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Son Excellence Bassima Hakkaoui
Ministre de la Solidarité, de la femme, de la famille et du développement social
Rabat, Royaume du Maroc

Son Excellence Moustapha Ramid
Ministre de la Justice et des Libertés
Rabat, Royaume du Maroc

Objet : Réformes de la loi sur la violence domestique

Vos Excellences,

Nous vous écrivons au sujet de plusieurs processus de réforme de la loi concernant les violences faites aux femmes — notamment la violence domestique — au Maroc. Ceux-ci comprennent un projet de loi de 2015 proposant des réformes au code pénal (ci-après, le projet de code pénal), un projet de loi de 2015 sur les modifications apportées au code de procédure pénale (ci-après, le projet de code de procédure pénale), et un projet de loi de 2013 sur la lutte contre les violences faites aux femmes (projet de loi 103-13, ci-après, le projet de loi sur les violences faites aux femmes). Nous savons que le projet de loi de 2013 sur les violences faites aux femmes est en cours de mise à jour, mais n’est pas encore accessible au public.

Human Rights Watch se félicite de l'engagement pris par le gouvernement marocain en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes et de l’élimination des violences contre les femmes. Nous aimerions partager nos observations sur les réformes proposées ainsi que les moyens de les renforcer. Bien que les processus de réforme juridique mentionnés ci-dessus couvrent un large éventail de questions, cette lettre se concentre spécifiquement sur la violence domestique.

Human Rights Watch a enquêté sur la violence domestique et la réponse des Etats dans toutes les régions du monde depuis plus de vingt ans. Nous avons collaboré avec des gouvernements, des institutions internationales et des organisations de la société civile afin de promouvoir les meilleurs  lois et programmes sur la violence domestique. Nos observations sur les réformes proposées au Maroc sont basées sur cette expérience, ainsi que sur les normes internationales des droits humains.



Nos observations sont également basées sur des entretiens que nous avons menés au Maroc en 2015 auprès de 20 femmes et filles victimes de violence domestique, et sur 25 entretiens avec des avocats, des militants des droits des femmes, des représentants d'organisations non gouvernementales (ONG) assistant les victimes de violences domestiques, des travailleurs sociaux ainsi que des représentants d’agences des Nations Unies.

Human Rights Watch a écrit cinq lettres aux responsables marocains en 2015 sollicitant des rencontres et des informations sur la violence domestique, mais n'a pas reçu de réponse à ces lettres.[1]

Le commentaire ci-dessous passe en revue les éléments essentiels aux réformes juridiques sur la violence domestique au Maroc. Il appelle également à la participation significative de la société civile dans le processus de réforme. En annexe à cette lettre, nous avons inclus une liste de ressources sur la législation et d’autres mesures étatiques prises pour combattre les violences contre les femmes.

Éléments essentiels pour des réformes juridiques sur la violence domestique au Maroc

Les trente dernières années ont vu un véritable tournant dans la façon dont les pays du monde entier traitent la violence domestique dans leurs législations. Selon ONU Femmes, quelque 125 pays ont adopté des lois portant spécifiquement sur la violence domestique (bien que ce nombre comprenne plusieurs pays qui ne mettent en œuvre qu’une application minimale du droit pénal à la violence domestique).[2]

Le Maroc est aujourd’hui parfaitement en mesure d’ adopter et d’appliquer une législation sur la violence domestique. Il a déjà prouvé son engagement s  à promouvoir les droits des femmes dans sa propre législation, notamment à travers ses réformes du droit de la famille, et il dispose de prestataires de services expérimentés ainsi que de leaders de la société civile qui peuvent conseiller sur les réformes. En effet, le Maroc est tenu d'adopter une telle législation en vertu des traités internationaux des droits humains, notamment la Convention des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.  Des organes onusiens chargés de l'application des traités sur les droits de l'homme ont, à plusieurs reprises, appelé le Maroc à adopter une telle législation.[3]

L'ONU a établi les éléments clés pour la rédaction des législations sur les violences contre les femmes, qui incluent la violence domestique, dans son « Manuel de législation sur les violences à l'égard des femmes » de 2012 (Manuel des Nations Unies). Parmi la vaste gamme de sujets traités dans le Manuel de l'ONU, nous considérons les éléments suivants comme essentiels pour la législation sur la violence domestique au Maroc :

  • La définition et le champ d'application des crimes de violence domestique
  • Les mesures de prévention
  • Les responsabilités des forces de l’ordre et du parquet
  • Les responsabilités du système judiciaire
  • Les ordonnances de protection
  • D'autres services et assistances pour les survivants

Définition et champ d'application des crimes de violence domestique

Les gouvernements du monde entier reconnaissent que la violence domestique implique bien plus que la violence physique, et tendent vers des définitions juridiques plus complètes des crimes de violence domestique. Le Manuel de l'ONU recommande que les définitions juridiques de la violence domestique comprennent « la violence physique, sexuelle, psychologique et économique. »[4] Le site Internet de l'ONU « EndVAWNow » donne des exemples de la façon dont les pays ont défini la violence domestique.[5]

Dans la définition de la violence psychologique et économique, l'ONU recommande que les lois se concentrent sur le « contrôle coercitif », c’est-à-dire la façon dont ces violences sont liées à une forme de domination par l'intimidation, l'isolement, la dégradation et la privation, ainsi que les agressions physiques. [6] L’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) recommande que les lois définissent la « violence psychologique » comme un comportement coercitif, menaçant ou compromettant sérieusement l’intégrité psychologique d’une personne par la force ou les menaces.[7]

L’ONU a également recommandé que les lois érigent expressément en infraction pénale la violence sexuelle dans le cadre des relations avec le conjoint ou le partenaire (viol par le mari ou le partenaire).[8]

Un grand nombre de pays ont également défini l’étendue des personnes couvertes par les lois nationales, allant au-delà des personnes qui sont mariées et qui cohabitent. Le Manuel de l'ONU recommande que les lois sur la violence domestique s’appliquent aux « personnes qui sont ou ont été dans une relation intime, notamment par une relation de mariage, hors mariage, entre personnes de même sexe ou sans cohabitation ; aux personnes qui ont des liens familiaux ou aux membres d’un même ménage. »[9] Des exemples de champ d'application spécifique à chaque pays figurent sur le site d’EndVAWNow.[10]

L'ONU est également préoccupée par les crimes dits « d'honneur », qui peuvent être une forme extrême de violence domestique. Le Manuel de l’ONU recommande que les législations nationales éliminent les dispositions du code pénal qui prévoient des réductions de peines pour les auteurs de crimes dits « d’honneur », et excluent l’acte d’adultère par un des membres de la famille comme une défense valide pour justifier des crimes de violence domestique commis en représailles.[11]

Au Maroc, le code pénal en vigueur ne définit pas spécifiquement la violence domestique. Il contient quelques dispositions accordant des peines plus sévères si la victime est un conjoint ou un membre de la famille, notamment pour les crimes d'empoisonnement ou d'agression.[12] Le viol conjugal n’est pas expressément pénalisé. Les références minimales à la violence domestique dans le code pénal sont loin des exigences du droit international des droits humains.

Le projet de loi proposé sur les violences faites aux femmes définirait la catégorie générale des « violences contre les femmes », mais ne définirait pas spécifiquement la « violence domestique ». Le projet de loi définit la « violence contre les femmes » comme « tout acte matériel ou moral, ou l’omission de celui-ci, sur la base de discrimination sexiste qui entraîne un préjudice physique, psychologique, sexuel ou économique pour une femme ».[13] Si cela est très encourageant, le Maroc devrait également avoir une définition juridique claire de la « violence domestique », en accord avec les recommandations de l'ONU ci-dessus.

Le projet de loi sur les violences faites aux femmes comporte des modifications du code pénal, dont la plupart sont également comprises dans le projet de loi distinct de code pénal. Elles prévoient des sanctions supplémentaires si la personne reconnue coupable de crimes spécifiques (comme l'agression, l'enlèvement, l’aide au suicide ou les menaces d'agression) est un conjoint, un tuteur ou une personne ayant la garde ou exerçant une autorité sur la victime.[14] Le projet de loi introduit également de nouveaux crimes, tels que le mariage forcé, dilapider de l'argent dans le but d’éviter le versement de la pension alimentaire ou d'autres sommes dues découlant d'un divorce, ainsi que d’empêcher une épouse de rentrer chez elle.[15] Le projet de loi précise que certaines infractions existantes peuvent s’appliquer aux conjoints, telles que l'abus de confiance, le détournement de biens et la fraude.[16]

Mais ces dispositions sont insuffisantes à plusieurs égards. Elles sont trop étroites en termes de champ d'application, car elles laissent de côté les ex-conjointes (à l'exception d'un article relatif à l'agression d'une ex-épouse devant ses enfants ou parents), ou les partenaires intimes non mariés.[17] Elles sont également trop limitées en ce qui concerne les crimes contre des épouses ou membres de la famille pouvant entraîner des sanctions, en omettant par exemple le viol conjugal.

Certaines modifications proposées au code pénal aggraveraient les choses pour les femmes, notamment un changement de l'article 420 du code pénal sur les réductions de peine pour les criminels dans les cas de violence contre les membres de la famille ayant eu des rapports sexuels illicites (comme l'adultère, le sexe hors mariage et les rapports sexuels entre personnes du même sexe). Le code pénal actuel prévoit déjà des réductions de peine pour le « chef de famille » s'il commet un meurtre ou une agression contre un membre de sa famille après l’avoir surpris en train de se livrer à des rapports sexuels illicites. L'amendement étendrait la possibilité de réductions de peine pour meurtre et agression de tout membre de la famille qui surprend un membre de sa famille  sur le fait dans un tel rapport. Par ailleurs, ni la loi sur les violences à l’égard des femmes, ni le projet de code pénal n’abrogerait la criminalisation des relations sexuelles consenties entre adultes en dehors du mariage au Maroc.[18] Cela viole le droit à la vie privée et expose les victimes au risque de poursuites, dans le cas où elles voudraient signaler une violence domestique par un partenaire qui n'est pas un conjoint.

Nos recommandations :

  • Le projet de loi sur les violences faites aux femmes et le projet de code pénal devraient définir la « violence domestique » de façon à inclure la violence physique, sexuelle, psychologique, économique et définir plus précisément chacun de ces termes, conformément aux recommandations des Nations Unies. Ilsdevraient indiquer que le viol conjugal est un crime.
  • Ces projets de loi devraient élargir le champ d'application des crimes de violence domestique. Ils devraient, dans certaines circonstances, comprendre : les personnes qui sont ou ont été dans une relation intime, notamment civile, non-matrimoniale, de même sexe, et les relations sans cohabitation ; les personnes ayant des liens familiaux ; et les membres d'un même foyer.Le projet de code pénal devrait abroger la possibilité de réductions de peine pour les auteurs de crimes commis contre des membres de leur famille parce qu'ils ont été surpris lors de relations sexuelles hors mariage ou illicites. Il devrait également dépénaliser les relations sexuelles entre adultes consentants.

Mesures préventives

Lorsque les pays ont commencé à répondre à la violence domestique dans le droit national, un grand nombre d’entre eux s’est axé uniquement sur la criminalisation. Au fil du temps, la plupart ont inclus la prévention de la violence domestique dans les cadres juridiques.

L'ONU recommande que la législation sur les violences à l’égard des femmes traite de la prévention. Elle devrait inclure des mesures telles que des activités de sensibilisation sur les droits fondamentaux des femmes, des programmes d'enseignement ayant pour but de modifier les  schémas de comportements discriminatoires et les stéréotypes sexistes ainsi que la sensibilisation des médias aux violences dont les femmes sont victimes.[19] ONU Femmes a également publié un « Manuel sur les plans nationaux de lutte contre les violences à l’égard des femmes », qui élabore des mesures de prévention supplémentaires, et l'ONUDC a également publié des directives sur la prévention.[20]

Au Maroc, des organisations de la société civile ont mené des efforts pour prévenir les violences à l’égard des femmes, notamment la violence domestique. Par exemple, elles ont créé des campagnes de sensibilisation du public et ont travaillé avec les médias afin de mieux lutter contre la violence domestique. Le gouvernement a également pris certaines mesures pour prévenir les violences faites aux femmes. Par exemple, en juin 2015, il a créé un observatoire pour surveiller l'image des femmes dans les médias et combattre les stéréotypes sur les femmes.[21] En août 2014, le ministère de la Solidarité, de la Femme, de la Famille et du Développement social a rétabli l'Observatoire national des violences à l'égard des femmes, qui permettra de surveiller et de recueillir des données sur les violences contre les femmes.[22] Il a également adopté une stratégie nationale sur les violences contre les femmes en 2002, qui portait sur la nécessité de mesures de prévention telles que l'éducation, la sensibilisation, l'information, la recherche et la formation des autorités.[23]

La proposition de projet de loi sur les violences faites aux femmes et les autres projets de loi pertinents ne mentionnent pas directement la prévention. Le projet de loi sur les violences faites aux femmes fait appel aux comités nationaux, régionaux et locaux sur les femmes et les enfants, mais ne fait pas référence à leur rôle dans la prévention.[24]

Nos recommandations :

  • Le projet de loi sur les violences faites aux femmes devrait inclure une section sur la prévention de la violence domestique. Il devrait attribuer les responsabilités aux agences gouvernementales de prendre des mesures de prévention, notamment des activités de sensibilisation, le développement de programmes d'enseignement, et la sensibilisation des médias au sujet de la violence domestique.

Les responsabilités des forces de l’ordre et du parquet

Les forces de l’ordre et les procureurs (et, dans certains pays, les juges d'instruction) sont au cœur de la lutte contre la violence domestique. Ils sont souvent en première ligne pour recevoir les plaintes, enquêter sur les affaires et prendre des décisions sur les accusations. Malheureusement, lors de ses recherches menées dans le monde entier, Human Rights Watch a constaté que la police et les procureurs sont souvent réticents à répondre à ce qu'ils peuvent considérer comme « des affaires familiales privées ». Bien trop souvent, ils ont renvoyé des femmes à des partenaires dangereux et ont omis d’engager des procédures judiciaires contre les agresseurs.

Reconnaissant cette tendance, l’ONU recommande que les lois en matière de violence domestique établissent des obligations concrètes pour la police, les procureurs et autres autorités jouant un rôle dans la mise en application des lois ou dans les enquêtes sur les cas de violences faites aux femmes. Le Manuel de l’ONU demande aux services de police d’effectuer une évaluation des risques ; d’interroger les parties et les témoins; d’enregistrer la plainte ; d’informer la victime de ses droits ; de remplir et d’enregistrer un rapport officiel de la plainte ; d’assurer et d’organiser le transport de la victime jusqu’à l’hôpital/le centre médical le plus proche ; de lui assurer toute autre protection si besoin. (Voir ci-dessous pour les ordonnances de protection).[25] L'Office de l’ONU contre la drogue et le crime recommande des mesures similaires.[26]

En ce qui concerne les procureurs, le Manuel de l’ONU recommande que « la législation nationale devrait  disposer que c’est au parquet qu’il incombe de poursuivre les auteurs de violence à l’égard des femmes et non pas aux victimes. » Il recommande également que la législation mette en place un minimum de mesures en ce qui concerne les informations que le parquet doit communiquer aux victimes, notamment la décision d’abandonner une affaire.[27]

Enfin, l’ONU recommande que les gouvernements adoptent des politiques « favorables aux arrestations » et aux « poursuites » lorsqu’il existe un motif raisonnable de croire qu’un crime de violence domestique a eu lieu. L’ONUDC explique que les politiques « favorables aux arrestations » « encouragent fortement les agents de police à procéder à une arrestation dans des cas de violence domestique tout en leur laissant un certain pouvoir discrétionnaire. Ces politiques devraient exiger un rapport écrit sur les raisons ayant motivé que la procédure n’est pas suivie. »[28] Dans le cas de politiques « favorables aux poursuites », s’il existe un motif raisonnable de croire qu’un crime a été commis, les poursuites sont probables mais non obligatoires.[29]

Au Maroc, les lois existantes ne proposent pas de directives suffisantes à la police, aux procureurs ni aux juges d’instruction concernant leurs obligations dans des affaires de violence domestique. Ceci contribue à des pratiques incohérentes et problématiques de certaines autorités.

Des filles et des femmes victimes de violence domestique ont indiqué à Human Rights Watch des cas où la police n’a pas fait grand-chose, voire rien, lorsqu’elles ont tenté de signaler des violences domestiques. Elles ont expliqué que les policiers leur ont dit de retourner vers leurs partenaires auteurs d’abus, affirmant qu’ils ne pouvaient rien faire sans témoins oculaires, ou bien de s’adresser à un procureur sans entreprendre d’autre action. Par exemple, une femme a déclaré à Human Rights Watch que lorsqu’elle est allée voir la police à Rabat après que son frère l’a frappée à la tête et lui a donné des coups de poing dans les yeux en juillet 2015, les policiers lui ont dit : « Nous ne pouvons rien faire, ce n’est pas notre travail. » Ils lui ont dit de s’adresser plutôt au procureur public.[30]

Six femmes avec qui nous nous sommes entretenus ont indiqué que lorsqu’elles ont déposé plainte auprès d’un procureur, on leur a dit de rapporter un document aux policiers leur donnant pour instruction d’enquêter sur les plaintes de violence domestique, sans que les procureurs ne communiquent directement avec la police. Mais même après avoir remis ces documents, la plupart des femmes ont déclaré que la police soit n’avait pas donné suite aux instructions des procureurs, soit s’était contentée de téléphoner aux agresseurs. Par exemple, une femme a confié à Human Rights Watch qu’elle avait signalé au procureur public à Rabat que son mari la battait. Le procureur lui a remis un document qu’elle devait donner à la police leur ordonnant d’enquêter. Ledocument a bien été remis à la police mais, a-t-elle déclaré, la police n’a rien fait. Elle est retournée voir le procureur qui a lui a alors fourni un autre document similaire. Elle a affirmé que la police lui avait dit : « Nous l’avons déjà convoqué deux fois, mais votre mari ne veut pas venir. Nous avons fait notre travail. »[31]

D’autres femmes interrogées par Human Rights Watch ont également affirmé que la police n’avait pas mené les actes d’enquêtes habituels, comme par exemple se rendre sur la scène de crime pour relever des preuves ou interroger des voisins pouvant avoir été témoins des violences ou les avoir entendues. Plusieurs femmes ont indiqué que leurs voisins avaient effectivement vu ou entendu les violences.

Dans certains cas, des femmes ont déclaré que des policiers avaient réclamé des pots-de-vin avant d’enquêter sur des violences domestiques. Ainsi, une femme a expliqué qu’elle s’était rendue à la police en 2014 munie d’un document du procureur public donnant pour instruction à la police d’enquêter sur sa plainte, plainte selon laquelle son mari et ses frères la battaient et l’avaient frappée à coups de couteau. Mais selon elle, les agents du poste de police de Maarif à Casablanca lui ont rétorqué qu’ils ne l’aideraient que si elle leur donnait de l’argent. Le procureur public lui a alors remis un autre document leur ordonnant d’enquêter, mais elle a affirmé que les policiers lui ont dit de « ficher le camp. »[32]

Des défenseurs des droits des femmes et des prestataires de service au Maroc ont partagé des commentaires mitigés quant à la réponse de la police à la violence domestique. Certains ont indiqué à Human Rights Watch qu’ils avaient été témoins de cas où la police mettait peu d’empressement à mener des enquêtes, à procéder à des arrestations ou même à recueillir les dépositions de survivantes dans les cas de violence domestique. Par exemple, la fondatrice de Mobilizing Rights Associates a déclaré que certaines femmes lui avaient expliqué que lorsqu’elles appelaient la police pour signaler des violences domestiques, la police demandait si « du sang avait été versé. » Des femmes ont déclaré que la police leur avait expliqué que s’il n’y avait pas de sang, il leur fallait un ordre du procureur pour se rendre au domicile.[33] Najat Razi, membre d’Oyounne Nissaiya (une coalition pour les droits des femmes), a indiqué qu’elle avait vu des cas où la police faisait pression sur les femmes afin qu’elles reviennent vers des maris agresseurs et qu’elles retirent leur plainte. « Dans la plupart des cas que nous recevons, la police tente de convaincre les femmes de ne pas déposer plainte contre leur mari, et si elle insiste ils l’insultent », a-t-elle déclaré.[34] Najat Ikhich de la Fondation YTTO (qui apporte un accompagnement social et juridique aux survivantes de violence domestique) a indiqué que son organisation recevait « de nombreuses plaintes de la part de femmes qui tentent de s’adresser aux cellules des postes de police afin de porter plainte pour violence [domestique] mais qu’elles font alors l’objet d’une autre forme de violence. » Elle a affirmé que la police accuse les survivantes d’être responsables de la violence qu’elles subissent.[35] D’autre part, plusieurs représentants d’ONG ont indiqué que certains policiers orientaient bien des survivantes vers des refuges privés, même si la pratique reste irrégulière.

À une exception près, les survivantes de violence domestique avec qui Human Rights Watch s’est entretenu ont toutes affirmé que la police n’avait jamais fourni ou payer pour le transport vers des soins médicaux ou pour qu’elle puisse se rendre chez le procureur public. Plusieurs femmes et filles ont expliqué qu’elles s’étaient senties dans l’impossibilité de se rendre auprès du procureur parce qu’elles n’avaient pas l’argent pour payer le transport, et qu’elles avaient peur de ne pouvoir déposer plainte sans papiers d’identité, conservés par leurs agresseurs.

Nos recommandations :

  • Le projet de loi sur les violences faites aux femmes devrait aborder la problématique des obligations de la police dans les cas de violence domestique, notamment en prévoyant octroi de pouvoirs suffisants pour  l’autorisation de pénétrer sur les lieux et de procéder à des arrestations ; de mener des évaluations de risque ; d’interroger les parties et les témoins ; d’enregistrer les plaintes ; de conseiller la plaignante sur ses droits ; de faire un rapport officiel ; d’organiser le transport en vue de soins médicaux ; et de fournir toute autre protection. 
  • Le projet de loi devrait enjoindre aux ministères concernés d’adopter des politiques « favorables aux arrestations » et aux « poursuites » dans les cas de violence domestique lorsqu’il y a un motif raisonnable de croire qu’un acte criminel a été commis.
  • Le projet de loi devrait exiger que la police et les procureurs (ou les juges d’instruction, selon le cas) se concertent pour les cas de violence domestique et communiquent directement entre leurs bureaux. Les autorités ne devraient pas exiger que les survivantes de violence domestique se chargent de transmettre des instructions entre les  différents services.
  • Le projet de loi devrait stipuler clairement que la responsabilité des poursuites pour violence domestique incombe aux autorités judiciaires, et non aux survivantes, et établir des normes minimales concernant les informations que les procureurs doivent communiquer aux survivantes.

Responsabilités du système judiciaire

Le système judiciaire joue également un rôle central dans le traitement de la violence domestique. Diverses mesures ont été expérimentées par les Etats afin d’améliorer la prise en charge de ces affaires par les tribunaux, notamment des politiques favorisant des procédures équitables et rapides, des règles de preuve et de procédure adaptées (par exemple des audiences à huis clos), la formation des juges et des procureurs, et la mise en place de tribunaux ou d’unités spécialisés.

Le manuel de l’ONU recommande que la législation garantisse aux victimes une aide judiciaire gratuite dans toutes les procédures, les services gratuits d’un interprète ainsi qu’un appui gratuit devant les tribunaux..[36] Il recommande une législation qui prévoit une procédure rapide et sans retard, et que des tribunaux spécialisés ou une procédure judiciaire spéciale examinent les cas de violences à l’égard des femmes.[37]

Le Manuel de l’ONU aborde également la question des éléments de preuves médicales et médico-légales dans les procédures judiciaires qui concernent les violences faites aux femmes. Il stipule que « les éléments de preuves médicales ou médico-légales ne sont pas nécessaires à la reconnaissance de la responsabilité », et que les accusés doivent pouvoir être poursuivis et condamnés « uniquement sur la base du témoignage de la plaignante/survivante. »[38] De même, il ne devrait pas être nécessaire de disposer d’éléments de preuves médicales et médico-légales pour que les autorités procèdent à une arrestation ou engagent des poursuites.

L’ONUDC recommande que les pays élaborent des lignes directrices sur la recevabilité des preuves devant les tribunaux pour les affaires de violence domestique. Ces lignes directrices peuvent inclure des preuves médicales et médico-légales, des dépositions de victimes, des preuves photographiques, des témoignages d’experts, des preuves matérielles telles que des vêtements déchirés et des objets endommagés, ainsi que des enregistrements sur des téléphones portables, des enregistrements d’appels d’urgence, et d’autres communications.[39]

Au Maroc, les avocats qui travaillent sur des affaires de violence domestique ont indiqué à Human Rights Watch que les poursuites et les condamnations en application du code pénal pour des infractions liées à la violence domestique (par exemple des agressions) sont extrêmement rares.[40] Des avocats qui ont travaillé sur de telles affaires ont déclaré que les juges n’ont été ni cohérents ni raisonnables lorsqu’il s’agissait de déterminer quels éléments de preuve étaient considérés comme suffisants pour une inculpation. Par exemple, une avocate a expliqué à Human Rights Watch que certains juges exigeaient que des victimes de violence domestique fournissent des témoins oculaires, alors même qu’ils avaient à leur disposition un rapport médical et le témoignage de la survivante elle-même.[41] Étant donné que ces agressions se produisent généralement au domicile des victimes et derrière des portes closes, il n’y a presque jamais de témoins autres que les enfants, qui normalement ne peuvent pas témoigner. Un avocat de Rabat a déclaré qu’il avait vu des accusés acquittés de chefs d’accusation liés à la violence domestique parce que les tribunaux ont considéré le témoignage de la victime comme insuffisant.[42] Même si cela ne devrait pas être la norme que le seul témoignage de la victime soit toujours suffisant pour une inculpation, il devrait être possible pour les tribunaux de prononcer une inculpation sur la base d’un témoignage crédible de victime, en accord avec les normes de procédure régulière au regard du droit international des droits humains et avec le niveau de preuve requis par le droit marocain pour parvenir à un verdict de culpabilité.

Le projet de loi sur les violences faites aux femmes amenderait le code de procédure pénale de manière à clarifier quels éléments de preuve peuvent être pris en considération par les tribunaux dans les affaires de violence domestique. Ces éléments comprennent des rapports de psychologues, des preuves médicales, des dépositions d’experts, des photographies, des enregistrements audio et vidéo, et des dépositions de victimes dans les dossiers des hôpitaux.[43] Il s’agit là d’une avancée positive, mais le projet de loi devrait également spécifier que le témoignage d’une victime au tribunal peut être un élément de preuve suffisant pour mener à une inculpation.

En ce qui concerne les condamnations possibles pour voies de fait, le code pénal du Maroc base le niveau des peines prononcées sur l’incapacité entraînée par des blessures corporelles. Si une agression ne cause pas de blessures ou bien si les blessures entraînent une incapacité de travail n’excédant pas vingt jours, l’agresseur peut être puni d’un emprisonnement d’un mois à un an et/ou d’une amende de 200 à 500 dirhams (approximativement de 18,50 à 46 €).[44] Lorsque l’incapacité est supérieure à vingt jours, la peine est l'emprisonnement d'un à trois ans et l'amende de 200 à 1000 dirhams (environ de 18,50 à 92 €).[45] Les peines augmentent encore dans les cas ayant entraîné une mutilation, une amputation ou une privation de l'usage d'un membre, la cécité ou une infirmité permanentes.[46]

Aucun des projets de loi en cours d’examen liés à la violence domestique ne modifierait fondamentalement cet accent mis sur l’incapacité pour la détermination de la peine. Les projets d’amendements au code pénal entraîneraient de légères modifications aux règles de l’imposition des peines liées à l’incapacité, mentionnant 21 jours au lieu de 20, et diminuant la durée possible des peines d’emprisonnement. Le projet de loi prévoit que si l’agression entraîne pour la victime une incapacité de moins de 21 jours, l’agresseur peut être condamné à une peine d’un mois à six mois d’emprisonnement et/ou à une amende de 2 000 à 5 000 dirhams (de 185 à 460 € environ).[47] Si la durée de l’incapacité dépasse 21 jours, la peine passe à une durée allant d’un à deux ans d’emprisonnement et/ou à une amende de 2 000 à 20 000 dirhams (de 185 à 1 850€ environ).[48]

Le fait que la loi se focalise sur l’incapacité comme critère décisif pour la détermination de la peine s’est avéré problématique à plusieurs égards. La loi ne dit rien des critères permettant de déterminer la période d’incapacité, et les certificats médicaux d’incapacité sont utilisés par les tribunaux pour se prononcer sur les peines. Ce manque d’indications laisse aux médecins un large pouvoir discrétionnaire et a le potentiel d’influencer de façon arbitraire la détermination des peines dans les affaires pénales. Cette approche ignore également le fait qu’en réalité, la violence domestique entraîne souvent de petits dommages corporels mais qui s’accumulent et qui peuvent durer moins de 20 jours, ou bien d’autres dommages non corporels ou moins visibles.[49] Le Conseil national des droits de l’homme du Maroc s’est plaint du fait qu’il n’existe pas de cadre national pour déterminer la durée de l’incapacité, et aucune définition d’incapacité permanente dans le code pénal.[50]

En dépit de ces problèmes, les normes relatives à l’incapacité affectent des affaires au-delà même de la détermination des peines. Plusieurs avocats et activistes ont expliqué à Human Rights Watch qu’elles ont aussi un impact sur les pratiques d’arrestation. Une avocate, par exemple, a expliqué que des juges ne peuvent délivrer un mandat d’arrêt que lorsque les victimes ont des certificats médicaux indiquant 21 jours d’incapacité ou plus à la suite de violences familiales, et le ministère public ne peut délivrer un mandat d’arrêt que s’il estime que la survivante court le risque d’une violence extrême.[51] L’avocate a indiqué n’avoir constaté des arrestations que lorsque ses clientes avait perdu un œil ou des dents, ou sont devenues handicapées suite à des violences domestiques. Sur les 20 survivantes interrogées par Human Rights Watch, une seule a indiqué que son agresseur avait été arrêté. Elle disposait d’un rapport médical indiquant 21 jours d’incapacité après que son mari lui a donné un coup de poing et lui a cassé le nez alors qu’elle était enceinte.[52]

Nos recommandations :

  • Le projet de loi sur les violences faites aux femmes devrait maintenir la disposition sur les types de preuves qui sont recevables devant les tribunaux, mais également spécifier que le témoignage d’une plaignante peut être une preuve suffisante pour une inculpation. Le projet de code de procédure pénale devrait comporter une disposition similaire pour les crimes d’agression, notamment dans le contexte de la violence domestique.
  • Même si la gravité des blessures, telle que la déterminent les médecins, doit être un facteur pris en compte par les tribunaux pour fixer les peines des individus reconnus coupables de crimes, le projet de loi sur les violences faites aux femmes ou le projet de code pénal devraient réduire l’importance accordée à l’incapacité comme facteur décisif. D’autres facteurs devraient refléter les indications de l’ONUDC sur la détermination des peines, notamment les antécédents de violence, le risque de récidive, les besoins de réhabilitation et les facteurs aggravants.
  • Le projet de loi sur les violences faites aux femmes devrait exiger des protocoles officiels pour les examens médico-légaux dans les affaires de violence domestique. Il devrait clairement stipuler que la police a le pouvoir de procéder à une arrestation, que la plaignante dispose ou non d’un certificat médical indiquant une incapacité.

Ordonnances de protection

Dans de nombreux pays, les survivantes de violences domestiques peuvent avoir accès à des « ordonnances de protection » d’urgence ou à plus long terme. ONU Femmes décrit les ordonnances de protection comme étant « parmi les recours les plus efficaces mis par le droit à la disposition des plaignantes/ survivantes d’actes de violence à l’égard des femmes. »[53]

Ces ordonnances portent une diversité de noms (par exemple des ordonnances restrictives ou ordonnances de protection), et peuvent être délivrées par diverses autorités. Des « ordonnances civiles de protection » existent dans certains pays, totalement en dehors du système de justice pénale, tandis que d’autres pays disposent d’ « ordonnances pénales de protection » (ou des deux). Le Manuel de l’ONU recommande que ces ordonnances soient disponibles aussi bien dans des procédures pénales que civiles. Leur but est la prévention de nouvelles violences et la protection de la victime. Les survivantes de violence domestique peuvent demander ces ordonnances indépendamment de toute autre procédure, par exemple une action pénale ou un divorce. Les violations d’ordonnances de protection sont en général considérées comme des infractions pénales.

Les ordonnances d’urgence de courte durée répondent à des situations de danger immédiat, souvent en imposant de la distance entre l’agresseur et la victime. Plutôt que de faire peser sur les victimes la charge de rechercher un refuge et la sécurité ailleurs, l’éloignement du défendeur (l’auteur présumé des violences) pour un temps limité est approprié. Les lois désignent les autorités compétentes pour délivrer ces ordonnances. En tant qu’ordonnances d’urgence temporaire, elles peuvent être délivrées ex parte sur le base du témoignage d’une victime. Elles expirent souvent au bout de plusieurs semaines.

Les ordonnances de protection à plus long terme sont en général délivrées par les tribunaux après notification au défendeur et la possibilité d’une audience en règle et d’un examen des preuves. Dans de nombreux pays, ces ordonnances expirent au bout de plusieurs mois, mais l’ONU recommande qu’elles restent valables pendant une année.[54]

Tant les ordonnances d’urgence que les ordonnances à plus long terme spécifient des restrictions qui peuvent être imposées au défendeur. Par exemple, elles peuvent empêcher un accusé de : perpétrer des menaces ou de causer d’autres actes de violence ; de contacter la survivante ou les personnes à la charge de celle-ci ; d’accéder au foyer familial ; de posséder ou d’acheter une arme à feu.[55] Dans de nombreux pays, les autorités peuvent ordonner que le défendeur paie les frais de pension alimentaire pour les enfants, le loyer et les frais médicaux pour les blessures causées par la violence domestique. Des exemples des conditions pouvant être imposées par des ordonnances de protection sont disponibles sur le site internet d’ONU Femmes.[56] 

Au Maroc, le code de procédure pénale prévoit des « mesures de protection » générales pour les victimes, mais il n’y a aucun système d’ordonnances de protection spécifiquement dédiées à la violence domestique.[57] Les avocats que Human Rights Watch a rencontrés ont déclaré n’avoir jamais vu une cour pénale délivrer une mesure de protection dans une affaire de violence domestique. Une avocate a mentionné qu’elle ne connaissait qu’une seule affaire de violence domestique dans laquelle un juge du tribunal des affaires familiales avait ordonné à un homme de rester à l’écart du domicile familial pendant 20 jours.[58] Aucune des femmes et des filles interrogées par Human Rights Watch n’ont bénéficié de mesures de protection ordonnées par un tribunal.

Le projet de loi sur les violences faites aux femmes propose la création de « mesures protectrices » dans le code pénal pour les victimes.[59] Ces mesures pourraient inclure des mesures d’éloignement de l’accusé du domicile conjugal et l’interdiction des contacts avec la victime ou les enfants concernés ; l’envoi de la victime vers des refuges, des cliniques ou des soins psychologiques ; le désarmement de l’agresseur ; et l’interdiction pourl’accusé de jouir des biens communs de la famille. En cas de violation de la mesure de protection, la personne visée encourrait des sanctions monétaires ou des peines d’emprisonnement. Le projet de loi ne contient pas de proposition d’ amendements au code de procédure civile,  qui permettraient d’identifier plus clairement les ordonnances de protection comme des recours civils s’ajoutant à la possibilité d’ordonnances de protection pénales.

Les termes du projet de loi  employés pour les mesures protectrices pourraient représenter un pas vers la création d’un système d’ordonnances de protection. Toutefois, une plus grande précision serait nécessaire. Il est recommandable que le projet de loi autorise clairement des ordonnances de protection « civiles », qui seraient alors disponibles sans aucune procédure pénale, plutôt qu’il prévoitde les incorporer dans le code de procédure pénale. Le projet de loi devrait aussi distinguer entre les ordonnances de protection d’urgence (de courte durée) et les ordonnances de protection de longue durée , en fixant des limites de durée pour chaque type. Il devrait expliquer que les ordonnances de protection d’urgence peuvent être délivrées sur la base d’une déposition de la victime, sans autre élément de preuve, alors que les ordonnances de protection de longue durée  requièrent une audition et l’examen des preuves. Il devrait désigner les autorités compétentes pour délivrer ces ordonnances.

Nos recommandations :

  • Le projet de loi sur les violences faites aux femmes devrait conserver la disposition relative aux mesures de protection mais cette disposition doit être complétée
  • Le projet de loi devrait traiter des ordonnances de protection d’urgence  et de celles de longue durée, préciser les restrictions ou les conditions que ces ordonnances peuvent imposer et expliquer les procédures pour les deux types d’ordonnances. En accord avec le Manuel de l’ONU, il devrait autoriser les ordonnances de protection dans les procédures civiles comme pénales.  

Autres services et assistance pour les survivantes

Les États ont une obligation en matière de droits humains de garantir que les survivantes de violence domestique aient un accès rapide à un refuge, à des services de santé, à des conseils juridiques, à une assistance téléphonique, ainsi qu’à d’autres formes de soutien.[60] L’ONU recommande que ce soutien et ces services soient prévus et exigés par la loi et impliquent des organismes gouvernementaux, plutôt que d’être laissés aux seules ONG. Il est également recommandé que des lois obligent l’État à financer ces mesures.

Le Manuel  recommande d’adopter au moins les normes minimales en ce qui concerne la disponibilité de services d’appui aux plaignantes/survivantes (par exemple au moins un abri/foyer pour 10 000 habitants).[61] Il recommande également que la législation prévoit un accès à une assistance financière, telle que la mise à disposition de fonds ou d’une assistance sociale intégrée.[62] Enfin, l’ONU souligne l’importance de la coordination et des échanges entre les différents organismes traitant de la violence domestique, et recommande que la législation  encadre cette coordination. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a également publié des lignes directrices relatives à la réponse du système de santé aux violences faites aux femmes, et notamment la violence domestique.[63]

Au Maroc, des représentants d’ONG qui aident les survivantes de violence domestique ont indiqué que de nombreux services sont proposés uniquement par des organisations non gouvernementales et non par le gouvernement. Les refuges, par exemple, ne sont gérés que par des ONG, et seuls quelques-unsreçoivent un financement de la part du gouvernement. Human Rights Watch a connaissance d’un peu moins de dix refuges dans le pays qui acceptent des survivantes de violence domestique. Parmi les refuges que Human Rights Watch a visités, aucun n’avait de la place pour accueillir plus d’une soixantaine de femmes et d’enfants. Il n’existe aucune règlementation gouvernementale établissant les normes minimales pour les refuges gérés par des ONG.

Des représentants de refuges et d’ organisations de défense des droits des femmes ont expliqué à Human Rights Watch que la plupart des survivantes de violence domestique qui s’étaient tournées vers elles étaient revenues vers des partenaires violents parce qu’elles n’avaient pas les moyens de subsister ni de se loger. Une survivante de violence domestique accueillie dans un refuge a confié à Human Rights Watch que puisqu’elle n’avait aucun autre endroit où aller ni aucun moyen financier, elle se sentait obligée de retourner vers son mari violent après la limite de deux mois au refuge atteinte.[64]

Même si le Maroc propose quelques programmes d’assistance sociale (par exemple une aide financière pour les femmes divorcées indigentes), aucun n’est destiné spécifiquement aux survivantes de violence domestique. Même les pensions alimentaires ordonnées par les tribunaux après les divorces prennent fin au bout de trois mois, et les prestations à plus long terme destinées aux enfants sont souvent minimes, a indiqué une avocate à Human Rights Watch.[65]

En termes de services de santé, les survivantes de violence domestique et les défenseurs des droits des femmes ont également décrit des pratiques incohérentes. Des  représentants d’associations ont indiqué que si certains médecins interrogent les patientes à propos des violences familiales, la plupart ne le font pas, et très peu d’entre eux les dirigent ensuite vers d’autres services. Une survivante a déclaré à Human Rights Watch s’être rendue dans le même hôpital pendant sept ans alors que son mari la battait et qu’elle souffrait de dépression. Mais les médecins ne l’ont jamais redirigée vers le refuge se trouvant juste de l’autre côté de la rue, ni n’ont évoqué avec elle la possibilité de déposer une plainte au pénal.[66] D’autres survivantes ont fait part d’expériences positives, notamment une femme qui a indiqué que le personnel hospitalier l’avait bien traitée après que son mari lui a tailladé le bras, et que le médecin lui avait conseillé de s’adresser à la police.[67]

La présidente d’une association défendant les droits des femmes a expliqué que certains hôpitaux disposent d’un seul médecin légiste, et les heures destinées aux examens médico-légaux sont limitées. Les survivantes doivent parfois attendre plusieurs jours avant d’en bénéficier, particulièrement si les blessures ont été infligées durant le week-end.[68] Une survivante a déclaré qu’elle était allée chercher un certificat médical un samedi après que son mari l’a battue, mais que le médecin légiste n’était pas disponible avant le lundi suivant.[69]

Le Maroc a pris des mesures pour renforcer et coordonner la réponse des organismes publics aux violences contre les femmes et les enfants dans différents secteurs. En 2006 et 2007, les ministères de la Justice et de la santé, la Direction générale de la sûreté nationale et la Gendarmerie Royale ont initié la mise en place de cellules et d’unités pour assister les femmes et les enfants victimes de violences domestique dans les tribunaux, les hôpitaux et les postes de police. En 2010, le gouvernement a également mis en place des comités locaux et régionaux pour coordonner la réponse publique aux violences faites aux femmes.[70]

Néanmoins, les défenseurs des droits des femmes et les avocats ont affirmé à Human Rights Watch que certaines des cellules ou unités promises n’ont jamais vu le jour, et que celles qui existent sont bureaucratiques et inefficaces. On peut lire dans le rapport d’une ONG que ces cellules se limitent à remplir des papiers plutôt que de fournir des informations, des services ou uneprotection aux femmes victimes de violence.[71] Même un membre du gouvernement a critiqué publiquement certaines de ces unités. Le substitut du procureur du Tribunal de première instance d’Azilal a fait remarquer que les cellules judiciaires chargées des femmes et des enfants manquent de clarté en ce qui concerne leur mandat, et qu’elles présentent des problèmes de ressources humaines et de mauvaise coordination.[72]

En 2012, le ministère de la Santé a affirmé qu’il avait mis en place 76 unités pour les femmes et les enfants victimes de violence dans les hôpitaux, mais seules 23 d’entre elles étaient alors actives.[73] Selon l’UNICEF, les médecins n’ont pas régulièrement adressé les femmes victimes à ces unités.[74] La Stratégie du ministère de la Santé pour 2012-16 contient des points d’action pour l’amélioration de la réponse des services de santé aux femmes et aux enfants victimes de violence, notamment le renforcement et le développement des unités d’assistance ; le renforcement des capacités des professionnels de santé sur la violence basée sur le genre ; l’amélioration de la coordination entre les unités ; la diffusion plus large d’informations sur les unités spécialisées ; une évaluation continue ; et le développement de systèmes d'information informatisés.[75] Le projet de loi sur les violences faites aux femmes contient des dispositions sur les unités spécialisées dans les organismes chargés de la justice, de la santé, de la jeunesse, des femmes et des enfants, ainsi qu’au sein de la Direction générale de la sûreté nationale et de la Gendarmerie Royale. Le projet de loi appelle aussi les comités locaux, régionaux et nationaux à coordonner leur action sur les questions touchant les femmes et les enfants. De même, les amendements au projet de code de procédure pénale prévoient des cellules destinées aux femmes et aux enfants qui devraient assister les victimes de violence.[76] Ces dispositions sont des points positifs, mais les projets de lois devraient également inclure des mesures sur la formation du personnel, le contrôle des unités et la mise en œuvre de la responsabilité des autorités si elles omettent de remplir leurs obligations.

Nos recommandations :

  • Le projet de loi sur les violences faites aux femmes devrait définir plus précisément le rôle du gouvernement dans la prestation de soutien et de services aux survivantes de violence domestique, notamment concernant les refuges, les services de santé, les soins psychologiques, le conseil juridique, et l’assistance téléphonique.
  • Le projet de loi devrait constituer un fond d’affectation spéciale ou une autre sorte d’assistance financière pour les survivantes de violence domestique.
  • Le projet de loi devrait conserver les dispositions relatives à la coordination et aux unités spécialisées au sein des organismes gouvernementaux afin de traiter les violences contre les femmes et les enfants. Il devrait ajouter des dispositions sur la formation du personnel, le contrôle de l’efficacité et l’obligation pour ces unités  de rendre compte de leur action. 

Participation au processus de réforme

Les organisations non gouvernementales ont depuis longtemps fourni des services et du soutien aux survivantes de violence domestique au Maroc. Ces organisations de la société civile — et les survivantes elles-mêmes — se trouvent dans une excellente position pour contribuer à élaborer les réformes législatives sur la violence domestique. La Convention de l’ONU sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes comporte l’obligation pour les États de garantir aux femmes, sur un pied d’égalité avec les hommes, le droit de participer à la formulation des politiques gouvernementales et à leur mise en œuvre.[77]

Des représentants d'organisations de la société civile, notamment d’organisations de premier plan en matière dedroits des femmes, ont informé Human Rights Watch qu’elles n’avaient  pas été impliquées dans l’élaboration du projet de loi gouvernementale de 2013 portant sur les violences faites aux femmes. Étant donné que Human Rights Watch a été dans l’incapacité d’obtenir un rendez-vous avec le ministère de la Justice et des Libertés ainsi qu’avec celui de la Solidarité, de la femme, de la famille et du développement social, nous n’avons pu confirmer si le gouvernement avait sollicité ou non la contribution de la société civile. De nombreuses personnes représentant des ONG que nous avons interrogées ont expliqué qu’elles avaient travaillé sur une proposition de loi de la société civilesur les violences faites aux femmes, publiée en 2010, mais que le projet de loi officiel du gouvernement présente peu de ressemblance avec leur projet.[78] Des organisations œuvrant pour les droits des femmes, notamment Printemps de la dignité (une coalition d’organisations des droits des femmes) ont également critiqué le projet de loi de 2013, et ont publié un mémorandum de leurs préoccupations.[79]

Nous vous exhortons à prendre au sérieux les points de vue et les expériences des survivantes de violence domestique et des organisations représentatives dans les délibérations futures sur les réformes ou les projets de lois relatives aux violences faites aux femmes.

Nous vous remercions de votre temps ainsi que de l’attention portée à cette lettre. Nous apprécierons grandement la possibilité de nous entretenir avec vous à ce sujet. Nous espérons que nos commentaires seront utiles pour vos délibérations, et que nous pourrons œuvrer ensemble à promouvoir la sécurité et les droits des femmes.

Nous vous prions d’agréer, Vos Excellences, l’expression de notre respectueuse considération.

Liesl Gerntholtz

Directrice de la division des Droits des femmes
Human Rights Watch

 
 
 

Annexe : Ressources

ONU Femmes, « Manuel de législation sur la violence à l’égard des femmes », 2012,

  • En français :

http://www2.unwomen.org/~/media/headquarters/attachments/sections/library/publications/2012/12/unw_legislation-handbook_fr%20pdf.pdf?v=1&d=20141013T121502

Office de l’ONU contre la drogue et le crime (ONUDC), « Strengthening Crime Prevention and Criminal Justice Responses to Violence against Women », 2014, https://www.unodc.org/documents/justice-and-prison-reform/Strengthening_Crime_Prevention_and_Criminal_Justice_Responses_to_Violence_against_Women.pdf

ONUDC, « Manuel sur les réponses policières efficaces à la violence envers les femmes », 2010, en français : http://www.unodc.org/documents/justice-and-prison-reform/crimeprevention/Effective_police_responses_to_violence_against_women-French.pdf

Assemblée générale de l’ONU, Résolution A/RES/65/228, Renforcement des mesures en matière de prévention du crime et de justice pénale visant à combattre la violence à l’égard des femmes, annexe, « Stratégies et mesures concrètes types actualisées relatives à l’élimination de la violence contre les femmes dans le domaine de la prévention du crime et de la justice pénale», 2011,

ONU Femmes, « Manuel sur les plans nationaux de lutte contre la violence à l’égard des femmes », 2012,

Organisation mondiale de la Santé, « Responding to intimate partner violence and sexual violence against women, WHO clinical and policy guidelines », 2013, http://www.who.int/reproductivehealth/publications/violence/9789241548595/en/

Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, en français : https://rm.coe.int/CoERMPublicCommonSearchServices/DisplayDCTMContent?documentId=090000168008481d

Conseil de l’Europe, « Explanatory Report for the Council of Europe Convention on Preventing and Combatting Violence against Women and Domestic Violence », 2011, http://www.conventions.coe.int/Treaty/EN/Reports/Html/210.htm

ONU Femmes, Centre virtuel de connaissances pour mettre fin à la violence contre les femmes et les filles

http://www.endvawnow.org/fr/

Réseau juridique canadien VIH/sida, « Respect, Protect and Fulfill: Legislating for Women’s Rights in the Context of HIV/AIDS », Module 2: Violence domestique, 2009, http://www.aidslaw.ca/site/wp-content/uploads/2013/04/Vol1Module2_DomesticViolence.pdf

 

[1] Lettres de Human Rights Watch envoyées au ministère de la Solidarité, de la femme, de la famille et du développement social, au ministère de la Justice et des Libertés, au ministère de l’Intérieur, au ministère de la Santé et à la délégation interministérielle aux Droits de l'homme, le 31 août 2015.

[2] ONU Femmes, « Progress of the World’s Women: In Pursuit of Justice », 2011, http://www.unwomen.org/~/media/headquarters/attachments/sections/library/publications/2011/progressoftheworldswomen-2011-en.pdf (consulté le 1er février 2016).

[3] Voir par exemple les Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels de 2015, UN Doc. E/C.12/MAR/CO/4, http://tbinternet.ohchr.org/_layouts/treatybodyexternal/Download.aspx?symbolno=E%2fC.12%2fMAR%2fCO%2f4&Lang=en (consulté le 1er février 2016) para. 38 ; les observations finales de 2008 du Comité de l’ONU pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, UN Doc. No. CEDAW/C/MAR/CO/4, http://tbinternet.ohchr.org/_layouts/treatybodyexternal/Download.aspx?symbolno=CEDAW%2fC%2fMAR%2fCO%2f4&Lang=en (consulté le 1er février 2016) para. 21 ; et les observations finales de 2014 du Comité des droits de l’enfant de l’ONU, UN Doc. No. CRC/C/MAR/CO/3-4, http://tbinternet.ohchr.org/_layouts/treatybodyexternal/Download.aspx?symbolno=CRC%2fC%2fMAR%2fCO%2f3-4&Lang=en (consulté le 1er février 2016) para. 39(b) ; les observations finales de 2011 du Comité contre la Torture, UN Doc. No. CAT/C/MAR/CO/4, http://tbinternet.ohchr.org/_layouts/treatybodyexternal/Download.aspx?symbolno=CAT%2fC%2fMAR%2fCO%2f4&Lang=en, para. 23 (consulté le 1er février 2016).

[4] ONU Femmes, « Manuel de législation sur les violences à l’égard des femmes », 2012, http://www2.unwomen.org/~/media/headquarters/attachments/sections/library/publications/2012/12/unw_legislation-handbook_fr%20pdf.pdf?v=1&d=20141013T121502 (consulté le 1er février 2016).

[5] ONU Femmes, EndVAWNow.org (centre de ressources virtuel), « Definition of Domestic Violence », non daté, http://www.endvawnow.org/en/articles/398-definition-of-domestic-violence.html (consulté le 1er février 2016).

[6] Ibid.

[7] Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), « Strengthening Crime Prevention and Criminal Justice Responses to Violence against Women », 2014, https://www.unodc.org/documents/justice-and-prison-reform/Strengthening_Crime_Prevention_and_Criminal_Justice_Responses_to_Violence_against_Women.pdf, consulté le 1er février 2016) p. 39.

[8] Ibid, et Manuel de l’ONU, section 3.4.3.1. 

[9] Manuel de l’ONU, section 3.4.2.2.

[10] EndVAWNow.org, « Scope of Persons Protected by Law » http://www.endvawnow.org/en/articles/399-scope-of-persons-protected-by-law.html?next=400 (consulté le 1er février 2016).

[11] Manuel de l’ONU, section 3.11.2 et ONUDC, « Strengthening Crime Prevention and Criminal Justice Responses to Violence against Women », p. 40.

[12] Code pénal, arts. 413 et 414 (empoisonnement) et 404 (agression).

[13] Loi 103-13 (Projet de loi sur les violences faites aux femmes). L’article 1 définit plus précisément chacune de ces catégories, mais pas avec le degré de spécificité recommandé par l’ONU. Human Rights Watch a examiné la version 2013 de cette loi. Le gouvernement n’a rendu publique aucune mise à jour de la loi, et des organisations de la société civile affirment qu’il s’agit de la version la plus récente.

[14] Projet de loi sur les violences faites aux femmes, arts. 10, 12 et 13. Projet de loi sur le code pénal, art. 404 (agression), art. 407 (suicide assisté), art. 436-1 (enlèvement), et art. 427-1 (menaces d’agression). Le projet de code pénal ne définit pas non plus la « violence domestique », ni n’aborde la question du viol conjugal.

[15] Projet de loi sur les violences faites aux femmes, art. 14. Projet de loi sur le code pénal, art. 481-1 (empêcher une épouse de revenir chez elle), art. 503-2-1 (mariage forcé), art. 526-1 (dilapider de l’argent).

[16] Projet de loi sur les violences faites aux femmes, art. 14. Le projet de code pénal ne comporte pas de mentions supplémentaires relatives à l'abus de confiance, au détournement de biens et à la fraude.

[17] Projet de loi sur les violences faites aux femmes, l’art. 14 comportait un article supplémentaire afin d’amender l’article 404-1 du code pénal « Quiconque volontairement porte des coups ou fait des blessures ou perpètre tout autre type de violence ou de tort contre une femme enceinte, son épouse, ou son ancienne épouse en présence de ses enfants ou de ses parents. » Toutefois, le projet de code pénal ne comprend pas cet article supplémentaire, ni n’inclut « une ancienne épouse » à l’article 404 sur l’agression.

[18] Code pénal art. 489 (concernant les relations sexuelles entre personnes du même sexe), art. 490 (concernant les relations sexuelles entre personnes de sexe différent non mariées), et art. 491 (concernant l’adultère).

[19] Manuel de l’ONU, section 3.5.1.

[20] ONU Femmes, « Manuel sur les plans nationaux de lutte contre les violences à l’égard des femmes », 2012, http://www2.unwomen.org/~/media/headquarters/attachments/sections/library/publications/2012/7/handbooknationalactionplansonvaw-fr%20pdf.pdf?v=1&d=20141013T121502

(consulté le 1er février 2016). Voir également ONUDC, « Strengthening Crime Prevention and Criminal Justice Responses to Violence against Women », pp. 88-90.

[21] « The observatory on the image of women in the media finally sees the light in Morocco », Hespress, 19 juin 2015, http://www.hespress.com/femme/267385.html (consulté le 1er février 2016).

[22] Ministère de la Solidarité, de la femme, de la famille et du développement social, « Observatoire national des violences à l'égard des femmes », août 2014, http://bit.ly/1OKu7kM (consulté le 1er février 2016).

[23] Voir référence de 2002 à la stratégie nationale sur les violences faites aux femmes dans les rapports d’État combinés du Maroc au Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, 18 septembre 2006, CEDAW/C/MAR/4,  http://tbinternet.ohchr.org/_layouts/treatybodyexternal/Download.aspx?symbolno=CEDAW%2fC%2fMAR%2f4&Lang=en (consulté le 1er février 2016).

[24] Projet de loi sur les violences faites aux femmes, arts. 2-9.

[25] Manuel de l’ONU, section 3.8.1

[26] ONUDC, « Strengthening Crime Prevention and Criminal Justice Responses to Violence against Women », p. 57.

[27] Manuel de l’ONU, section 3.8.2.

[28] ONUDC, « Strengthening Crime Prevention and Criminal Justice Responses to Violence against Women », p. 65.

[29] Ibid., p. 76.

[30] Entretien de Human Rights Watch avec Sadiya (pseudonyme), Rabat, 17 septembre 2015. 

[31] Entretien de Human Rights Watch avec Shayma (pseudonyme), Rabat, 17 septembre 2015.

[32] Entretien de Human Rights Watch avec Safaa (pseudonyme), Casablanca, 16 septembre 2015.

[33] Correspondance électronique de Human Rights Watch avec Stéphanie Willman-Bordat, cofondatrice de Mobilizing Rights Associates, 8 janvier 2016.

[34] Entretien de Human Rights Watch avec Najat Razi, militante des droits des femmes et membre d’Oyounne Nissaiya, Casablanca, 11 septembre 2015.

[35] Entretien de Human Rights Watch avec Najat Ikhich, Fondation Ytto, Casablanca, 11 septembre 2015.

[36] Manuel de l’ONU, sections 3.9.2 et 3.9.3.

[37] Ibid., section 3.9.2 (sur une procédure sans retard et rapide) et 3.2.5 (sur les tribunaux spécialisés).

[38] Ibid., section 3.9.5.

[39] ONUDC, « Strengthening Crime Prevention and Criminal Justice Responses to Violence against Women », pp. 71-72.

[40] Entretiens individuels de Human Rights Watch avec les avocates Zahia Amoumou et Fatima Zahra Chaoui, et l’avocat Mohamed al-Mon, Rabat et Casablanca, septembre 2015 et 2014.

[41] Entretien de Human Rights Watch avec Fatima Zohra Chaoui, avocate et présidente de l’Association Marocaine de lutte contre les violences à l’égard des Femmes, Casablanca, 18 septembre 2015.

[42] Entretien de Human Rights Watch avec l’avocat Mohammed al-Mon, Rabat, septembre 2014.

[43] Projet de loi sur les violences faites aux femmes, art. 17.

[44] Code pénal, art. 400.

[45] Code pénal, art. 401.

[46] Code pénal, art. 402.

[47] Projet de code pénal, art. 400.

[48] Projet de code pénal, art. 401.

[49] Organisation mondiale de la santé, « Understanding and addressing violence against women: Intimate Partner Violence », pp.5-6, http://apps.who.int/iris/bitstream/10665/77432/1/WHO_RHR_12.36_eng.pdf (consulté le 1er février 2016) et Rolf Gainer, « Domestic violence, brain injury and psychological trauma », Neurological Rehabilitation Institute at Brookhaven hospital, 30 décembre 2015, (consulté le 1er février 2016), http://www.traumaticbraininjury.net/domestic-violence-brain-injury-and-psychological-trauma/.

[50] Conseil national des droits de l’homme , « Forensic activities in Morocco: Need for comprehensive reform », juillet 2013, http://www.cndh.ma/an/node/20867 (consulté le 1er février 2016).

[51] Entretien de Human Rights Watch avec Zahia Amoumou, avocate, Casablanca, 18 septembre 2015.

[52] Entretien de Human Rights Watch avec Khadija (pseudonyme), Oujda, 21 septembre 2015.

[53] Manuel de l’ONU, section 3.10.1.

[54] EndVAWNow.org, « Time Limits on Protection Orders », non daté, http://www.endvawnow.org/en/articles/416-time-limits-on-protection-orders.html?next=417 (consulté le 1er février 2016).

[55] Voir EndVAWNow, « Content of post-hearing orders for protection », non daté, http://www.endvawnow.org/en/articles/414-content-of-post-hearing-orders-for-protection.html?next=415 (consulté le 1er février 2016) et Manuel de l’ONU, section 3.10.3.

[56] EndVAWNow, « Content of post-hearing orders for protection. »

[57] Code de procédures criminelles, arts. 82-4 à 82-10.

[58] Entretien de Human Rights Watch avec Fatima Zohra Chaoui, 18 septembre 2015.

[59] Projet de loi sur les violences faites aux femmes, chapitre III.

[60] Assemblée générale de l’ONU, Résolution A/RES/65/228, Renforcement des mesures en matière de prévention du crime et de justice pénale visant à combattre les violences à l’égard des femmes, annexe,      « Stratégies et mesures concrètes types actualisées relatives à l’élimination de les violences contre les femmes dans le domaine de la prévention du crime et de la justice pénale », 2011, http://www.unodc.org/documents/justice-and-prison-reform/crimeprevention/65_228_French.pdf

(consulté le 1er février 2016) ; Comité CEDAW, Recommandation générale No. 19, Violence contre les femmes, (Onzième session, 1992), art. 24, http://tbinternet.ohchr.org/Treaties/CEDAW/Shared%20Documents/1_Global/INT_CEDAW_GEC_3731_E.pdf (consulté le 1er février 2016); CESCR, Observation générale No.16 (2005), Questions de fond concernant la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels : le droit égal qu'ont l'homme et la femme au bénéfice de tous les droits économiques, sociaux et culturels (art. 3 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels), UN Doc E/C.12/2005/4 (11 août 2005), para. 27.

[61] Manuel de l’ONU, section 3.6.1.

[62] Ibid., section 3.6.5.

[63] Voir Organisation mondiale de la Santé, « Responding to intimate partner violence and sexual violence against women, WHO clinical and policy guidelines », 2013, http://www.who.int/reproductivehealth/publications/violence/9789241548595/en/ (consulté le 1er février 2016).

[64] Entretien de Human Rights Watch avec Khadija (pseudonyme), Oujda, 21 septembre 2015.

[65] Entretien de Human Rights Watch avec Fatima Zohra Chaoui, présidente de l’Association Marocaine de lutte contre les Violences à l’égard des Femmes, septembre2014.

[66] Entretien de Human Rights Watch avec Amina (pseudonyme), Oujda, 21 septembre 2015.

[67] Entretien de Human Rights Watch avec Jihan (pseudonyme), province d’El Jadida, 15 septembre 2015.

[68] Entretien de Human Rights Watch avec Fatima Zohra Chaoui, 18 septembre 2015.

[69] Entretien de Human Rights Watch avec Leila (pseudonyme), Casablanca, 16 septembre 2015.

[70] Ministère de la Solidarité, de la femme, de la famille et du développement social, « Report of the Kingdom of Morocco through its participation in the works of 57th session of the Commission on the Status of Women on the outcome and prospects of the Promotion of equality and combating violence against women in Morocco », mars 2013, http://www.social.gov.ma/sites/default/files/Promoting%20gender%20equality%20and%20combating%20violenc%20against%20women.pdf (consulté le 1er février 2016).

[71] Voir « Morocco’s Implementation of Accepted UPR Recommendations on Women’s Rights, Submitted by The Advocates for Human Rights and MRA Mobilising for Rights Associates », juin 2014, http://www.theadvocatesforhumanrights.org/uploads/morocco_human_rights_council_women_s_rights_june_2014_english.pdf (consulté le 1er février 2016).

[72] « The experience of cells providing for women and children victims of violence », Legal Agenda, Anas Saadoun, mars 2015, http://www.legal-agenda.com/article.php?id=1026&lang=ar (consulté le 1er février 2016).

[73] Ministère de la Santé, Stratégie du ministère de la Santé pour 2012-16, mars 2012, pp.51-52, http://www.sante.gov.ma/Docs/Documents/secteur%20sant%C3%A9.pdf (consulté le 1er février 2016).

[74] Entretien de Human Rights Watch avec une personne représentant l’UNICEF, Rabat, 10 septembre 2015.

[75] Stratégie du ministère de la Santé pour 2012-16, pp.55-56.

[76] Projet de code de procédure pénale, art. 82-5-1.

[77] CEDAW, art. 7.

[78] « Non-governmental organization propose a special law on gender-based family violence », mars 2010, http://www.mrawomen.ma/sites/default/files/ressources/Les_reformes_legislatives_nationales/Morocco_VAW_-_arabic__12.8.10.pdf (consulté le 1er février 2016).

[79] Association Démocratique des Femmes du Maroc, « Communiqué du mouvement des femmes au sujet du projet de Loi 103.13 sur la ‘Lutte contre les violences faite aux femmes’ », Casablanca, 6 novembre 2013, http://www.adfm.ma/spip.php?article4670&lang=fr (consulté le 1er février 2016). 

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