(New York, le 17 avril 2013) – Les membres du Conseil de sécurité des Nations Unies devraient charger les Nations Unies de surveiller les violations des droits humains au Sahara occidental et dans les camps de réfugiés de la région de Tindouf en Algérie, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui dans une lettre adressée aux 15 pays membres du Conseil de sécurité. Le Conseil doit voter, courant avril 2013, le renouvellement du mandat de la mission de maintien de la paix de l’ONU au Sahara occidental, connue sous le nom de MINURSO.
La MINURSO est l’une des rares missions de maintien de la paix de l’ONU qui ne comprenne pas de mandat d’observation de la situation des droits humains et de rédaction de rapports à ce sujet. Le Maroc, qui revendique sa souveraineté sur le Sahara occidental et qui l’administre de facto, s’est longtemps opposé, avec le soutien de la France, à ce que la surveillance des droits humains soit incluse dans le mandat de la MINURSO. Ce mandat viendra à échéance le 30 avril, mais il a été renouvelé sans interruption depuis que la mission a été créée en 1991.
« Le Conseil de sécurité devrait mettre fin à l’anomalie qui veut que la MINURSO mène des activités de déminage et des patrouilles frontalières, mais n’ait aucun mandat pour rendre compte de la violence policière, des procès injustes ou des restrictions du droit de rassemblement auxquels sont systématiquement confrontés les habitants du Sahara occidental », a déclaré Philippe Bolopion, directeur du plaidoyer auprès de l’ONU à Human Rights Watch.
Le Secrétaire général de l’ONU et le Rapporteur spécial sur la torture ont tous deux récemment appelé à une surveillance accrue des droits humains au Sahara occidental. Les abus commis par le Maroc au Sahara occidental visent tout particulièrement les Sahraouis plaidant pour une auto-détermination ou une indépendance du territoire. Les autorités violent leur droit à manifester pacifiquement et à créer des associations, et des militants ont été torturés puis emprisonnés à l’issue de procès non équitables.
Des sources diplomatiques ont indiqué à Human Rights Watch que les États-Unis ont incorporé, dans le projet de résolution de 2013, des formulations qui pourraient permettre à l’ONU de surveiller les droits humains au Sahara occidental et de publier des rapports sur le sujet. Le projet de texte demande aussi au Secrétaire général de garantir que les agences de l’ONU adéquates puissent surveiller et émettre des rapports sur les droits humains dans les camps de réfugiés de la région de Tindouf, en coopération avec l’Algérie.
Le Sahara occidental est une ancienne colonie espagnole située sur la côte atlantique entre le Maroc et la Mauritanie. Quand l’Espagne s’en est retirée en 1975, le Maroc a pris le contrôle de la plus grande partie du territoire et depuis lors l’a administré comme une région du Maroc. L’ONU ne reconnaît pas la souveraineté marocaine, et considère le Sahara occidental comme un « territoire non autonome ».
En 1991, l’ONU a servi d’intermédiaire pour négocier un cessez-le-feu entre le Maroc et le Front Polisario, basé sur le principe d’un référendum d’auto-détermination que l’ONU devait organiser. Pourtant le référendum n’a jamais eu lieu, et aujourd’hui le Maroc s’y oppose, proposant au lieu de cela une forme d’autonomie pour le Sahara occidental au sein du Maroc.
« Le mandat élargi de la MINURSO devrait inclure la tâche de surveiller la situation des droits humains non seulement au Sahara occidental, mais aussi dans les camps de réfugiés sahraouis situés de l’autre côté de la frontière, en Algérie, dont les habitants vivent de façon relativement isolée », a écritHuman Rights Watch dans sa lettre. En effet le Front Polisario a pris des mesures pour punir des résidents des camps qui critiquaient ses dirigeants ou soutenaient le plan d’autonomie du Maroc.
« La mission de maintien de la paix au Sahara occidental aurait dû inclure depuis longtemps un mandat de surveillance des droits humains, qui améliorerait les mécanismes de protection des droits humains tout en dissuadantles parties en présence de déformer les allégations de violations pour servir leurs propres objectifs politiques », a conclu Philippe Bolopion. « Les membres du Conseil de sécurité ne devraient pas laisser passer cette opportunité historique d’aligner la MINURSO avec les autres missions modernes de maintien de la paix, bâties sur l’idée que les droits humains font partie intégrante du travail de l’ONU. »