«La génération FESCI» : Implications pour lavenirBon nombre des personnes interrogées par Human Rights Watch, notamment des policiers, des juges, des professeurs, des étudiants et des fonctionnaires des ministères de lenseignement supérieur et de la justice, ont relevé que la FESCI, sous sa forme violente et hégémonique actuelle, ne pourrait pas survivre longtemps sans limpunité dont jouissent ses membres, qui leur permet déchapper aux mesures disciplinaires de luniversité et aux poursuites criminelles.260 Néanmoins, même si lon mettait fin à limpunité demain, beaucoup de personnes interrogées sinquiètent de leffet que la « génération FESCI » aura sur la vie politique future de la Côte dIvoire.261
La FESCI semble être devenue un terrain dentraînement pour les leaders ivoiriens en herbe. Guillaume Soro, chef des rebelles des Forces Nouvelles et actuel premier ministre au sein dun gouvernement dunion, a dirigé la FESCI de 1995 à 1998. Charles Blé Goudéchef des Jeunes Patriotes, un groupement pro-gouvernemental ultranationaliste, et lun des trois Ivoiriens faisant actuellement lobjet de sanctions du Conseil de sécurité de lONUa été à la tête de la FESCI de 1999 à 2001. Laile jeune de plusieurs grands partis politiques est ou a été dirigée par danciens leaders de la FESCI. Et récemment, des ex-dirigeants de la FESCI, dont Martial Ahipeaud, premier secrétaire général de la FESCI, et Doumbia Major, dirigeant de la dissidence en 2000-2001, ont formé leurs propres partis politiques. Outre ces « vedettes », les anciens membres de la FESCI sont de plus en plus présents au sein de ladministration des différents ministères du gouvernement et au sein des forces de sécurité telles que la police et la gendarmerie. Bon nombre des personnes avec lesquelles nous nous sommes entretenus, des policiers aux professeurs en passant par les étudiants, se sont plaintes du favoritisme dont, selon elles, les membres de la FESCI profitent depuis 2000 pour avoir accès aux écoles de formation de la police et de la gendarmerie, ainsi quà la prestigieuse École Nationale dAdministration (ENA), une institution délite destinée à former les hauts fonctionnaires.262 Un policier haut gradé a confié à Human Rights Watch :
Le système denseignement supérieur de la Côte dIvoire semble donc produire une génération de dirigeants qui se sont fait les dents en politique dans un climat dintimidation, de violence et dimpunité, où le dissentiment et la divergence dopinion sont brutalement réprimés. Il reste à voir si ces jeunes leaders pourront prendre leurs distances par rapport à cette « formation » lorsquils entreront dans la vie professionnelle. |