Que feriez-vous avec mille milliards de dollars ? Essayeriez-vous d’utiliser cet argent pour une bonne cause dans le monde ? Ou l'utiliseriez-vous pour commettre de graves violations des droits humains ?
Aujourd'hui, nous nous intéressons au Fonds d'investissement public (Public Investment Fund - PIF) de l'Arabie saoudite, comment ce fonds est essentiellement contrôlé par un seul homme et comment il a permis des violations des droits humains et en a profité.
Le PIF est ce que l'on appelle un fonds souverain. De nombreux pays disposent de tels fonds, souvent fondés sur les richesses pétrolières. Il s'agit en fait de l’argent excédentaire qu'un gouvernement a accumulé au fil du temps et qu'il investit ensuite au niveau national et à l'étranger. Les revenus de ces investissements pourraient bénéficier aux citoyens en investissant dans le système de santé, par exemple, ou dans l'éducation ou les infrastructures.
Dans le cas de l'Arabie saoudite, cependant, les choses ne fonctionnent pas tout à fait de cette manière. Le fonds souverain saoudien provient des vastes ressources en énergies fossiles du pays mais il n'est souvent pas utilisé au profit du peuple saoudien.
Il est appelé « Fonds d'investissement public » mais il n'est pas là pour aider le public.
Ce fonds de près de mille milliards de dollars américains est essentiellement contrôlé par une seule personne, le prince héritier Mohammed ben Salmane. Il exerce cet énorme pouvoir économique de façon très personnalisée, et le PIF est utilisé pour commettre de graves violations des droits humains. Il est également utilisé pour tenter de redorer l’image du pays entâchée par ces abus.
Tout cela est décrit dans le dernier rapport de Human Rights Watch, « The Man Who Bought the World » (L'homme qui acheta le monde)
Le rapport examine minutieusement un vaste éventail de documents saoudiens et internationaux et conclut que le PIF a profité directement de graves violations des droits humains liées à son président, le prince héritier Mohammed ben Salmane (parfois surnommé « MBS »).
On parle notamment de la répression « anti-corruption » menée par le prince héritier en 2017, qui a consisté en des détentions arbitraires, un traitement abusif des détenus et l'extorsion de biens auprès de l'élite saoudienne.
Le PIF a permis de graves violations des droits humains liées à MBS par l'intermédiaire d'entreprises qu'il possède et contrôle.
Un exemple est le meurtre en 2018 du journaliste saoudien Jamal Khashoggi, un critique important de la répression anti-corruption. Sky Prime Aviation, l'une des sociétés transférées au PIF lors de cette vague de répression, était propriétaire des deux avions utilisés en 2018 par des agents saoudiens pour se rendre à Istanbul, où ils ont assassiné Khashoggi.
MBS utilise aussi unilatéralement d'énormes sommes de la richesse de l'État vers des « mégaprojets » qui ont durement touché les personnes les plus marginalisées d'Arabie saoudite - les travailleurs migrants, les communautés rurales et les habitants pauvres et de la classe ouvrière. Ces projets ont expulsé de force des résidents, rasé des quartiers, soumis des travailleurs migrants à de graves abus et réduit au silence des communautés.
N'oubliez pas que cet argent est censé provenir de l'État. Au lieu de cela, il nuit au public.
Alors, que peut-on faire ?
Une certaine prudence internationale serait un minimum absolu. Le PIF a des investissements dans le monde entier et MBS utilise le sport en particulier comme outil d'influence. Il suffit de penser au circuit professionnel LIV Golf Tour, à la Coupe du monde de la FIFA 2034 et au club de football de Premier League Newcastle United.
Toute entreprise ayant des liens avec le Fonds d'investissement public saoudien devrait réexaminer ces liens et s'assurer qu'ils ne sont pas également liés à de graves violations des droits humains.