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Chine/Japon : Les autorités chinoises harcèlent des citoyens qui vivent au Japon

Le gouvernement chinois exerce une répression transnationale contre ses citoyens exprimant des vues dissidentes au Japon, en menaçant leurs familles en Chine

Une manifestation tenue à Tokyo, au Japon, le 30 novembre 2022, en hommage aux victimes d’un incendie grave survenu six jours auparavant à Ürümqi, la capitale de la région du Xinjiang en Chine. Une grande bannière avec les mots « Liberté et droits humains » résumait aussi ce que les manifestants voulaient voir au Xinjiang. © 2022 Hiro Komae/AP Photo

(Tokyo, 10 octobre 2024) – Les autorités chinoises cherchent à intimider leurs citoyens qui vivent au Japon et y participent à des activités critiques à l’égard du gouvernement chinois, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui.

Le gouvernement chinois exerce ce type de harcèlement surtout à l’égard de personnes qui sont originaires du Xinjiang, du Tibet et de la Mongolie intérieure, ainsi que contre leurs familles qui vivent encore en Chine ; l’objectif est clairement de dissuader les membres de la diaspora de manifester contre le gouvernement chinois, ou de participer à des événements qu’il considère comme politiquement sensibles. Les autorités chinoises ont également demandé à des membres de la diaspora de leur fournir des informations sur d’autres personnes chinoises vivant au Japon.

« Les autorités chinoises semblent chercher de manière peu scrupuleuse à réduire au silence les Chinois qui vivent au Japon et y critiquent les abus commis par Pékin », a déclaré Teppei Kasai, chargé de programmes auprès de la division Asie à Human Rights Watch. « Le gouvernement japonais devrait signaler à Pékin qu’il ne tolérera pas sur son territoire le bras long de la répression transnationale chinoise. »

Entre juin et août 2024, Human Rights Watch a mené au Japon des entretiens avec 25 personnes originaires des régions du Xinjiang, du Tibet et de la Mongolie intérieure, parmi d’autres, ainsi que de Hong Kong. Toutes ces personnes avaient participé à des activités pacifiques que le Parti communiste chinois considère comme critiques, voire menaçantes  pour le régime du parti unique : des événements publics au sujet des crimes contre l’humanité commis au Xinjiang, mais aussi la simple promotion de la culture tibétaine, ou l’organisation d’un club de lecture pour discuter d’un livre écrit par un activiste de la Mongolie intérieure.

La plupart des personnes interrogées ont déclaré que la police chinoise les avait contactées directement, ou avait contacté leurs proches restés en Chine, afin de les pousser à mettre fin à leur participation à de telles activités au Japon. Plusieurs personnes ont partagé avec Human Rights Watch des messages provenant de la plateforme de médias sociaux chinoise WeChat, des enregistrements d’appels vidéo et des images de vidéosurveillance, corroborant leurs récits.

Une personne a déclaré avoir cessé de participer à toute activité politiquement sensible, que ce soit en personne ou en ligne, après avoir reçu un appel des autorités chinoises en 2024. Une autre personne, qui avait initialement accepté de discuter avec Human Rights Watch, a ensuite décidé de ne pas le faire, par crainte de représailles de la part des autorités chinoises.

Plusieurs Ouïghours originaires du Xinjiang et vivant actuellement au Japon ont déclaré que les autorités chinoises les avaient contactés par l’intermédiaire de leurs proches, qui se trouvaient toujours au Xinjiang. Des policiers chinois les ont ensuite appelés sur WeChat et leur ont demandé de cesser de participer au Japon à des activités critiques à l’égard du gouvernementales chinois ; dans certains cas, ils ont cherché à obtenir des informations sur la communauté ouïghoure du Japon, notamment les membres de l’ONG Japan Uyghur Association.

De même, plusieurs personnes originaires de la Mongolie intérieure, qui s’étaient exprimées au Japon en faveur des droits linguistiques et de l’autodétermination pacifique de cette minorité ethnique, ont déclaré que les autorités chinoises les avaient ensuite contactées, souvent par l’intermédiaire de leurs proches restés en Chine.

Une personne originaire du Tibet, qui promeut la culture tibétaine au Japon, a indiqué qu’elle s’était rendue à l’ambassade de Chine à Tokyo pour renouveler son passeport ; mais là-bas, des responsables de l’ambassade lui ont dit qu’elle devait retourner au Tibet pour s’en occuper. Elle a préféré ne pas le faire, craignant d’être arrêtée ou punie en cas de retour au Tibet.

Les autorités chinoises ont en effet violé les droits de citoyens revenus en Chine après un séjour au Japon. En mars 2023, par exemple, la police de Hong Kong a arrêté arbitrairement une citoyenne de 23 ans qui était rentrée chez elle après avoir étudié au Japon, en raison de commentaires pro-démocratie qu’elle avait publiés en ligne lorsqu’elle se trouvait là-bas.

Human Rights Watch a transmis des courriers résumant ses recherches à l’ambassade de Chine au Japon, ainsi qu’au ministère japonais des Affaires étrangères, en sollicitant leurs commentaires ; toutefois, Human Rights Watch n’a reçu aucune réponse à ce jour. Human Rights Watch a aussi écrit à l’Agence nationale de police au Japon, afin d’obtenir des informations sur les actions répressives menées par la Chine au Japon, mais n’a pas reçu de réponse.

L’expression « répression transnationale » désigne les actions menées par plusieurs États au-delà de leurs propres frontières, pour réprimer ou étouffer la dissidence. Les ressortissants ou anciens ressortissants vivant dans un autre pays, les membres des communautés de la diaspora et ceux qui vivent en exil sont particulièrement vulnérables.

Le gouvernement japonais devrait reconnaître la réalité des menaces subies par les ressortissants chinois sur son territoire, et contribuer à protéger leurs droits fondamentaux en établissant un système leur permettant de signaler de manière sûre de tels incidents, a déclaré Human Rights Watch.

Un tel système devrait prévoir des garanties appropriées pour la protection de la vie privée des individus, faciliter les enquêtes criminelles dans les cas où la loi japonaise a été violée et protéger les personnes ayant signalée des cas crédibles contre le risque d’expulsion ou d’extradition. Les personnes qui subissent de telles pressions devraient être informées de leur droit de demander l’asile ou d’autres formes de protection.

Le gouvernement japonais devrait appeler le gouvernement chinois à mettre fin à la surveillance et aux menaces contre les personnes vivant au Japon. Le 26 juin, le Japon s’est joint à 54 autre pays membres du Conseil des droits de l’homme de l’ONU pour condamner la répression transnationale, et s’engager à demander des comptes aux responsables. Le Japon devrait également coordonner ses actions avec d’autres gouvernements et organismes de l’ONU pour protéger les personnes en danger.

Communiqué complet en ligne en anglais.

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