(Rabat) – Les autorités marocaines en 2013 ont promis plus d’améliorations des droits humains qu'elles n’en ont réalisées, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui dans son Rapport mondial 2014. Les tribunaux ont condamné des dissidents à des peines de prison à la suite de procès inéquitables, la police a fait un usage excessif de la force pour disperser des manifestations pacifiques et dans le territoire contesté du Sahara occidental, les autorités ont réprimé les partisans de l'autodétermination.
Au cours des deux ans et demi qui se sont écoulés depuis que le Maroc a approuvé une nouvelle constitution, le gouvernement n’a adopté aucune législation pour donner force de loi aux fortes protections des droits humains de la constitution. Le projet lancé par le roi Mohammed VI en 2009 pour réformer le système judiciaire et renforcer son indépendance n’a jusqu'ici produit que des recommandations émanant d’une haute commission. Des peines de prison pour délits d'expression sont toujours inscrites dans le code de la presse, en dépit d'un engagement pris il y a deux ans par le ministre de la Communication à tâcher de les supprimer. Un projet de loi de 2006 qui protègerait pour la première fois les travailleurs et travailleuses domestiques n'a pas encore été adopté.
« Quand il s'agit des droits humains, le Maroc ressemble à un vaste chantier où les autorités annoncent à grand bruit de vastes projets, mais retardent ensuite la finition des fondations », a déclaré Sarah Leah Whitson, directrice de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord.
Dans son Rapport mondial 2014 (24ème rapport annuel, dont la version anglaise compte 667 pages), Human Rights Watch résume les pratiques en matière de droits humains dans plus de 90 pays. Les massacres massifs de civils en Syrie ont suscité un sentiment d’horreur, mais peu d’actions ont été engagées par les leaders mondiaux pour y mettre fin, a indiqué Human Rights Watch. La doctrine de la « responsabilité de protéger », qui a connu un regain de popularité, semble avoir empêché des atrocités de masse dans certains cas en Afrique. Les majorités au pouvoir en Égypte et dans d’autres pays ont étouffé les voix dissidentes, et ont réprimé les droits des minorités. Le rapport examine aussi les révélations d’Edward Snowden sur les programmes de surveillance américains, et leurs répercussions à l’échelle internationale.
Les Marocains et leur société civile dynamique ont cependant bénéficié d’une certaine liberté de critique et de protestation contre les politiques du gouvernement en 2013 – tant qu’ils ont évité les sujets sensibles de la monarchie - d’une manière générale et plus particulièrement en ce qui concerne le roi et la famille royale - ainsi que de l'islam et de la revendication du Maroc sur le Sahara occidental. Les autorités ont coopéré avec des experts en droits humains des Nations Unies qui ont visité le pays et le Sahara occidental, mais ont rejeté une proposition des États-Unis d'élargir le mandat de l'opération de maintien de la paix des Nations Unies dans ce territoire pour y inclure l'observation des droits humains.
Les tribunaux marocains ont condamné des accusés dans des affaires politiquement sensibles sur la seule base de leurs aveux, sans enquêter sur les plaintes selon lesquelles la police a extorqué les aveux sous la torture et les mauvais traitements. En février, le tribunal militaire de Rabat a condamné 25 accusés sahraouis à des peines de prison, allant pour la plupart de 20 ans à la prison à vie pour leur participation présumée à de violents affrontements dans le camp de protestation de Gdeim Izik au Sahara occidental deux ans plus tôt. Ces affrontements ont coûté la vie à 11 membres des forces de sécurité.
Le Roi Mohammed VI devrait tenir les promesses qu'il a faites en 2013 de soutenir la cessation des procès militaires de civils et la réforme du système d'examen des demandes d’asile. Les autorités devraient également s'assurer que des lois soient adoptées pour donner force légale aux droits constitutionnels. Cela comprend l'article 133 de la Constitution, qui accorde le droit à toute personne comparaissant devant un tribunal marocain de contester la constitutionnalité des lois que les autorités appliquent dans leur affaire.