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Les États-Unis ont fait preuve d’hypocrisie honteuse en expulsant des Haïtiens

L’administration Biden devrait mettre fin aux dangereuses expulsions vers Haïti

Des habitants de la commune de Tabarre, située dans l’est de la capitale d’Haïti, Port-au-Prince, ayant fui leurs domiciles face à la violence des gangs armés, s’étaient rassemblés devant l'ambassade américaine à Port-au-Prince, le 25 juillet 2023. © 2023 Odelyn Joseph/AP Photo

Le 30 août, l’ambassade des États-Unis à Port-au-Prince a appelé tous les citoyens américains à quitter Haïti « dès que possible » en raison de la situation sécuritaire qui se dégradait dans le pays. Mais le lendemain, des agents des services de l'immigration et des douanes des États-Unis ont embarqué de force 57 personnes haïtiennes à bord d’un avion pour les expulser vers Haïti.

On peut se demander si ce même avion, après avoir servi à déporter des Haïtiens hors des États-Unis, s’est rempli de citoyens américains évacuant ce pays jugé trop dangereux pour qu’ils y demeurent.

Human Rights Watch a récemment publié un rapport documentant l’augmentation dramatique des meurtres, des enlèvements et des violences sexuelles en Haïti depuis janvier.

Pourtant, les responsables des États-Unis savent depuis longtemps qu’Haïti n’est pas un pays sûr. Déjà en 2010, le Secrétaire à la sécurité intérieure des États-Unis avait accordé aux citoyens originaires de Haïti le « statut de protection temporaire » (temporary protected status, TPS), qui depuis a été étendu et réattribué à plusieurs reprises. Le TPS interdit aux États-Unis d’expulser des personnes vers un pays où certaines conditions temporaires empêchent les ressortissants de retourner en sécurité. Le 4 février 2023, l’actuel Secrétaire à la sécurité intérieure a désigné à nouveau Haïti pour le TPS, déclarant que « Haïti connaît des conditions extraordinaires et temporaires découlant d’une grave insécurité et de la criminalité de bandes organisées, ainsi que des conditions socio-économiques et humanitaires, notamment liées à des catastrophes environnementales aggravant l’insécurité alimentaire ».

Qu’est-ce qui distingue les ressortissants haïtiens vivant aux États-Unis qui ne peuvent pas être expulsés, parce qu’ils bénéficient du TPS, des 57 personnes qui ont été expulsées jeudi ?  Réponse : une date butoir. Les Haïtiens qui sont arrivés après la date de la désignation du statut TPS, le 4 février 2023, peuvent être expulsés.

Les Haut-commissariats des Nations Unies pour les réfugiés et aux droits de l’homme – ainsi que le principe de non-refoulement du droit international – ne font aucune distinction de ce type. Le 3 novembre 2022, le Haut-commissaire pour les réfugiés a appelé tous les gouvernements à « ne pas renvoyer de force les Haïtiens vers ce pays extrêmement fragile ». Le lendemain, le haut-Commissaire aux droits de l’homme a affirmé que « les violations systématiques des droits en Haïti ne permett[ai]ent pas actuellement le retour sûr, digne et durable des Haïtiens dans le pays ».

Il est déconcertant de constater que l’administration Biden semble être si préoccupée d’expulser les Haïtiens arrivés après le 4 février qu’elle omet de tenir compte d’une part de sa propre alerte adressée aux Américains pour qu’ils quittent Haïti, et d’autre part de la protection accordée aux Haïtiens présents aux États-Unis avant cette date.  

Des personnes ont été forcées à retourner dans un pays jugé trop dangereux pour que les Américains y demeurent, ou pour que d’autres ressortissants de ce pays y soient renvoyées, uniquement à cause de leur date d’arrivée aux États-Unis. cela ne va pas seulement contre le sens commun, c’est aussi mettre leur vie en danger.

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