Background Briefing

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Tueries de civils

Toutes les parties ont délibérément visé des civils, le plus souvent prétextant qu’ils sont partisans du camp adverse, ignorant de ce fait la distinction fondamentale prescrite par le droit international humanitaire de distinction entre civil et combattant. Une jeune fille a expliqué que : « Le langage des militaires, c’est de nous dire que chaque personne qu’ils voient, c’est un assaillant. Que les femmes et les filles sont aussi des assaillants. »21 

Des témoins de la commune Kanyosha ont accusé les soldats du gouvernement, peut-être ceux stationnés à Mboza, d’avoir tué un garçon de dix ans, prénommé Elias, le 14 novembre 2003. L’enfant a été arrêté à une barrière dressée par les militaires à Mugwa, colline Buhonga, alors qu’il fuyait en compagnie de sa mère et d’autres civils. Ils l’ont arraché des bras de sa mère qui cherchait à le protéger, prétextant qu’il s’agissait là « d’un de ces rebelles qui nous tirent dessus » et l’ont exécuté sous les yeux de la mère. Des témoins de la localité ont rapporté que le même jour, au même endroit, les soldats ont aussi tué Ambroise Nvuyekure, un autre civil.22 Les combattants FDD ont aussi, selon plusieurs témoins, tué Emmanuel Nahurutari à Rushubi alors qu’il tentait des les empêcher d’enlever sa fille Denise, qu’ils prétendaient appartenir aux Jeunesses Patriotiques Hutu (JPH), une organisation d’obédience FNL essentiellement composée de jeunes gens.23

A la fin de l’année 2003, les FNL ont dressé une liste de 49 notables de la commune Mutambu simplement parce qu’ils les soupçonnaient d’avoir participé à une réunion organisée par les FDD. Des témoins de la localité ont rapporté que trois d’entre eux, Michel Nyabworo, Artémon Kirahinduka et Stanislas Ciza ont été tués dans les semaines qui suivirent tandis que les autres ont été contraints de fuir la commune.24 Le 29 mars 2004, à Muberure, en commune Isale, des combattants FNL ont exécuté un jeune étudiant pour le seul motif que son frère était soupçonné de faire partie des FDD.25

Les militaires de l’armée gouvernementale peuvent aussi se voir reprocher un recours à la force disproportionné et sans discrimination, qui a mis les civils en danger d’être blessés ou tués. Un témoin a raconté avoir vu, en pleine journée du 16 mars 2004, sur la route RN3 qui mène à la commune de Kabezi, les militaires de l’armée gouvernementale tirer des obus sans égard pour la population civile qui fuyait : « Ils ont installé un grand fusil pour lancer quatre bombes vers la colline Mena. On pouvait voir, très visiblement, une ligne de gens qui couraient en descendant [la colline] vers le centre de Kabezi. Une bombe est tombée sur le groupe et j’ai vu la poussière monter et les gens s’éparpiller dans tous les sens. On a prié pour eux pour qu’ils ne meurent pas. »26 Dans un autre cas du 26 janvier, deux soldats de l’armée gouvernementale ont été abattus à Karinzi, commune Mutambu, en plein jour de marché, apparemment par des combattants FNL, ce qui a provoqué une fusillade en représailles de la part des militaires présents, dans laquelle six civils ont été tués.27



[21] Entretien de Human Rights Watch, Bujumbura, 5 décembre 2003. Voir aussi le rapport de Human Rights Watch : « Burundi : les civils paient le prix d’un processus de paix hésitant », février 2003.

[22] Entretiens de Human Rights Watch, Bujumbura, 18, 20, 25 et 27 novembre 2003.

[23] Entretien de Human Rights Watch, Rushubi, 19 mars 2004.

[24] Entretien de Human Rights Watch, Mutambu, 12 mars 2004.

[25] Entretien de Human Rights Watch, Muramvya, 29 mars 2004.

[26] Entretien de Human Rights Watch, Bujumbura, 18 mars 2004.

[27] Entretiens de Human Rights Watch, Bujumbura, 3 février, et Mutambu, 12 mars 2004.


<<previous  |  index  |  next>>juin 2004