Si la promotion des droits des femmes comme élément incontournable de la vie publique et politique est une conquête indéniable des mouvements féministes, le degré selon lequel ces droits sont respectés ou violés est lui beaucoup moins clair. Qu’une femme jouisse effectivement de ses droits dépend de nombreuses variables : si elle est autochtone ou non, issue d’une zone rurale ou urbaine, lesbienne, transgenre, ou dotée d’autres identités plurielles. Un autre facteur déterminant est de savoir si elle vit dans un pays où l’état de droit et les principes fondamentaux de la démocratie sont respectés.
A l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, le 25 novembre, il est bon de se pencher – de manière générale mais aussi spécifique – sur les progrès et les reculs enregistrés dans certains pays. Cette analyse montrera l’importance du rôle que jouent les garanties démocratiques.
Plusieurs pays dotés de structures gouvernementales autoritaires offrent de puissants exemples de ce que peut être le déni des droits des femmes : les politiques gouvernementales autoritaires de la Chine qui traitent les femmes comme des « utérus » pour des avortements ou des grossesses forcés en fonction des « besoins » démographiques perçus ; les Talibans qui privent les femmes et les filles de l’accès à l’éducation, au travail et aux libertés fondamentales en Afghanistan ; ou encore la police des mœurs en Iran, qui punit les femmes qui ne portent pas le hijab, une mesure qui affecte pratiquement tous les aspects de la vie publique des femmes.
Aujourd’hui, le Qatar est sous le feu des projecteurs en raison de la Coupe du monde. Les lois, politiques et usages qataris ont pour conséquence que l’autonomie des femmes est largement contrôlée par un tuteur masculin dont la permission est exigée pour nombre de décisions. Les femmes ont besoin d’une autorisation pour se marier. Les femmes célibataires qataries de moins de 25 ans doivent demander la permission pour se rendre à l’étranger. Les femmes mariées sont tenues d’obtenir le feu vert de leur mari pour accéder à des services de santé reproductive tels que l’avortement ou la stérilisation.
Toutes les femmes doivent avoir l’autorisation de leur tuteur masculin pour obtenir des bourses d’études du gouvernement. Et même à l’université d’État du Qatar, où règne la ségrégation sexuelle, on ne s’affranchit pas du système de tutelle : les étudiantes doivent demander la permission pour se rendre au campus en taxi, vivre dans un logement étudiant ou participer à des voyages en rapport avec leurs études.
Bien sûr, les femmes sont également victimes de discrimination dans les pays où les protections démocratiques fonctionnent. Ici au Mexique, le nombre croissant de féminicides, l’impunité pour ce type de violence et l’absence de mesures pour protéger les femmes les plus exposées à la violence, comme les femmes handicapées, illustrent l’incapacité de notre démocratie à relever ces défis structurels.
Plus les garde-fous sont solides, mieux les droits des femmes fonctionnent. Les luttes menées dans le monde entier renforcent la corrélation entre la défense d’une démocratie saine et la lutte pour les droits des femmes. Dans leur pluralité et leur diversité, les mouvements féministes luttent contre les reculs sur le front de la reconnaissance, de la garantie et de la protection des droits des femmes. Les femmes connaissent les risques – le prix à payer pour se faire entendre – mais aussi la force qui émane de la coordination et de la solidarité mondiales de leurs mouvements.
Les mouvements féministes latino-américains, connus sous le nom de « marée verte », illustrent le puissant impact d’une synergie bien orchestrée. Il en va de même du mouvement mondial de sororité qui s’est uni pour protester contre la mort de Mahsa Amini aux mains de la police des mœurs iranienne. Cette force féministe rejette l’autoritarisme, défend la démocratie, revendique des droits et dénonce les abus et la violence à l’égard des femmes et des filles du monde entier.
La Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes nous invite à nous mobiliser contre la violence à l’égard des femmes et à soutenir les mouvements féministes, comme ceux qui ont critiqué la FIFA pour avoir choisi le Qatar comme pays hôte de la Coupe du monde. Alors que tous les regards sont tournés vers le Qatar du fait de la Coupe du monde, les membres de la communauté internationale devraient saisir cette occasion pour exiger du Qatar qu’il respecte l’égalité des sexes en mettant fin au système de tutelle masculine et en permettant aux femmes de se marier, de voyager, d’étudier et d’accéder aux services de santé reproductive sans interférence.
Sous nos latitudes, le Mexique devrait s’attaquer à son propre problème de féminicide, notamment en menant des enquêtes et en poursuivant tous les meurtriers présumés. Particulièrement quand le progrès n’est pas linéaire et fait marche arrière, nous devrions soutenir nos sœurs qui réclament sécurité et droits afin d’empêcher les gouvernements de faire marche arrière et de s’assurer qu’ils continuent à aller de l’avant pour élargir la protection des droits des femmes.
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