juridictions gacaca chargées des poursuites et du jugement des infractions constitutives du crime de génocide et d’autres crimes contre l’humanité, commis entre le 1er octobre 1990 et le 31 décembre 1994 (ci-après « Loi 2004 sur les Gacaca »), art. 1.
[25] De nouvelles lois sur le processus gacaca ont été adoptées en 2004, 2006, 2007 et 2008.
[26]Loi 2004 sur les Gacaca, arts. 23, 51. Selon la Loi 2004 sur les gacaca, les catégories 2 et 3 ont fusionné pour devenir la catégorie 2 (traitant les meurtres intentionnels et non intentionnels ainsi que les agressions graves) et les crimes contre les biens sont devenus un délit relevant de la catégorie 3.
[27]Loi 2004 sur les gacaca, arts. 3-4.
[28] Loi organique du 1er mars 2007 portant organisation, compétence et fonctionnement des Juridictions gacaca chargées des poursuites et du jugement des infractions constitutives du crime de génocide et d’autres crimes contre l’humanité, commis entre le 1er octobre 1990 et le 31 décembre 1994, art. 11 (ci-après « Loi 2007 sur les gacaca »).
[29]Loi 2007 sur les gacaca, art. 5.
[30]Loi organique du 19 mai 2008 Modifiant et complétant la Loi organique No. 16/2004 of 19/6/2004 portant organisation, compétence et fonctionnement des Juridictions gacaca chargées des poursuites et du jugement des infractions constitutives du crime de génocide et d’autres crimes contre l’humanité, commis entre le 1er octobre 1990 et le 31 décembre 1994, art. 1 (ci-après « Loi 2008 sur les gacaca »). La Loi 2008 sur les gacaca transférait toutes les affaires de viols et de violences sexuelles aux tribunaux gacaca.
[31] PRI, « Rapport de la Recherche sur la Gacaca: PRI Rapport III, Avril – Juin 2002 », http://www.penalreform.org/publications/gacaca-research-report-no3-jurisdictions-pilot-phase-0 (consulté le 2 septembre 2010), p. 7. Un secteur pilote était choisi pour chacune des 12 provinces qui existaient alors au Rwanda et comprenait 80 juridictions de cellule. Les secteurs pilotes étaient Nkomero (province de Gitarama), Gishamvu (province de Butare), Nkumbure (province de Gikongoro), Nzahaha (province de Cyangugu), Nyange (province de Kibuye), Murama (province de Gisenyi), Mataba (province de Ruhengeri), Birenga (province de Kibungo), Mutete (province de Byumba), Gahini (province d’Umutara), Nyarugenge (Kigali ville) et Kindama (Kigali rural).
[32] « Gacaca in Brief », Hirondelle News Agency, 15 mars 2005, http://www.hirondellenews.com/content/view/2170/26 (consulté le 5 octobre 2010).
[33] « Over 600 Trials Completed So Far », Hirondelle News Agency, 27 avril 2005, http://www.hirondellenews.com/content/view/2370/26 (consulté le 5 octobre 2010).
[34] « Start of Gacaca Trials Postponed until February », Hirondelle News Agency, 11 janvier 2005, http://www.hirondellenews.com/content/view/1870/26 (consulté le 5 octobre 2010).
[35] Service National des Juridictions Gacaca (SNJG), Procédure de collecte d’informations dans les juridictions Gacaca, Vérité-Justice-Réconciliation, Kigali, novembre 2004, mentionné dans PRI, «Rapport de monitoring et de recherche sur la Gacaca : La récolte d’informations en phase nationale», juin 2006, http://www.penalreform.org/files/rep-ga8-2006-info-gathering-fr_0.pdf (consulté le 5 octobre 2010), n.20
[36] PRI, «Rapport de monitoring et de recherche sur la Gacaca : La récolte d’informations en phase nationale », juin 2006, http://www.penalreform.org/files/rep-ga8-2006-info-gathering-fr_0.pdf (consulté le 5 octobre 2010), pp. 17-19, 26-38.
[37] Conférence de presse de la secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, 3 juillet 2007, Kigali ; « One Tenth of the Rwandan Population Accused of Genocide », Hirondelle News Agency, 3 avril 2007, http://www.hirondellenews.com/content/view/9400/26 (consulté le 5 octobre 2010).
[38] Conférence de presse donnée par la secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, 3 juillet 2007, Kigali. Les statistiques fournies par le SNJG indiquent que 44 204 suspects étaient censés ne plus se trouver au Rwanda et que 88 063 suspects étaient censés être décédés.
[39] Ce chiffre était plus de quatre fois supérieur à celui de la population carcérale lorsqu’elle a atteint son maximum en 1998.
[40] Selon le SNJG, le nombre total de tribunaux gacaca était de 12 103, se répartissant comme suit : 9 013 au niveau des cellules, 1545 au niveau des secteurs, et 1545 cours d’appel au niveau des secteurs. Remarques du directeur de la section juridique du SNJG, Gratien Dusingizimana, à la Conférence nationale sur l’unité et la réconciliation, Kigali, 9 décembre 2009. Le document Power Point présenté lors de la conférence peut être consulté sur le site Web du SNJG sous le titre « Gacaca Jurisdictions: Achievements, Problems, and Future Prospects », http://www.inkiko-gacaca.gov.rw/En/EnIntroduction.htm, p. 23 (consulté le 15 mars 2010).
[41] « Gacaca Jurisdictions Have Extended to All Rwanda And Have Judged 16,801 Persons in Three Months », Hirondelle News Agency, 19 octobre 2006, http://www.hirondellenews.com/content/view/3936/26 (consulté le 5 octobre 2010).
[42] « Conclusion of Gacaca Trials Next Year (Rwandan Minister of Justice) », Hirondelle News Agency, 20 décembre 2006, http://www.hirondellenews.com/content/view/9252/418 (consulté le 5 octobre 2010).
[43] Ibid.
[44] « Gacaca Results Presented to Cherie Blair », Hirondelle News Agency, 22 février 2007, http://www.hirondellenews.com/content/view/4300/92 (consulté le 5 octobre 2010).
[45] Plus de 2000 nouveaux tribunaux sont venus s’ajouter aux tribunaux de secteur et d’appel existants.
[46] ASF, « Monitoring des juridictions gacaca, phase de jugement: Rapport Analytique No. 3, octobre 2006-avril 2007 », http://www.asf.be/publications/Rwanda_MonitoringGacaca_RapportAnalytique3_FR.pdf (consulté le 21 mars 2011), pp. 59-62 ; PRI, « La contribution des juridictions Gacaca au règlement du contentieux du génocide : Apports, limites et attentes sur l’après Gacaca », 24 février 2010, http://www.penalreform.org/files/Gacaca_final_2010_fr.pdf (consulté le 21 mars 2011), pp. 41-42 ; PRI, Huit ans après…le point sur le monitoring de la gacaca au Rwanda (London: Bell & Bain Ltd., 2010), pp. 63-64.
[47] « Gacaca Mandate to be Extended », The New Times, 3 décembre 2007, http://allafrica.com/stories/200712030014.html (consulté le 5 octobre 2010).
[48] Rapport du SNJG, 27 octobre 2008 (document en possession de Human Rights Watch); Edwin Musoni « CNLG to Highlight Gacaca Achievements », The New Times, 2 juin 2009, http://allafrica.com/stories/200906020149.html (consulté le 8 octobre 2010).
[49] Integrated Regional Information Network (IRIN), « Jury Still Out on Effectiveness of ‘Gacaca’ Courts », 23 juin 2009, http://www.irinnews.org/report.aspx?ReportID=84954 (consulté le 5 octobre 2010).
[50] Human Rights Watch, La loi et la réalité : Les progrès de la réforme judiciaire au Rwanda, annexe 2.
[51] Entretien de Human Rights Watch avec Domitilla Mukantaganzwa, secrétaire exécutive du SNJG, Kigali, 11 mars 2008.
[52] « Gacaca Courts to Close in June », The New Times, 12 mars 2009, http://allafrica.com/stories/200903130267.html (consulté le 5 octobre 2010) ; « Only 2,261 Gacaca Cases Remain », The New Times, 10 décembre 2009, http://allafrica.com/stories/200912100016.html (consulté le 6 octobre 2010) ; « Gacaca Closure Postponed One More Time », Hirondelle News Agency, 31 mars 2010, http://www.hirondellenews.com/content/view/13340/332 (consulté le 5 octobre 2010).
[53] « Last Gacaca Verdict to be Delivered ‘Any Time from Now' », Hirondelle News Agency, 14 juillet 2010, http://www.hirondellenews.com/content/view/13615/1167 (consulté le 6 octobre 2010) ; « Gacaca Official Closure Postponed Sine Die », Hirondelle News Agency, 29 septembre 2010, http://www.hirondellenews.com/content/view/13738/26 (consulté le 6 octobre 2010).
[54] Correspondance électronique de Human Rights Watch avec le porte-parole du SNJG, Denis Bikesha, 16 novembre 2010 ; entretien téléphonique de Human Rights Watch avec Bikesha, 16 mars 2011. Au fil des ans, le SNJG a rencontré des difficultés pour fournir des statistiques fiables sur le nombre d’affaires traitées par les juridictions gacaca. Il a annoncé des totaux allant d’un million à 1,5 million d’affaires au cours des deux dernières années. Les véritables chiffres ne seront pas connus tant que tous les dossiers gacaca n’auront pas été rassemblés au siège du SNJG et saisis dans une base de données électronique, censée être achevée à mi 2011. Au moment de la rédaction de ce rapport, le SNJG avait enregistré 1 237 356 dossiers. Toutefois, il pensait que le total puisse être légèrement inférieur car il avait détecté un certain nombre d’entrées multiples dans sa base de données et s’employait à les éliminer. Il faut noter que ces chiffres ne correspondent pas au nombre des personnes accusées. Des individus peuvent avoir des affaires multiples dans différentes juridictions, selon l’emplacement des crimes, et peuvent avoir à la fois une affaire de catégorie 1 ou 2 pendantes et une autre affaire de catégorie 3 (pour dommages aux biens). Le SNJG n’a pas fourni de statistiques sur le nombre total d’individus jugés par les tribunaux gacaca. Selon le SNJG, le taux d’acquittement était de 30 pour cent pour les affaires relevant de la catégorie 2 et de 4 pour cent pour les affaires de catégorie 3. Il n’a pas pu fournir le taux d’acquittement pour les affaires relevant de la catégorie 1. Dans des statistiques officielles rendues publiques en janvier 2011, le SNJG a annoncé que 145 255 personnes au total avaient été acquittées par les tribunaux gacaca, ce qui traduit un taux d’acquittement global de moins de 12 pour cent. « Les Tribunaux Gacaca ont acquitté près de 150 000 personnes (Officiel) », Hirondelle News Agency, 28 février 2011, http://fr.hirondellenews.com/content/view/15909/613 (consulté le 16 mars 2011).
[55] Entretien de Human Rights Watch avec la secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, et le directeur de la Section juridique du SNJG, Gratien Dusingizimana, Kigali, 11 novembre 2010.
[56] Entretien de Human Rights Watch avec une personne qui avait consulté le rapport de la CNDP, Kigali, 16 novembre 2010. La CNDP a présenté son rapport annuel sur les droits humains au Parlement fin novembre 2010, citant des violations de procédure dans 367 affaires gacaca et expliquant qu’elle soumettait le rapport confidentiel au Président Kagame parce qu’elle estimait que le SNJG n’avait pas répondu correctement aux préoccupations formulées dans des rapports antérieurs de la CNDP. Rapport de la CNDP pour 2009-2010, p. 55 (document en possession de Human Rights Watch). Voir aussi Remarques de l’Ombudsman Tito Rutaremara au Parlement, 16 novembre 2010 ; Bureau de l’Ombudsman, « Annual Activity Report January 2009-June 2010 », juillet 2010, http://www.ombudsman.gov.rw/Documents/RAPPORT%20ANNUEL2009-2010.pdf (consulté le 8 décembre 2010), pp. 22-23, 26.
[57] Entretien de Human Rights Watch avec la secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, et le directeur de la Section juridique du SNJG, Gratien Dusingizimana, Kigali, 11 novembre 2010.
[58]Lettre du ministre de la Justice, Tharcisse Karugarama, à Human Rights Watch, 5 mai 2011 (voir Annexe II).
[59] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec le porte-parole du SNJG, Denis Bikesha, 16 mars 2011.
[60] Entretien de Human Rights Watch avec le porte-parole du SNJG, Denis Bikesha, Kigali, 11 novembre 2010 ; entretien de Human Rights Watch avec la secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, et le directeur de la Section juridique du SNJG, Gratien Dusingizimana, Kigali, 11 novembre 2010.
[61] Le Rwanda a accédé au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) en 1975 et a ratifié la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) en 1983. Cette section s’appuie largement sur ces instruments comme fondements des obligations internationales du Rwanda. Voir PIDCP, Résolution de l’Assemblée générale de l’ONU 2200A, 16 décembre 1966, entrée en vigueur le 23 mars 1976, art. 14 ; CADHP, OAU Doc. CAB/LEG/67/3 rev. 5, 21 I.L.M. 58 (1982), 27 juin 1981, entrée en vigueur le 21 octobre 1986), art. 7.
[62] Comité des droits de l’homme de l’ONU, « Consideration of Reports Submitted by State Parties Under Article 40 of the Covenant, Concluding Observations of the Human Rights Committee », CCPR/C/RWA/CO/3, 7 mai 2009, http://www.ccprcentre.org/doc/ICCPR/AR/A_64_40(Vol%20I)_Eng.pdf (consulté le 27 avril 2010), para. 17, p. 48.
[63] Ibid.
[64] Bureau du Haut commissariat aux droits de l’homme, « United Nations High Commissioner for Human Rights Ends Visit to Rwanda », 25 mai 2007.
[65] Constitution rwandaise modifiée en 2010, art. 18 ; Loi no. 13/2004 du 17/5/2004 portant Code de procédure pénale (« Code de procédure pénale rwandais »), articles 64 et 96 ; Loi sur le Génocide, art. 36. Voir aussi PIDCP, art. 14 ; CADHP, art. 7.
[66] « Rwanda/Justice – Des avocats rwandais devant les gacacas ? », Hirondelle News Agency, 6 septembre 2007, http://fr.hirondellenews.com/content/view/5308/334 (consulté le 6 octobre 2010).
[67] Entretien de Human Rights Watch avec un avocat, Kigali, 11 septembre 2007.
[68] Correspondance électronique de Human Rights Watch avec un membre de l’Institut danois pour les droits de l’homme, 25 novembre 2009.
[69] Institut danois pour les droits de l’homme, « Counseling of Accused and Survivors in the Context of Genocide Trials Before Gacaca Tribunals – A Proposal by the Danish Center for Human Rights », 15 mai 2002 (document en possession de Human Rights Watch).
[70] Correspondance électronique de Human Rights Watch avec un membre de l’Institut danois pour les droits de l’homme, 25 novembre 2009.
[71] « Rwanda: Un tribunal gacaca condamne un militant à la prison», communiqué de presse de Human Rights Watch, 30 mai 2007, http://www.hrw.org/en/news/2007/05/30/rwanda-un-tribunal-gacaca-condamne-un-militant-la-prison; « Rwanda : Une cour d’appel confirme la peine prononcée contre un militant », communiqué de presse de Human Rights Watch, 22 août 2007, http://www.hrw.org/fr/news/2007/08/22/rwanda-une-cour-d-appel-confirme-la-peine-prononc-e-contre-un-militant. À l’époque, Byuma était aussi vice-président de la Ligue des droits de la personne dans la région des Grands Lacs (LDGL), membre de la Ligue rwandaise pour la promotion et la défense des droits de l’homme (LIPRODHOR), et de l’Association des écrivains du Rwanda (IBARWA).
[72] SNJG, « The Case of François-Xavier Byuma », 12 juin 2007, http://www.inkiko-gacaca.gov.rw/pdf/June%20Byuma%20Final%20copy.pdf (consulté le 10 décembre 2010) [ci-après désigné comme la « Déclaration du SNJG sur Byuma »], p. 1.
[73] L’article 10 de la Loi gacaca de 2004 prévoit que les juges ne peuvent pas siéger dans des affaires où une « inimitié grave » existe avec l’accusé ou lorsque « tout autre prévenu dont le lien avec la personne intègre pourrait entraver la liberté de cette dernière. »
[74] Le SNJG a appuyé la menace du juge dans une déclaration ultérieure, indiquant que le refus initial de Byuma de témoigner à son procès était « contraire à l’esprit et à la nature participative du processus gacaca dans son ensemble. » Déclaration du SNJG sur Byuma, p. 2.
[75] Human Rights Watch, observations de procès, juridiction du secteur de Biryogo, district de Nyarugenge, Kigali, 13 mai 2007.
[76] Human Rights Watch, observations de procès, juridiction du secteur de Biryogo, district de Nyarugenge, Kigali, 20 mai 2007.
[77] Human Rights Watch, observations de procès, juridiction du secteur de Biryogo, district de Nyarugenge, Kigali, 27 mai 2007. La femme a témoigné au procès avoir été selon elle enlevée et a fourni des éléments de preuves contradictoires d’avoir été agressée par Byuma. Le tribunal, dans son jugement final, n’a pas réconcilié ni expliqué les contradictions.
[78] Human Rights Watch, observations de procès, juridiction du secteur de Biryogo, district de Nyarugenge, Kigali, 4 et 18 août 2007.
[79] Human Rights Watch, observations de procès, juridiction du secteur de Biryogo, district de Nyarugenge, 24 janvier, 7 février, 7 et 14 mars 2009.
[80] Human Rights Watch, observations de procès, juridiction du secteur de Biryogo, district de Nyarugenge, 24 janvier, 7 février, 7 et 14 mars 2009.
[81] Constitution rwandaise, art. 19 ; Code rwandais de procédure pénale, art. 44 ; PIDCP, art. 14 ; CADHP, art. 7.
[82] Voir Comité des droits de l’homme de l’ONU, Observation générale No.32, article 14 : Droit à l’égalité devant les tribunaux et les cours de justice et à un procès équitable, 23 août 2007, CCPR/C/GC/32, para.30.
[83] Human Rights Watch, La loi et la réalité : Les progrès de la réforme judiciaire au Rwanda, pp. 40-43 ; Amnesty International, « Il est plus prudent de garder le silence : les conséquences effrayantes des lois rwandaises sur ‘l’idéologie du génocide’ et le ‘sectarisme’», AI Index: AFR 47/005/2010, 31 août 2010, http://www.amnesty.org/fr/library/asset/AFR47/005/2010/fr/9f9d78ca-29d0-4140-89cd-5a994d5bc5c6/afr470052010fra.pdf (consulté le 4 décembre 2010), pp. 11-17.
[84] Human Rights Watch, « Il n’y aura pas de procès » : Détenus abattus par la police et imposition de punitions collectives (New York: Human Rights Watch, juillet 2007), http://www.hrw.org/legacy/french/reports/2007/rwanda0707/ (consulté le 4 mars 2010), p. 27.
[85] Loi no. 47/2001 du 18/12/2001 portant répression des crimes de discrimination et pratique du sectarisme, art. 1; Loi no. 18/2008 of 23/07/2008 portant répression du crime d’idéologie du génocide, arts. 2-3 (ci-après « Loi sur l’idéologie du génocide ») ; Constitution rwandaise, art. 13 ; Loi no. 33bis/2003 du 06/09/2003 réprimant le crime de génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre, art. 4.
[86] « Rwanda : La BBC doit être autorisée à émettre à nouveau », communiqué de presse de Human Rights Watch, 27 avril 2009, http://www.hrw.org/fr/news/2009/04/27/rwanda-la-bbc-doit-tre-autoris-e-mettre-nouveau.
[87]Aucune date de procès n’a été fixée pour Ingabire. En février 2011, Ntaganda a été reconnu coupable de « divisionnisme » (et deux autres délits). Il a été condamné à quatre ans de prison, dont deux pour le délit de « divisionnisme ». « Rwanda : Peine de prison prononcée à l’encontre du dirigeant de l’opposition Bernard Ntaganda », communiqué de presse de Human Rights Watch, 11 février 2011, http://www.hrw.org/fr/news/2011/02/11/rwanda-peine-de-prison-prononc-e-l-encontre-du-dirigeant-de-l-opposition-bernard-nta. Mushayidi a été acquitté de « divisionnisme » et « minimisation du génocide » mais inculpé et condamné à la réclusion à perpétuité pour d’autres chefs d’accusation. « Rwanda : Les voix critiques réduites au silence à l’approche des élections », communiqué de presse de Human Rights Watch, 2 août 2010, http://www.hrw.org/fr/news/2010/08/02/rwanda-atteintes-aux-libert-s-d-expression-d-association-et-de-r-union-l-approche-de ; « Genocide Memorial row in Rwanda », BBC News Online, 18 janvier 2010, http://news.bbc.co.uk/2/hi/8466780.stm (consulté le 6 octobre 2010) ; Hereward Holland, « Rwanda’s Kagame Warns Critical Presidential Rival », Reuters, 9 février 2010, http://www.reuters.com/article/idUSTRE61816V20100209 (consulté le 7 octobre 2010) ; Edwin Musoni, « Senate May Take PS-Imberakuri to Court », The New Times, 29 décembre 2009, http://allafrica.com/stories/200912290079.html (consulté le 6 décembre 2010).
[88] Human Rights Watch, La loi et la réalité : Les progrès de la réforme judiciaire au Rwanda, p. 43. D’autres statistiques ont été tirées des rapports mensuels sur les affaires, figurant sur le site Web de la Cour Suprême : http://www.supremecourt.gov.rw/spip.php?rubrique71 (consulté le 17 février 2011). Human Rights Watch a rencontré des difficultés pour obtenir des statistiques officielles sur le nombre de poursuites judiciaires pour « divisionnisme » et « idéologie génocidaire ».
[89] Amnesty International, « Il est plus prudent de garder le silence : les conséquences effrayantes des lois rwandaises sur ‘l’idéologie du génocide’ et le ‘sectarisme’ », pp. 18-19.
[90] Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Evariste Mpambara, juridiction du secteur de Gashali, district de Karongi, province de l’Ouest, 19 août 2008.
[91] Voir ci-dessous, section VI, « Le cas de Théodore Munyangabe ». Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Théodore Munyangabe, secteur de Shangi, district de Nyamasheke, province de l’Ouest, 25 août 2009.
[92] Voir ci-dessus, section VI, « Le cas de François-Xavier Byuma ».
[93] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de François-Xavier Byuma, juridiction du secteur de Biryogo, district de Nyarugenge, Kigali, 13 et 27 mai, 14 et 21 juillet, et 4 et 18 août 2007.
[94] « Rwanda : Un tribunal gacaca condamne un militant à la prison », communiqué de presse de Human Rights Watch, 30 mai 2007, http://www.hrw.org/fr/news/2007/05/30/rwanda-un-tribunal-gacaca-condamne-un-militant-la-prison.
[95] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de François-Xavier Byuma, juridiction du secteur de Biryogo, district de Nyarugenge, 24 janvier, 7 février, 7 et 14 mars 2009.
[96]ASF, « Monitoring des Juridictions Gacaca, Phase de Jugement: Rapport Analytique No. 5, Janvier 2008-Mars 2010 », http://www.asf.be/publications/Rwanda_MonitoringGacaca_RapportAnalytique5_Light.pdf (consulté le 21 mars 2011), pp. 33-35.
[97] Voir ci-dessous, section VI, « Charge de la preuve et normes de preuve ».
[98] Constitution rwandaise, art. 18 ; Code rwandais de procédure pénale, arts 64, 127-28 ; PIDCP, art. 14. Le droit à une défense est aussi proclamé à l’article 7 de la CADHP.
[99] Loi gacaca 2004, art. 82.
[100] Code rwandais de procédure pénale, arts. 127-28. Si les lois gacaca ne spécifient pas le délai requis pour la citation, l’exigence de sept jours figure dans le guide de procédure additionnel pour les juges publié par le SNJG en 2005. SNJG, « Simplified Guide to Trial Procedures », 25 janvier 2005, p. 4 (document en possession de Human Rights Watch).
[101] Loi gacaca 2004, art. 99 ; SNJG, « Simplified Guide to Trial Procedures », p. 4.
[102] SNJG, « Simplified Guide to Trial Procedures », p. 4.
[103] La pratique normale dans le système gacaca est qu’une personne est déclarée coupable par défaut si elle ne se présente pas à trois audiences consécutives. Lors de la première et de la deuxième audiences, le tribunal enregistre simplement l’absence de la personne accusée et programme une autre audience pour la semaine suivante. À la troisième date, le procès se poursuit même si la personne accusée n’est pas présente. Loi gacaca 2004, art. 66.
[104] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Félicien Murenzi, juridiction du secteur de Nyamiyaga, district de Kamonyi, province du Sud, 6 juin 2008 ; Assignation de Phocas Muhizi, datée du 13 janvier 2008 pour comparaître le 20 janvier 2008, juridiction du secteur de Nyakabanda, district de Nyarugenge, Kigali ; Assignation de Symphorien Kamuzinzi, datée du 7 octobre 2007 pour comparaître le 14 octobre 2007, juridiction du secteur de Nyakabanda, district de Nyarugenge, Kigali.
[105] Entretien de Human Rights Watch avec un accusé dont le cas s’est produit dans le district de Kicukiro, Kigali, octobre 2007. Son co-accusé n’a pas reçu de citation non plus. Les deux personnes ont signalé le fait à l’attention du SNJG, qui est intervenu et a reporté l’audience plus tard dans le mois.
[106] Entretien de Human Rights Watch avec un accusé, Kigali, 12 mars 2009.
[107] Entretien de Human Rights Watch avec Innocent Nizeyimana, Kigali, 19 octobre 2007.
[108] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec Innocent Nizeyimana, 7 mai 2010.
[109] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Désiré Kayiranga, juridiction du secteur de Kabuye, district de Huye, province du Sud, 10 septembre 2008 ; entretien de Human Rights Watch avec un observateur d’ONG qui a suivi une audience antérieure de l’affaire, Kigali, 4 septembre 2009.
[110] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Emmanuel Nkurunziza, Juridiction du secteur de Mugina, district de Kamonyi, province du Sud, 6 octobre 2009 ; Human Rights Watch, observations de procès, affaire de l’Abbé Joseph Ndagijimana, juridiction du secteur de Nyanza, district de Nyanza, province du Sud, 26 novembre 2009 ; Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Félicien Murenzi, juridiction du secteur de Mukinga, District de Kamonyi, province du Sud, 12 décembre 2009 ; Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Emmanuel Ntagwabira, juridiction du secteur de Gatsata, district de Gasabo, Kigali, 9 mai 2009 ; Assignation d’Antoine Ntibiringirwa, datée du 25 mars 2004 pour comparaître le 27 mars 2004, juridiction de la cellule de Gitebe, secteur de Muhika, district de Rubavu, province de l’Ouest et citation datée du 8 mai 2004 pour comparaître le 12 mai 2004, même juridiction ; assignation de Mulindabigwi, datée du 11 juin 2010 pour comparaître le 12 juin 2010, juridiction du secteur de Biryogo, district de Nyarugenge, Kigali.
[111] Entretien de Human Rights Watch avec un parent de l’accusé, Kigali, 2 juin 2010.
[112] Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Evariste Mpambara, juridiction du secteur de Gashura, district de Karongi, province de l’Ouest, 19 août 2008 ; lettre de l’épouse de l’accusé Ildephonse Ngendahayo à la secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, 1er décembre 2006 (document en possession de Human Rights Watch).
[113] Lettre de Pascal Karekezi à la secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, 7 juillet 2009 (document en possession de Human Rights Watch).
[114] Human Rights Watch, observations de procès, affaire du Dr Justin Nsengimana, juridiction du secteur de Gishamvu, district de Huye, province du Sud, 19-20 février 2010.
[115] Habituellement, le report était d’une semaine. Toutefois, dans des cas isolés, les procédures ont été reportées de moins de sept jours, ce qui n’a pas corrigé la violation. Dans un cas, la cour d’appel gacaca n’a reporté l’audience que d’un seul jour, en dépit du fait que l’accusé avait demandé à la cour de citer à comparaître plusieurs témoins clés qui avaient déjà avoué leur implication dans le même crime. Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Emmanuel Nkurunziza, Juridiction du secteur de Gahogo, district de Muhanga, province du Sud, 30 mars 2010.
[116] Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Innocent Nizeyimana, Juridiction du secteur de Kanombe, district de Kicukiro, Kigali, 27-28 octobre 2007 (tribunal de première instance) ; Juridiction du secteur de Nyarugunga, district de Kicukiro, Kigali, 4 et 11 février 2008 (cour d’appel).
[117] Human Rights Watch, observations de procès, affaire du Dr Justin Nsengimana, Juridiction du secteur de Gishamvu, district de Huye, province du Sud, 19-20 février 2010. Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Fulgence Kabundege, Juridiction du secteur de Biryogo, district de Nyarugenge, Kigali (avec des juges désignés par le SNJG du secteur de Kigarama, district de Kicukiro, Kigali), 15 juin 2010.
[118] Assignation de Phocas Muhizi Muvala, datée du 13 janvier 2008 pour comparaître le 20 janvier 2008, Juridiction du secteur de Nyakabanda, district de Nyarugenge, Kigali ; Assignation de l’Abbé Joseph Ndagijimana, datée du 23 novembre 2009 pour comparaître le 26 novembre 2009, Juridiction du secteur de Nyanza, district de Nyanza, province du Sud; Assignation de Félicien Murenzi, datée du 10 décembre 2009 pour comparaître le 12 décembre 2009, secteur de Mukinga, district de Kamonyi, province du Sud; Assignation d’Emmanuel Ntagwabira, datée du 5 mai 2009 pour comparaître le 9 mai 2009, Juridiction du secteur de Gatsata, district de Gasabo, Kigali. Human Rights Watch détient des copies de ces assignations.
[119] Assignation de Spéciose Uwamwezi, datée du 13 janvier 2008 pour comparaître le 20 janvier 2008, Juridiction du secteur de Nyakabanda, district de Nyarugenge, Kigali ; Assignation de Célestin Hategekimana, datée du 18 décembre 2006 pour comparaître le 4 janvier 2007, Juridiction du secteur de Gahogo, district de Muhanga, province du Sud; Assignation de Désiré Kayiranga, datée du 10 mars 2008 pour comparaître le 19 mars 2008, Juridiction du secteur de Kabuye, district de Huye, province du Sud ; Assignation de Symphorien Kamuzinzi, datée du 30 novembre 2009 pour comparaître le 5 décembre 2009, Juridiction du secteur de Gikondo, district de Kicukiro, Kigali; Assignation de Abbé Joseph Ndagijimana, datée du 23 novembre 2009 pour comparaître le 26 novembre 2009, Juridiction du secteur de Nyanza, district de Nyanza, province du Sud ; Assignation de Célestin Kabatsinga, datée du 27 février 2009 pour comparaître le 6 mars 2009, Juridiction du secteur de Jurwe, district de Gasabo, Kigali ; Assignation de Léopold Munyakazi, non datée, pour comparaître le 22 octobre 2009, Juridiction du secteur de Kayenzi, district de Kamonyi, province du Sud ; Assignation d’Emmanuel Kamegeri, datée du 26 mai 2009 pour comparaître le 5 juin, secteur de Kimironko, district de Gasabo, Kigali ; Assignation de Félicien Murenzi, datée du 10 décembre 2009 pour comparaître le 12 décembre 2009, secteur de Mukinga, district de Kamonyi, province du Sud; Assignation de Martin Bakundikwano, datée du 5 février 2009 pour comparaître le 12 février 2009, Juridiction du secteur de Kanazi, district de Bugesera, province de l’Est ; Assignation de Pascal Muberuka, datée du 26 juin 2009 pour comparaître le 7 juillet 2009, Juridiction du secteur de Jabana, district de Gasabo, Kigali. Human Rights Watch détient des copies de ces assignations.
[120] Assignation de Symphorien Kamuzinzi, datée du 30 novembre 2009 pour comparaître le 5 décembre 2009, Juridiction du secteur de Gikondo, district de Nyarugenge, Kigali ; Assignation de Domina Nyirakabano, datée du 29 septembre 2009 pour comparaître le 6 octobre 2009, Juridiction du secteur de Cyeza, district de Muhanga, province du Sud ; Assignation d’Antoine Ntibiringirwa, datée du 25 mars 2004 pour comparaître le 27 mars 2004, Juridiction de la cellule de Gatebe, secteur de Muhika, district de Rubavu, province de l’Ouest ; Assignation de Spéciose Uwamwezi, datée du 13 janvier 2008 pour comparaître le 20 janvier 2008, Juridiction du secteur de Nyakabanda, district de Nyarugenge, Kigali. Human Rights Watch détient des copies de ces assignations.
[121] Assignation de Léopold Munyakazi, datée du 8 septembre 2008 pour comparaître le 7 octobre 2008.
[122] Assignation de Domina Nyirakabano, datée du 29 septembre 2009 pour comparaître le 6 octobre 2009, Juridiction du secteur de Cyeza, district de Muhanga, province du Sud; Assignation de Antoine Ntibiringirwa, datée du 25 mars 2004 pour comparaître le 27 mars 2004, Juridiction de la cellule de Gatebe, secteur de Muhika, district de Rubavu, province de l’Ouest ; Assignation de Joseph Ndabankenga, Juridiction du secteur de Save, district de Gisagara, province du Sud, 11 et 18 septembre 2008 ; Affaire de Venuste Sebahire, Juridiction du secteur de Nyamiyaga, district de Kamonyi, province du Sud, 15 avril 2008 ; Assignation de Désiré Kayiranga, datée du 10 mars 2008 pour comparaître le 19 mars 2008, Juridiction du secteur de Kabuye, district de Huye, province du Sud. Human Rights Watch détient des copies de ces assignations.
[123] Human Rights Watch, observations de procès, Affaire de Domina Nyirakabano, Juridiction du secteur de Cyeza, district de Muhanga, province du Sud, 6 octobre 2009.
[124] Human Rights Watch, observations de procès, Affaire de Domina Nyirakabano, Juridiction du secteur de Gahogo, district de Muhanga, province du Sud, 20 et 22 mars 2010.
[125] Entretien de Human Rights Watch avec une femme, Gitarama, 14 août 2009.
[126] Entretien de Human Rights Watch avec un parent de l’accusé, Kigali, 27 août 2009.
[127] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Ndikuryayo, Juridiction du secteur de Nyamabuye, district de Muhanga, province du Sud, 3 et 10 mars 2009; Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Félicien Murenzi, Juridiction du secteur de Nyamiyaga, district de Kamonyi, province du Sud, 30 mai 2008 ; Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’un accusé qui a exigé l’anonymat, Juridiction du district de Kicukiro, Kigali, 20 mai 2009.
[128] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Théodore Munyangabe et de l’Abbé Aimé Mategeko, Juridiction du secteur de Shangi, district de Nyamasheke, province de l’Ouest, 25 août 2009.
[129] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Théodore Munyangabe et de l’Abbé Aimé Mategeko, Juridiction du secteur de Shangi, district de Nyamasheke, province de l’Ouest, 15 septembre 2009.
[130] Voir ci-dessous, section VI, « Le cas de Théodore Munyangabe ».
[131] Voir, par exemple, la lettre de Pascal Karekezi à la secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, 7 juillet 2009 (document en possession de Human Rights Watch) ; entretien de Human Rights Watch avec l’homme accusé, Kigali, 19 octobre 2007 ; Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Pascasie Nyirahategeka, Juridiction du secteur de Rubingo, district de Gasabo, Kigali, 22 et 29 juillet 2008 ; Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Evariste Mpambara, Juridiction du secteur de Gashali, district de Karongi, province de l’Ouest, 19 août 2008.
[132] Entretien de Human Rights Watch avec un parent de Habarugira, Kigali, 11 avril 2008.
[133] Human Rights Watch, observations de procès, Juridiction du secteur de Ngoma, district de Huye, province du Sud, 22 août 2007.
[134] « Gacaca Court Jails Six Doctors for 30 Years », The New Times, 5 septembre 2007, http://allafrica.com/stories/200709060079.html (consulté le 10 décembre 2010) ; « The Brother of the Former President, Sentenced to 30 Years in Prison », Hirondelle News Agency, 10 septembre 2007, http://www.hirondellenews.com/content/view/9901/309 (consulté le 10 décembre 2010).
[135] Human Rights Watch, observations de procès, Juridiction du secteur de Ngoma, district de Huye, province du Sud, 30 janvier et 6 février 2008.
[136] Lettre réf : CDRH/183/08 de la Commission nationale des droits de la personne à la Secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, 31 mars 2008, p. 1 (document en possession de Human Rights Watch) ; lettre réf : CDRH/735/08 de la Commission nationale des droits de la personne à la Secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, 10 décembre 2008 (document en possession de Human Rights Watch).
[137] Lettre refusant la révision, signée par le Président de l’Assemblée générale des juridictions Gacaca du secteur de Ngoma, 16 avril 2008 (document en possession de Human Rights Watch) ; lettre réf : 1046/MJD/2009 refusant la révision, signée par la Secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, 13 mai 2009 (document en possession de Human Rights Watch).
[138] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Ndikuryayo, juridiction du secteur de Nyamabuye, district de Muhanga, province du Sud, 3 mars 2009.
[139] Code de procédure pénale, arts. 54-63, 144, 146, 180, 205.
[140] PIDCP, art. 14.
[141] CADHP, art. 7.
[142] Loi no. 47/2001 du 18/12/2001 portant répression des crimes de discrimination et pratique du sectarisme, art. 1; Loi sur l’idéologie du génocide, arts. 2-3.
[143] Loi sur l’idéologie du génocide, art. 4. De fortes amendes peuvent aussi être infligées, en plus d’une peine de prison.
[144]Procureur c. Yusuf Munyakazi, TPIR, Affaire No. TPIR-97-36-R11bis, Décision relative à l’appel du procureur contre la décision de renvoi en vertu de l’article 11bis (Chambre d’appel), 8 octobre 2008, paras. 37-38 ; Procureur c. Gaspard Kanyarukiga, TPIR, Affaire No. TPIR-2002-78-R11bis, Décision relative à l’appel du procureur contre la décision de renvoi selon l’article 11bis (Chambre d’appel), 30 octobre 2008, paras. 23-27 ; Procureur c. Ildephonse Hategekimana, TPIR, Affaire No. TPIR-00-55B-R11bis, Décision relative à l’appel du procureur contre la décision de renvoi selon l’article 11bis (Chambre d’appel), 4 décembre 2008, paras. 15, 21-23. Le Royaume-Uni et la France ont tous deux refusé d’extrader des suspects de génocide vers le Rwanda au motif que l’accusé pourrait ne pas bénéficier d’un procès équitable — la loi sur l’idéologie du génocide étant l’un des facteurs susceptible de décourager des témoins à décharge de témoigner.
[145] Loi organique no. 12/2009 du 26/05/2009 modifiant et complétant la Loi organique no. 11/2007 du 16/03/2007 relative au renvoi d’affaires à la République du Rwanda par le Tribunal pénal international pour le Rwanda et par d’autres États. La nouvelle loi ne fait pas référence à son application dans le cadre des tribunaux gacaca, mais vraisemblablement le même principe s’appliquerait.
[146] « Govt Announces Review of Contentious Genocide Law », Rwanda News Agency, 5 avril 2010, http://www.rnanews.com/politics/3094-govt-announces-review-of-contentious-genocide-law (consulté le 1er novembre 2010) ; « Rwandan Cabinet Reviews Genocide Ideology Law », Radio France Internationale, http://www.english.rfi.fr/africa/20100811-rwandan-cabinet-reviews-genocide-ideology-law (consulté le 1er novembre 2010) ; « Genocide Ideologie Faces Fresh Scrutiny », The Independent, 22 septembre 2010, http://www.independent.co.ug/index.php/reports/special-report/71-special-report/3463-genocide-ideology-faces-fresh-scrutiny (consulté le 1er novembre 2010).
[147] Remarques du ministre de la Justice Tharcisse Karugarama au Conseil des droits de l’homme de l’ONU, Genève, 24 janvier 2011.
[148] Lettre du ministre de la Justice, Tharcisse Karugarama, à Human Rights Watch, 5 mai 2011 (voir Annexe II).
[149] Voir ci-dessous, section VII, « Intimidation ».
[150] Voir ci-dessus, section VI, « Le cas de Pascal Habarugira ». Lettre de la Commission nationale des droits de la personne à la Secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, 31 mars 2008, p. 1 (document en possession de Human Rights Watch).
[151] Département d’État des États-Unis, Bureau de la démocratie, des droits de l’homme et du travail, « Rwanda Chapter of the US 2009 Country Reports on Human Rights Practices », mars 2010, http://www.state.gov/g/drl/rls/hrrpt/2009/af/135971.htm (consulté le 8 décembre 2010), p. 9.
[152] Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Evariste Mpambara, juridiction du secteur de Gashali, district de Karongi, province de l’Ouest, 19 août 2008.
[153] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Pascasie Nyirahategeka, juridiction du secteur de Rubingo, district de Gasabo, Kigali, 22 et 29 juillet 2008.
[154] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Jonas Kanyarutoki et al., juridiction du secteur de Nyarwungo, district de Nyamagabe, 27 septembre 2007 ; Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Déo Nziraguseswa, secteur de Bushekeri, district de Nyamasheke, province de l’Ouest, 1er août 2008.
[155] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Simon Pierre Nsengiyaremye et al., juridiction du secteur de Kabuye, district de Gasabo, Kigali, 11 octobre 2008.
[156] PIDCP, Article 14 (3)(g). Ce droit n’est pas garanti par la CADHP.
[157] Loi gacaca 2004, préambule.
[158] Loi gacaca 2004, Articles 29-30.
[159] Voir ci-dessus, section VI, « Le cas de François-Xavier Byuma ».
[160] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de François-Xavier Byuma, juridiction du secteur de Biryogo, district de Nyarugenge, Kigali, 13 mai 2007.
[161] Loi Gacaca 2004, Art. 64(6). ASF, « Monitoring des juridictions gacaca, phase de jugement: Rapport Analytique No. 2, October 2005-September 2006 », http://www.asf.be/publications/Rwanda_MonitoringGacaca_RapportAnalytique2.pdf (consulté le 21 mars 2011), pp. 18 ; ASF, « Monitoring des juridictions gacaca, phase de jugement: Rapport Analytique No. 3, octobre 2006-avril 2007 », http://www.asf.be/publications/Rwanda_MonitoringGacaca_RapportAnalytique3_FR.pdf (consulté le 21 mars 2011), pp. 35-36, 45-46.
[162] ASF, « Monitoring des juridictions gacaca, phase de jugement: Rapport Analytique No. 3», http://www.asf.be/publications/Rwanda_MonitoringGacaca_RapportAnalytique3_FR.pdf (consulté le 21 mars 2011), pp. 48-49, fn 165-166.
[163] Instruction No. 10/06 du 1/09/2006 de la Secrétaire exécutive du SNJG relative à l’arrestation et à la détention par les juridictions gacaca.
[164] Loi Gacaca 2007, arts. 12-14.
[165] PRI, « Rapport de la Recherche sur la Gacaca – PRI Rapport IV:La procédure d’aveux, pierre angulaire de la justice rwandaise », janvier 2003, http://www.penalreform.org/publications/gacaca-research-report-no4-guilty-plea-procedure-cornerstone-rwandan-justice-system-0 (consulté le 21 mars 2011).
[166] Carina Tertsakian, Le Château: The Lives of Prisoners in Rwanda (London: Arves Books, 2008), p. 398. Voir aussi ASF, « Monitoring des Juridictions Gacaca, Phase de Jugement: Rapport Analytique No. 5, Janvier 2008-Mars 2010 », http://www.asf.be/publications/Rwanda_MonitoringGacaca_RapportAnalytique5_Light.pdf (consulté le 21 mars 2011), p. 45.
[167] Pour une discussion générale sur les aveux dans les prisons, voir « Rapport de la Recherche sur la Gacaca – PRI Rapport IV:La procédure d’aveux, pierre angulaire de la justice rwandaise», janvier 2003, http://www.penalreform.org/publications/gacaca-research-report-no4-guilty-plea-procedure-cornerstone-rwandan-justice-system-0 (consulté le 21 mars 2011).
[168] PRI, « Rapport de la Recherche sur la Gacaca – PRI Rapport V », septembre 2003, http://www.penalreform.org/files/rep-2003-gacaca5CellPreparations-fr_0.pdf (consulté le 23 mars 2011), p. 10.
[169] PRI, Huit ans après…le point sur le monitoring de la gacaca au Rwanda, pp. 34-37.
[170] Ibid.
[171] Code pénal rwandais, art. 5 ; PIDCP, art. 14. Le principe de res judicata ou non bis idem, qui existe tant dans les juridictions de droit coutumier que de droit civil, prévoit qu’une fois qu’un jugement est rendu dans une affaire donnée, un tribunal confronté à une affaire ultérieure qui est identique ou essentiellement semblable à la précédente (par exemple, liée au même incident ou à la même transaction) doit récuser l’affaire et préserver les effets du premier jugement. Voir aussi Statut de la Cour internationale de justice, art. 38(1)(c) ; article 13 du TPIR.
[172] Entretien de Human Rights Watch avec le ministre de la Justice Tharcisse Karugarama, Kigali, 10 septembre 2007; entretien de Human Rights Watch avec la secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, Kigali, 7 novembre 2007.
[173] Loi gacaca 2004, article 93.
[174]Ibid. La loi de 2006 reprend la même disposition mais autorise toute personne à demander la révision du jugement, et non seulement les parties dans une affaire comme le spécifiait la loi de 2004. Loi Gacaca 2006, article 20.
[175]Entretien de Human Rights Watch avec un juge de la Cour suprême, Kigali, 8 novembre 2006.
[176] Human Rights Watch, La loi et la réalité : Les progrès de la réforme judiciaire au Rwanda, p. 93.
[177] Entretien de Human Rights Watch avec un juge de la Cour suprême, Kigali, 8 novembre 2006.
[178] Entretien de Human Rights Watch avec la secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, Kigali, 7 novembre 2007.
[179] Loi gacaca 2008, art. 24.
[180] Ibid. L’article 24 stipule : « Seule la Juridiction Gacaca d’Appel a la compétence de réviser les jugements coulés en force de la chose jugée rendus par une autre Juridiction Gacaca. Le jugement coulé en force de chose jugée rendu par une juridiction ordinaire ou militaire peut faire objet d’une demande de révision auprès de cette juridiction » (c’est nous qui soulignons). Joseph Mulindangabo a contesté la constitutionnalité du fait d’être jugé deux fois pour le même crime après avoir été cité à comparaître devant un tribunal gacaca sur les mêmes chefs d’accusation pour lesquels il avait été acquitté antérieurement par un tribunal classique. L’affaire a abouti à la Cour suprême, mais n’a jamais été jugée parce que la loi Gacaca 2008 autorisait de telles affaires à être renvoyées devant les tribunaux gacaca. L’affaire de Mulindangabo a de ce fait été renvoyée aux tribunaux gacaca pour un nouveau procès.
[181] Entretien de Human Rights Watch avec la secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, Kigali, 7 novembre 2007.
[182] Lettre de la secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, au Président de la juridiction du secteur de Nyaruganga, district de Kicukiro, 3 février 2010, lue publiquement lors de l’audience de révision, 5 mars 2010. Human Rights Watch, entretiens avec des personnes bien informées de l’affaire d’Aphrodis Mugambira (Juridiction du secteur de Kanombe, district de Kicukiro, 5-6 mars 2010), Kigali, 15 et 22 mars 2010.
[183] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Faustin Musabimana, juridiction de Gikirambwe, district de Huye, province du Sud, 24 octobre 2007 ; Human Rights Watch, observations de procès, affaire du Père Joseph Ndagijimana, juridiction du secteur de Kamusenyi, district de Muhanga, province du Sud, 27-31 mars 2009, 16 juin 2009 et même juridiction (avec des juges désignés par le SNJG venus du district de Nyanza, province du Sud), 8-9 et 15, 22 novembre 2009 ; Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Jacques Twahirwa, juridiction du secteur de Gahogo, district de Muhanga, province du Sud, 3 et 10 mars 2009.
[184] Entretien de Human Rights Watch avec l’homme accusé, Kigali, 13 septembre 2007.
[185] Entretiens de Human Rights Watch avec deux juges gacaca distincts, district de Huye, 24 octobre 2007.
[186] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Faustin Musabimana, juridiction de Gikirambwe, district de Huye, province du Sud, 24 octobre 2007 ; entretien de Human Rights Watch avec un parent de Musabimana, 4 octobre 2007.
[187] Human Rights Watch, entretien avec un observateur d’ONG qui a assisté à son procès au tribunal classique, 25 mars et 30 août 2010. L’accusé, Jean-Baptiste Sebarame, avait été acquitté par le Tribunal de Grande Instance de Butare. Procureur c. Jean-Baptiste Sebarame, Jugement, Huye, RP (Gen) 0054/05/TP/But, 18 décembre 2009.
[188] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Déo Nziraguseswa, juridiction du secteur de Nyamasheke, district de Nyamasheke, province de l’Ouest, 8-9 septembre 2008.
[189] Correspondance électronique de Human Rights Watch avec un observateur étranger qui a assisté au procès précédent d’André Rutayisire en 2007, 16 avril 2010.
[190] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Déo Nziraguseswa, juridiction du secteur de Bushekeri, district de Nyamasheke, 1 et 9 août 2008.
[191] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Déo Nziraguseswa, juridiction du secteur de Gihundwe, district de Rusizi, 8 septembre 2008.
[192] Entretien de Human Rights Watch avec des personnes ayant une bonne connaissance de l’affaire, 6 décembre 2009.
[193] Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Odette Uwimana, juridiction du secteur de Jabana, district de Gasabo, Kigali, 6 décembre 2009.
[194] Ibid.
[195] Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Odette Uwimana, juridiction du secteur de Jabana, district de Gasabo, Kigali (jugée par des juges désignés par le SNJG venus du secteur de Shyogwe, district de Muhanga, province du Sud), 14 mars 20010.
[196] Ibid.
[197] Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Evariste Mpambara, secteur de Gashali, district de Karongi, province de l’Ouest, et entretiens avec des habitants, 19 août 2008.
[198] Entretien de Human Rights Watch avec un juge gacaca, district de Karongi, province de l’Ouest, 19 août 2008.
[199]Procureur c. Jean-Baptiste Nkurayija et al., affaire No. RMP 83545/S4/NTI/NSE, Tribunal de première instance de Kibungo, 19 janvier 2001.
[200] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Jean-Baptiste Nkurayija, juridiction du secteur de Gahini, district de Kayonza, province de l’Est, 21 et 28 août 2008.
[201] Des milliers de personnes ont été stoppées et tuées à des barrières au cours du génocide de 1994.
[202] Entretien de Human Rights Watch avec un responsable de secteur, 11 septembre 2008.
[203] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Joseph Ndabakenga, juridiction du secteur de Save, district de Gisagara, province du Sud, 11 et 18 septembre 2008.
[204] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Joseph Ndabakenga, juridiction du secteur de Save, district de Gisagara, province du Sud, 18 septembre 2008.
[205] Entretien de Human Rights Watch avec une autorité locale, secteur de Save, district de Gisagara, province du Sud, 18 septembre 2008.
[206] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Joseph Ndabakenga, juridiction du secteur de Save, district de Gisagara, province du Sud, 6 août 2009.
[207] Entretien de Human Rights Watch avec l’accusé, Kigali, 26 août 2009.
[208] Le ministre de l’Intérieur du Rwanda, Abdul Karim Harelimana, faisait partie des personnes qui ont fait son éloge. Voir lettre de l’épouse de Munyangabe au Président Kagame au sujet de l’affaire de son mari, 31 juillet 2009 (document en possession de Human Rights Watch).
[209] Amnesty International, « Rwanda: The Troubled Course of Justice: Tried, Acquitted…and Still in Gaol », AI Index: AFR 47/11/00, avril 2000, http://www.amnesty.org/en/library/info/AFR47/011/2000/en (consulté le 30 août 2010).
[210] Human Rights Watch, observations de procès, juridiction du secteur de Mururu, district de Rusizi, province de l’Ouest, 27 novembre 2008.
[211] Entretien par téléphone de Human Rights Watch avec un représentant d’une ONG qui observait le procès, 10 décembre 2010.
[212] Human Rights Watch, observations de procès, juridiction du secteur de Shangi, district de Nyamasheke, province de l’Ouest, 24-26 août 2009, 1-5 et 14-15 septembre 2009.
[213] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants, secteur de Shangi, 25 août 2009.
[214] Human Rights Watch, observations de procès, juridiction du secteur de Shangi, district de Nyamasheke, province de l’Ouest, 14 septembre 2009.
[215] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants, secteur de Shangi, 14-15 septembre 2009.
[216] Lettre refusant la révision, signée par le Président de l’Assemblée générale des juridictions gacaca du secteur de Gihundwe, 25 novembre 2009 (document en possession de Human Rights Watch).
[217] Code rwandais de procédure pénale, arts. 155-156.
[218] En France, par exemple, l’article 410 du Code de procédure pénale stipule qu’un accusé qui ne se présente pas « sera jugé comme s’il était présent » du moment qu’il a reçu une citation l’informant de la procédure dont il fait l’objet. Code français de procédure pénale, http://www.easydroit.fr/codes-et-lois/article-410-du-Code-de-procedure-penale/A58199, art. 410.
[219] Comité des droits de l’homme de l’ONU, Observations générales, art. 14, para. 11, http://www.ccprcentre.org/doc/ICCPR/General%20Comments/HRI.GEN.1.Rev.9(Vol.I)_(GC13)_fr.pdf (consulté le 31 août 2010). Article 14: « Quand, exceptionnellement et pour des raisons justifiées, il y a procès par contumace, le strict respect des droits de la défense est encore plus indispensable. »
[220] Les tribunaux gacaca ont en général reconnu coupables les personnes qui ne se sont pas présentées à leur procès, mais ont occasionnellement acquitté des personnes accusées.
[221]Procureur c. Emmanuel Bagambiki et consorts, TPIR, Affaire No. TPIR-97-36, Jugement (Chambre de première instance), 25 février 2004 ; confirmé en appel, jugement (Chambre d’appel), 7 juillet 2006.
[222]James Munyaneza, « Rwanda plots Bagambiki’s re-arrest », The New Times,
http://www.rwandagateway.org/article.php3?id_article=2215 (consulté le 16 mai 2008); « La Ville des acquittés du TPIR reste divisée », Hirondelle News Agency, 10 février 2006, http://fr.hirondellenews.com/content/view/3940/26 (consulté le 7 octobre 2010).
[223] « Belgium investigates acquitted ex-Rwandan governor Bagambiki », Hirondelle News Agency, 3 juin 2008, http://www.hirondellenews.com/content/view/6096/26 (consulté le 7 octobre 2010) ; « Rwanda intends to prosecute ex-Governor Emmanuel Bagambiki for rape », Hirondelle News Agency, 8 mars 2006, http://www.hirondellenews.com/content/view/3516/26 (consulté le 7 octobre 2010).
[224] Human Rights Watch, observations de procès, Procureur c. Léonidas Nshogoza, Tribunal de première instance, district de Gasabo, 17 octobre 2007 ; « No False Testimony in the Rukundo Trial », Hirondelle News Agency, 11 octobre 2007, http://www.hirondellenews.com/content/view /10072/281 (consulté le 14 mars 2010). Nshogoza a comparu devant le tribunal de première instance de Gasabo le 19 novembre 2007 et a été libéré sous caution en attendant que des informations soient envoyées par le TPIR aux autorités judiciaires rwandaises. Voir aussi « An ICTR Investigator Has Been Detained in Rwanda for the Past Six Months », Hirondelle News Agency, 3 janvier 2008, http://www.hirondellenews.com/content/view/10452/26 (consulté le 14 mars 2010).
[225] « Defense Investigator Surrenders to UN Tribunal in Arusha », Hirondelle News Agency, 8 février 2008, http://www.hirondellenews.com/content/view/10595/26/ (consulté le 11 octobre 2010).
[226] Entretien de Human Rights Watch avec deux autorités gacaca, Mahembe, 29 janvier 2008. Selon les témoins, le dossier a été ouvert le 16 décembre 2007.
[227] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Léonidas Nshogoza, juridiction du secteur de Mahembe, district de Muhanga, province du Sud, 29 janvier 2008.
[228] Entretiens de Human Rights Watch avec des juges gacaca, Mahembe, 29 janvier 2008. La lettre, consultée par Human Rights Watch, disait : « Jugez ce dossier aussi vite que possible. Si l’accusé ne se présente pas le 29/1/2008, envoyez une autre citation pour le 5/2/2008. S’il ne se présente pas à cette date, jugez-le par défaut le jeudi 7/2/2008. »
[229] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Léonidas Nshogoza, juridiction du secteur de Mahembe, district de Muhanga, province du Sud, 7 février 2008 ; correspondance électronique de Human Rights Watch avec Allison Turner, avocate de Nshogoza au TPIR, 17 mars 2010. La cour d’appel de Mahembe a rendu sa décision le 6 mai 2008.
[230] « Defence Investigator Surrenders to UN Tribunal in Arusha », Hirondelle News Agency, 8 février 2008, http://www.hirondellenews.com/content/view/10594/57 (consulté le 14 mars 2010).
[231]Procureur c. Léonidas Nshogoza, TPIR, affaire No. TPIR-07-91-T, Jugement (Chambre de première instance), 7 juillet 2009, confirmé en appel, Jugement (Chambre d’appel), 15 mars 2010.
[232] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec Léopold Munyakazi, 21 octobre 2009 ; correspondance électronique de Human Rights Watch avec Munyakazi, 5 avril 2010 ; enquête de Human Rights Watch au Rwanda de décembre 2008 à février 2009.
[233] Correspondance électronique de Human Rights Watch avec Munyakazi, 5 avril 2010.
[234] Gouvernement du Rwanda, Rapport parlementaire sur l’Idéologie du génocide, juin 2004, p. 91.
[235] Brian Stelter, « On Trail of War Criminals, NBC News is Criticized », New York Times, 10 février 2009, http://www.nytimes.com/2009/02/11/business/media/11network.html (consulté le 7 octobre 2010).
[236] Andrew Rice, « Doubt, A Professor, A Genocide, and NBC's quest for a prime-time hit », New Republic, 12 août 2009, http://www.tnr.com/article/politics/doubt (consulté le 7 octobre 2010) ; « Prof Munyakazi's U.S friends determined to save him », Rwanda News Agency, 30 mars 2009, http://rnanews.com/index.php?option=com_content&view=article&id=1106:prof-munyakazis-us-friends-determined-to-save-him-&Itemid=47 (consulté le 7 octobre 2010).
[237] Mandat d’arrêt international au nom du peuple rwandais, daté du 10 novembre 2006 (document en possession de Human Rights Watch). « Prof Munyakazi's U.S friends determined to save him », Rwanda News Agency, 30 mars 2009, http://rnanews.com/index.php?option=com_content&view=article&id=1106:prof-munyakazis-us-friends-determined-to-save-him-&Itemid=47 (consulté le 7 octobre 2010).
[238] Brian Stelter, « On Trail of War Criminals, NBC News is Criticized », New York Times, 10 février 2009, http://www.nytimes.com/2009/02/11/business/media/11network.html (consulté le 7 octobre 2010) ; Andrew Rice, « Doubt, A Professor, A Genocide, and NBC's quest for a prime-time hit », New Republic, 12 août 2009, http://www.tnr.com/article/politics/doubt (consulté le 7 octobre 2010).
[239] Mandat d’arrêt international au nom du peuple rwandais, daté du 18 septembre 2008 (document en possession de Human Rights Watch) ; « Prof Munyakazi's U.S friends determined to save him », Rwanda News Agency, 30 mars 2009, http://rnanews.com/index.php?option=com_content&view=article&id=1106:prof-munyakazis-us-friends-determined-to-save-him-&Itemid=47 (consulté le 7 octobre 2010).
[240] Affaire de Léopold Munyakazi, Assignation de Léopold Munyakazi datée du 8 septembre 2008 pour comparaître le 7 octobre 2008, sans indication de juridiction.
[241] Affaire de Léopold Munyakazi, Assignation non datée de Léopold Munyakazi pour comparaître le 22 octobre 2009, juridiction du secteur de Kayenzi, district de Kamonyi, province du Sud ; correspondance électronique de Human Rights Watch avec Munyakazi, 5 avril 2010.
[242] Entretien de Human Rights Watch avec Jean-Népomuscène Munyangabe, prison de Mpanga, 6 février 2008 ; entretien de Human Rights Watch avec un représentant gacaca, Nyanza, 18 mars 2008. Une autorité a déclaré à Human Rights Watch qu’il était bien connu que Munyangabe travaillait pour l’ONU au Tchad, mais il ne pouvait pas expliquer pourquoi les autorités n’avaient fait aucune tentative pour l’avertir, lui ou sa famille.
[243] Entretien de Human Rights Watch avec Munyangabe, prison de Mpanga, 6 février 2008.
[244] Ibid. Voir aussi : Entretien de Human Rights Watch avec l’épouse de Munyangabe, Butare, 18 avril 2008 ; entretien de Human Rights Watch avec le coordinateur de district, Nyanza, 7 mai 2008.
[245] Human Rights Watch, observations de procès, juridiction du secteur de Kibilizi, district de Nyanza, province du Sud, 18 et 25 mars, et 4 avril 2008.
[246] Entretien de Human Rights Watch avec le coordinateur de district, Nyanza, 7 mai 2008.
[247] Human Rights Watch, observations de procès, juridiction du secteur de Kibilizi, district de Nyanza, province du Sud, 20 mai, et 10 et 17 juin 2008. Les tentatives du juge pour altérer le procès-verbal écrit ont été contrecarrées par les autres juges.
[248] Human Rights Watch, observations de procès, juridiction du secteur de Kibilizi, district de Nyanza, province du Sud, 27 juillet 2008.
[249] Lettre réf : 2422KE/MD/20010 refusant la révision, signée par la secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, 20 mai 2010 (document en possession de Human Rights Watch).
[250] Enquête de Human Rights Watch de février à août 2008, comportant l’observation des procès gacaca et des entretiens avec des habitants.
[251] Entretien de Human Rights Watch avec un collègue de l’homme accusé, Kigali, 9 septembre 2010 ; entretien de Human Rights Watch avec des personnes connaissant bien l’affaire, secteur de Kabacuzi, district de Muhanga, province du Sud, 15 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec des personnes connaissant bien l’affaire, Zoko, 22 juin 2006.
[252] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec un journaliste burundais, 5 octobre 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec des membres du personnel du HCR, Genève, 7 juillet 2010. Voir aussi International Refugee Rights Initiative, Refugee Law Project, et Social Science Research Council, « A Dangerous Impasse: Rwandan Refugees in Uganda », Citizenship and Displacement in the Great Lakes Region, Working Paper No. 4, June 2010, http://refugeelawproject.org/other_reports.php, pp. 27-31.
[253] « Over 80 People Flee Rwanda as Gacaca Trials Begin », Hirondelle News Agency, 14 mars 2005, http://allafrica.com/stories/200503150079.html ; « Hundreds of People Fleeing the Gacaca Tribunal Towards the RDC », Hirondelle News Agency, 17 avril 2007, http://www.hirondellenews.com/content/view/4364/135 (consulté le 7 octobre 2010).
[254] « Burundi : Les autorités doivent examiner les demandes d’asile des Rwandais », communiqué de presse de Human Rights Watch, 16 octobre 2009, http://www.hrw.org/fr/news/2009/10/16/burundi-les-autorit-s-doivent-examiner-les-demandes-dasile-des-rwandais ; « Burundi : Les autorités doivent arrêter d’expulser les demandeurs d’asile rwandais », communiqué de presse de Human Rights Watch, 2 décembre 2009, http://www.hrw.org/fr/news/2009/12/02/burundi-les-autorit-s-doivent-arr-ter-d-expulser-les-demandeurs-dasile-rwandais .
[255] International Refugee Rights Initiative, Refugee Law Project et Social Science Research Council, « A Dangerous Impasse: Rwandan Refugees in Uganda », pp. 27-31.
[256] Constitution rwandaise, art. 18 ; PIDCP, art. 9 ; CADHP, art. 5.
[257] Remarques de la secrétaire exécutive de la CNDP, Sylvie Kayitesi Zainabo, au Parlement, 30 novembre et 1er décembre 2010.
[258] PIDCP, art. 9(5).
[259] PRI, Huit ans après…le point sur le monitoring de la gacaca au Rwanda, p. 45-46.
[260] Remarques de la secrétaire exécutive de la CNDP, Sylvie Kayitesi Zainabo, au Parlement, 30 novembre et 1er décembre 2010, et débat parlementaire qui s’est déroulé après ses remarques. Un certain nombre de parlementaires ont attaqué avec véhémence la proposition de la CNDP d’indemniser les personnes ayant subi une détention illégale (y compris les suspects de génocide).
[261] Human Rights Watch, La loi et la réalité : Les progrès de la réforme judiciaire au Rwanda, pp. 13-14 ; Human Rights Watch, Aucun témoin ne doit survivre ; Human Rights Watch, Rwanda: The Crisis Continues, 1er avril 1995, vol. 7, no. 1, http://www.hrw.org/legacy/reports/1995/Rwanda.htm, pp. 5-6.
[262]Human Rights Watch, Toujours en Lutte: La justice, un parcours semé d’obstacles pour les victims de viol au Rwanda, p. 11 ; Amnesty International, « Annual Report 1999 », http://www.amnestyusa.org/annualreport.php?id=ar&yr=1999&c=RWA (consulté le 26 octobre 2010) ; International Crisis Group, « Tribunal Penal International pour le Rwanda: l’urgence de juger », Rapport Afrique No. 30, 7 juin 2001, http://www.crisisgroup.org/fr/regions/afrique/afrique-centrale/rwanda/030-international-criminal-tribunal-for-rwanda-justice-delayed.aspx (consulté le 26 octobre 2010), p. 40.
[263] Gouvernement du Rwanda, Report on the Reflection Meetings Held in the Office of the President of the Republic from May 1998 to March 1999 (Kigali : Présidence de la République, 1999), p. 58.
[264]Au 28 février 2011, la population carcérale totale était de 61 678 personnes. Statistiques fournies par le Service national des prisons en mars 2011.
[265] Au 28 février 2011, il y avait 39 887 personnes incarcérées suite à des condamnations pour génocide. Statistiques fournies par le Service national des prisons en mars 2011. Voir aussi « Over 60,000 Prisoners in Rwandan Jails, Two Thirds Genocide Suspects », Hirondelle News Agency, 3 février 2011, http://www.hirondellenews.com/content/view/14008/332 (consulté le 15 février 2011).
[266] Au 28 février 2011, il y avait 130 personnes détenues dans l’attente de leur procès pour accusations liées au génocide. Statistiques fournies par le Service national des prisons en mars 2011.
[267] Code rwandais de procédure pénale, art. 89. En dépit de cette disposition, la détention dans des lieux secrets se produit occasionnellement, le plus souvent dans des cas politiquement sensibles ou militaires. Human Rights Watch, entretien avec une personne détenue dans un lieu illégal, non identifié, pendant plus de deux semaines, Kigali, 19 août 2010.
[268] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Célestin Nzabanita, juridiction du secteur de Zoko, district de Gicumbi, province du Nord, 6 septembre 2006.
[269] Entretien de Human Rights Watch avec un parent de Prudence Nsabimana, Kigali, 9 juin 2008.
[270] Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Evariste Mpambara, juridiction du secteur de Gashali, district de Karongi, province de l’Ouest, 19 août 2008.
[271] Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Emmanuel Nkurunziza, juridiction du secteur de Mugina, district de Kamonyi, province du Sud, 3 avril 2010.
[272] Voir ci-dessus, section VI, « Le cas de Jean-Népomuscène Munyangabe ».
[273] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Justin Nsengimana, juridiction du secteur de Gishamvu, district de Huye, province du Sud, 16 février 2008.
[274] La distribution d’armes avait été l’un des chefs d’accusation dans le procès de Nsengimana jugé en 2008.
[275] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Justin Nsengimana, juridiction du secteur de Gishamvu, district de Huye, province du Sud, 19-20 février 2010.
[276] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Viateur Munyandekwe, juridiction du secteur de Cyahafi, district de Nyarugenge, Kigali, 26 août 2007.
[277] Entretien de Human Rights Watch avec une connaissance de Munyandekwe, Kigali, 2 février 2009.
[278] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec un membre d’ONG observateur des procès, 22 février 2009 ; Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec une connaissance de Munyandekwe, 22 février 2009.
[279] Entretien de Human Rights Watch avec une personne ayant une bonne connaissance de l’affaire, Kigali, 21 juin 2010.
[280] Bureau de terrain du Haut commissariat aux droits de l’homme pour le Rwanda, « The Administration of Justice in Post-Genocide Rwanda », HRFOR/Justice/June 1996/E, http://repository.forcedmigration.org/show_metadata.jsp?pid=fmo:3105 (consulté le 15 mars 2010).
[281] Le gouvernement rwandais a indiqué le nombre de 841 juges en 1996. Remarques du directeur de la section juridique du SNJG, Gratien Dusingizimana, à la conférence hebdomadaire d’Unité et réconciliation nationales, Kigali, 9 décembre 2009. Le document Power Point présenté à la conférence est disponible sur le site Web du SNJG sous le titre « Gacaca Juridictions: Achievements, Problems, and Future Prospects », http://www.inkiko-gacaca.gov.rw/En/EnIntroduction.htm, p. 4 (consulté le 15 mars 2010).
[282] Certains candidats semblent avoir été présélectionnés avant les élections. Voir PRI, « Rapport de la Recherche sur la Gacaca – Rapport I : Les juridictions Gacaca et leur préparation, Juillet - Décembre 2001, » janvier 2002, http://www.penalreform.org/files/rep-ga1-2002-preparations-fr_0.pdf (consulté le 4 décembre 2010), pp. 39-40.
[283] PRI, Huit ans après…le point sur le monitoring de la gacaca au Rwanda, p. 29. En décembre 2009, seulement 169 442 juges gacaca demeuraient en service. Remarques du directeur de la section juridique du SNJG, Gratien Dusingizimana, à la conférence hebdomadaire d’Unité et réconciliation nationales, Kigali, 9 décembre 2009. Le document Power Point présenté à la conférence est disponible sur le site Web du SNJG sous le titre « Gacaca Juridictions: Achievements, Problems, and Future Prospects », http://www.inkiko-gacaca.gov.rw/En/EnIntroduction.htm, p. 23 (consulté le 15 mars 2010).
[284] Loi gacaca 2001, arts. 10-11; loi gacaca 2004, arts. 14-15. Les juges ne peuvent pas être impliqués dans l’administration au niveau local ou national, ni dans la politique ou être un membre dirigeant d’un parti politique, de la police ou de l’armée, ou du système judiciaire. Toutefois, ils peuvent être élus une fois qu’ils ont démissionné de ces fonctions.
[285] Loi gacaca 2001, art. 10; loi gacaca 2004, art. 14. « Sectarisme » et « divisionnisme » sont des termes mal définis dans la loi rwandaise et souvent utilisés de façon interchangeable pour désigner la diffusion d’idées qui encouragent l’animosité ethnique entre les populations tutsie et hutue du pays.
[286] PRI, « Rapport de la Recherche sur la Gacaca – Rapport I : Les juridictions Gacaca et leur préparation, Juillet - Décembre 2001 » janvier 2002, http://www.penalreform.org/files/rep-ga1-2002-preparations-fr_0.pdf (consulté le 4 décembre 2010), pp. 40-41. Selon la Coopération technique belge, 92,7 pour cent des juges gacaca étaient des agriculteurs et 15,4 pour cent d’entre eux étaient analphabètes. Coopération technique belge, Rapport sur les conditions de vie des Inyangamugayo, novembre 2005 (document en possession de Human Rights Watch).
[287] PRI, « Rapport de la Recherche sur la Gacaca – Rapport I : Les juridictions Gacaca et leur préparation, Juillet - Décembre 2001 » janvier 2002, http://www.penalreform.org/files/rep-ga1-2002-preparations-en_0.pdf (consulté le 4 décembre 2010), p. 40-41.
[288] Ibid.
[289]Amnesty International, « Gacaca: Une question de justice », AI Index: AFR 47/007/2002, décembre 2002, http://www.amnesty.org/fr/library/asset/AFR47/007/2002/fr/cbeede57-d769-11dd-b024-21932cd2170d/afr470072002fr.pdf (consulté le 15 mars 2010).
[290] Ibid.
[291]African Rights, « Gacaca Justice: A Shared Responsibility », Kigali, janvier 2003, pp. 4-12 ; PRI, Huit ans après…le point sur le monitoring de la gacaca au Rwanda, p. 19. Voir aussi Comité des droits de l’homme de l’ONU, « Concluding Observations », 7 mai 2009, UN Doc. No. CCPR/C/RWA/CO/3, http://www.ccprcentre.org/doc/ICCPR/AR/A_64_40(Vol%20I)_Eng.pdf (consulté le 10 décembre 2010), para.17, p. 48 ; ASF, « Monitoring des Juridictions Gacaca, Phase de Jugement: Rapport Analytique No. 5, Janvier 2008-Mars 2010 », http://www.asf.be/publications/Rwanda_MonitoringGacaca_RapportAnalytique5_Light.pdf (consulté le 21 mars 2011), pp. 19-21.
[292] Cour Suprême, Département des Juridictions Gacaca, Manuel explicatif sur la loi organique portant création des juridictions gacaca, Kigali, octobre 2001, (document en possession de Human Rights Watch).
[293] Lettre de Pierre-Richard St. Hilaire, Conseiller juridique résident au Rwanda, Département d’État des États-Unis, au Procureur général rwandais, Gerald Gahima, 26 mars 2002 (document en possession de Human Rights Watch).
[294] SNJG, « Le Guide Simplifié de la Procédure de Jugement », avril 2005 (document en possession de Human Rights Watch).
[295] Entretiens téléphoniques de Human Rights Watch avec des juges gacaca, 16 mars 2010.
[296] Entretien de Human Rights Watch avec la secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, Kigali, 9 septembre 2008.
[297]Voir ci-dessous, section VIII.
[298] Martien Schotsmans, Coopération Technique Belge (CTB), Appui au Renforcement de l’Etat de Droit et de la Justice au Rwanda, 2004, http://www.oecd.org/dataoecd/7/31/35110075.pdf (consulté le 21 mars 2011), pp. 24-25.
[299] SNJG et CTB, « Enquête sur l’Amélioration des Conditions de Vie des Inyangamugayo », Kigali, novembre 2005.
[300] Entretiens téléphoniques de Human Rights Watch avec plusieurs juges gacaca, 15 mars 2010. Selon plusieurs juges, la nature sélective de la distribution a entraîné des tensions. Un juge, qui a requis l’anonymat, a déclaré à Human Rights Watch qu’il avait été contraint de vendre sa bicyclette et de partager la somme avec ses collègues juges afin de maintenir la paix.
[301] Loi gacaca 2001, art. 12 ; loi gacaca 2004, art. 16.
[302]Instructions No. 06/2005 du 20 juillet 2005 de la Secrétaire exécutive du Service national des juridictions gacaca sur la destitution du juge inyangamugayo du siège d’un tribunal gacaca, Dissolution du siège d’un tribunal gacaca et remplacement des juges inyangamugayo.
[303] Martien Schotsmans, Coopération Technique Belge (CTB), Appui au Renforcement de l’Etat de Droit et de la Justice au Rwanda, 2004, http://www.oecd.org/dataoecd/7/31/35110075.pdf (consulté le 21 mars 2011), p. 22.
[304] Remarques du directeur de la section juridique du SNJG, Gratien Dusingizimana, à la conférence hebdomadaire d’Unité et réconciliation nationales, Kigali, 9 décembre 2009. Le document Power Point présenté à la conférence est disponible sur le site Web du SNJG sous le titre « Gacaca Juridictions: Achievements, Problems, and Future Prospects », http://www.inkiko-gacaca.gov.rw/En/EnIntroduction.htm, p. 8 (consulté le 15 mars 2010).
[305] « Gacaca Trials Could Also Try First Category Defendants », Hirondelle News Agency, 4 janvier 2008, http://www.hirondellenews.com/content/view/10460/309 (consulté le 17 mars 2010). Human Rights Watch n’a pas été en mesure de vérifier le nombre de juges ayant fait l’objet de poursuites judiciaires pour corruption.
[306] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Joseph Ndabakenga, juridiction du secteur de Save, district de Gisagara, province du Sud, 11 et 18 septembre 2008 ; affaire d’Emmanuel Nkurunziza, 30 mars et 1-3 avril 2010, juridiction du secteur de Gahogo, district de Muhanga, province du Sud. Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Symphorien Kamuzinzi, juridiction du secteur de Nyakabanda, district de Nyarugenge, Kigali (avec des juges nommés par le SNJG, provenant du secteur de Kimironko, district de Gasabo, Kigali), 2 et 4 mars 2010.
[307] Loi gacaca 2004, Art. 25.
[308] SNJG, « Simplified Guide to Trial Procedures », p. 13.
[309]ASF, « Monitoring des Juridictions Gacaca, Phase de Jugement: Rapport Analytique No. 5, Janvier 2008-Mars 2010 », http://www.asf.be/publications/Rwanda_MonitoringGacaca_RapportAnalytique5_Light.pdf (consulté le 21 mars 2011), pp. 17-18, 26-32.
[310] Loi gacaca 2004, Art. 26.
[311] Entretien de Human Rights Watch avec le directeur de la section juridique du SNJG, Gratien Dusingizimana, Kigali, 17 avril 2008.
[312] PRI a indiqué : « Dans nos entretiens avec les juges [sic] beaucoup ne maîtrisaient pas certaines notions juridiques, telles que l’intention, qui fait partie de la définition même du crime de génocide. » PRI, « La contribution des juridictions Gacaca au règlement du contentieux du génocide : Apports, limites et attentes sur l’après Gacaca», 24 février 2010, http://www.penalreform.org/publications/final-monitoring-and-research-report-gacaca-process (consulté le 21 mars 2011), p. 42.
[313] Loi sur le génocide, art. 1 (incluant l’article 2 de la Convention internationale pour la prévention et la répression du crime de génocide). Voir aussi Statut du TPIR, art. 2. Le génocide est considéré comme un « crime commis dans une intention spécifique », ce qui signifie que la personne doit avoir eu un état d’esprit particulier en plus de commettre un acte concret.
[314] Cette question s’est aussi posée dans les tribunaux classiques, qui ont souvent omis d’exiger que le procureur apporte la preuve que l’accusé avait l’intention par ses actions de détruire, en totalité ou en partie, le groupe ethnique tutsi.
[315] Loi gacaca 2001, para. 53 ; loi gacaca 2004, para. 53 ; loi sur le génocide 1996, art. 3.
[316]Le droit rwandais exige qu’une personne soutienne « sciemment » une autre personne dans la commission d’un crime pour être jugée responsable de complicité. Code pénal rwandais, art. 91. Le TPIR a une norme juridique similaire et a jugé que « la seule présence de l’accusé sur les lieux ne suffit pas par elle-même à établir que ce dernier a aidé et encouragé a commettre le crime, à moins qu’il ne soit démontré qu’elle a eu pour effet de légitimer ou d’encourager sensiblement sur les agissements de l’auteur principal. » Procureur c. Athanase Seromba, TPIR, affaire No. TPIR-2001-66-I, Jugement (chambre de première instance), 13 décembre 2006, para. 308. Dans l’affaire de génocide, le TPIR a aussi jugé que le complice « aurait dû avoir connaissance de l’intention spécifique [de génocide] du contrevenant principal » même si le complice n’a pas eu lui-même l’intention de commettre le génocide. Procureur c. Athanase Seromba, TPIR, affaire No. TPIR-2001-66-A, Jugement (Chambre d’appel), 12 mars 2008, para. 56.
[317] ASF, « Monitoring des juridictions gacaca, phase de jugement : Rapport Analytique No. 3, octobre 2006-avril 2007 », http://www.asf.be/publications/Rwanda_MonitoringGacaca_RapportAnalytique3_FR.pdf (consulté le 21 mars 2011), pp. 37-40.
[318] Remarques de la Secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, réunion publique à Kigali, 13 mars 2007. Domitilla Mukantaganzwa a déclaré que le SNJG avait émis une directive à cet effet qui avait été transmise aux juridictions gacaca locales.
[319] Voir ci-dessus, section VI, « Le cas de Jean-Népomuscène Munyangabe ». Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Jean-Népomuscène Munyangabe, juridiction du secteur de Kibilizi, district de Nyanza, province du Sud, 25 mars 2008.
[320] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Théodore Munyangabe et de l’Abbé Aimé Mategeko, juridiction du secteur de Shangi, district de Nyamasheke, province de l’Ouest, 5 et 14 septembre 2009 ; affaire de Justin Nsengimana, juridiction du secteur de Gishamvu, district de Huye, province du Sud, 20 février 2010.
[321]Voir ci-dessus, section VI, « Le cas de Pascal Habarugira ».
[322] Human Rights Watch, observations de procès, affaire du Dr Pascal Habarugira, juridiction du secteur de la ville de Butare, district de Huye, province du Sud, 30 janvier 2008.
[323] Voir ci-dessus, section VI, « Le cas de Théodore Munyangabe ».
[324] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Théodore Munyangabe, juridiction du secteur de Shangi, district de Nyamasheke, province de l’Ouest, 24 août 2009, 15 septembre 2009.
[325] Entretien de Human Rights Watch avec Benoît Kaboyi, Secrétaire exécutif de l’ONG Ibuka, 11 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec Sabine Uwase, responsable de la défense, de la justice et de l’information pour l’ONG Avega, 8 août 2009 ; Phil Clark, « Truth and Reconciliation at a Price », Radio Netherlands Worldwide, 24 août 2010, http://www.rnw.nl/international-justice/article/truth-and-reconciliation-a-price (consulté le 8 octobre 2010).
[326] « Rwanda Not ‘Satisfied’ with UN Court’s Genocide Sentence », Hirondelle News Agency, 18 juin 2004, http://www.hirondellenews.com/content/view/1101/309 (consulté le 6 septembre 2010) ; « Frosty Reception for Colonel’s Genocide Punishment », Hirondelle News Agency, 16 décembre 2006, http://www.hirondellenews.com/content/view/3284/26 (consulté le 6 septembre 2010) ; « TPIR Hands Munyakazi 25 Years Over Genocide », The New Times, 1er juillet 2010, http://www.allafrica.com/stories/201007010101.html (consulté le 6 septembre 2010).
[327] Loi organique no. 31/2007 du 25 juillet 2007 portant abolition de la peine de mort, art. 4 ; loi gacaca 2004, art. 72 ; loi gacaca 2007, art. 13 ; loi gacaca 2008, art. 17.
[328] Loi gacaca 2004, arts. 72, 73, 75 ; loi gacaca 2007, arts. 13-14 ; loi gacaca 2008, art. 17.
[329] Ibid.
[330] Loi gacaca 2004, art. 76 ; loi gacaca 2007, art. 15. Les prévenus de la catégorie 1 étaient déchus de ces droits à titre définitif; les prévenus de la catégorie 2 pouvaient se voir retirer certains de ces droits pour une période donnée ou indéfiniment. De nombreux tribunaux pensaient que la perte des droits civiques était automatique et par conséquent ne spécifiaient pas cette peine dans les jugements, laissant des milliers de Rwandais considérés comme incapables de voter ou de travailler dans le secteur public ou bien comme enseignants et membres du personnel médical. Voir ASF, « Monitoring des juridictions gacaca, phase de jugement: Rapport Analytique No. 2, octobre 2005-septembre 2006 », http://www.asf.be/publications/Rwanda_MonitoringGacaca_RapportAnalytique2.pdf (consulté le 21 mars 2011), pp. 47-48 ; ASF, « Monitoring des juridictions gacaca, phase de jugement: Rapport Analytique No. 3, octobre 2006-avril 2007 », http://www.asf.be/publications/Rwanda_MonitoringGacaca_RapportAnalytique3_FR.pdf (consulté le 21 mars 2011), p. 46-47.
Du fait de la confusion entourant la perte des droits civiques, il a été admis que les prévenus de catégorie 3 ne pouvaient pas voter. En 2008, peu avant les élections législatives, le parlement a adopté un amendement à la loi électorale et a prévu que les prévenus de catégorie 3 pourraient conserver leur droit de vote.
[331] Loi gacaca 2004, art. 78 ; loi gacaca 2007, art. 16.
[332] PRI, « Rapport de la Recherche sur la Gacaca – PRI Rapport IV:La procédure d’aveux, pierre angulaire de la justice rwandaise », janvier 2003, http://www.penalreform.org/publications/gacaca-research-report-no4-guilty-plea-procedure-cornerstone-rwandan-justice-system-0 (consulté le 21 mars 2011), p. 21 (copie du communiqué présidentiel). Le communiqué du président a bien spécifié que les prévenus libérés pourraient encore être traduits devant des tribunaux gacaca. Toute personne coupable d’avoir fait des aveux mensongers retournerait immédiatement en prison. Toute personne reconnue coupable par un tribunal gacaca était susceptible de retourner en prison selon la durée de la peine infligée.
[333] Lars Waldorf, « Mass Justice for Mass Atrocity: Rethinking Local Justice as a Transitional Model », Temple Law Review, vol. 79, printemps 2006, pp. 42-43 ; Carina Tertsakian, Le Château: The Lives of Prisoners in Rwanda (London: Arves Books, 2008),
p. 426-28.
[334]Ministère de la Justice, Imbonerahamwe Igaragaza Ibisabwa n’intangazo Ryaturutse Muri Perezidansi ya Repubulika [Tableau indiquant ce qui était requis par le communiqué du Président de la République] , 7 mars 2003 (document en possession de Human Rights Watch).
[335] « Rwanda Prepared for Release of Confessed Prisoners », Hirondelle News Agency, 25 août 2005, http://www.hirondellenews.com/content/view/2787/309 (consulté le 4 décembre 2010) ; « Rwanda Liberates Over 9192 Prisoners », Hirondelle News Agency, http://www.hirondellenews.com/content/view/9294/26 (consulté le 4 décembre 2010) ; « Rwanda Frees Genocide Prisoners », BBC News Online, http://news.bbc.co.uk/2/hi/africa/6376979.stm (consulté le 4 décembre 2010).
[336] « Genocide Survivors in Danger, Says Ibuka », Hirondelle News Agency, 15 novembre 2005, http://www.hirondellenews.com/content/view/3176/26 (consulté le 4 décembre 2010).
[337] Loi gacaca 2008, art. 17. Cette peine a également été prononcée par des tribunaux classiques. Code pénal rwandais, arts. 36, 116, 118, 156, 185, 190, 202.
[338] Loi organique no. 31/2007 du 25 juillet 2007 portant abolition de la peine de mort, art. 4.
[339] Comité des droits de l’homme de l’ONU, « Concluding Observations », 7 mai 2009, UN Doc. No. CCPR/C/RWA/CO/3, http://www.ccprcentre.org/doc/ICCPR/AR/A_64_40(Vol%20I)_Eng.pdf (consulté le 10 décembre 2010), para.14, p. 47 ; Comité des droits de l’homme de l’ONU, « Les Experts s’Inquiètent du Fonctionnement des Gacaca au Rwanda mais se Félicitent des Progrès dans la Parité des Sexes », U.N. Doc. No. DH/CT/704, http://www.un.org/News/fr-press/docs/2009/DHCT704.doc.htm (consulté le 1er septembre 2010) ; Procureur c. Yusuf Munyakazi, TPIR, Affaire No. TPIR-97-36-R11bis, Décision sur l’appel du procureur contre la décision de renvoi en vertu de la Règle 11bis (Chambre d’appel), 8 octobre 2008, paras. 8-21 ; Procureur c. Gaspard Kanyarukiga, TPIR, Affaire No. TPIR-2002-78-R11bis, Décision sur l’appel du procureur contre la décision de renvoi en vertu de la Règle 11bis (Chambre d’appel), 30 octobre 2008, paras. 12-17; Procureur c. Ildephonse Hategekimana, TPIR, Affaire No. TPIR-00-55B-R11bis, Décision sur l’appel du procureur contre la décision de renvoi en vertu de la Règle 11bis (Chambre d’appel), 4 décembre 2008, paras. 31-38.
[340] « Rwanda : Il faut abolir la peine de réclusion criminelle à perpétuité », communiqué de presse de Human Rights Watch, 29 janvier 2009, http://www.hrw.org/fr/news/2009/01/29/rwanda-il-faut-abolir-la-peine-de-r-clusion-criminelle-perp-tuit ; ASF, HRW et PRI, « Lettre aux Autorités Judiciaires sur le Nouveau Projet de Loi Gacaca 2008 », 19 mai 2008, p. 2 (en possession de Human Rights Watch) ; ASF, « Avocats Sans Frontières émet les trois recommandations suivantes en matière de justice et de droits de l’homme au Rwanda pour un meilleur accord avec les normes et standards internationaux », avril 2008, http://www.asf.be/publications/publication_recommandationsRwanda_avr08FR.pdf (consulté le 4 décembre 2010) ; ASF, « The Ratification of the Convention Against Torture: A Step Forward in the Adoption of International Norms of Justice and Human Rights », 26 juin 2009, http://www.eurac-network.org/web/uploads/documents/20090629_11634.pdf (consulté le 7 octobre 2010) ; Ligue des droits de la personne dans la région des Grands Lacs (LDGL), « Rapport de la Société Civile sur la Mise en Œuvre du PIDCP », mars 2009, http://www.ccprcentre.org/doc/HRC/Rwanda/NGO/Rapport%20LDGL_CCPR_HRC.pdf
(consulté le 1er septembre 2010), p. 6.
[341] Entretien de Human Rights Watch avec le ministre de la Justice, Tharcisse Karugarama, Kigali, 19 mars 2009.
[342] Loi organique no. 66/2008 du 21/11/2008 modifiant et complétant la loi organique No. 31/2007 du 25 juillet 2007 portant abolition de la peine de mort, art. 1.
[343] Loi no. 32/2010 du 22/09/2010 relative à l’exécution de la peine de réclusion criminelle à perpétuité, art. 3.
[344] Ibid., arts. 5-7, 10-11.
[345] Loi gacaca 2001, arts. 69, 70, 75 ; Loi gacaca 2004, arts. 73, 74, 78, 80, 81; Loi gacaca 2007, arts. 14, 16, 17; Loi gacaca 2008, arts. 18, 20, 21. Voir aussi Arrêté présidentiel No. 26/01/2001 du 10/12/2001 relative à la peine alternative à l’emprisonnement de travaux d’intérêt général.
[346] Les TIG n’ont jamais été utilisés au Rwanda pour des affaires criminelles autres que celles de génocide.
[347] Les travaux d'intérêt général, qui font appel à de larges parties de la population pour aider à la reconstruction du pays, ont été particulièrement utiles en considérant la lutte du Rwanda contre la pauvreté et son engagement envers le développement économique.
[348] Arrêté présidentiel No. 10/01 du 7/3/2005 définissant les modalités de mise en œuvre du service communautaire d’intérêt général comme peine alternative à l’emprisonnement ; loi gacaca 2004, art. 73. Si la personne commet un autre crime alors qu’elle participe au programme de TIG, elle est renvoyée en prison pour y purger le reste de la peine. Loi gacaca 2004, art. 80.
[349] Loi gacaca 2001, art. 75.
[350] Loi gacaca 2004, arts. 73 et 78 ; Arrêté présidentiel No. 10/01 du 7/3/2005 définissant les modalités de mise en œuvre du service communautaire d’intérêt général comme peine alternative à l’emprisonnement.
[351] Loi gacaca 2008, art. 21.
[352]La décision d’organiser le travail des TIG en camps était une réponse à la répartition inégale des prisonniers à travers le pays, certains projets de TIG communautaires entraînant des coûts opérationnels élevés pour quelques prisonniers seulement dans la région et mobilisant des travailleurs non qualifiés pour terminer le travail nécessaire. Le recours aux camps de TIG est donc apparu comme financièrement plus efficient. Selon les termes de l’arrêté présidentiel de 2005, les districts ou municipalités pouvaient faire travailler des prisonniers dans des zones extérieures à leurs communautés locales et pendant plus longtemps que les trois jours hebdomadaires normaux, à condition que la période ne dépasse pas une année. Cette restriction n’a pas été respectée dans le cadre du programme de camps de TIG. PRI, « Rapport de monitoring et de recherche sur la Gacaca: Le Travail d’Intérêt Général (TIG), Quelques pistes de reflexion » mars 2007, http://www.penalreform.org/publications/gacaca-research-report-no9-community-service-0 (consulté le 7 septembre 2010). À la mi-novembre 2010, le gouvernement a indiqué que toutes les personnes effectuant des travaux d’intérêt général se trouvaient dans des camps (et non vivant dans leurs communautés locales). Entretien de Human Rights Watch avec un ancien fonctionnaire, 15 novembre 2010.
[353]À la fin de 2010, il y avait 57 camps de TIG dans tout le pays, avec environ 25 000 personnes faisant des travaux d’intérêt général. Entretien de Human Rights Watch avec un ancien fonctionnaire, Kigali, 15 novembre 2010.
[354] PRI, «Rapport de monitoring et de recherche sur la Gacaca: Le Travail d’Intérêt Général (TIG), Quelques pistes de reflexion », mars 2007, http://www.penalreform.org/files/rep-ga9-2007-community-service-en_0.pdf (consulté le 8 octobre 2010), pp. 25-27.
[355] « TIG a Success, Says Official », The New Times, 29 février 2008, http://allafrica.com/stories/200802290207.html (consulté le 8 septembre 2010).
[356] Entretien de Human Rights Watch avec un rescapé du génocide, district de Huye, 14 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec un rescapé du génocide, district de Kamonyi, 12 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec le Secrétaire exécutif d’Ibuka, Benoît Kaboyi, 11 août 2009.
[357] Entretien de Human Rights Watch avec un rescapé du génocide, district de Kicukiro, 11 août 2009. De nombreux rescapés du génocide craignaient aussi le retour de prisonniers libérés au sein de leur communauté.
[358] Entretien de Human Rights Watch avec un rescapé du génocide, district de Ngororero, 10 août 2009.
[359] Entretiens de Human Rights Watch avec des tigistes, Kigali, 16 juin 2008.
[360] Entretien de Human Rights Watch avec un tigiste, Kigali, 16 juin 2008.
[361] Statistiques officielles du Bureau national des TIG, 30 juin 2009, http://www.tig.minijust.gov.rw/eng/images/Database/le%20nombre%20de%20tigistes%20en%20date%20du%2030.pdf (consulté le 8 septembre 2010).
[362] Statistiques officielles du Bureau national des TIG, « Trimester Report for October-December 2010 », p. 2 (document en possession de Human Rights Watch).
[363] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec un membre de la Liprodhor, 23 mars 2011. La Liprodhor met en œuvre un programme d’observation des TIG.
[364] Loi gacaca 2004, art. 75. L’indemnisation dans les affaires de catégorie 3 s’est avérée litigieuse, nombre de Rwandais indiquant que des bénéficiaires potentiels ont parfois substantiellement gonflé la valeur des biens endommagés. Voir PRI, « Monitoring and Research Report on the Gacaca, The Settlement of Property Offence Cases Committed During the Genocide: Update on the Execution of Agreements and Restoration Condemnations », août 2009, http://www.penalreform.org/files/Rep_Ga12_final_2009.pdf (consulté le 7 décembre 2010), pp. 45-46.
[365] Loi gacaca 2001, art. 90 ; loi sur le génocide 1996, art. 32.
[366] PRI est parvenu à une conclusion similaire. PRI, Huit ans après…le point sur le monitoring de la gacaca au Rwanda, p. 45-46.
[367] Loi No. 69/2008 du 30/12/2008 portant création du Fonds de soutien et d’assistance aux rescapés du génocide perpétré contre les Tutsis et autres crimes contre l’humanité commis entre le 1er octobre 1990 et le 31 décembre 1994 et déterminant son organisation, ses compétences et son fonctionnement (ci-après « loi FARG »). Voir aussi « Le lent chemin de l’indemnisation », Hirondelle News Agency, 19 avril 2004, http://fr.hirondellenews.com/content/view/912/26 (consulté le 6 septembre 2010).
[368] « Blame-Shifting Between Government and FARG Deepens », The New Times, 8 janvier 2009, http://allafrica.com/stories/200901080178.html (consulté le 7 octobre 2010).
[369] Le gouvernement rwandais a contribué au FARG à hauteur de 6 pour cent de son produit intérieur brut, soit 800 millions de francs rwandais (Frw) en 2007 (1,32 million USD), 1,1 milliard de Frw en 2008 (1,8 million USD), et près de 1,5 milliard de Frw en 2009 (2,5 millions USD). Loi FARG, art. 22. Le FARG reçoit aussi un financement privé et international. « FARG Blames Government Officials for its Woes », The New Times, 7 janvier 2009, http://allafrica.com/stories/200901070138.html (consulté le 6 septembre 2010).
[370] « Minister Slams Local Leaders over FARG », The New Times, 12 janvier 2009, http://www.newtimes.co.rw/index.php?issue=13773&article=12365 (consulté le 8 octobre 2010).
[371] « Blame-Shifting Between Government and FARG Deepens », The New Times, 8 janvier 2009, http://allafrica.com/stories/200901080178.html (consulté le 7 octobre 2010).
[372] « Over 500 Students Removed from FARG List », The New Times, 15 janvier 2009, http://www.newtimes.co.rw/index.php?issue=13776&article=12462 (consulté le 8 octobre 2010) ; « Government Sacks FARG Leaders », The New Times, 15 janvier 2009 ; « FARG Corruption Scam Claims 104 », The New Times, 17 mars 2009, http://allafrica.com/stories/200903170175.html (consulté le 8 octobre 2010). En décembre 2009, le gouvernement a annoncé la nomination d’un nouveau directeur pour superviser le FARG. Arrêté du Premier ministre No. 42/03 du 10/6/2009 nommant un directeur du Fonds de soutien et d’assistance aux rescapés du génocide perpétré contre les Tutsis et autres crimes contre l’humanité commis entre le 1er octobre 1990 et le 31 décembre 1994.
[373] « New deadline issued to reorganize Genocide survivors fund », Rwanda News Agency, 27 septembre 2010, http://rnanews.com/national/4250-new-deadline-issued-to-reoganise-genocide-survivors-fund (consulté le 7 octobre 2010).
[374] Entretien de Human Rights Watch avec un membre d’une ONG locale, Kigali, 7 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec un membre d’une ONG locale, Kigali, 12 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec un membre d’une ONG internationale, Kigali, 19 août 2009.
[375] Entretien de Human Rights Watch avec un rescapé du génocide, district de Ngororero, 10 août 2009.
[376] Entretien de Human Rights Watch avec une rescapée du génocide, Kicukiro District, 8 août 2009.
[377] Entretien de Human Rights Watch avec le directeur du FARG, Bernard Itangishaka, Kigali, 18 août 2009.
[378] Entretien de Human Rights Watch avec un membre d’une ONG locale, Kigali, 7 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec un membre d’une ONG locale, Kigali, 12 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec un membre d’une ONG locale, Gitarama, 13 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec un membre d’une ONG internationale, Kigali, 19 août 2009.
[379]Ignatius Ssuuna et Pelagie N. Mbabazi, « Widows Association Under Probe over FARG money », The New Times, 29 octobre 2009, http://allafrica.com/stories/200910300085.html (consulté le 11 octobre 2010).
[380] Ibuka, qui signifie « souviens-toi » en kinyarwanda, a été créé fin 1994 pour traiter les questions de « justice, mémoire, problèmes sociaux et économiques rencontrés par les rescapés. » Voir le bulletin d’informations d’Ibuka de novembre 2010, en suivant le lien http://www.ibuka.rw (consulté le 16 mars 2011). Ibuka est une organisation qui recouvre des associations de rescapés du génocide au Rwanda et agit souvent comme le principal porte-parole des rescapés du génocide dans le pays. Elle a souvent joué un rôle fortement politisé. L’organisation a des antennes dans plusieurs autres pays où résident des rescapés du génocide, notamment la Belgique et la France.
[381] Entretien de Human Rights Watch avec un membre d’une ONG locale, Kigali, 7 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec un membre d’une ONG locale, Kigali, 12 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec un membre d’une ONG locale, Gitarama, 13 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec un membre d’une ONG internationale, Kigali, 19 août 2009.
[382] Entretien de Human Rights Watch avec une rescapée du génocide, district de Kicukiro, 11 août 2009.
[383] PRI, « Rapport de la Recherche sur la Gacaca: PRI Rapport III, Avril – Juin 2002 », http://www.penalreform.org/publications/gacaca-research-report-no3-jurisdictions-pilot-phase-0 (consulté le 2 septembre 2010), pp. 9-10
[384] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants, juridiction de cellule de Kimisugi, secteur de Mutete, district de Gicumbi, province du Nord, 21 octobre 2002 et 7 février 2003 ; entretien de Human Rights Watch avec des habitants, secteur de Karenge, district de Ngoma, province de l’Est, 23 septembre 2002.
[385] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants, cellule de Kimisugi, secteur de Mutete, district de Gicumbi, province du Nord, 7 février 2003 ; entretiens de Human Rights Watch avec des habitants, cellule de Rwimbogo, secteur de Nyarugunga, district de Kicukiro, Kigali, 13 juillet 2002 ; observations de procès par Human Rights Watch, juridiction de Mutete-Kavumu, secteur de Mutete, district de Gicumbi, province du Nord, 18 septembre 2002 ; Human Rights Watch, observations de procès, juridiction de cellule de Gishamvu, secteur de Gishamvu, district de Huye, province du Sud, 30 octobre 2002.
[386] Peter Uvin, « The Introduction of a Modernized Gacaca for Judging Suspects of Participation in the Genocide and the Massacres of 1994 in Rwanda: A Discussion Paper », 2000, http://fletcher.tufts.edu/faculty/uvin/pdfs/reports/Boutmans.pdf (consulté le 9 septembre 2010), p. 10.
[387] Une représentante d’Avega (l’association de veuves du génocide) a estimé que 65 pour cent de rescapés du génocide ont déménagé depuis le génocide. Remarques de la représentante d’Avega, Co-Existence Network Meeting, Kigali, 23 juillet 2002.
[388] Remarques de l’ancien président d’Ibuka, Antoine Mugesera, conférence du CLADHO sur le processus gacaca, Kigali, 14 février 2003.
[389] Karen Brouneus, « The Trauma of Truth-Telling: Effects of Witnessing in the Rwandan Gacaca Courts on Psychological Health », Journal of Conflict Resolution, 23 février 2010, http://jcr.sagepub.com/content/early/2010/02/23/0022002709360322 (consulté le 21 septembre 2010).
[390] Human Rights Watch, observations de procès, juridiction de cellule de Muboni, secteur de Gishamvu, district de Huye, province du Sud, 16 septembre 2002 ; Human Rights Watch, observations de procès, juridiction de cellule de Mutete-Kavumu, secteur de Mutete, district de Gicumbi, province du Nord, 18 septembre 2002 ; Human Rights Watch, observations de procès, juridiction de cellule de Gishamvu, secteur de Gishamvu, district de Huye, province du Sud, 2 janvier 2003.
[391] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, district de Huye, 14 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, district de Kamonyi, 12 août 2009.
[392] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants, Kibungo, district de Ngoma, province de l’Est, 3 et 7 octobre 2002.
[393] Entretien de Human Rights Watch avec un juge gacaca, Kibungo, 3 octobre 2002.
[394] Entretien de Human Rights Watch avec une autorité locale, Kibungo, district de Ngoma, province de l’Est, 7 octobre 2002.
[395] Entretiens de Human Rights Watch avec des personnes accusées, Kigali, 19 et 27 août 2009 ; entretiens de Human Rights Watch avec des rescapés du génocide, district de Kicukiro, 11 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec un militant local des droits humains, 1er septembre 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec un juge gacaca, district de Ngororero, 10 août 2009.
[396] Voir Max Rettig, « Truth, Justice, and Reconciliation in Post-Conflict Rwanda? »African Studies Review, vol. 51, no. 3, décembre 2008, p. 40 ; ASF, « Monitoring des juridictions gacaca, phase de jugement: Rapport Analytique No. 2, octobre 2005-septembre 2006 », http://www.asf.be/publications/Rwanda_MonitoringGacaca_RapportAnalytique2.pdf (consulté le 21 mars 2011), p. 21.
[397] Voir Max Rettig, « Truth, Justice, and Reconciliation in Post-Conflict Rwanda? » African Studies Review, p. 40.
[398] Par exemple, à Cyangugu, les habitants ont demandé que le processus gacaca soit programmé le même jour que l’umuganda parce qu’ils ne voulaient pas consacrer deux jours par semaine à des obligations publiques. Voir « PRI Rapport III, Avril – Juin 2002, » http://www.penalreform.org/publications/gacaca-research-report-no3-jurisdictions-pilot-phase-0 (consulté le 5 mai 2011), p. 10. À Kabanoza, les autorités locales ont déplacé le jour consacré au processus gacaca à celui qui avait été fixé pour l’umuganda, en partie parce que les gens ne voulaient consacrer qu’un jour par semaine à des obligations publiques et d’autre part parce que l’absentéisme de l’umuganda entraînait des amendes. Toutefois, cette mesure s’est avérée tout aussi inefficace et finalement, le processus gacaca a été rétabli à son jour d’origine. Entretien de Human Rights Watch avec une autorité locale, cellule de Kabanoza, secteur de Mukingo, district de Nyanza, 24 septembre 2002.
[399] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants, cellule de Kabanoza, secteur de Mukingo, district de Nyanza, province du Sud, 21 juillet 2002 ; entretiens de Human Rights Watch avec des habitants, cellule de Rwimbogo, secteur de Nyarugunga, district de Kicukiro, Kigali, 6 juillet 2002 ; entretiens de Human Rights Watch avec des habitants, secteur de Rusebeya, district de Gicumbi, province du Nord, 25 novembre 2002 ; entretiens de Human Rights Watch avec des habitants, Kibungo, district de Ngoma, province de l’Est, 26 septembre 2002 ; entretiens de Human Rights Watch avec des habitants, cellule de Mutete-Kavumu, secteur de Mutete, district de Gicumbi, province du Nord, 17 juillet 2002 ; entretien de Human Rights Watch avec un président de tribunal gacaca, secteur de Nyarugunga, district de Kicukiro, Kigali, 12 juillet 2002 ; entretiens de Human Rights Watch avec des habitants, cellule de Rwimbogo, secteur de Nyarugunga, district de Kicukiro, Kigali, 9 septembre 2002.
[400] Entretien de Human Rights Watch avec un habitant, Kibuye, 12 octobre 2007.
[401] Entretien de Human Rights Watch, cellule de Kimisugi, secteur de Mutete, district de Gicumbi, province du Nord, 21 octobre 2002 ; entretien de Human Rights Watch avec un habitant, cellule de Gishamvu, secteur de Gishamvu, district de Huye, province du Sud, 13 août 2002, 5 septembre 2002, et 30 janvier 2003. Un responsable de cellule a demandé au conseiller de secteur (autorité locale) de lui donner deux membres de la force de défense locale pour l’aider à rassembler les gens. Entretien de Human Rights Watch avec une autorité locale, Mutete-Kavumu, 6 novembre 2002.
[402] Loi gacaca 2004, art. 29 : « Participer aux activités des Juridictions Gacaca est une obligation pour tout Rwandais. »
[403] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Pierre Clavier Karangwa, juridiction de Mbati, secteur de Mugina, district de Kamonyi, province du Sud, 29 décembre 2007. Le témoin a posé cette question aux juges gacaca après avoir entendu d’autres rescapés du génocide présents au procès qui lui murmuraient des insultes pendant qu’il témoignait pour la défense de l’accusé.
[404] Loi gacaca 2004, art.29.
[405] Entretien de Human Rights Watch avec une autorité locale, juridiction du secteur de Zoko, district de Gicumbi, province du Nord, 6 septembre 2006.
[406] Entretien de Human Rights Watch avec une femme, district de Kamonyi, 12 août 2009.
[407] Voir ci-dessus, section VI, «La présomption d’innocence » et « Le droit de présenter une défense ».
[408]Procureur c. Célestin Sindikubwabo, Jugement, Tribunal de grande instance de Huye, affaire No. RP 0015/07/TGI/HYE RPGR 40832/S2/06/MR/KJ, 24 avril 2007.
[409]Procureur c. Alphonse Minyago, Jugement, Tribunal de grande instance de Rusizi, affaire No. RP 0080/06/TGI/RSZ, 29 septembre 2006.
[410] Entretien de Human Rights Watch avec Théoneste Karenzi, Coordinateur de l’Unité de soutien des victimes et des témoins (Victim and Witness Support Unit, VWSU) au parquet, Kigali, 16 novembre 2010. Voir aussi Gouvernement du Rwanda, « Report on the Killings of Survivors and Witnesses Between January 1995 and August 2008 », septembre 2008, p. 17. Le rapport ne mentionne pas les six autres meurtres qui ont eu lieu entre septembre et décembre 2008.
[411] La VWSU n’a pas été en mesure de dire à Human Rights Watch si les témoins qui ont été tués avaient déposé comme témoins à charge ou à décharge des personnes accusées.
[412] Entretien de Human Rights Watch avec Théoneste Karenzi, coordinateur de la VWSU, Kigali, 16 novembre 2010.
[413] Département d’État des États-Unis, Bureau de la démocratie, des droits de la personne et du travail, « Country Reports on Human Rights Practices – 2009: Rwanda », mars 2010, p. 9.
[414] Entretien de Human Rights Watch avec le coordinateur de la VWSU, Théoneste Karenzi, Kigali, 16 novembre 2010.
[415] Loi gacaca 2004, art. 29.
[416] Instruction no. 06/10 du 1er septembre 2006 de la Secrétaire exécutive des juridictions gacaca concernant les arrestations dans le cadre des juridictions gacaca, arts. 4, 9.
[417] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Pascal Habarugira et al., juridiction du secteur de Ngoma, district de Huye, province du Sud, 8 août 2007.
[418] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Joseph Ndagijimana, juridiction du secteur de Byimana, district de Muhanga, province du Sud, 27 novembre 2009.
[419] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Joseph Ndagijimana, juridiction du secteur de Byimana, district de Muhanga, province du Sud, 22 décembre 2009.
[420] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Justin Nsengimana, juridiction du secteur de Gishamvu, district de Huye, province du Sud, 19 février 2010.
[421] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Justin Nsengimana, juridiction du secteur de Gishamvu, district de Huye, province du Sud, 20 février 2010.
[422] Voir ci-dessus, section VI, « Le cas de Théodore Munyangabe ».
[423] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Félicien Murenzi, juridiction de Mukinga, secteur de Nyamiyaga, district de Kamonyi, province du Sud, 6 et 20 juin 2008.
[424] Voir ci-dessus, section VI, « Le droit d'être informé de l'affaire et d'avoir du temps pour préparer sa défense ». Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Odette Uwimana, juridiction du secteur de Jabana, district de Gasabo, Kigali, 6 décembre 2009 ; Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Domina Nyirakabano, juridiction du secteur de Cyeza, district de Muhanga District, province du Sud, 6 octobre 2009.
[425] Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Elisabeth Mukasafari et Vincent Uzarama, juridiction du secteur de Jabana, district de Gasabo, Kigali, 28 août et 24 septembre 2009. Jugement infirmé par les juges gacaca du secteur de Shyogwe, district de Muhanga, province du Sud, désignés par le SNJG, 14 mars 2010.
[426] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Gérard Mutabazi, juridiction du secteur de Nyakabanda, district de Nyarugenge, Kigali, 21 et 28 octobre, 4, 11, 18 et 25 novembre, et 16 décembre 2007.
[427] Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Alphonse Rutayisire et Célestin Rusanganwa, juridiction du secteur de Gikondo, district de Kicukiro, Kigali, 7 et 14 novembre et 5 décembre 2009. La cour d’appel a confirmé le verdict le 7 mars 2010.
[428]Entretien de Human Rights Watch avec un rescapé du génocide, Kigali, 9 septembre 2007.
[429] Entretiens de Human Rights Watch avec l’accusé et des parents de l’accusé, Kigali, 9 septembre 2007 et 2 décembre 2007.
[430] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Joseph Ndabakenga, secteur de Save, district de Gisagara, province du Sud, 18 septembre 2008.
[431]Loi gacaca 2004, art. 30.
[432] Ibid.
[433]Département d’État des États-Unis, Bureau de la démocratie, des droits de la personne et du travail, « Country Reports on Human Rights Practices – 2009: Rwanda », mars 2010, p. 9. Human Rights Watch a tenté d’établir combien de ces affaires étaient liées à des témoins de l’accusation par rapport aux témoins de la défense, mais n’a pas été en mesure d’obtenir cette information auprès des autorités du ministère public.
[434] Entretien de Human Rights Watch avec le coordinateur de la VWSU, Théoneste Karenzi, 16 novembre 2010.
[435] Ibid.
[436] Voir ci-dessus, section VI, « Indemnisation ».
[437] Entretien de Human Rights Watch avec deux juges gacaca de la province du Nord, Kigali, 28 novembre 2006.
[438] Entretien de Human Rights Watch avec une personne ayant une bonne connaissance de l’affaire, Gitarama, 21 juillet 2006.
[439]Procureur c. Berchimas Munyurabatware et al., Jugement, Cour suprême, Muhanga, affaire No. RPGR 20828/S1/05/MA/MR, 11 octobre 2006.
[440]Loi gacaca 2004, art. 71.
[441]Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants, Mukinga, 6 juin 2008 ; entretiens de Human Rights Watch avec des habitants, Ngoma, 16 octobre 2007.
[442] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Martin Mbarushimana, juridiction de Mpembe, secteur de Gishyita, district de Karongi, province de l’Ouest, 16 octobre 2007.
[443] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants, Mpemba, 16 octobre 2007.
[444] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Martin Mbarushimana, juridiction de Mpembe, secteur de Gishyita, district de Karongi, province de l’Ouest, 16 octobre 2007.
[445] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec un parent de l’accusé, 22 septembre 2010.
[446] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Théoneste Niyitegeka, juridiction de Gihuma, secteur de Nyamabuye, district de Muhanga, province du Sud, 5 février 2008.
[447] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants, Gihuma, 5 février 2008.
[448] Entretien de Human Rights Watch avec des habitants, secteur de Kibilizi, 20 et 27 mai 2008.
[449] ASF, HRW et PRI, « Lettre aux Autorités Judiciaires sur le nouveau Projet de Loi Gacaca 2008 », 19 mai 2008, p. 1.
[450] Entretien de Human Rights Watch avec la secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, Kigali, 11 mars 2008. Les directeurs de mission d’ASF et de PRI étaient également présents à cette réunion.
[451] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Célestin Nzabanita, juridiction de Zoko, secteur de Mutete, district de Gicumbi, province du Nord, 6 septembre 2006. Plusieurs des habitants, dont un juge gacaca qui ne faisaient pas partie de ceux qui jugeaient l’affaire du fils, ont affirmé à Human Rights Watch que l’affaire n’avait absolument aucun lien avec le génocide. Entretiens de Human Rights Watch avec un juge gacaca et des habitants, Zoko, 6 septembre 2006.
[452] Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Etienne Rutungura, juridiction de Zoko, secteur de Mutete, district de Gicumbi, province du Nord, 19 et 26 juillet 2006.
[453] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Célestin Nzabanita, juridiction de Zoko, secteur de Mutete, district de Gicumbi, province du Nord, 4 juin 2007.
[454] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Célestin Nzabanita, juridiction de Zoko, secteur de Mutete, district de Gicumbi, province du Nord, 6 septembre 2006.
[455] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Célestin Nzabanita, juridiction de Zoko, secteur de Mutete, district de Gicumbi, province du Nord, 4 juin 2007.
[456] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Simon Kamonyo, juridiction de Zoko, secteur de Mutete, district de Gicumbi, province du Nord, 6 septembre 2006.
[457] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Jean-Pierre Kanani, juridiction du secteur de Mukura, district de Karongi, province de l’Ouest, 17 décembre 2009.
[458] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Jean-Pierre Kanani, juridiction du secteur de Mukura, district de Karongi, 24 décembre 2009.
[459]Procureur c. Aphrodis Mugambira, Jugement, Tribunal de première instance, Kibuye, RP.ch.Sp. 007/01/2000, 29 novembre 2002 ; jugement en appel, Cour d’appel, Ruhengeri, RPA218/R1/GC/RUH, 16 octobre 2003.
[460] Entretien de Human Rights Watch avec une personne ayant une bonne connaissance de l’affaire, Kigali, 22 mars 2010 ; entretien de Human Rights Watch avec un parent, Kigali, 29 janvier 2010.
[461] Entretien de Human Rights Watch avec une personne ayant une bonne connaissance de l’affaire, Kigali, 22 mars 2010.
[462] Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Aphrodis Mugambira, juridiction du secteur de Bwishyura, district de Karongi, province de l’Ouest (avec des juges désignés par le SNJG, venant du secteur de Gikondo, district de Kicurkiro, Kigali), 30 août 2008 ; Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Aphrodis Mugambira, juridiction de Bwishyura, district de Karongi, province de l’Ouest (avec des juges désignés par le SNJG, venant du secteur de Gikondo, district de Kicurkiro, Kigali), 26-27 septembre 2009.
[463] Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Aphrodis Mugambira, juridiction de Bwishyura, district de Karongi, province de l’Ouest (avec des juges désignés par le SNJG, venant du secteur de Nyarugunga, district de Nyarugenge, Kigali), 5-6 mars 2010.
[464] Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Alexandre Nyamutera, juridiction de Musenyi, secteur de Mushishiro, district de Muhanga, province du Sud, 2, 5 et 30 octobre 2007.
[465] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants, secteur de Mushishiro, 2 et 5 octobre 2007.
[466] Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Alexandre Nyamutera, juridiction de Musenyi, secteur de Mushishiro, district de Muhanga, province du Sud, 30 octobre 2007.
[467]Procureur c. Alexandre Nyamutera, Jugement, Cour suprême, Muhanga, affaire No.PGR2278/S1/07/07/TGI/MHG, 11 janvier 2008.
[468] Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Alexandre Nyamutera, juridiction du secteur de Musenyi, district de Muhanga, province du Sud, 30 avril et 7 mai 2009.
[469] Entretien de Human Rights Watch avec une personne ayant une bonne connaissance de l’affaire, Kigali, 31 mai 2008 ; entretien de Human Rights Watch avec un observateur d’ONG ayant assisté au procès, Kigali, 12 juin 2008.
[470] Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Esperance Iribagiza, juridiction du secteur de Gahini, district de Kayonza, province de l’Est, 15, 22 et 29 mai 2008.
[471] Entretien de Human Rights Watch avec une personne ayant une bonne connaissance de l’affaire, Kigali, 31 mai 2008.
[472] Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Esperance Iribagiza, juridiction du secteur de Gahini, district de Kayonza, province de l’Est, 14 août 2008 et 11 septembre 2008.
[473] Entretien de Human Rights Watch avec une personne ayant une bonne connaissance de l’affaire, Kigali, 27 août 2009.
[474]Département d’État des États-Unis, Bureau de la démocratie, des droits de la personne et du travail, chapitre consacré au Rwanda dans les Rapports de pays 2004 sur les pratiques en matière de droits humains, février 2004, p. 5, http://www.state.gov/g/drl/rls/hrrpt/2003/27744.htm (consulté le 24 septembre 2010).
[475]« Rwanda : La condamnation d’un médecin pour génocide doit être réexaminée », communiqué de presse de Human Rights Watch, 15 février 2008, http://www.hrw.org/fr/news/2008/02/15/rwanda-la-condamnation-d-un-m-decin-pour-g-nocide-doit-tre-r-examin-e .
[476] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Théoneste Niyitegeka, juridiction de Gihuma, secteur de Nyamabuye, district de Muhanga, province du Sud, 9 et 30 octobre 2007.
[477] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Théoneste Niyitegeka, juridiction de Gihuma, secteur de Nyamabuye, district de Muhanga, province du Sud, 5 février 2008.
[478] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Théoneste Niyitegeka, juridiction de Gihuma, secteur de Nyamabuye, district de Muhanga, province du Sud, 29 janvier et 5 février 2008.
[479] Entretien de Human Rights Watch avec le directeur de la section juridique du SNJG, Gratien Dusingizimana, Kigali, 20 mars 2009.
[480] Human Rights Watch, La loi et la réalité : Les progrès de la réforme judiciaire au Rwanda, pp. 65-67.
[481] Entretien de Human Rights Watch avec un ministre du gouvernement, Kigali, 8 septembre 2005.
[482] De nombreuses personnes ont accusé l’Église catholique non seulement de ne pas s’être opposée au génocide mais aussi de complicité active dans les violences. Un certain nombre de prêtres, de sœurs, de frères, de catéchistes, ainsi que des dirigeants laïques catholiques ont appuyé, participé ou aidé à organiser les massacres. Voir par exemple Alison Des Forges, Aucun témoin ne doit survivre, pp. 290-293 ; Timothy Longman, « Christian Churches and Genocide in Rwanda », mai 1997, http://faculty.vassar.edu/tilongma/Church&Genocide.html (consulté le 16 mars 2011). En décembre 2006, le TPIR a condamné le père Athanase Seromba pour son implication dans la mort de plus de 2 000 Tutsis qui s’étaient réfugiés dans l’église de la paroisse de Nyange. Le tribunal a établi que Seromba avait donné l’ordre de détruire l’église au bulldozer et avait ensuite abattu quelques rescapés du génocide qui avaient survécu à l’attaque. Il a été condamné à la prison à vie, décision confirmée en appel. Procureur c. Athanase Seromba, TPIR, affaire No. ICTR-2001-66, Jugement (Chambre de première instance), 13 décembre 2006 ; Procureur c. Athanase Seromba, TPIR, affaire No. ICTR-2001-66-A, Jugement (Chambre d’appel), 12 mars 2008. Un certain nombre d’autres prêtres et personnes affiliées à l’Église catholique ont fait l’objet de poursuites pour des crimes liés au génocide et ont été reconnues coupables par le TPIR, ainsi que par des tribunaux gacaca et des tribunaux classiques au Rwanda, et aussi par des tribunaux étrangers. Toutefois, les prêtres catholiques n’ont pas tous soutenu le génocide. Plusieurs d’entre eux ont sauvé ou tenté de sauver des Tutsis des massacres, et certains ont eux-mêmes été tués au cours du génocide.
[483] Human Rights Watch, La loi et la réalité : Les progrès de la réforme judiciaire au Rwanda, pp. 60-62.
[484] Conversation de Human Rights Watch avec un général des Forces rwandaises de défense, Kigali, 11 septembre 2005.
[485] Human Rights Watch, observations de procès, juridiction de la cellule d’Ubumwe, secteur de Rugenge, district de Nyarugenge, Kigali, 11 septembre 2005.
[486] Ibid.
[487] Human Rights Watch, World Report 2006: Rwanda, Janvier 2006, http://www.hrw.org/en/world-report-2006/rwanda.
[488] Entretiens de Human Rights Watch avec un diplomate, Kigali, 12 septembre 2007 et avec une personne ayant une bonne connaissance de l’affaire, par téléphone, Bruxelles, 30 octobre 2007 ; correspondance électronique de Human Rights Watch avec un diplomate belge, 24 septembre 2010.
[489] « Mukezamfura’s Appeal Inadmissible, Judge Rules », Hirondelle News Agency, 20 octobre 2009, http://www.hirondellenews.com/content/view/12871/465 (consulté le 24 septembre 2010) ; Edwin Musoni, « Former Speaker Gets Life Sentence », The New Times, 4 septembre 2009, http://allafrica.com/stories/200909040006.html (consulté le 24 septembre 2010) ; Human Rights Watch, observations de procès, affaire d’Alfred Mukezamfura, juridiction du secteur de Nyakabanda, district de Nyarugenge, Kigali, 30 août et 2 septembre 2009.
[490] Safari, considéré largement comme un Hutu modéré, était membre du Mouvement démocratique républicain (MDR) avant 1994. Il a co-fondé plus tard le PSP, qui faisait partie de la coalition soutenant le FPR lors des élections législatives de 2008. Safari avait auparavant été inculpé de pillage, comme prévenu de catégorie 3 en 2008, bien qu’aucune autre accusation n’ait été portée contre lui. « Rwandan Legislators Expel Genocide-Convicted Senator », Hirondelle News Agency, 11 juin 2009, http://www.hirondellenews.com/content/view/12480/534 (consulté le 27 septembre 2010).
[491] « 15 ans après: le vieux Sénateur Safari choisit l’Exil à la Prison! », Les Points Focaux, Volume 384, 7-14 juin 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec une personne ayant une bonne connaissance de l’affaire, Kigali, 29 mai 2009.
[492] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Stanley Safari, juridiction de Cyarwa-Sumo, district de Huye, province du Sud (avec des juges désignés par le SNJG, venus du secteur de Kimironko, district de Gasabo, Kigali), 23 mai 2009.
[493] « Exiled Senator Resurfaces Online, Condemns Gacaca », Rwandan News Agency, 15 février 2010, http://www.rnanews.com/index.php?option=com_content&view=article&id=2806:exiled-senator-surfaces-online-condemns-gacaca&catid=17:politics&Itemid=36 (consulté le 12 octobre 2010) ; « L’Affaire Safari Continue à Faire Couler Beaucoup d’Encre », Umuseso, Volume 371, 31août-7 septembre 2009, p. 5.
[494] « MP sentenced to life for Genocide », The New Times, 2 mars 2009, http://allafrica.com/stories/200903020004.html (consulté le 8 octobre 2010) ; Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Béatrice Nirere, juridiction du secteur de Kanombe, district de Kicukiro, Kigali, 25-26 juin, et 2 et 9 juillet 2009.
[495] Voir ci-dessus, section VI, « Procès in absentia pour des raisons politiques ».
[496] Comité pour la protection des journalistes, « Rwandan Journalist Freed After 11 Months in Jail », 31 juillet 2006, http://cpj.org/2006/07/rwandan-journalist-freed-after-11-months-in-jail.php (consulté le 9 octobre 2010) ; Comité pour la protection des journalistes, « Attacks on the Press 2006: Rwanda », 7 février 2007, http://cpj.org/2007/02/attacks-on-the-press-2006-rwanda.php (consulté le 27 octobre 2010). Voir aussi Amnesty International, « La liberté d’expression réprimée », AI Index: AFR 47/002/2006, 23 janvier 2006, http://www.amnesty.org/fr/library/asset/AFR47/002/2006/fr/5610152a-d466-11dd-8743-d305bea2b2c7/afr470022006fr.pdf (consulté le 9 octobre 2010).
[497] Comité pour la protection des journalistes, « Rwandan Journalist Freed After 11 Months in Jail », 31 juillet 2006 ; Comité pour la protection des journalistes, « Attacks on the Press 2006: Rwanda », 7 février 2007.
[498] Comité pour la protection des journalistes, « Rwandan Journalist Freed After 11 Months in Jail », 31 juillet 2006. Voir aussi Amnesty International, « La liberté d’expression réprimée », 23 janvier 2006.
[499] « Rwanda : Il faut mettre fin aux attaques contre les journalistes et les opposants », communiqué de presse de Human Rights Watch, 26 juin 2010, http://www.hrw.org/fr/news/2010/06/26/rwanda-il-faut-mettre-fin-aux-attaques-contre-les-journalistes-et-les-opposants.
[500] Edwin Musoni, « Two Arrested over Journalist Murder », The New Times, 28 juin 2010, http://newtimes.co.rw/index.php?issue=14305&article=30736 (consulté le 27 octobre 2010) ; Edwin Musoni, « Suspected Journalist Killers Named », The New Times, 9 juillet 2010, http://allafrica.com/stories/201007090032.html (consulté le 27 octobre 2010).
[501] Human Rights Watch, observations de procès, Procureur c. Didas Nduguyangu et Antoine Karemera, Cour suprême de Kigali, affaire No. RP007/10/HCKig, 29 octobre 2010.
[502] Ibid. Voir aussi Human Rights Watch, observations de procès, Procureur c. Didas Nduguyangu et Antoine Karemera, Cour suprême, affaire No. RP007/10/HCKig, 14 mars 2011.
[503] Entretien de Human Rights Watch avec le porte-parole de la police nationale rwandaise, Eric Kayiranga, Kigali, 23 juillet 2010.
[504] Remarques du directeur de la section juridique du SNJG, Gratien Dusingizimana, à la Conférence hebdomadaire d’unité et de réconciliation nationale, Kigali, 9 décembre 2009. Le document Power Point présenté à la conférence est disponible sur le site Web du SNJG sous le titre « Gacaca Jurisdictions: Achievements, Problems, and Future Prospects », http://www.inkiko-gacaca.gov.rw/En/EnIntroduction.htm, p. 23 (consulté le 15 mars 2010).
[505] Human Rights Watch, observations de procès, juridiction de Muboni, secteur de Gishamvu, district de Huye, province du Sud, 9 septembre 2002.
[506] Entretien de Human Rights Watch avec une juge gacaca, district de Ngororero, province de l’Ouest, 10 août 2009.
[507] Loi gacaca 2001, art. 16 ; Loi gacaca 2004, art. 10. Après avoir été récusé, l’ex-juge est alors libre de participer comme témoin à la procédure.
[508] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de François-Xavier Byuma, juridiction du secteur de Biryogo, district de Nyarugenge, Kigali, 13 et 27 mai 2007 ; Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Jean-Népomuscène Munyangabe, juridiction du secteur de Kibilizi, district de Nyanza, province du Sud, 20 mai 2008 ; Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Jean-Leonard Rugambage, juridiction du secteur de Mugina, district de Kamonyi, province du Sud, 7 et 14 juin 2006 ; entretien de Human Rights Watch avec un observateur de la CNDP dans les tribunaux gacaca qui a assisté à la procédure d’appel dans l’affaire d’Aphrodis Mugambira, Kibuye, 5 mars 2010.
[509] Entretien de Human Rights Watch avec la secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, Kigali, 17 août 2009.
[510] Entretien de Human Rights Watch avec l’Ombudsman, Tito Rutaremara, Kigali, 18 août 2009.
[511] « Gacaca Trials Could Also Try First Category Defendants », Hirondelle News Agency, 4 janvier 2008, http://www.hirondellenews.com/content/view/10460/309 (consulté le 17 mars 2010).
[512] Bureau de l’Ombudsman, « Annual Activity Report 2008 », juillet 2009, https://www.ombudsman.gov.rw/Documents/Rapport%20UMUVUNYI%2020085.pdf (consulté le 16 mars 2011), p. 65. Le rapport a suscité une controverse et a été dénoncé par de nombreuses hautes autorités judiciaires mais a néanmoins entraîné le licenciement de 23 membres du personnel judiciaire, notamment des juges et des greffiers. Voir aussi Felly Kimenyi, « Revoke Report, Officials Demand Ombudsman », The New Times, 14 juillet 2009, http://allafrica.com/stories/200907140173.html (consulté le 16 mars 2011) ; Eugene Mutara, « Judiciary Wields Axe on Corrupt Staff », The New Times, 18 septembre 2009, http://allafrica.com/stories/200909210300.html (consulté le 16 mars 2011).
[513] « Chief Justice Warns against Corruption in Justice Sector », ORINFOR, 8 février 2011, http://www.orinfor.gov.rw/printmedia/topstory.php?id=2187 (consulté le 9 février 2011) ; Edwin Musoni, « 85 Corruption Cases to be Heard in One Week », The New Times, 8 février 2011, http://www.newtimes.co.rw/index.php?issue=14530&article=38119 (consulté le 9 février 2011).
[514] Entretien de Human Rights Watch avec un accusé, Kigali, 26 août 2009.
[515] Entretien de Human Rights Watch avec un rescapé du génocide, district de Ngororero, 10 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec un rescapé du génocide, district de Kamonyi, 12 août 2009. « Gacaca Trials Could Also Try First Category Defendants », Hirondelle News Agency, 4 janvier 2008, http://www.hirondellenews.com/content/view/10460/309 (consulté le 28 septembre 2010).
[516] PRI, « Rapport de Monitoring et de Recherche sur la Gacaca: Les Témoignages et la Preuve devant les Juridictions Gacaca », août 2008, http://www.penalreform.org/files/rep-2008-gacaca11testimonyandproof-fr.pdf (consulté le 28 septembre 2010), pp. 56-59.
[517] Entretien de Human Rights Watch avec un accusé, Kigali, 17 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec un accusé, Kigali, 19 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec un accusé, Kigali, 19 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec un parent d’un accusé, Kigali, 20 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec le mari d’une accusée, Kigali, 27 août 2009.
[518] Entretien de Human Rights Watch avec un accusé, Kigali, 19 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec une personne ayant connaissance de l’affaire, Kigali, 17 août 2009.
[519]Procureur c. Daniel Murinda, Cour suprême, Gasabo, affaire No. RPGR 103344/S1/2007/MAB (en instance).
[520] Entretien de Human Rights Watch avec un accusé du district de Nyarugenge, 17 août 2009.
[521] Entretien de Human Rights Watch avec un accusé du district de Kicukiro, 31 juillet 2009.
[522] Entretien de Human Rights Watch avec le mari de l’accusée, Kigali, 17 août 2009.
[523] Entretien de Human Rights Watch avec le mari de l’accusée, Kigali, 27 août 2009.
[524] Entretien de Human Rights Watch avec une rescapée du génocide, Gitarama, 10 août 2009. Le SNJG a remplacé ensuite le coordinateur de district.
[525] Entretien de Human Rights Watch avec une personne ayant connaissance des deux affaires, Kigali, 26 août 2009.
[526] Entretien de Human Rights Watch avec le frère de l’accusé, Kigali, 20 août 2009.
[527] Entretien de Human Rights Watch avec un accusé, Kigali, 26 août 2009.
[528]Procureur c. Augustin Bapfakubaka, Jugement, Cour suprême, Rubavu, affaire No. RP 0189/08/TG/RBV, 28 novembre 2008.
[529] Ibid.
[530] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, district de Kamonyi, 12 août 2009.
[531] PRI, « Rapport de Monitoring et de Recherche sur la Gacaca: Les Témoignages et la Preuve devant les Juridictions Gacaca », août 2008, http://www.penalreform.org/files/rep-2008-gacaca11testimonyandproof-fr.pdf (consulté le 28 septembre 2010), pp. 50-52.
[532] Entretien de Human Rights Watch avec une personne ayant connaissance de l’affaire, Kigali, 17 août 2009.
[533] Voir ci-dessus, section VI, « Le cas de Jean-Népomuscène Munyangabe ».
[534] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Jean-Népomuscène Munyangabe, juridiction du secteur de Kibilizi, district de Nyanza, province du Sud, 20 mai 2008.
[535] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Déo Nziraguseswa et al., juridiction du secteur de Nyamasheke, district de Nyamasheke, province de l’Ouest, 15 octobre 2007.
[536] Human Rights Watch, observations de procès, affaire du Dr Justin Nsengimana, juridiction du secteur de Gishamvu, district de Huye, province du Sud, 19-20 février 2010.
[537] Entretiens de Human Rights Watch par téléphone avec un juge gacaca, 28 septembre 2009.
[538] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Prudence Nsabimana, juridiction du secteur de Bulinga, district de Muhanga, province du Sud, 16 et 30 octobre 2007.
[539] Entretiens de Human Rights Watch avec des habitants, Bulinga, juin 2, 2008 ; entretien de Human Rights Watch avec l’épouse de l’accusé, Kigali, 9 juin 2008.
[540] Entretien de Human Rights Watch avec l’épouse de l’accusé, Kigali, 9 juin 2008. Le procès a eu lieu le 1er juin 2008 dans la juridiction du secteur de Bulinga.
[541] Human Rights Watch, observations de procès, affaire de Déo Nziraguseswa et al., juridiction du secteur de Nyamasheke, district de Nyamasheke, province de l’Ouest, 15 octobre 2007 ; entretien de Human Rights Watch avec des personnes ayant connaissance de l’affaire, Kigali, 2 février 2009.
[542] Lettre de membres d’Ibuka du secteur de Kagano, district de Nyamasheke, province de l’Ouest, à la Secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, 27 septembre 2008 (en possession de Human Rights Watch).
[543] Loi gacaca 2008.
[544] Entretien de Human Rights Watch avec la secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, Kigali, 11 mars 2008 ; entretien de Human Rights Watch avec le directeur de la section juridique du SNJG, Gratien Dusingizimana, Kigali, 25 novembre 2008.
[545] Entretien de Human Rights Watch avec Sabine Uwase, responsable de la défense, de la justice et de l’information pour Avega, Kigali, 8 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec Zaina Nyiramatama, secrétaire exécutive d’Haguruka, Kigali, 7 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec Suzanne Ruboneka, secrétaire exécutive de Profemme, Kigali, 20 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec Jane Gatete Abatoni, secrétaire exécutive d’ARCT, Kigali, 7 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec le secrétaire exécutif d’Ibuka, Benoît Kaboyi, Kigali, 11 août 2009.
[546] Entretien de Human Rights Watch avec Sabine Uwase, responsable de la défense, de la justice et de l’information pour Avega, Kigali, 8 août 2009.
[547] Entretien de Human Rights Watch avec une représentante d’une association de femmes, Kigali, août 2009.
[548] Entretien de Human Rights Watch avec la secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, Kigali, 9 septembre 2008.
[549] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, district de Kamyoni, 12 août 2009.
[550] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, Kigali, 11 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, district de Kamyoni, 12 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec des victimes de viol, Butare, 14 août 2009.
[551] Entretien de Human Rights Watch avec Sabine Uwase, responsable de la défense, de la justice et de l’information pour Avega, Kigali, 8 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec Suzanne Ruboneka, secrétaire exécutive de Profemme, Kigali, 20 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec Jane Gatete Abatoni, secrétaire exécutive d’ARCT, Kigali, 7 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec le secrétaire exécutif d’Ibuka, Benoît Kaboyi, Kigali, 11 août 2009.
[552] Entretien de Human Rights Watch avec Jane Gatete Abatoni, secrétaire exécutive d’ARCT, Kigali, 7 août 2009.
[553] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, Kigali, 11 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, district de Kamyoni, 12 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec des victimes de viol, Butare, 14 août 2009.
[554] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, district de Kamyoni, 12 août 2009.
[555] Entretien de Human Rights Watch avec des victimes de viol, Kigali, 11 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, Butare, 14 août 2009.
[556] Entretien de Human Rights Watch avec des victimes de viol, Butare, 14 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, district de Kamyoni, 12 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, Gitarama, 10 août 2009.
[557] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, district de Kamyoni, 12 août 2009.
[558] Entretien de Human Rights Watch avec Sabine Uwase, responsable de la défense, de la justice et de l’information pour Avega, Kigali, 8 août 2009.
[559] Human Rights Watch, observations de procès, affaire du Dr Justin Nsengimana, juridiction du secteur de Gishamvu, district de Huye, province du Sud, 20 février 2010.
[560] Entretien de Human Rights Watch avec un juge gacaca, district de Nyarugenge, 14 avril 2009.
[561] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, Gitarama, 10 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, district de Kamyoni, 12 août 2009.
[562] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, Kigali, 11 août 2009 ; entretiens de Human Rights Watch avec une victime de viol, district de Kamyoni, 12 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, Gitarama, 10 août 2009.
[563] Entretien de Human Rights Watch avec Sabine Uwase, responsable de la défense, de la justice et de l’information pour Avega, Kigali, 8 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec Benoît Kaboyi, secrétaire exécutif d’Ibuka, Kigali, 11 août 2009.
[564] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, district de Kicukiro, 11 août 2009 ; entretien de Human Rights Watch avec des victimes de viol, district de Kamyoni, 12 août 2009. Voir aussi entretien de Human Rights Watch avec Benoît Kaboyi, secrétaire exécutif d’Ibuka, Kigali, 11 août 2009.
[565] Loi de 1996 sur le génocide, art. 30.
[566] Entretien de Human Rights Watch avec la secrétaire exécutive du SNJG, Domitilla Mukantaganzwa, Kigali, 17 août 2009.
[567] Ibid.
[568] Ibid. ; entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, Butare, 14 août 2009.
[569] Le résultat aurait été le même devant les tribunaux classiques.
[570] Entretien de Human Rights Watch avec un conseiller spécialisé dans les traumatismes, Kigali, 10 août 2009.
[571] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, district de Ngororero, 10 août 2009.
[572] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, district de Kamyoni, 12 août 2009.
[573] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, district de Ngororero, 10 août 2009.
[574] Entretien de Human Rights Watch avec un conseiller spécialisé dans les traumatismes, Kigali, 10 août 2009.
[575] Entretien de Human Rights Watch avec le coordinateur de la VWSU, Théoneste Karenzi, Kigali, 16 novembre 2010.
[576] Entretien de Human Rights Watch avec Benoît Kaboyi, secrétaire exécutif d’Ibuka, Kigali, 11 août 2009.
[577] Entretien de Human Rights Watch avec un juge gacaca, district de Nyarugenge, 14 avril 2009.
[578] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, Gitarama, 10 août 2009.
[579] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, Kigali, 11 août 2009.
[580] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, Gitarama, 10 août 2009. Cette femme a déclaré qu’elle se serait sentie capable de donner davantage d’information sur ce qui lui était arrivé, devant des tribunaux classiques.
[581] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, Gitarama, 10 août 2009.
[582] Entretiens de Human Rights Watch avec des victimes de viol, district de Kamonyi, 12 août 2009.
[583] Entretiens de Human Rights Watch avec une victime de viol, district de Kamonyi, 12 août 2009.
[584] Entretiens de Human Rights Watch avec deux victimes de viol, district de Kamonyi, 12 août 2009.
[585] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, district de Ngororero, 10 août 2009.
[586] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, district de Kamonyi, 12 août 2009.
[587] Entretien de Human Rights Watch avec Sabine Uwase, responsable de la défense, de la justice et de l’information pour Avega, Kigali, 8 août 2009.
[588] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, Kigali, 11 août 2009.
[589] Entretien de Human Rights Watch avec une personne ayant connaissance de l’affaire, Kigali, 12 août 2009.
[590] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, Kigali, 11 août 2009.
[591] Haut Commissariat des Nations Unies aux Réfugiés (HCR), « Note, la Situation au Rwanda », confidentiel, 23 septembre 1994 ; notes d’un briefing donné par Robert Gersony, HCR, Genève.
[592] Pour un débat plus large sur les crimes du FPR, voir Human Rights Watch, La loi et la réalité : Les progrès de la réforme judiciaire au Rwanda, pp. 96-103 ; Alison Des Forges, Aucun témoin ne doit survivre, pp. 805-845.
[593] Loi gacaca 2001, art. 1.
[594] Discours du Président Paul Kagame lors du lancement des juridictions gacaca, 18 juin 2002, dans PRI, « Rapport de la Recherche sur la Gacaca: PRI Rapport III, Avril – Juin 2002, » http://www.penalreform.org/publications/gacaca-research-report-no3-jurisdictions-pilot-phase-0 (consulté le 29 septembre 2010), annexe, pp. 35-36.
[595]Entretiens de Human Rights Watch, Kigali, 28 et 31 mai 2005. De hautes autorités gouvernementales ont régulièrement insisté sur les limites de compétence du système gacaca dans des émissions diffusées publiquement à la radio. Par exemple, Servilien Sebasoni, porte-parole du FPR, a reproché aux autorités locales de base de ne pas avoir fait comprendre à la population que les crimes du FPR ne relèvent pas de la compétence des tribunaux gacaca (« Morning edition », Voice of America, 31 mai 2005).
[596] Human Rights Watch, La loi et la réalité : Les progrès de la réforme judiciaire au Rwanda, pp.96-98; Amnesty International, « Il est plus prudent de garder le silence: les conséquences effrayantes des lois rwandaises sur ‘l’idéologie du génocide’ et le ‘sectarisme’», pp. 4, 8-9, 20-21, 26.
[597] Comité des droits de l’homme de l’ONU, « Consideration of Reports Submitted by State Parties Under Article 40 of the Covenant, Concluding Observations of the Human Rights Committee », CCPR/C/RWA/CO/3, 7 mai 2009, http://daccess-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/G09/441/54/PDF/G0944154.pdf (consulté le 27 avril 2010), para. 13.
[598] Human Rights Watch, La loi et la réalité : Les progrès de la réforme judiciaire au Rwanda, annexe 2.
[599] « Rwanda Tribunal Should Pursue Justice for RPF Crimes », communiqué de presse de Human Rights Watch, 12 décembre 2008, http://www.hrw.org/en/news/2008/12/12/rwanda-tribunal-should-pursue-justice-rpf-crimes ; « Rwanda : Le Tribunal pénal international pour le Rwanda risque d’encourager une ‘justice des vainqueurs’ » communiqué de presse de Human Rights Watch, 1er juin 2009, http://www.hrw.org/fr/news/2009/06/01/rwanda-le-tribunal-p-nal-international-pour-le-rwanda-risque-d-encourager-une-justic .
[600] Objectifs déterminés par Paul Kagame, « Discours de Paul Kagame à l’occasion du lancement officiel des travaux des juridictions Gacaca, » Kigali, 18 juin 2002, retranscrit dans PRI, « Rapport de la Recherche sur la Gacaca: PRI Rapport III, Avril – Juin 2002 », http://www.penalreform.org/publications/gacaca-research-report-no3-jurisdictions-pilot-phase-0 (consulté le 2 septembre 2010), annexe.
[601] Entretien de Human Rights Watch avec le secrétaire exécutif d’Ibuka, Benoît Kaboyi, Kigali, 11 août 2009.
[602] Entretien de Human Rights Watch avec un juge gacaca (et un rescapé du génocide), district de Ngororero, 10 août 2009.
[603] Entretien de Human Rights Watch avec un rescapé du génocide, district de Kamonyi, 12 août 2009.
[604] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, Butare, 14 août 2009.
[605] Entretien de Human Rights Watch avec une victime de viol, district de Kamonyi, 12 août 2009.
[606] Entretien de Human Rights Watch avec une autre victime de viol, district de Kamonyi, 12 août 2009.
[607] Entretien de Human Rights Watch avec une personne ayant fait des aveux, Gitarama, 28 août 2009.
[608] Entretien de Human Rights Watch avec une personne accusée, district de Gicumbi, 25 novembre 2005.
[609] Entretien de Human Rights Watch avec l’épouse de l’accusé, Kigali, 6 août 2009.
[610] Human Rights Watch a documenté quelques cas isolés où des tribunaux gacaca ont poursuivi des Tutsis en lien avec des crimes commis durant le génocide, mais ces cas ont été rares. Aucun n’était lié à des meurtres commis par les FPR.
[610] Remarques du chercheur Bert Ingelaere, « Great Lakes Conference: People and Power in Transition », Anvers, Belgique, 17 septembre 2010 ; Bert Ingelaere, « The Gacaca Courts in Rwanda », in Luc Huyse and Mark Salter, eds., Traditional Justice and Reconciliation after Violent Conflict: Learning from African Experiences (Stockholm: IDEA, 2008).
[611] Voir remarques de Bert Ingelaere, « Great Lakes Conference: People and Power in Transition », Anvers, Belgique, 17 septembre 2010 ; remarques d’Anne Aghion à la suite de la projection de « My Neighbor, My Killer » (« Mon voisin, mon tueur »), lors du Festival du film « Movies that Matter » (« Des films qui comptent »), La Haye, 28 mars 2010.
[612] Peter Uvin, « The Introduction of a Modernized Gacaca for Judging Suspects of Participation in the Genocide and the Massacres of 1994 in Rwanda: A Discussion Paper », 2000, http://fletcher.tufts.edu/faculty/uvin/pdfs/reports/Boutmans.pdf (consulté le 9 septembre 2010), p. 12.
[613] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec Dirk Brems, ancien Premier secrétaire chargé de la Coopération et du Développement à l’ambassade de Belgique à Kigali, 9 décembre 2010 ; entretien téléphonique de Human Rights Watch avec l’ancienne co-chef de projet de l’Agence belge de développement (CTB), Véronique Geoffroy, 9 décembre 2010.
[614] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec Dirk Brems, ancien Premier secrétaire chargé de la Coopération et du Développement à l’ambassade de Belgique à Kigali, 9 décembre 2010 ; entretien téléphonique de Human Rights Watch avec l’ancienne co-chef de projet de l’Agence belge de développement (CTB), Véronique Geoffroy, 9 décembre 2010. Voir aussi CTB, « Rapport d’Exécution: Décembre 2004-Mai 2005, Appui au Renforcement de l’État de Droit et de la Justice au Rwanda : Cour Suprême—SNJG », mai 2005 (document en possession de Human Rights Watch).
[615] Entretien téléphonique de Human Rights Watch avec Dirk Brems, ancien Premier secrétaire chargé de la Coopération et du Développement à l’ambassade de Belgique à Kigali, 9 décembre 2010.
[616] Correspondance électronique de Human Rights Watch avec Frieda Nicolai, Première secrétaire de l’ambassade des Pays-Bas, 13 octobre 2010.
[617] La formation de 2008 a été dispensée par l’Institut pour la pratique juridique et le développement (ILPD), centre proposant des programmes de formation juridique et de formation permanente. Correspondance électronique de Human Rights Watch avec Frieda Nicolai, Première secrétaire de l’ambassade des Pays-Bas, 13 octobre 2010.
[618] Correspondance électronique de Human Rights Watch avec Renaud Houzel, directeur du secteur de la Justice à la Commission européenne, 8 octobre 2010.
[619]Financing Agreement between the European Commission and the Republic of Rwanda : Sector Budget Support for the Justice, Reconciliation, Law and Order Sector (SBS JRLO), 19 avril 2010. À la fin 2010, la Commission européenne avait déboursé au total six millions d’euros dans le cadre de cet accord. Entretien de Human Rights Watch avec Renaud Houzel, directeur du secteur de la Justice à la Commission européenne, Kigali, 10 novembre 2010. La Belgique et les Pays-Bas ont appliqué une démarche similaire en 2009. En utilisant un soutien budgétaire général, les bailleurs de fonds européens n’ont plus leur mot à dire quant à l’usage de leurs fonds pour soutenir le système gacaca ou bien d’autres projets liés à la justice. Le gouvernement rwandais, quant à lui, doit rendre compte correctement de l’utilisation des fonds et respecter d’autres exigences préalablement fixées. Voir le Protocole d’entente entre le gouvernement du Rwanda et les partenaires du développement en ce qui concerne les principes de partenariat pour l’appui au secteur de la Justice, Réconciliation, Loi et Ordre, 8 juillet 2009.
[620] Correspondance électronique de Human Rights Watch avec Walter Ehmeir, directeur de l’Agence autrichienne de développement à Kampala, 17 novembre 2010.
[621] Ibid.
[622] Entretien de Human Rights Watch avec Didier Douziech, chargé de programme pour la région des Grands Lacs à la Direction du développement et de la coopération suisse, 2 décembre 2010.
[623] Ibid.
[624] Correspondance électronique de Human Rights Watch avec Fatima Boulnemour, ancienne chef de mission de PRI au Rwanda, 8 décembre 2010.