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Violations du droit international et crimes commis le 7 octobre 2023

  1. Quelles sont les violations du droit humanitaire international et les crimes internationaux graves qui ont été commis le 7 octobre ?
  2. Quelles sont les recherches menées par Human Rights Watch pour déterminer les violations du droit international lors de l’assaut du 7 octobre ?
  3. Combien de personnes ont-elles été tuées lors de l’assaut du 7 octobre ?
  4. Les abus commis par des groupes armés palestiniens contre des soldats israéliens ont-ils été examinés par Human Rights Watch ?
  5. Quelles violations du droit international humanitaire et quels crimes internationaux graves Human Rights Watch a-t-il documentés à Gaza depuis l’assaut du 7 octobre ?

Les responsables

  1. Quels sont les groupes armés palestiniens qui ont participé à l’assaut du 7 octobre ?
  2. Qui est légalement responsable des violations du droit de la guerre commises par des groupes armés liés à des mouvements politiques ?
  3. Quel rôle ont joué les civils de Gaza qui sont entrés en Israël lors de l’assaut du 7 octobre ?
  4. Quelles armes les combattants palestiniens ont-ils utilisées lors de leurs attaques contre les communautés israéliennes ?

Objectifs du rapport de Human Rights Watch

  1. Quels sont les objectifs du rapport de Human Rights Watch ?

Les otages

  1. Combien d’otages les groupes armés palestiniens ont-ils emmenés à  Gaza?
  2. Qu’est-ce que la prise d’otages au regard du droit international humanitaire ?
  3. Quel droit humanitaire international s'applique aux otages ?

Violence sexuelle et sexospécifique

  1. Quelles ont été les principales observations de Human Rights Watch concernant les violences sexuelles et sexospécifiques commises le 7 octobre ?
  2. Comment Human Rights Watch a-t-il enquêté sur les allégations de violences sexuelles et sexospécifiques ?
  3. Human Rights Watch a-t-il interrogé des survivantes ou des témoins de viol ?
  4. Dans quelle mesure les violences sexuelles et sexospécifiques étaient-elles généralisées le 7 octobre ?

Préparation de l'armée israélienne avant l'assaut du 7 octobre

  1. Human Rights Watch a-t-il examiné l’état de préparation de l’armée israélienne avant le 7 octobre ou sa réponse à l’assaut ?

Réponses des autorités

  1. Qu’a déclaré le Hamas à propos des conclusions de Human Rights Watch ?
  2. Qu’a déclaré Israël à propos des conclusions de Human Rights Watch ?

Enquêtes internationales

  1. Quelles sont les instances internationales qui enquêtent sur l’assaut du 7 octobre ? 

Violations du droit international et crimes commis le 7 octobre 2023

  1. Quelles sont les violations du droit humanitaire international et les crimes internationaux graves qui ont été commis le 7 octobre ?

Les recherches de Human Rights Watch ont révélé que les groupes armés palestiniens impliqués dans l’assaut contre Israël du 7 octobre 2023 ont commis de nombreuses violations du droit international humanitaire – les lois de la guerre – qui constituent des crimes de guerre. Il s’agit notamment d’attaques délibérées et indiscriminées contre des civils et des biens de caractère civil ; d’homicides volontaires de personnes en détention ; de traitements cruels et autres traitements inhumains ; de crimes impliquant des violences sexuelles et sexistes ; de prises d'otage ; de mutilations et de spoliations (vol) de corps ; d’utilisation de boucliers humains ; et de saccage et de pillage. 

Human Rights Watch a également constaté que les groupes armés palestiniens avaient commis des attaques généralisées dirigées contre une population civile, à un niveau qui correspond à la définition pour être qualifiés de crimes contre l'humanité. Cette qualification est basée sur le grand nombre de sites civils qui ont été ciblés et sur la planification documentée par Human Rights Watch de ces crimes. Human Rights Watch a en outre constaté que le meurtre de civils et la prise d'otages étaient tous des objectifs centraux de l’assaut planifié, et non des actions survenues après coup, ou comme un plan qui a mal tourné, ou comme des actes isolés, par exemple uniquement par les actions de Palestiniens non affiliés de Gaza, et en tant que tel, il existe des preuves solides d'une politique organisationnelle visant à commettre de multiples actes de crimes contre l'humanité.

Selon le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, une attaque dirigée contre une population civile est définie comme un comportement consistant en la commission multiple d'actes de crimes contre l'humanité, tels que le meurtre ou l'emprisonnement illégal, en application ou dans la poursuite de la politique d’un État ou d’une organisation ayant pour but une telle attaque.

Human Rights Watch conclut que le meurtre de civils et la prise d'otages – emprisonnement en violation des règles fondamentales du droit international – le 7 octobre 2023, faisaient partie de l’assaut et constituaient des crimes contre l'humanité.

Human Rights Watch appelle à une enquête sur d'autres crimes potentiels contre l'humanité, notamment les persécutions contre tout groupe identifiable pour des raisons raciales, nationales, ethniques ou religieuses ; le viol ou toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable ; et l'extermination. Ceux-ci constitueraient des crimes contre l’humanité si les actes constitutifs de ces crimes étaient commis dans le cadre d’une « attaque » dirigée contre une population civile.

Ce rapport ne couvre que les abus commis le 7 octobre, il n'a pas examiné les abus commis lors des événements ultérieurs, notamment le traitement des otages à Gaza.

  1. Quelles ont été les recherches menées par Human Rights Watch pour déterminer les violations du droit international lors de l’assaut du 7 octobre ?

Human Rights Watch s’est entretenu avec 94 survivants de l’assaut du 7 octobre et 50 autres personnes, dont des membres des familles de survivants, des otages et des personnes tuées ; des premiers secours qui ont récupéré les restes humains sur les sites d'attaque ; des experts médicaux qui ont examiné les restes humains et ont fourni des conseils médico-légaux aux autorités israéliennes ; des responsables des municipalités touchées par les attaques ; et des journalistes qui se sont rendus sur les lieux des attaques après que les zones aient été sécurisées par les forces armées israéliennes. La plupart des survivants interrogés étaient des Juifs israéliens, mais également des Palestiniens de Gaza, des citoyens palestiniens d'Israël et des travailleurs étrangers du Népal, de Thaïlande et des Philippines.

Les chercheurs ont également vérifié et analysé plus de 280 photographies et vidéos prises pendant et immédiatement après l’assaut du 7 octobre, dont beaucoup ont été publiées sur les réseaux sociaux.

  1. Combien de personnes ont-elles été tuées lors de l’assaut du 7 octobre ?

Le gouvernement israélien a fait état de 1 195 morts à la suite de l’assaut du 7 octobre, y compris la mort ultérieure d’otages à Gaza. L'Agence France Presse (AFP), qui a analysé de nombreuses bases de données du gouvernement israélien recensant le nombre de personnes tuées et enquêté sur les meurtres d'étrangers, a estimé que 815 sur ces 1 195 étaient des civils, dont 79 ressortissants étrangers. Parmi les personnes tuées, figuraient au moins 282 femmes et 36 enfants. L'AFP n'a pas inclus dans son décompte les militaires, les policiers, les membres des forces de sécurité communautaires ni les équipes d'intervention rapide, bien que les policiers et les membres des équipes d'intervention rapide qui n'ont pas de rôle de combat permanent soient normalement des civils au regard du droit de la guerre.

Human Rights Watch n'a pas été en mesure de confirmer la cause du décès de tous les civils qui ont perdu la vie. Dans les cas où Human Rights Watch a reçu des informations sur la cause du décès, les éléments de preuve indiquent que ce n'est que dans une minorité de cas que les civils ont été tués au cours de combats entre les forces armées israéliennes et les groupes armés palestiniens, y compris par les forces israéliennes. Human Rights Watch n'a trouvé aucune preuve étayant l'affirmation selon laquelle la majorité des décès ont été causés par des armes lourdes utilisées uniquement par les forces israéliennes et non par des groupes armés palestiniens.

  1. Les abus commis par des groupes armés palestiniens contre des soldats israéliens ont-ils été examinés par Human Rights Watch ?

Selon le droit de la guerre, les combattants peuvent faire l’objet d’attaques militaires. Cependant, ils sont protégés contre les mauvais traitements en détention, tels que la torture, les violences sexuelles et sexistes et les meurtres, ainsi que contre d'autres violations du droit de la guerre, comme le fait d'être utilisés comme otages ou comme boucliers humains.

En raison du manque d'accès aux forces armées israéliennes, Human Rights Watch n'a pas abordé dans ce rapport les abus commis contre les soldats israéliens le 7 octobre.

  1. Quelles violations du droit international humanitaire et quels crimes internationaux graves Human Rights Watch a-t-il documentés à Gaza depuis l’assaut du 7 octobre ?

Depuis le 7 octobre 2023, les autorités israéliennes ont coupé des services essentiels, notamment l'eau et l'électricité, à la population de Gaza, et ont bloqué l’entrée de presque tout le carburant et l'aide humanitaire essentielle, des actes de punition collective qui constituent des crimes de guerre et incluent  l'utilisation de la famine comme méthode de guerre. Le blocus a exacerbé une situation humanitaire déjà mauvaise en raison des restrictions draconiennes imposées par Israël depuis 16 ans sur la circulation des personnes et des biens à destination et en provenance de Gaza.

Les attaques israéliennes, en violation apparente des lois de la guerre et constituant de probables crimes de guerre, ont touché de grands immeubles résidentiels, des centres de distribution d'aide alimentaire, des installations médicales, des écoles, des abris, des résidences de travailleurs humanitaires, des universités, des infrastructures d'approvisionnement en eau et des puits, et ont réduit de grandes parties de quartiers à l'état de ruines. Les forces israéliennes ont également utilisé illégalement du phosphore blanc à Gaza. Les autorités israéliennes ont ordonné à la majeure partie de la population de Gaza d’évacuer ses logements, ce qui pourrait constituer le crime de guerre de déplacement forcé. Au 1er juillet, au moins 37 900 Palestiniens à Gaza avaient été tués et 87 060 autres blessés, selon le ministère de la Santé à Gaza.

Depuis le 7 octobre, des groupes armés palestiniens ont illégalement lancé des milliers de roquettes sur des communautés israéliennes, causant des morts, des blessés et des dégâts matériels.

Les crimes graves perpétrés par les forces israéliennes et par les groupes armés palestiniens depuis le 7 octobre sont l’héritage de plusieurs décennies d’impunité pour les attaques illégales et les crimes commis par toutes les parties, notamment les crimes contre l’humanité d’apartheid et de persécution contre les Palestiniens commis par Israël.

Les responsables

  1. Quels sont les groupes armés palestiniens qui ont participé à l’assaut du 7 octobre ?

Human Rights Watch a confirmé la participation aux attaques d’au moins cinq groupes armés palestiniens de Gaza: la branche armée du Hamas, les Brigades al-Qassam ; la branche armée du Jihad islamique palestinien, les Brigades Qods ; la branche armée du Front démocratique de libération de la Palestine, les Brigades de résistance nationale ou les Forces Omar al-Qasim ; la branche armée du Front populaire de libération de la Palestine, les Brigades du martyr Abu Ali Mustafa ; et les Brigades des martyrs d'Aqsa, anciennement liées à la faction politique du Fatah.

La participation de ces groupes a été confirmée en grande partie par une analyse détaillée des assaillants visibles dans les vidéos prises lors des attaques, notamment des images de vidéosurveillance et de caméras corporelles, certains portant des bandeaux colorés liés à des groupes armés spécifiques, ainsi que par une identification des chaînes de réseaux sociaux Telegram appartenant à des groupes armés spécifiques sur lesquelles les images des abus ont été publiées, avec des légendes revendiquant la responsabilité des actes diffusés.

Deux groupes supplémentaires – les Brigades Moudjahidine et les Brigades Nasser Salah al-Din – ont affirmé avoir participé à l’assaut, mais Human Rights Watch n'a pas été en mesure de confirmer leur participation de manière indépendante. Un autre groupe, les Brigades Ansar, pourrait également avoir participé aux attaques, mais Human Rights Watch n'a pas été en mesure de vérifier sa participation et le groupe n'a pas non plus publié de déclaration confirmant son implication le 7 octobre.

Tous ces groupes étaient membres d'une « salle d'opérations conjointes » à Gaza qui, lors de l'escalade des hostilités, s'entraîne, planifie et mène des opérations armées contre Israël.

  1. Qui est légalement responsable des violations du droit de la guerre commises par des groupes armés liés à des mouvements politiques ?

Human Rights Watch a trouvé des preuves solides de la participation aux attaques d’au moins cinq groupes armés palestiniens de Gaza : la branche armée du Hamas, les Brigades al-Qassam, qui ont mené l’assaut ; la branche armée du Jihad islamique palestinien, les Brigades Qods ; la branche armée du Front démocratique de libération de la Palestine, les Brigades de résistance nationale ou Forces Omar al-Qasim ; la branche armée du Front populaire de libération de la Palestine, les Brigades du martyr Abu Ali Mustafa ; et les Brigades des martyrs d'Aqsa, anciennement liées à la faction politique du Fatah. 

Depuis 2007, le Hamas est l'autorité de facto dans la bande de Gaza et participe à la gouvernance civile au-delà de sa composante militaire.  Le Hamas et tous les autres groupes politiques dont les branches armées ont participé à l'assaut sont responsables en dernier ressort des actions de leurs forces militaires.  Les recherches de Human Rights Watch sur les attaques se sont concentrées sur les actions des combattants du groupe, qui étaient membres de leurs branches militaires et sont désignés comme tels. Human Rights Watch n'a pas été en mesure de déterminer l'étendue des informations que les branches militaires ont partagées avec leurs branches politiques au sujet de l’assaut du 7 octobre.

Les membres des branches politiques qui ont participé à la planification, à la complicité ou à la commission des abus perpétrés lors de l’assaut du 7 octobre en porteraient également la responsabilité légale et pourraient être poursuivis pour des infractions pénales. Les dirigeants civils peuvent également être poursuivis pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité dans le cadre de leur responsabilité de commandement, lorsqu'ils savaient ou auraient dû avoir connaissance de la commission de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité par des personnes relevant de leur chaîne de commandement, et qu’ils n'ont pas pris de mesures suffisantes pour les empêcher ou punir les responsables.

  1. Quel rôle ont joué les civils de Gaza qui sont entrés en Israël lors de l’assaut du 7 octobre ?

L'analyse de plus de 280 photographies et vidéos de l’assaut, ainsi que des témoignages, montrent que des combattants en uniforme, apparemment bien entraînés et armés, ont commencé à attaquer des zones peuplées de civils, immédiatement après avoir procédé à une brèche coordonnée de plusieurs points de la frontière entre Gaza et Israël. Les témoignages de survivants, ainsi que des photographies et des vidéos vérifiées, montrent des combattants palestiniens recherchant des civils et les tuant sur les sites d'attaque dès les premiers instants du début de l’assaut, ce qui indique que le meurtre intentionnel et la prise d'otages de civils étaient planifiés et fortement coordonnés.

Même si certains attaquants portaient des vêtements civils, Human Rights Watch n'a pas pu déterminer s'il s'agissait réellement de civils. Dans certains cas, des témoins ont vu ces individus communiquer avec des combattants en uniforme, notamment en utilisant des radios bidirectionnelles, indiquant que les combattants recevaient des ordres. De plus, les combattants des groupes armés non étatiques ne sont pas obligés par les lois de la guerre de porter des uniformes ou d’autres insignes d’identification. Ainsi, Human Rights Watch n’a pas constaté que les civils de Gaza qui traversaient opportunément la frontière avec Israël étaient responsables des violations les plus graves commises lors de l’assaut.

  1. Quelles armes les combattants palestiniens ont-ils utilisées lors de leurs attaques contre les communautés israéliennes ?

Les groupes armés palestiniens ont mené de nombreuses attaques contre des civils à leurs domiciles, en rase campagne, dans leur voiture sur les routes ou dans des abris publics anti-bombes, où ils ont été soumis à des tirs de fusils d'assaut, souvent à bout portant ou à très courte portée, des grenades et des roquettes tirées à l'épaule.

Les incendies ont également détruit un certain nombre de bâtiments et de véhicules. Human Rights Watch a documenté que des combattants palestiniens avaient allumé des incendies dans le but apparent de chasser les civils de leurs lieux sûrs, soit pour les capturer, soit pour les tuer. Selon la loi, toutes les maisons construites en Israël depuis 1992 doivent être dotées de mamads ou de pièces sécurisées, conçues pour résister aux tirs de roquettes. 

Dans d'autres cas, les incendies peuvent avoir été la conséquence de l'utilisation d'armes légères et d'explosifs, qui peuvent provoquer l'ignition de matières inflammables, notamment lorsque des véhicules sont attaqués.

Dans plusieurs zones, les combats entre les groupes armés palestiniens d’une part, et les membres des équipes communautaires d'intervention d'urgence et les forces de sécurité israéliennes d’autre part, ont persisté pendant plusieurs jours. Les forces militaires israéliennes ont utilisé des hélicoptères, des chars et d'autres véhicules blindés, ainsi que des équipements lourds, tels que des bulldozers, pour tenter de nettoyer les zones attaquées par les combattants palestiniens. 

Objectifs du rapport de Human Rights Watch

  1. Quels sont les objectifs du rapport de Human Rights Watch ?

Human Rights Watch a pour mandat de documenter les violations des droits humains internationaux et du droit humanitaire. L’organisation effectue ce travail de manière impartiale, quel que soit la victime ou l’auteur des faits.

Sur Israël et la Palestine, et sur les conflits plus généralement, les objectifs fondamentaux de notre travail comprennent la protection des civils, la justice pour les victimes de violations des droits, et la lutte contre la désinformation par l’établissement de faits clairs et contextualisés. Le principe de non-réciprocité est un principe fondamental du droit international humanitaire : les abus commis par une partie ne peuvent jamais justifier les abus commis par l'autre partie.

L'enquête de Human Rights Watch vise à saisir la nature et l'étendue des violations du droit international humanitaire et des graves crimes internationaux commis par les groupes armés palestiniens sur de nombreux sites d'attaque le 7 octobre. Le rapport examine également le rôle des différents groupes armés palestiniens impliqués, ainsi que leur coordination avant et pendant les attaques. Ce faisant, il établit un rapport complet et indépendant sur les crimes commis le 7 octobre et sur les personnes qui en sont responsables.

Le rapport de Human Rights Watch présente des recommandations détaillées aux autorités palestiniennes et aux groupes armés, au gouvernement israélien, au Conseil de sécurité de l'ONU et aux États. Ces recommandations comprennent un appel aux groupes armés palestiniens à Gaza à libérer immédiatement et sans condition les civils retenus en otage, et les Etats ayant une influence sur le Hamas et les groupes armés à faire pression pour leur libération immédiate. Le rapport souligne les mesures essentielles qui devraient être prises pour garantir la justice et les réparations pour les victimes, notamment par le biais de la coopération avec les autorités internationales.

Les otages

  1. Combien d’otages les groupes armés palestiniens ont-ils emmenés à  Gaza?

Selon les autorités israéliennes et les médias indépendants, des groupes armés palestiniens ont pris en otage 251 civils et membres des forces de sécurité israéliennes et les ont emmenés à Gaza à la suite de l'assaut du 7 octobre. Les personnes capturées sont soit restées en otages à Gaza, soit ont été libérées, soit ont été tuées ou sont mortes au cours des combats qui ont suivi.

Au 1er juillet, 116 otages seraient encore détenus à Gaza, dont 42 otages morts ou tués dont les corps n'ont pas été restitués, selon l'AFP. Parmi les morts figurent ceux qui ont été tués le 7 octobre et dont les groupes armés ont emporté les corps à Gaza, et ceux qui ont été enlevés et ont été tués ou sont morts en détention.

  1. Qu’est-ce que la prise d’otages au regard du droit international humanitaire ?

La prise d'otages est interdite par le droit international humanitaire et constitue un crime de guerre. Les groupes armés palestiniens devraient libérer immédiatement et en toute sécurité tous les civils détenus.

Le Commentaire de 2016 du Comité international de la Croix-Rouge sur l’article 3 commun des Conventions de Genève de 1949 définit la prise d’otages comme « le fait de s’emparer, de détenir ou de retenir autrement une personne (l’otage) et de menacer de la tuer, de la blesser ou de continuer à la détenir afin de contraindre une tierce partie à accomplir un acte quelconque ou à s’en abstenir, en échange de la libération, de la sécurité ou du bien-être de l’otage. » L'article 8 du Statut de Rome de la Cour pénale internationale définit également la prise d'otages comme un crime de guerre.

La prise d’otages est également liée à d’autres crimes de guerre, notamment à l’interdiction d’utiliser des civils captifs comme boucliers humains, aux traitements cruels consistant à menacer de faire du mal aux otages et aux punitions collectives. La prise d’otages peut également constituer le crime contre l’humanité d’emprisonnement illégal, si elle est menée dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique dirigée contre une population civile.

Il est illégal de traiter toute personne, y compris les combattants capturés, comme otage. Les parties belligérantes doivent traiter les combattants capturés avec humanité. Ils ne peuvent pas être utilisés pour obtenir une rançon ni être détenus dans un lieu, tel qu'un pont ou un dépôt d'armes, pour empêcher une attaque ennemie. Cependant, les combattants capturés peuvent légalement être inclus dans les échanges de prisonniers avec d’autres combattants capturés.

  1. Quel droit humanitaire international s'applique aux otages ?

Human Rights Watch n'a pas enquêté sur le traitement des otages détenus par les groupes armés palestiniens ni sur les efforts militaires israéliens pour secourir des otages. Les initiatives de Human Rights Watch pour s’entretenir avec d’anciens otages n’ont pas abouti.

Une partie belligérante doit libérer immédiatement et en toute sécurité toute personne prise en otage qui est détenue illégalement. Conformément à l'article 3 commun aux Conventions de Genève de 1949, tant que les otages restent en détention, ils doivent être traités avec humanité et recevoir de la nourriture, de l'eau et des soins médicaux adéquats. Dans la mesure du possible, ils doivent être détenus dans un lieu éloigné des combats.

Une partie belligérante qui tente de secourir des otages ou d’autres personnes détenues par la partie adverse doit respecter les lois de la guerre. Autrement dit,  les attaques ne doivent pas causer des pertes en vies humaines et en biens civils disproportionnées par rapport aux bénéfices escomptés de l'attaque, et les méthodes de guerre illégales, telles que la perfidie (feindre le statut de civil pour mener une attaque), ne doivent pas être utilisées.

Violences sexuelles et sexistes

  1. Quelles ont été les principales observations de Human Rights Watch concernant les violences sexuelles et sexistes commises le 7 octobre ?

L’ampleur des actes de violence sexuelle et sexiste commis lors de l’assaut du 7 octobre ne sera probablement jamais pleinement connue. Un grand nombre de victimes pourraient avoir été tuées ; la stigmatisation et les traumatismes dissuadent souvent les survivantes de dénoncer les faits ; et les forces de sécurité israéliennes et les autres intervenants n’ont pour l’essentiel pas recueilli de preuves médico-légales pertinentes sur les sites d’attaque ou sur les corps retrouvés. De ce fait, Human Rights Watch a une compréhension limitée de l’ampleur globale des violences sexuelles et sexistes commises lors des attaques.

Les recherches de Human Rights Watch ont trouvé des preuves d'actes de violence sexuelle et sexistes, notamment de nudité forcée et de publication sans consentement d'images à caractère sexuel sur les réseaux sociaux. Human Rights Watch n'a pas été en mesure de recueillir des informations vérifiables par le biais d’entretiens avec des survivantes ou des témoins de viols lors de l'assaut du 7 octobre, et il n'existe qu'un seul témoignage public d'une telle survivante.

Human Rights Watch fait également référence aux conclusions du bureau de la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies sur la violence sexuelle dans les conflits et de la Commission d'enquête des Nations Unies. Le bureau de la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies sur la violence sexuelle dans les conflits, qui a interrogé des personnes ayant déclaré avoir été témoins de viols et d'autres violences sexuelles, a conclu qu'il existait « des motifs raisonnables de croire que des violences sexuelles liées au conflit ont eu lieu lors des attaques du 7 octobre dans plusieurs endroits de la périphérie de Gaza, notamment des viols et des viols collectifs, dans au moins trois endroits. »

L'enquête de la Commission d'enquête de l'ONU « a documenté des cas révélateurs de violences sexuelles perpétrées contre des femmes et des hommes sur et autour du site du festival de Nova, ainsi que dans l'avant-poste militaire de Nahal Oz et dans plusieurs kibboutzim, dont Kfar Aza, Re'im et Nir Oz », et « a trouvé des indications selon lesquelles des membres de la branche militaire du Hamas et d'autres groupes armés palestiniens ont commis des violences basées sur le genre (VBG) dans plusieurs endroits du sud d'Israël le 7 octobre. »

Les éléments de preuve disponibles n'ont pas permis à Human Rights Watch de tirer des conclusions quant à l'identité spécifique des auteurs de crimes sexuels et sexistes, ni de savoir si ces crimes étaient planifiés par les groupes armés palestiniens qui ont ordonné les attaques.

  1. Comment Human Rights Watch a-t-il enquêté sur les allégations de violences sexuelles et sexistes ?

Tout au long des recherches menées pour le rapport, les chercheurs de Human Rights Watch ont posé la question aux personnes interviewées s’ils avaient connaissance des violences sexuelles et basées sur le genre. Les chercheurs se sont également entretenus avec des prestataires de services, des avocats, des journalistes, des experts en matière de VSBG et le gouvernement israélien, dans le but d'interviewer des victimes et des témoins.

Les recherches de Human Rights Watch sur les violences sexuelles et sexistes comprennent un examen spécifique de photos et vidéos collectées par des experts en matière de VSBG.

Human Rights Watch a envoyé une demande d'informations détaillée au gouvernement israélien spécifiquement axée sur les violences sexuelles et basées sur le genre en demandant à s’entretenir avec des personnes employées par le gouvernement israélien qui pourraient détenir des informations pertinentes et à examiner les documents et images pertinents en possession des autorités israéliennes. Nous n’avons pas reçu de réponse substantielle à cette demande.

Les chercheurs de Human Rights Watch ont assisté à la projection de la vidéo compilée par le gouvernement israélien à partir d'images des attaques, en cherchant tout particulièrement à comprendre quelles informations cette vidéo contenait au sujet des violences sexuelles et basées sur le genre. Une grande partie des images contenues dans la bande-clip avaient déjà été obtenues par Human Rights Watch auprès d'autres sources et ont pu être vérifiées. Les chercheurs ont également examiné les reportages publics sur les violences sexuelles et sexistes et se sont entretenus avec des journalistes couvrant le sujet.

  1. Human Rights Watch a-t-il interrogé des survivantes ou des témoins de viol ?

Human Rights Watch a tenté d'identifier et de contacter les survivantes et les témoins d'actes de violence sexuelle et sexistes commis lors de l'assaut du 7 octobre. Les chercheurs ont pu entrer en contact avec plusieurs personnes qui ont décrit aux médias leurs expériences comme témoins d'actes de violence sexuelle, mais qui n'ont pas accepté de s’entretenir avec Human Rights Watch. Les chercheurs de Human Rights Watch n’ont pas insisté auprès de ces personnes pour qu’elles acceptent un entretien. Raconter ce type d’expérience peut être profondément traumatisant, surtout si ceci est répété à plusieurs reprises. Les normes de Human Rights Watch en matière de recherche éthique exigent des chercheurs qu’ils évitent de nuire aux personnes interrogées ou qui pourraient l’être.

Il existe des motifs raisonnables qui expliquent pourquoi il n’y a eu que quelques témoignages de violences sexuelles lors de l’attaque, et un seul témoignage dans les médias d’une personne qui s’est identifiée comme ayant survécu à un viol lors de l’assaut. Documenter la violence basée sur le genre, notamment la violence sexuelle, est souvent une tâche difficile. Les survivantes sont souvent confrontées à un traumatisme profond et peuvent ne pas avoir le sentiment que parler de leurs expériences soit propice à leur bien-être. Les services conçus pour aider les survivantes à faire face aux conséquences du viol sont souvent inexistants ou difficiles d'accès. Les réponses des autorités sont souvent gênantes pour les victimes de viol et il est peu probable qu'elles aboutissent à une action en justice. Également, les survivantes craignent souvent une profonde stigmatisation — et elles y sont confrontées. Certains témoignages de violences sexuelles du 7 octobre décrivent des victimes de viol qui ont été tuées, ce qui signifie que ces victimes ne pourront jamais raconter leur histoire.

Les personnes qui ont vécu les violences du 7 octobre sont souvent profondément traumatisées ; nombre d’entre elles ont été témoins de violences commises contre leurs proches, ont perdu leur conjoint, leurs enfants ou leurs parents, ou attendent la libération de leurs proches retenus en otages.

Parmi les personnes prises en otage, certaines peuvent avoir été témoins ou victimes de violences sexuelles lors de l’assaut du 7 octobre, et leurs témoignages n'étaient pas non plus disponibles pendant leur captivité. Pour les otages qui ont été libérés, le traumatisme de l'enlèvement et les expériences vécues pendant la captivité ont peut-être créé des obstacles supplémentaires les empêchant de raconter ce qu'ils ont vécu ou vu le 7 octobre.

  1. Dans quelle mesure les violences sexuelles et sexistes étaient-elles généralisées le 7 octobre ?

Human Rights Watch ne le sait pas et nous ne connaîtrons probablement jamais la situation dans son ensemble. Outre les facteurs évoqués ci-dessus qui peuvent affecter la volonté et la capacité des survivantes et des témoins à se manifester, il existe également des lacunes importantes dans la collecte de preuves médico-légales. Un porte-parole de la police israélienne, discutant de la violence sexuelle avec les médias, a déclaré au lendemain de l’assaut que les autorités n’avaient procédé à « aucune autopsie ».

Toute violence sexuelle et sexiste est inacceptable et devrait susciter un soutien urgent aux victimes, ainsi que des enquêtes, une justice et des réparations centrées sur les victimes.

Préparation de l'armée israélienne avant l'assaut du 7 octobre

  1. Human Rights Watch a-t-il examiné l’état de préparation de l’armée israélienne avant le 7 octobre ou sa réponse à l’assaut ? 

Human Rights Watch a pour mandat de documenter les violations des droits humains et du droit humanitaire international. En conséquence, nous n’examinons les questions de préparation en matière de sécurité que lorsque nous avons des raisons de croire qu’il pourrait s’agir d’une violation de ces lois.

Début 2024, les autorités israéliennes ont ouvert des enquêtes sur les événements survenus avant et immédiatement après le 7 octobre, notamment plusieurs enquêtes individuelles sur les actions de l'armée lors des attaques des groupes armés palestiniens du 7 au 10 octobre. Le contrôleur de l'État israélien a également ouvert une enquête distincte, mais en juin, la Haute Cour d'Israël a suspendu les enquêtes sur l'armée et l'agence nationale de renseignement en réponse aux plaintes déposées par une ONG basée à Jérusalem qui affirmait que ces enquêtes nuiraient à l'armée et à la confiance du public.

Réponses des autorités

  1. Qu’a déclaré le Hamas à propos des conclusions de Human Rights Watch ?

Le Hamas a répondu aux questions soumises par Human Rights Watch par une lettre de neuf pages, dont l'intégralité est disponible en annexe du rapport.

Plusieurs dirigeants du Hamas se sont exprimés publiquement sur l'assaut du 7 octobre, notamment en saluant l'opération menée ce jour-là, tout en prenant leurs distances avec les abus commis. Un document en anglais intitulé « Notre récit... Opération Al-Aqsa Flood », publié par le bureau des médias du Hamas le 21 janvier 2024, déclarait que les attaques n’ont visé que les sites militaires et les combattants israéliens, ont évité de blesser les civils et évoquait le chaos dans les zones frontalières franchies. Cependant, les recherches de Human Rights Watch réfutent l’affirmation du Hamas selon laquelle le 7 octobre, ses forces n’ont pas cherché à s’en prendre aux civils ; au contraire, cela faisait partie du plan dès le départ.

  1. Qu’a déclaré Israël à propos des conclusions de Human Rights Watch ?

Entre janvier et mars 2024, Human Rights Watch a envoyé des lettres à diverses autorités israéliennes, notamment au bureau du Premier ministre, aux forces armées israéliennes, à la police israélienne, à l'unité de police Lahav 433, au ministère de la Santé et au bureau du Procureur de l’État, demandant des informations à propos des enquêtes du gouvernement sur les crimes commis lors de l’assaut du 7 octobre.

Human Rights Watch a reçu des réponses de la police israélienne, du bureau du Procureur de l’État et des forces armées israéliennes entre le 1er février et le 23 mai. Aucune des réponses ne contenait d’informations substantielles sur les enquêtes du gouvernement ou sur les informations obtenues. Un représentant de la police israélienne a déclaré que la loi israélienne ne l'obligeait pas à fournir ces informations. Le bureau du Procureur de l’État a déclaré qu'il ne disposait pas de ces informations et nous a orientés vers d'autres autorités. Le Bureau du Premier ministre a demandé un délai supplémentaire pour répondre à notre lettre, s’engageant à le faire d’ici le 17 juillet 2024. Human Rights Watch publiera les informations pertinentes partagées par le gouvernement sur son site Internet.

Enquêtes internationales

  1. Quelles sont les instances internationales qui enquêtent sur l’assaut du 7 octobre ?

Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Karim Khan, a confirmé que depuis mars 2021, son bureau mène une enquête sur des atrocités présumées commises dans la bande de Gaza et en Cisjordanie, notamment à Jérusalem-Est depuis 2014, et que son bureau a compétence sur les crimes commis dans les hostilités actuelles entre Israël et les groupes armés palestiniens, qui couvre les conduites illégales de toutes les parties.

Le 20 mai 2024, Karim Khan a annoncé qu'il demandait des mandats d'arrêt de la part d'une chambre préliminaire du tribunal contre trois dirigeants du Hamas, Yahya Sinwar, chef du Hamas à Gaza ; Mohammed Diab Ibrahim Al-Masri, commandant en chef des Brigades al-Qassam ; et Ismail Haniyeh, chef du Bureau politique du Hamas, ainsi que contre deux dirigeants israéliens, le Premier ministre Benjamin Netanyahou et le ministre de la Défense Yoav Gallant. Concernant les trois dirigeants du Hamas, le procureur de la CPI a déclaré que, sur la base des preuves recueillies et examinées par son bureau, il avait des motifs raisonnables de croire qu'ils portaient une responsabilité pénale pour les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité commis sur le territoire d'Israël et de la Palestine depuis le 7 octobre 2023 au moins.

La Commission d'enquête internationale indépendante sur le Territoire palestinien occupé, comprenant Jérusalem-Est et Israël, a demandé à six reprises l'accès à Israël et au Territoire palestinien occupé, afin d'enquêter sur toutes les allégations de violations du droit international humanitaire et de violations du droit international des droits humains, notamment celles commises le 7 octobre. Malgré son manque d'accès et le refus des responsables israéliens de coopérer à l'enquête de la Commission, notamment en interdisant aux professionnels de santé israéliens et à d'autres d'être en contact avec la Commission, celle-ci a publié un rapport le 10 juin, avec ses conclusions concernant l'assaut.

Pramila Patten, la Représentante spéciale des Nations Unies sur les violences sexuelles dans les conflits, s'est rendue en Israël pendant une semaine en janvier-février 2024 afin de recueillir des informations sur les violences sexuelles commises dans le cadre de l’assaut du 7 octobre. Pramila Patten était accompagnée d'une équipe d'experts qui sont restés pendant une semaine et demie supplémentaire. L'objectif de la visite était de recueillir, d'analyser et de vérifier les allégations de violences sexuelles liées au conflit qui auraient été commises lors de l'assaut. Pramila Patten a clairement indiqué que son rôle n’était pas celui d’une enquêtrice, et qu’une enquête approfondie — menée par un organisme tel que la Commission d’enquête internationale indépendante — était nécessaire. En mars, la représentante spéciale a publié un rapport détaillant les conclusions de sa mission.

Israël devrait fournir à la CPI, à la Commission d'enquête internationale indépendante, au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, aux autres mécanismes et experts pertinents de l'ONU, ainsi qu'aux organisations indépendantes de défense des droits humains, une coopération immédiate et un accès sans entrave à l'ensemble d'Israël et du Territoire palestinien occupé.

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