Comme les lecteurs de cette newsletter le savent bien, la situation des droits humains en Afghanistan est épouvantable et le pays fait face à une catastrophe humanitaire.
Les autorités pakistanaises en sont sans aucun doute bien conscientes. Pourtant, elles ont malgré tout forcé des réfugiés afghans à retourner en Afghanistan.
En janvier, le ministère de l'Intérieur pakistanais a annoncé que les Afghans sans titres de séjour officiels devaient quitter les villes d'Islamabad et de Rawalpindi sous peine d'expulsion. Même les Afghans en possession de documents en ordre, censés leur permettre de rester au Pakistan, comme la carte de preuve d'enregistrement, doivent partir avant le 30 juin.
Ce n’est que la dernière d'une série de mesures prises par les autorités pakistanaises contre les réfugiés afghans.
Une précédente vague de déportations et d'expulsions, de septembre 2023 à janvier 2024, avait déjà contraint plus de 800 000 Afghans à retourner en Afghanistan. Beaucoup d'entre eux étaient en fait nés au Pakistan ou y vivaient depuis des dizaines d’années.
La police pakistanaise a mené des descentes dans des maisons, frappé et arrêté arbitrairement des personnes et confisqué leurs documents y compris des permis de séjour. Elle a exigé des pots-de-vin pour permettre aux Afghans de rester au Pakistan.
Ces abus semblent délibérément prévus pour contraindre les réfugiés afghans à partir. La plupart des Afghans qui sont retournés en Afghanistan ont invoqué la crainte d'être détenus par les autorités pakistanaises comme raison de leur départ.
Lorsqu'ils arrivent en Afghanistan, ils sont plongés dans la situation désastreuse qui y règne sous le régime des talibans.
Les perspectives pour les femmes et les filles sont plus que sombres. Les talibans ont interdit aux filles et aux femmes de poursuivre leurs études au-delà de la sixième , les empêchent d'accéder à de nombreux emplois et restreignent leurs déplacements en public. Une femme ne peut pas quitter sa maison sans être accompagnée d'un homme de sa famille.
Mais les femmes et les filles ne sont pas les seules à être en difficulté. L'économie est en ruine, le chômage est généralisé et le système de santé s'est effondré. Plus de 22 millions d'Afghans, soit près de la moitié de la population, ont besoin d'une aide alimentaire d'urgence et d'autres formes d'assistance. Quelque 3,5 millions d’enfants souffrent de malnutrition aiguë.
Parallèlement, le niveau de l'aide étrangère est en chute.
Les Afghans qui ont occupé des postes gouvernementaux ou d'autres fonctions importantes sont particulièrement menacés s'ils sont renvoyés. Ils encourent un risque important d'être persécutés, torturés ou tués. Les renvoyer enfreindrait probablement les obligations du Pakistan en vertu du droit international.
Les autorités pakistanaises sont sans doute au courant de tout cela, et pourtant, elles ne font qu'accroître la pression sur les réfugiés afghans pour qu'ils rentrent chez eux.
Le Pakistan n'est évidemment pas le seul pays à ignorer la réalité de l'Afghanistan. L'Allemagne et d'autres pays ont également mis des Afghans en danger en les expulsant vers l'Afghanistan. C'est scandaleux et inadmissible.
Mais les chiffres que nous observons actuellement au Pakistan sont énormes. Quelque 800 000 réfugiés afghans ont été contraints de retourner en Afghanistan lors de la dernière campagne du Pakistan.
Qui sait combien de centaines de milliers d'autres seront pris dans cette nouvelle vague si les dirigeants pakistanais ne changent pas de cap.