Dans le nord-est du Congo, le conflit armé international vient se greffer à plusieurs conflits internes. Le comportement des combattants tant dans les guerres internationales qu'internes est réglementé par plusieurs conventions internationales. La RDC a signé et ratifié en 1961 les Conventions de Genève du 12 août 1949 et en 1982 le 1er Protocole du 8 juin 1977 additionnel aux Conventions de Genève et relatif à la protection des victimes de conflits armés internationaux. L'Ouganda a signé et ratifié les Conventions de Genève en 1964 ainsi que le 1er Protocole additionnel aux Conventions de Genève et le 2e Protocole additionnel relatif à la protection des victimes de conflits armés non-internationaux en 1991.169
Etant donné que sa guerre avec la RDC est un conflit international, l'Ouganda, tout comme le Rwanda et le Burundi, est obligé de respecter les Conventions de Genève du 12 août 1949 et le 1er Protocole additionnel aux Conventions de Genève.
Sur le territoire congolais qu'elle occupe, l'UPDF est tenue de respecter les dispositions de la Quatrième Convention de Genève qui protège les civils se trouvant sous le contrôle d'un Etat ennemi contre toute action arbitraire de ce dernier. La Quatrième Convention de Genève interdit explicitement la contrainte d'ordre physique ou moral (article 31), les sévices corporels et la torture (article 32) et les peines collectives, le pillage et les représailles (article 33). Certains combattants de l'UPDF déployés dans les régions de Bunia, Beni, Lubero et dans la zone de conflit la plus affectée par le conflit ethnique Hema-Lendu se sont parfois livrés à l'une ou plusieurs de ces actions interdites comme il est expliqué plus haut.
Dans ses articles 47 à 78, la Quatrième Convention de Genève établit des règles applicables à un territoire occupé. Aux termes de l'article 42, un « territoire est considéré occupé lorsqu'il est placé sous l'autorité de l'armée hostile. » Bien qu'elle devienne de facto l'administrateur du territoire occupé, la puissance occupante doit s'abstenir de changer le statut du territoire, principe que l'Ouganda a violé en créant la province d'Ituri.
Une puissance occupante n'est autorisée à interner des habitants que « pour d'impérieuses raisons de sécurité » (article 78) et conformément aux procédures régulières qui incluent le droit d'appel. Un organisme compétent devra procéder à des révisions périodiques des dossiers des personnes internées. Les articles 79 à 135 fixent les conditions et les aspects pratiques de l'internement, notamment les lieux d'internement, l'alimentation et l'habillement, l'hygiène et les soins médicaux, les activités religieuses, intellectuelles et physiques, les relations avec l'extérieur, les sanctions pénales et disciplinaires, le transfert des internés et le décès des internés. Les soldats de l'UPDF ont violé cette réglementation en détenant arbitrairement des Congolais, sans recourir à aucune procédure officielle ou critère légal, et en maintenant les détenus dans des conditions assimilées à des mauvais traitements, particulièrement dans les mabusu, des tranchées utilisées comme lieux de détention.
Dans leurs affrontements avec les milices locales congolaises ou les bandes armées, composées d'un seul groupe ethnique comme les Lendu ou de personnes de diverses origines ethniques comme les Maï-Maï, les troupes de l'UPDF sont soumises aux normes régissant les conflits armés internationaux. En exécutant sommairement des combattants maï-maï blessés, les soldats de l'UPDF ont violé les Conventions de Genève tout autant que lorsqu'ils ont tué délibérément des civils.
La lutte entre les Hema et les Lendu et d'autres peuples congolais constituait un conflit armé interne aux dimensions internationales, étant donné que les troupes de l'UPDF y étaient impliquées. Une grande partie de la violence sortait cependant du cadre des combats car les milices armées ont attaqué des civils en fonction de leur ethnicité. Ces crimes se sont néanmoins produits dans le cadre d'un conflit plus large et les forces responsables étaient tenues de respecter les lois de la guerre interdisant les attaques contre les civils.
Les parties à un conflit armé interne sont obligées de respecter les normes stipulées dans l'Article 3 des dispositions générales des Conventions de Genève de 1949 qui interdisent les attaques contre les civils, notamment les atteintes portées à la vie et à l'intégrité corporelle, les traitements cruels, les tortures, les prises d'otages, les atteintes à la dignité des personnes, ainsi que les condamnations et exécutions effectuées sans un jugement préalable rendu par un tribunal régulièrement constitué.170
Le gouvernement de la RDC est responsable de l'application des dispositions de la loi nationale aux exactions commises par les deux parties au conflit.
L'article 38 (2) et (3) de la Convention relative aux droits de l'enfant interdit le recrutement dans les forces armées d'enfants n'ayant pas atteint l'âge de quinze ans.171 L'Ouganda a signé cette convention en 1990 mais il n'a pas signé le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés, lequel fixe à dix-huit ans l'âge minimum pour une participation directe aux hostilités, pour le recrutement obligatoire et pour tout recrutement ou utilisation dans les hostilités par des groupes armés non gouvernementaux et par les forces gouvernementales.172 L'Ouganda a toutefois signé (1992) et ratifié (1994) la Charte africaine relative aux droits et à la protection de l'enfant qui exige que les Etats parties prennent toutes les mesures nécessaires pour assurer qu'aucun enfant, défini comme une personne de moins de dix-huit ans, ne prenne part directement aux hostilités et que les Etats parties s'abstiennent de recruter des enfants.173
Human Rights Watch est d'avis qu'aucune personne de moins de dix-huit ans ne devrait être recrutée volontairement ou involontairement dans une force armée, qu'elle soit de nature gouvernementale ou non gouvernementale. En offrant une formation militaire à des Congolais mineurs en RDC, et même sur son propre territoire, et en facilitant leur utilisation dans le conflit, l'Ouganda viole les obligations qui lui incombent en vertu des conventions internationales et régionales dont il est partie.
Le 17 mars 1999, l'Ouganda a signé le Statut de la Cour Pénale Internationale qui définit la « conscription ou l'enrôlement d'enfants de moins de quinze ans dans des forces ou groupes armés ou leur utilisation pour participer activement aux hostilités » dans des conflits armés internationaux et internes comme un crime de guerre qui relève de la compétence de la Cour.174
169 Le Rwanda et le Burundi l'ont fait respectivement en 1964 et 1984, et en 1971 et 1993.
170 Conventions de Genève du 12 août 1949.
171 Convention relative aux droits de l'enfant, Article 38 (2) et (3). Tous les Etats sont parties à la Convention relative aux droits de l'enfant à l'exception des Etats-Unis d'Amérique et de la Somalie.
172 Doc. ONU A/54/L.84, 2 (2000), Articles 2 et 4.
173 Charte africaine relative aux droits et à la protection de l'enfant, Articles II et XII (2).
174 Article 8 qui définit la conscription d'enfants de moins de quinze ans comme un crime de guerre : dans les conflits internationaux, Para 2 (b)(xxvi) ; ainsi que dans les conflits internes : Para 2 (e)(vii) ; Statut de Rome de la Cour Pénale Internationale, article 8 : Crimes de guerre, sur http://www.un.org/law/icc/statute/romefra.htm, accès au site le 4 mars 2001.