(Beyrouth) – Le 27 mai, les autorités égyptiennes ont emprisonné un éminent dirigeant de l’opposition politique, Ahmed al-Tantawi, après qu’une cour d’appel a confirmé une peine d’un an de prison à son encontre et à celle de plus d’une vingtaine de ses partisans, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Tantawi a été arrêté dans la salle d’audience du tribunal, immédiatement après la lecture du verdict.
Le tribunal a également confirmé la décision d’interdire à Tantawi de se porter candidat à des élections nationales pendant cinq ans. Le 6 février, un tribunal égyptien avait condamné Tantawi ainsi que son conseiller de campagne, Mohammad Abu al-Dyar, et 21 de ses partisans à un an de prison, suite à sa campagne pacifique visant à recueillir des soutiens publics pour se présenter à l’élection présidentielle de décembre 2023. Tantawi et son conseiller de campagne avaient été libérés contre une caution de 20 000 livres égyptiennes (environ 648 dollars US, ou 596 euros), durant la période d’appel.
« Punir Ahmed al-Tantawi et ses partisans pour avoir défié le président Abdel Fattah al-Sissi révèle une fois de plus la tolérance zéro des autorités envers l’activisme pacifique », a déclaré Adam Coogle, directeur adjoint de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch. « Les autorités égyptiennes au plus haut niveau devraient immédiatement réexaminer cette affaire, et libérer Tantawi ainsi que ses partisans. »
Les autorités n’ont pas révélé le lieu de détention de Tantawi, mais une source qui suit cette affaire a déclaré à Human Rights Watch que le 30 mai, sa famille a appris qu’il est détenu dans la Prison du 10-Ramadan à l’est du Caire, dans le gouvernorat d’al-Sharqia. Quant à Mohammad Abu al-Dyar, il été arrêté le 3 juin, dans la salle d’audience du tribunal où sa peine de prison a été confirmée.
Le verdict du tribunal à l’encontre de Tantawi est entièrement fondé sur son activisme politique pourtant pacifique, notamment sur les efforts de sa campagne pour recueillir des déclarations de soutien avant l’élection présidentielle de décembre 2023. À l’issue de ce scrutin, le président Sissi a remporté un troisième mandat de six ans avec 89,6 % des voix, en l’absence d’une véritable concurrence. Tantawi et ses partisans ont été accusés d’avoir imprimé et distribué des déclarations de soutien non officielles. Le 8 octobre 2023, la campagne de Tantawi avait diffusé en ligne ces formulaires de soutien non officiels, encourageant les partisans de Tantawi à les remplir en ligne afin de prouver l’étendue du soutien dont il bénéficiait à travers le pays ; les autorités ont ensuite qualifié cette action d’infraction électorale.
Human Rights Watch a précédemment documenté des dizaines d’arrestations illégales, de poursuites judiciaires et d’actes d’intimidation visant des candidats potentiels et leurs partisans avant le scrutin présidentiel, ce qui a empêché toute compétition significative. À partir de mars 2023, suite à l’annonce par Tantawi de son intention de se présenter comme candidat, les autorités égyptiennes ont arrêté et poursuivi des dizaines de ses partisans, ainsi que des membres de sa famille et des personnes suspectées de le soutenir.
La loi égyptienne n° 45 de 2014, portant sur l’exercice des droits politiques, prévoit un minimum d’un an de prison et/ou une amende de 1 000 à 5 000 livres égyptiennes (environ 32-162 dollars US, ou 29-149 euros ) pour « l’impression ou la distribution, de quelque manière que ce soit, de bulletins de vote ou de documents utilisés dans le processus électoral » sans autorisation. Toutefois, l’utilisation de cette loi pour restreindre la capacité des militants à recueillir des déclarations de soutien ou des soutiens dans le cadre d’une campagne politique est incompatible avec les droits à la liberté d’expression et d’association en vertu du droit international des droits humains, a déclaré Human Rights Watch.
Toutes les personnes arrêtées sans preuve crédible d’une véritable infraction devraient être libérées immédiatement et sans condition, a déclaré Human Rights Watch.
« Les peines de prison visant à dissuader toute dissidence pacifique constituent un élément essentiel de la répression systématique menée par le gouvernement égyptien contre les militants politiques et les détracteurs pacifiques », a déclaré Adam Coogle.
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